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D’autres structures globales de visibilit´e ont ´et´e propos´ees dans la litt´erature, certaines d’entre elles bas´ees sur des concepts similaires au complexe de visibilit´e. Nous les passons en revue, en insistant sur les similarit´es et les diff´erences.

6.1 Le graphe d’aspect

Les ´ev´enements visuels consid´er´es dans la litt´erature consacr´ee aux graphes d’aspects correspondent aux 1-faces du complexe de visibilit´e : la topologie d’une vue change par exemple quand un sommet et une arˆete sont align´es depuis un point de vue. Le graphe d’aspect est en fait l’arrangement de ces ´ev´enements dans l’espace des points de vue.

Cela explique sa plus grande taille par rapport au complexe. Int´eressons-nous au cas polygonal. Il peut y avoir O(n3) ´ev´enements T+T+T . Pour le complexe de visibilit´e, cela induit une taille en O(n4)car ces

´ev´enements ne peuvent ˆetre coup´es que par des sommets T +T+T +T . Dans le cas du graphe d’aspect pour une projection orthographique, la construction de l’arrangement 2D surS2peut engendrer jusqu’`a O(n6) intersections entre les paires d’´ev´enements T+T+T . Dans le cas perspective, l’espace des points de vue est IR3, et la taille du graphe d’aspect O(n9). Le complexe de visibilit´e contient en fait implicitement l’information du graphe d’aspect.

Le graphe d’aspect pour une projection orthographique traite en fait lui aussi une information de dimen-sion 4 : 2 pour l’espace des points de vue, et 2 pour chaque vue. Cependant, la s´eparation entre ces deux composantes rend difficile l’expression de propri´et´es comme la visibilit´e mutuelle de paires d’objets.

6.2 Asp

L’asp [PD90] (cf. section 6.3 du chapitre 1) tout comme le complexe de visibilit´e est une structure dans l’espace des droites. Il a ´et´e d´evelopp´e comme structure de donn´ees interm´ediaire pour la construction de graphes d’aspects.

Deux d´efinitions diff´erentes existent en fonction de la projection, orthographique ou perspective. Dans le cas orthographique, les droites orient´ees sont consid´er´ees et l’asp est un complexe cellulaire 4D qui d´ecompose l’espace des droites en fonction du premier objet rencontr´e. L’information de visibilit´e `a l’int´erieur de l’enve-loppe convexe de l’objet n’est pas trait´ee.

Dans le cas de la projection perspective, l’asp est un complexe cellulaire 5D, qui d´ecompose l’espace des rayons en fonction du premier objet intersect´e. L’asp contient alors la mˆeme information que le complexe de visibilit´e, mais elle est redondante car de nombreux rayons colin´eaires voient le mˆeme objet.

Le complexe de visibilit´e peut ˆetre vu comme offrant les avantages de l’asp pour les projections perspective et orthographique. Il traite la bonne quantit´e d’information grˆace `a la notion de segments libres maximaux. La cinqui`eme dimension n’est utilis´ee que si n´ecessaire, c’est `a dire le long des volumes de tangence. Il s’agit donc d’une structure 4D plong´ee en 5D. De plus, aucune version de l’asp n’a ´et´e propos´ee pour des objets courbes.

6.3 La fonction pl ´enoptique et les champs lumineux

La fonction pl´enoptique [AB91] est une fonction dans l’espace 5D des rayons qui d´ecrit la lumi`ere tra-versant chaque point de l’espace dans chaque direction. Si la lumi`ere qui parcourt l’espace libre est suppos´ee invariante et si l’observateur est contraint `a l’ext´erieur de la sc`ene, cette fonction peut ˆetre simplifi´ee en une fonction 4D appel´ee champ de lumi`ere (light-field [LH96] ou lumigraph [GGSC96]).

Ces fonctions correspondent en fait `a l’asp, `a part qu’une information de couleur est consid´er´ee.

Langer et Zucker [LZ97] utilisent des concepts topologiques similaires aux nˆotres pour d´ecrire le champ de lumi`ere (light field) dans une sc`ene dans un contexte de forme-`a-partir-d’ombrage (shape-from-shading). Tout comme pour le complexe de visibilit´e, ils notent que la vari´et´e des rayons est en fait de dimension 4, avec des branchements. Ils ne proposent cependant pas d’analyse des changements de visibilit´e, ni l’expression de la coh´erence gˆace aux adjacences entre classes de rayons.

6.4 Coordonn ´ees de Pl ¨ ucker

La param´etrisation de Pl¨ucker est une puissante dualit´e qui repr´esente les droites de l’espace dans un espace

`a 5 dimensions o`u les hyperplans peuvent ˆetre utilis´es pour caract´eriser les intersections droite-droite (cf. la section 6.2 du chapitre 1). Elle a ´et´e tr`es utilis´ee pour les calculs de visibilit´e dans des sc`enes polygonales.

Remarquons que la cinqui`eme dimension de l’espace de Pl¨ucker ne correspond pas `a la pseudo dimension que nous avons introduite `a la section 1.2. Les points de l’espace de Pl¨ucker ne correspondent pas tous `a des droites r´eelles, uniquement ceux qui se trouvent sur l’hypersurface de Pl¨ucker. La cinqui`eme dimension permet de s’affranchir des probl`emes de singularit´e inh´erents `a toute param´etrisation 4D des droites (comme c’est aussi le cas pour une param´etrisation 2D de la sph`ereS2). Par exemple notre param´etrisation(ϕ;θ;u;v)poss`ede deux singularit´es aux pˆoles de la sph`ere des directions.

Des arrangements ont ´et´e d´ecrits dans l’espace de Pl¨ucker qui sont tr`es semblables `a notre arrangement dual, par exemple [Pel93, Tel92b, Tel92a]. Un arrangement d’hyperplans est calcul´e en 5D et ensuite intersect´e avec l’hypersurface de Pl¨ucker pour obtenir une structure 4D. Cette structure est exactement notre arrangement dual, exprim´e dans une dualit´e diff´erente. Cela illustre ce que nous disions en introduction de ce chapitre : les concepts que nous d´ecrivons ne sont pas li´es `a une param´etrisation particuli`ere des droites.

N´eanmoins, les approches dans l’espace de Pl¨ucker ne se sont int´eress´ees qu’`a l’´equivalent de l’arrangement dual. Elles ne consid`erent que la visibilit´e selon les droites, et les occultations ne sont pas v´eritablement prises en compte.

6.5 Le complexe de visibilit ´e 2D

La version bidimensionnelle du complexe de visibilit´e a ´et´e l’inspiration initiale de ce travail. Nous com-parons maintenant les structures 2D et 3D, ce qui illustre les grandes diff´erences entre la visibilit´e 2D et 3D.

Tout d’abord, l’espace des droites de l’espace 3D est de dimension 4. L’augmentation de la dimension des probl`emes est 2 et non pas seulement 1. De mˆeme, la complexit´e th´eorique est O(n4)au lieu de O(n2). En 2D seules les bitangentes doivent ˆetre consid´er´ees, tandis qu’en 3D les segments tangents `a quatre objets constituent les sommets du complexe.

La propri´et´e qui explique que la visibilit´e 3D soit bien plus complexe est la s´eparabilit´e. En 2D, une droite s´epare le plan en deux demi plans, ce qui n’est plus vrai en 3D car les droites n’y sont plus des hyperplans.

En cons´equence, des propri´et´es de convexit´e ou de monotonicit´e qui ´etaient valables en 2D ne le sont plus en 3D. C’est le cas pour les faces du complexe : en 2D, en choisissant bien la dualit´e, les faces sont au moins monotones selon la direction. Cela implique des cons´equences bien utiles, en particulier la possibilit´e d’effectuer des balayages optimaux ou des parcours efficaces le long du complexe.

En 3D, nous avons vu que certaines 0-faces sont irr´eguli`eres pour le balayage du complexe. Les faces ne peuvent ˆetre rendue monotones par rapport `a un param`etre d’une param´etrisation. Elles peuvent de plus avoir un genre autre que 0 (elles peuvent avoir des trous, comme un tore). Cela rend notre algorithme non optimal.

Cela explique ´egalement la difficult´e de d´evelopper un algorithme efficace d’extraction de vue.

7 Conclusion

7.1 R ´esum ´e

Nous avons pr´esent´e une nouvelle approche pour les calculs de visibilit´e et d´ecrit une puissante structure de donn´ees qui englobe toute l’information de visibilit´e d’une sc`ene 3D. L’espace dual que nous utilisons permet une meilleure compr´ehension des ´ev´enements visuels, qui ont ´et´e pr´esent´es en d´etail. Notre repr´esentation donne de plus toutes les adjacences entre ces ´ev´enements.

Nous avons introduit une structure de donn´ees unifi´ee, le complexe de visibilit´e 3D, qui d´ecrit l’information globale de visibilit´e d’une sc`ene 3D compos´ee de poly`edres et d’objets lisses. Sa taille k est(n)et O(n4), et nous avons pr´esent´e un algorithme de construction dont la complexit´e d´epend de la sortie, puisqu’il est en temps O((n3+k)log n).

En utilisant une approche probabiliste, nous avons montr´e que pour des sc`enes “normales” le nombre d’´ev´enements de tritangence est O(n2;33).

Nous avons ´egalement d´efini le complexe de visibilit´e temporel qui d´ecrit toute la visibilit´e d’une sc`ene d’objets en mouvement.

Le complexe de visibilit´e est une structure de donn´ees tr`es prometteuse pour de nombreuses applications en synth`ese d’images : nous avons bri`evement d´ecrit son utilisation potentielle pour les calculs de vue, pour le calcul de facteur de forme, pour les limites d’ombre et de p´enombre, et pour le calculs de graphes d’aspect.

Nous verrons dans le chapitre suivant que, simplifi´e, il m`ene `a des solutions pratiques efficaces.

7.2 Discussion

Le complexe de visibilit´e est un cadre utile car il permet une description efficace de l’information de visi-bilit´e. Nous croyons qu’il s’agit d’un bon outil pour l’interpr´etation de probl`emes de visivisi-bilit´e. En permettant un point de vue diff´erent sur ces questions, nous esp´erons qu’il permettra une meilleure compr´ehension et le d´eveloppement de nouvelle m´ethodes, ainsi que le montre le chapitre suivant.

Son int´erˆet pratique direct est plus discutable. L’impl´ementation d’une subdivision cellulaire 4D est une tˆache ardue, et le parcours de ses adjacences est loin d’ˆetre trivial.

De plus, l’algorithme de construction est certes efficace, mais sujet `a des probl`emes de robustesse et de d´eg´en´erescences. Si un ´ev´enement du balayage n’est pas correctement trait´e ou d´etect´e, tout le reste de l’algo-rithme ´echoue car la coh´erence est perdue.

Nos r´eflexions sur l’impl´ementation ´eventuelle du complexe de visibilit´e nous ont amen´es `a en extraire l’information la plus importante et `a d´evelopper une structure de donn´ees plus simples, ainsi qu’un algorithme de construction plus robuste que nous pr´esentons dans le chapitre suivant.

7.3 Travaux futurs

Les faces du complexe de visibilit´e traduisent directement la nature ardue de la visibilit´e 3D. Elles n’ont au-cune propri´et´e de convexit´e ou de monotonicit´e, comme le montre bien le probl`eme des ´ev´enements irr´eguliers lors de notre balayage. Forcer de telles propri´et´es serait possible en subdivisant de mani`ere appropri´ee les faces du complexe. Les partitions cylindriques de Mulmuley [Mul91] ou les d´ecompositions cylindriques alg´ebriques de Collins [Col75] sont des exemples d’une telle approche. Malheureusement, cela augmenterait la complexit´e de la structure.

La distinction entre une composante directionnelle(θ;ϕ) et une composante spatiale (u;v) pour la pa-ram´etrisation des droites m´eriterait d’ˆetre ´etudi´ee plus avant. Comme nous l’avons vu, cela permet l’interpr´e-tation des ´ev´enements T++T dans notre espace dual. Nous pensons de plus que cela peut s’av´erer utile pour obtenir des propri´et´es de monotonicit´e, car les volumes de tangence ont une structure de tube le long de la com-posante directionnelle : pour toute paire(θ;ϕ), il existe une paire(u;v)qui appartient `a un volume de tangence donn´e, alors que l’inverse n’est pas vrai.

Les techniques de localisation randomis´ee [Cla87] pourraient permettre des requˆetes efficaces. Cela de-mande de traiter des hyperplans, ce qui peut ˆetre obtenu pour des sc`enes polygonales en passant dans l’espace de Pl¨ucker. On se rapproche alors des travaux de Pellegrini [Pel93, Pel90, PS92, Pel94]. Cependant, on veut traiter la visibilit´e selon les segments et non selon les droites. Traiter la visibilit´e selon les segments est loin d’ˆetre trivial dans ce contexte, mais c’est le seul moyen d’´eviter le co ˆut fixe en O(n4).

La d´efinition d’un algorithme efficace d’extraction de vue `a l’aide du complexe doit ˆetre ´etudi´ee. Nous n’avons pu trouver une telle m´ethode `a cause des probl`emes de monotonicit´e mentionn´es ci-dessus. La main-tenance de vue pose le mˆeme genre de probl`emes.

Le d´eveloppement d’un algorithme de calcul de vue efficace est li´e `a la construction efficace du complexe.

Pour les sc`enes polygonales, une autre approche consiste `a balayer la sc`ene par des plans tournant autour des arˆetes des polygones, tout en maintenant des complexes de visibilit´e 2D. Il faut alors synchroniser les balayages, et ne consid´erer dans chaque plan que la partie du complexe 2D visible depuis l’arˆete. La d´efinition d’un ordre topologique sur les 0-faces du complexe est une autre question `a r´esoudre pour obtenir un algorithme de construction optimal dont la complexit´e d´epende de la taille du r´esultat.

Dans le cas de sc`enes alg´ebriques, les travaux de Petitjean [Pet95, Pet96] en utilisant la g´eom´etrie ´enum´erative pourraient ˆetre adapt´es pour obtenir des bornes fines sur la taille du complexe en fonction du degr´e des objets.