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De nombreuses approches existent pour modéliser la consommation énergétique de chauf- fage des bâtiments. Cette section décrit les différents modèles observés dans la littérature et permet de situer l’approche que l’on cherche à développer.

2.4. Approches pour la modélisation énergétique des bâtiments

Hypothèse :

Étant donnés les conditions météorologiques françaises, le besoin de chauffage est lar- gement majoritaire par rapport au besoin de refroidissement. De plus, encore peu de logements sont équipés en climatisation, ce qui explique la prédominance des usages de chauffage dans la consommation des foyers (voir Fig. 1.4). Pour cette raison, nous avons fait le choix de concentrer la thèse sur la modélisation de la consommation de chauffage.

2.4.1 Les différents modèles bottom-up

L’introduction de ce chapitre a présenté la distinction entre les approches de modélisation descendantes et ascendantes, et la pertinence de ces dernières pour modéliser le contexte de la rénovation énergétique. Au sein de ces approches bottom-up, on peut distinguer deux familles de modèles (voir Fig. 2.3) :

• Les modèles statistiques, ou “Data-driven models”, sont appliqués à des données histo- riques, issues du terrain, et cherchent à identifier un lien entre la consommation d’éner- gie et certaines caractéristiques des consommateurs par le biais d’analyses statistiques comme des régressions. Celles-ci peuvent être d’ordre technique, socio-économique, etc. Ces modèles ne s’appuient pas sur une description de phénomènes physiques, mais sur l’observation de liens qui sont parfois difficilement interprétables. C’est pourquoi on les classe souvent dans les modèles dits boîte noire, ou black-box.

• Les modèles ingénieurs, ou “Engineering models”, s’appuient sur une description tech- nique des usages désagrégés. Les modèles peuvent reposer sur les équations de la physique, notamment de la thermodynamique : on parle alors de modèles physiques (des équipements et systèmes, des éléments structurels, etc.). Ils peuvent également s’appuyer sur des analogies, par exemple la modélisation des échanges thermiques par des circuits électriques équivalents : ce sont les modèles RC, calibrés pour correspondre à un contexte de demande consommation énergétique. Ces modèles ont toujours pour objectif de décrire des phénomènes physiques quantifiables, c’est pourquoi ils sont transparents et présentent une bonne interprétabilité : ce sont des modèles dits boîte blanche, ou white-box.

2.4.2 Modélisation statistique de la consommation électrique

Une tendance nette de digitalisation est observée dans le secteur de l’énergie (voir Sec. 1.1.2) et l’exploitation des données remontées du terrain représente un enjeu d’avenir certain. Dans le cadre d’un partenariat avec ENEDIS, gestionnaire du réseau de distribution d’électricité, nous avons pu exploiter des données de consommation à l’échelle individuelle. Nous avons cherché à valoriser ces données par le biais d’une modélisation statistique de la consommation électrique des ménages. L’analyse statistique développée recherche les dé-

Approches Ascendantes Bottom-up Approches Descendantes Top-Down Modèles Statistiques Data-driven Modèles d'Ingénierie Engineering Modèles Économetriques Modèles Socio-technologiques Modèles Physiques Physics-based Modèles Réduits Reduced-order

Figure 2.3 – Catégorisation des approches de modélisation de la consommation énergétique. Source : Inspiré de Brøgger and Wittchen [51]

terminants de la consommation des ménages, et met à profit un travail d’enrichissement de bases de données similaire à celui présenté en Section 2.2. Néanmoins, la approche statis- tique que nous avons développé présente des limites claires la rendant inapte à modéliser la consommation énergétique à l’échelle territoriale.

• La résolution de la caractérisation (au niveau du bâtiment) demande une grande fiabi- lité du procédé de matching. L’incertitude quant à la fiabilité du procédé d’appariement rend difficile l’analyse des modèles statistiques générés.

• La consommation électrique dépend grandement des équipements présents dans les logements, et surtout de la présence éventuelle d’un système de chauffage ou d’ECS électrique. Or, cette information, non disponible à l’échelle du bâtiment, introduit de grandes incertitudes et limite la fiabilité des modèles de consommation énergétique développés.

• Enfin, l’absence d’informations énergétiques (coefficients thermiques des parois no- tamment) oblige la classification des bâtiments par typologies (d’âge par exemple) qui ne permettent pas de modéliser les leviers de la transition de manière désagrégée (ou infra-bâtiment).

Bien qu’elle n’ait pas été exploitée dans la suite de ces travaux de thèse, cette étude de caractérisation a fait l’objet d’une présentation à la conférence internationale MedPower en 2018 à Dubrovnik, Croatie. Dans un souci de concision et de clarté du manuscrit, le détail de l’étude est présenté en Annexe C à travers le postprint de l’article de conférence.

2.4.3 Classification des modélisations ingénieures de la consommation Les modèles ingénieurs sont utilisés pour décrire la consommation énergétique des loge- ments. Au sein même de ces modèles, on peut distinguer les approches par modèles physiques et par modèles réduits (voir Fig. 2.3). Le choix entre l’une ou l’autre dépend notamment de

2.4. Approches pour la modélisation énergétique des bâtiments

la résolution spatiale et temporelle souhaitée, mais aussi de la taille du parc bâti à simuler ou de l’horizon de simulation. Une description physique détaillée des phénomènes thermiques permet de modéliser précisément la consommation énergétique, mais également le confort (ambiance) et l’hygrométrie d’un bâtiment. Néanmoins, un tel niveau de détail requiert des données d’entrée très précises qui ne sont généralement pas disponibles pour un parc com- plet et générique de bâtiments. Aussi, des calculs d’une telle précision demandent un effort de calcul important qui rend ce type de modèle inadapté pour la modélisation urbaine. À l’inverse, les modèles réduits, plus simples, permettent de modéliser la consommation éner- gétique d’un groupe de bâtiment au prix d’une résolution temporelle plus faible. Ils peuvent cependant s’avérer imprécis pour un pas de temps plus fin.

Ce compromis entre la finesse des modèles et leur capacité à opérer sur des problèmes de grande taille est synthétisé par la Figure 2.4, inspirée du travail de Frayssinet et al. [48]. On observe notamment que plus la taille du domaine à simuler augmente, plus la résolution temporelle diminue. Sur ce graphique sont situés deux grands types de modèles : ceux visant à simuler le comportement d’un bâtiment dans un environnement urbain, dits Urban Building Energy Simulation (UBES), et ceux décrivant le comportement énergétique dynamique d’un ensemble de bâtiments, dits City Energy Simulation (CES). Enfin, une dernière approche a été identifiée, celle des modèles les plus simplifiés qui permettent une estimation des besoins à grande échelle avec assez peu de données et pour des horizons temporels qui permettent de négliger des phénomènes transitoires, dits Territory Energy Estimation (TEE). Simplificationdes modèles Résolution temporelle Échelle modélisée Bâtiment Quartier Ville Territoire

Minute Heure Jour Mois Année Modèles Physiques Urban Building Energy Simulation Modèles réduits dynamiques City Energy Simulation Modèles réduits statiques ou quasi- statiques Territory Energy Modeling

Figure 2.4 – Comparaison des catégories de simulation énergétique dans le cadre urbain. Inspiré de Frayssinet et al. [48]

Pour la modélisation et l’optimisation des mesures de transition énergétique à l’échelle territoriale, les deux dernières approches sont particulièrement pertinentes. Elles se dis- tinguent principalement par la résolution temporelle des modèles (fine pour les CES et grossière pour les TEE) et donc également par les données qui peuvent être obtenues en sortie. En conséquence, ces approches sont employées dans des contextes différents. Les CES permettent la simulation dynamique du parc bâti, aboutissant par exemple à des courbes de charges. Les TEE sont pertinents pour l’estimation de potentiel d’économie d’énergie à l’échelle territoriale ou, et c’est l’objet de cette thèse, l’optimisation des mesures de transi- tion énergétique. Ainsi, pour une montée d’échelle dans la simulation urbaine, il faut soit passer par une simplification des modèles (qui implique une perte de précision) ou augmenter les capacités de calcul.