• Aucun résultat trouvé

Arrêts nos 55/10 et 56/10 du 26 mars 2010

Dans le document LES DOSSIERS DE LA PASICRISIE LUXEMBOURGEOISE (Page 170-176)

(Mémorial A n° 58 de 2010)

« Licenciement délégués du personnel - Code du travail, art. L. 415-11(1) - Art. 11(6) – conforme »

(…)

LA COUR CONSTITUTIONNELLE

Considérant que par ordonnance du 12 novembre 2009, le magistrat remplaçant le président de la huitième chambre de la Cour d’appel, à laquelle sont attribués les appels en matière de droit du travail, siégeant en matière de protection spéciale des délégués du personnel contre le licenciement, saisi d’un appel de la société anonyme de droit belge X., ayant une succursale au Grand- Duché de Luxembourg, Y., dirigé contre une ordonnance de la présidente du tribunal du travail de Luxembourg du 22 juillet 2009 ayant déclaré nul et de nul effet le licenciement de Monsieur Z., délégué à la sécurité attaché à la délégation du personnel auprès de l’appelante, intervenu le 25 mars 2009, et ordonnant son maintien au sein de la société, a déféré à la Cour constitutionnelle la question préjudicielle suivante : « l’article L. 415-11.(1) du Code du travail en ce qu’il interdit à l’employeur de licencier le délégué du personnel durant son mandat, le mettant ainsi à l’abri de toute mesure de réduction du personnel notamment en cas de suppression totale d’une branche de l’activité de l’entreprise à laquelle il est affecté, est-il conforme à l’article 11 (6) de la Constitution garantissant la liberté du commerce et de l’industrie ? » ;

Considérant que l’article L. 415-11., paragraphe 1erdu Code du travail dispose : « Pendant

la durée de leur mandat, les membres titulaires et suppléants des différentes délégations du personnel, le/la délégué-e à l’égalité et le/la délégué-e à la sécurité ne peuvent être licencié-e-s ; le licenciement notifié par l’employeur à un de ces délégués ou, le cas échéant, la convocation à l’entretien préalable sont nuls et sans effet. Dans les quinze jours qui suivent la résiliation du contrat, le salarié peut demander, par simple requête, au président de la juridiction du travail qui statue d’urgence et comme en matière sommaire, les parties entendues ou dûment convoquées, de constater la nullité du licenciement et d’ordonner son

mm); Date: Jun 28, 2018 15:09:25; Output Profile: OneVision Gray

maintien, ou le cas échéant, sa réintégration conformément aux dispositions de l’article L. 124-12. L’ordonnance du président de la juridiction du travail est exécutoire par provision ; elle est susceptible d’appel qui est porté par simple requête, dans les quarante jours à partir de la notification par la voie du greffe, devant le magistrat présidant la chambre de la Cour d’appel à laquelle sont attribués les appels en matière de droit du travail. Il est statué d’urgence, les parties entendues ou dûment convoquées » ;

Considérant que l’article 11, paragraphe 6, de la Constitution dispose en son alinéa 1er:

« La liberté de commerce et de l’industrie, l’exercice de la profession libérale et du travail agricole sont garantis, sauf les restrictions à établir par la loi » ;

Que la Constitution, dans le paragraphe 4 de l’article 11, dispose que la loi garantit non seulement le droit au travail mais encore les libertés syndicales, tout en organisant le droit de grève, tandis qu’en vertu du paragraphe 5, la loi est appelée à régler les droits des travailleurs ;

Considérant que parmi les libertés syndicales et les droits des travailleurs, le législateur a ainsi été amené à organiser les droits des travailleurs en conformité avec les éléments de droit international auxquels l’Etat a souscrit, dont plus particulièrement la Convention internationale n° 135 adoptée par la Conférence générale de l’organisation internationale du travail à Genève le 23 juin 1978 et approuvée par une loi du 15 février 1979 ;

Que suivant l’article 1er de ladite Convention « les représentants des travailleurs dans

l’entreprise doivent bénéficier d’une protection efficace contre toutes mesures qui pourraient leur porter préjudice, y compris le licenciement, et qui seraient motivées par leurs qualités ou leurs activités de représentants des travailleurs, leurs affectations syndicales ou leur participation à des activités syndicales, pour autant qu’ils agissent conformément aux lois, conventions collectives ou autres arrangements conventionnels en vigueur » ;

Considérant que si d’après l’article L. 411-1., paragraphe 1er, du Code du travail une

délégation du personnel est obligatoire pour tout employeur occupant régulièrement au moins quinze salariés liés par contrat de travail, cette délégation est instituée pour l’ensemble du personnel par la voie d’un scrutin unique suivant l’article L. 411-1. du même code ;

Considérant que d’après l’article L. 415-11., paragraphe 1er, du Code du travail, faisant

l’objet de la question préjudicielle, pendant la durée de leur mandat les membres des différentes délégations du personnel y énumérés se trouvent protégés contre le licenciement leur notifié par l’employeur, de même que, le cas échéant, contre la convocation à l’entretien préalable, qui sont nuls et sans effet d’après l’article de loi en question, sans qu’une restriction quelconque n’y soit apportée ;

Considérant que la question préjudicielle posée ne vise pas la conformité de l’article L.

415-11., paragraphe 1er, du Code du travail dans sa généralité, mais soumet à la Cour

l’hypothèse plus particulière du licenciement d’un délégué intervenu dans le cadre « de toute mesure de réduction du personnel notamment en cas de suppression totale d’une branche de l’activité de l’entreprise à laquelle il est affecté » ;

Que l’hypothèse à la base de l’ordonnance de renvoi est celle de la fermeture d’une branche d’activité de l’entreprise sans cessation de l’ensemble de ses activités, impliquant le maintien d’un certain nombre d’activités de cette entreprise ;

Considérant que la liberté de commerce et de l’industrie énoncée par l’article 11, paragraphe 6, de la Constitution, tout comme la liberté de l’exercice de la profession libérale et du travail agricole, n’est pas absolue, mais est soumise à un régime d’équilibre où notamment la liberté de l’entrepreneur et la protection du salarié sont essentiellement complémentaires ;

Considérant que la question préjudicielle posée se résout au point de savoir si cet équilibre se trouve rompu du fait de la protection contre le licenciement prévue dans le chef d’un

délégué du personnel dans les limites de l’article L. 415-11., paragraphe 1er, du Code du

travail et au regard de la liberté du commerce et de l’industrie garantie par l’article 11,

mm); Date: Jun 28, 2018 15:09:25; Output Profile: OneVision Gray

paragraphe 6, de la Constitution dans l’hypothèse précise d’une réduction du personnel correspondant à la suppression totale d’une branche de l’activité de l’entreprise à laquelle le délégué était affecté ;

Considérant que dans l’hypothèse ainsi visée par la question préjudicielle où seule une branche d’activité de l’entreprise, fût-elle la branche principale, est supprimée par l’employeur pour des raisons économiques et où il y a dès lors, corrélativement, maintien d’autres activités de l’entreprise avec maintien de salariés autres que les délégués du personnel justifiant la représentation par les délégués, le régime d’équilibre entre la liberté du commerce et de l’industrie garantie par l’article 11, paragraphe 6, de la Constitution et la protection du salarié visée par ses paragraphes 4 et 5, ne se trouve pas rompu du fait des dispositions de

l’article L. 415-11., paragraphe 1er, du Code du travail ;

Que dès lors par rapport à la question préjudicielle posée, l’article L. 415-11., paragraphe

1er, du Code du travail n’est pas contraire à l’article 11, paragraphe 6, de la Constitution ;

Par ces motifs,

dit que par rapport à la question préjudicielle posée l’article L. 415-11., paragraphe 1er, du

Code du travail n’est pas contraire à l’article 11, paragraphe 6, de la Constitution ;

ordonne que dans les 30 jours de son prononcé l’arrêt soit publié au Mémorial, Recueil de législation ;

ordonne qu’il soit fait abstraction des noms et prénoms des parties en cause lors de la publication de l’arrêt au Mémorial ;

ordonne que l’expédition du présent arrêt soit envoyée par le greffe de la Cour constitutionnelle au greffe de la huitième chambre de la Cour d’appel à laquelle appartient le magistrat remplaçant le président duquel émane la saisine et qu’une copie conforme soit envoyée aux parties en cause devant cette juridiction.

Arrêt n° 57/10 du 1

er

octobre 2010

(Mémorial A n° 180 de 2010)

« Changement d'affectation d'un fonctionnaire - Loi du 21 décembre 2007, art. 25, point 39 - Art. 51(1), 31 et 10bis(1) - conforme/pas conforme »

(…)

LA COUR CONSTITUTIONNELLE

Considérant qu'il se dégage d'un arrêt de la Cour administrative du 4 mars 2010 que suivant arrêté grand-ducal du 11 janvier 2008 avec effet au 15 janvier suivant, Monsieur X., colonel de l'armée, fut désaffecté de son emploi de chef de l'état-major de l'armée qu'il occupait jusqu'à cette date et fut détaché au ministère des Affaires étrangères et de l'Immigration et chargé de la planification auprès du ministre ayant la Défense dans ses attributions, ledit arrêté ayant été pris sur base de l'article 25, point 39°, de la loi du 21 décembre 2007 modifiant la loi modifiée du 23 juillet 1952 concernant l'organisation militaire et modifiant a) la loi modifiée du 22 juin 1963 fixant le régime des traitements des fonctionnaires de l'Etat, b) la loi modifiée du 28 juillet 1973 réglant l'usage des armes et autres moyens de contrainte par des membres de la force publique dans la lutte contre la criminalité, c) la loi modifiée du 28 mars 1986 portant harmonisation des conditions et modalités d'avancement dans les différentes carrières des administrations et services de l'Etat, d) la loi modifiée du 27 juillet 1992 relative à la participation du Grand-Duché de Luxembourg à des opérations de maintien de la paix (OMP) dans le cadre d'organisations internationales, e) la loi du 31 mars 1999 portant création de la police grand-ducale et d'une

mm); Date: Jun 28, 2018 15:09:25; Output Profile: OneVision Gray

inspection générale de la police, f) la loi du 9 décembre 2005 déterminant les conditions et modalités de nomination de certains fonctionnaires occupant des fonctions dirigeantes dans les administrations et services de l'Etat, en abrégé « la loi du 21 décembre 2007 », libellé comme suit :

« 39° Le colonel, dont la nomination en tant qu'officier de l'armée a eu lieu en 1977, est intégré dans le cadre A14, à l'échelon 11, à l'indice 647. Un supplément personnel non pensionnable de 20 points indiciaires lui est accordé au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi.

Avec effet à cette même date, il est placé hors cadre et détaché auprès du Ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration, chargé de la planification auprès du Ministre ayant la défense dans ses attributions. Après son détachement, il conserve son titre de colonel et sa rémunération acquis au sein de l’armée» ;

Que X. ayant exercé un recours contentieux, entre autres, contre l'arrêté grand-ducal du 11 janvier 2008, la Cour administrative, saisie du litige en instance d'appel, souligna dans son arrêt du 4 mars 2010 que le législateur, au lieu de laisser se poursuivre la procédure administrative entamée par le gouvernement sur base des articles 11 et 12 de la loi précitée du 23 juillet 1952, procédure qui confère sinon directement, du moins indirectement, par le jeu des règles relatives à la procédure administrative non contentieuse, un certain nombre de garanties et de droits aux fonctionnaires visés, avait pris la décision de légiférer en la matière et que, dans ce contexte, l’on ne perçoit spécialement pas quelle serait, a priori, la justification du fait que le fonctionnaire concerné par l’article 25, point 39°, de la loi du 21 décembre 2007, c’est-à-dire X., soit traité différemment que tous les autres fonctionnaires auxquels lesdites dispositions de la loi précitée du 23 juillet 1952, formant le droit commun en la matière, sont normalement applicables ;

Qu'estimant qu'il se posait ainsi une question d'égalité devant la loi, la Cour administrative posa à la Cour constitutionnelle la question préjudicielle suivante :

« L’article 25, point 39° de la loi du 21 décembre 2007 modifiant la loi du 23 juillet 1952

concernant l’organisation militaire est-il conforme à l'article 10bis paragraphe 1er de la

Constitution ? » ;

Considérant que la Cour administrative estima encore que l'on ne saurait pas non plus affirmer que la désaffectation de X. de son emploi de chef d’état-major de l’armée ne constitue manifestement pas une « privation » au sens de l’article 31 de la Constitution et que, pareillement, n’est point dénuée de tout fondement la question de savoir si le fait de prendre la décision par voie de disposition légale est conforme à l’exigence constitutionnelle de suivre « la manière déterminée par la loi » ;

Qu'elle ajouta que, dans ce contexte, se pose également la question de savoir si, en enlevant au Grand-Duc le « choix » lui reconnu par l’article 11 de la loi précitée du 23 juillet 1952 et, surtout, si, en décidant directement quant à la désaffectation et au détachement de X., le pouvoir législatif n’a pas outrepassé les limites de ses compétences et empiété sur les attributions du pouvoir exécutif, contrevenant de la sorte à la règle de la séparation des pouvoirs, qui transcende l’ensemble des dispositions constitutionnelles ;

Qu'elle saisit partant la Cour constitutionnelle d'une seconde question, libellée comme suit : « Ledit article 25, point 39° de la loi précitée du 21 décembre 2007 est-il encore conforme à l’article 31 de la Constitution et à la règle de la séparation des pouvoirs, qui transcende l’ensemble des dispositions constitutionnelles ? » ;

Considérant qu'il convient de répondre en premier lieu à la seconde question ;

Qu'en effet, la réponse à la première question présuppose une réponse affirmative à la seconde ; mm); Date: Jun 28, 2018 15:09:25; Output Profile: OneVision Gray

Sur la seconde question :

Considérant que la question préjudicielle est recevable en tant qu'elle vise la conformité de l'article 25, point 39°, de la loi du 21 décembre 2007 à la règle de la séparation des pouvoirs ;

Qu'il est vrai que l'article 8, paragraphe 1er, première phrase, de la loi du 27 juillet 1997

portant organisation de la Cour Constitutionnelle, dispose que la question préjudicielle indique avec précision les dispositions législatives et constitutionnelles sur laquelle elle porte ; Qu'il est cependant indifférent, à cet égard, que la juridiction qui pose la question, s'abstienne de désigner l'article de la Constitution susceptible d'être violé par une norme légale, dès lors qu'elle désigne clairement la règle juridique contenue dans une disposition de la Constitution ;

Que tel est le cas en l'espèce, étant donné que, d'une part, la règle constitutionnelle de la séparation des pouvoirs est clairement désignée dans l'arrêt de renvoi préjudiciel, et que, d'autre part, outre la circonstance qu'un certain nombre de dispositions de la Constitution

constituent une application directe de cette règle, l'article 51, paragraphe 1er, de la

Constitution qui énonce que le Grand-Duché de Luxembourg est placé sous le régime de la démocratie parlementaire, consacre implicitement, mais nécessairement, la règle constitutionnelle de la séparation des pouvoirs ;

Considérant que la séparation des pouvoirs, telle qu'organisée par la Constitution, implique que chacun des organes étatiques exerçant respectivement les pouvoirs législatif, exécutif et juridictionnel est souverain dans son existence et son fonctionnement et qu'aucun ne saurait exercer les pouvoirs dévolus par la Constitution aux autres organes, le législateur pouvant cependant exercer sa compétence dans tous les domaines non réservés, par la Constitution, aux deux autres pouvoirs constitués, que cette compétence s'exerce moyennant fixation de règles générales et impersonnelles ou par des mesures concrètes et individuelles ;

Considérant que l'article 31 de la Constitution dispose que les fonctionnaires publics, à quelque ordre qu'ils appartiennent, les membres du Gouvernement exceptés, ne peuvent être privés de leurs fonctions, honneurs et pensions que de la manière déterminée par la loi ;

Que cette disposition ne soustrait pas au législateur le pouvoir de prévoir la manière dont les fonctionnaires publics sont privés de leurs fonctions, honneurs et pensions, ce pouvoir pouvant être exercé moyennant fixation de règles générales ou de mesures individuelles, à condition de respecter l'égalité devant la loi ;

Que n'est partant contraire, ni à la règle de la séparation des pouvoirs, ni à l'article 31 de la Constitution, la disposition de l'article 27, point 39°, de la loi du 21 décembre 2007 qui dispose individuellement de la carrière d'un fonctionnaire déterminé ;

Quant à la première question :

Considérant que l'article 10bis, paragraphe 1er, de la Constitution dispose que les

Luxembourgeois sont égaux devant la loi ;

Considérant que la mise en œuvre de la règle constitutionnelle d'égalité suppose que les catégories de personnes entre lesquelles une discrimination est alléguée se trouvent dans une situation comparable au regard de la mesure alléguée ;

Qu'au regard de la mesure incriminée, à savoir les garanties procédurales encadrant le changement d'affectation d'un officier de l'armée, la situation de X., d'une part, et celle des autres officiers de l'armée, d'autre part, sont comparables ;

Considérant que le législateur peut, sans violer le principe constitutionnel de l'égalité, soumettre certaines catégories de personnes à des régimes légaux différents, à la condition que la disparité existant entre elles soit objective, qu'elle soit rationnellement justifiée, adéquate et proportionnée à son but ;

mm); Date: Jun 28, 2018 15:09:25; Output Profile: OneVision Gray

Que la situation des officiers de l'armée, dont fait partie le chef de l'état major de l'armée, est régie, en ce qui concerne la mesure incriminée, par l'article 12 de la loi modifiée du 23 juillet 1952 concernant l'organisation militaire qui dispose en son alinéa 2 que l'affectation ou le changement d'affectation des officiers est faite par le Grand-Duc ;

Qu'étant donné que les décisions afférentes du Grand-Duc constituent des décisions administratives individuelles, leurs destinataires bénéficient d'un certain nombre de garanties procédurales, notamment des règles découlant de la procédure administrative non contentieuse et de la possibilité de diriger un recours contentieux contre une décision dont ils estiment qu'elle leur fait grief ;

Que la disposition de l'article 25, point 39°, alinéa 2, de la loi du 21 décembre 2007 conduit à priver l'officier concerné du bénéfice des règles de la procédure administrative non contentieuse préalablement à l'arrêté grand-ducal qui ne fait que matérialiser la mesure instituée par la loi, ainsi qu'à lui enlever le droit de faire contrôler le caractère justifié de la mesure moyennant un recours juridictionnel effectif ;

Considérant qu’en limitant les garanties procédurales du fonctionnaire visé par l'article 25, point 39°, alinéa 2, de la loi du 21 décembre 2007, par rapport aux autres officiers de l'armée qui, en cas de changement d'affectation, bénéficient des garanties en question, ladite disposition légale crée une disparité objective entre l'officier visé et les autres officiers ;

Que s'il est vrai que le but de la mesure a été, selon les termes employés par l'Etat grand-ducal dans la présente instance ainsi que dans les travaux préparatoires de la loi, de préserver le grade et le traitement du fonctionnaire visé par la mesure, cet objectif n'est de

nature à justifier que l'alinéa 1er de la disposition incriminée, mais non pas à expliquer

rationnellement l'alinéa 2 qui place le colonel visé hors cadre et en opère le détachement ;

Que, comme l'alinéa 1erconstitue cependant seulement une conséquence de l'alinéa 2 et

que le premier serait dépourvu de raison d'être en l'absence du second, il y a lieu de rechercher le but de l'alinéa 2 ;

Que les travaux préparatoires de la loi ne livrent aucune explication du but de l'alinéa 2 et l'Etat n'avance pas, dans ses écrits dans la présente instance, de justification rationnelle du recours à la voie législative plutôt qu'à une décision du Grand-Duc pour effectuer la mesure litigieuse ;

Considérant que la disparité créée, qui a pour conséquence de priver des garanties de droit commun un officier particulier dans le cadre d'une mesure de changement d'affectation, n’est pas rationnellement justifiée, ni adéquate, ni proportionnée au but de ladite disposition ;

Qu’ainsi ladite disposition se heurte à l’article 10bis, paragraphe 1er, de la Constitution ;

Par ces motifs,

dit que l'article 25, point 39°, de la loi du 21 décembre 2007 n'est ni contraire à l'article 51,

paragraphe 1er, de la Constitution, ni à son article 31 ;

dit qu'en revanche, il est contraire à l'article 10bis, paragraphe 1er, de la Constitution ;

Dans le document LES DOSSIERS DE LA PASICRISIE LUXEMBOURGEOISE (Page 170-176)