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L'évaluation quantitative des IEM est généralement réalisée à l'aide de divers outils de simulation basés sur la résolution des équations de Maxwell, tels que la méthode des moments (MoM) (Harrington, 1993), la méthode des éléments finis (Silvester and Ferrari, 1996), la méthode des éléments finis de frontière (BEM) (Brebbia et al., 2012; Harrington, 1993), le domaine temporel des différences finies (FDTD) (Kunz and Luebbers, 1993; Taflove and Hagness, 1995) et la modélisation des lignes de transmission (TLM) (Ney and Le Maguer, 2003; Paul, 2008, 1987; Paul and Abraham, 1981). Les experts choisissent l’un ou l’autre suivant leurs avantages et leurs spécificités.

1. La méthode des Moments (MoM)

La méthode des Moments (MoM) a été introduite dans l'électromagnétisme par Harrington dans les années 1960. Elle est considérée comme l’un des outils le plus puissants pour le calcul numérique des champs électromagnétiques et est d’ailleurs fréquemment utilisée pour l'analyse des problèmes de CEM (Parmantier, 2004). L’utilisation de cette méthode, principalement pour les problèmes d’antennes et de diffusion électromagnétique, est basée sur la résolution d’équations intégrales transformées en un système d’équations linéaires (Leman, 2009).

Elle présente des avantages (elle est relativement rapide et est implémentée dans de nombreux logiciels commerciaux, etc.) par rapport aux autres approches numériques, en particulier pour les grandes surfaces électriques et/ou structures filaires (Brüns et al., 2017). Elle est très efficace pour analyser les problèmes de rayonnement sans limite, les configurations PEC (conducteur électrique parfait) et les diélectriques homogènes. Pour autant, la méthode MoM exige que la solution soit bien conditionnée et que les erreurs soient contrôlables (Annexe 4). Par ailleurs, cette méthode n’est pas adaptée aux analyses des géométries complexes et non homogènes. Enfin, les besoins en mémoire et en temps de calcul requis par cette méthode augmentent considérablement avec le nombre de segments de maillage.

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2. La méthode des éléments finis (FEM)

La méthode des éléments finis (FEM) est l’une des méthodes numériques qui transforme une relation fonctionnelle en un système d’équations linéaires. Depuis les années 1970, cette méthode a connu un grand développement dans de nombreux domaines de la physique grâce à son aptitude à s’appliquer à des structures avec des géométries complexes (NEY, 2006). Les techniques d'éléments finis exigent que tout le volume de la configuration étudiée soit maillé, contrairement aux techniques d'intégration de surface, qui exigent seulement que les surfaces soient maillées. Aussi, chaque élément maillé peut avoir non seulement des propriétés de matériau complètement différentes de celles des éléments voisins mais il doit aussi contenir la géométrie de l’élément, les contraintes d’excitations et les conditions aux limites.

La méthode des éléments finis est très puissante pour la modélisation des configurations non homogènes et complexes, les diélectriques, les surfaces métalliques minces et les conducteurs électriquement petits et étroitement couplés. En revanche, elle ne convient pas à la modélisation de fils minces et électriquement longs et n’est donc pas adaptée à la modélisation des nombreux problèmes d'IEM faisant intervenir ce type d’éléments. Par ailleurs, elle nécessite des conditions aux limites exhaustives afin de limiter le domaine de calcul (du maillage) principalement pour les structures ouvertes dans l’espace libre. Finalement, cette méthode est rigoureuse, mais elle requiert également un temps de calcul très important et une grande capacité de mémoire du calculateur (Jithesh and Pande, 2003; Sumithra and Thiripurasundari, 2017).

3. La méthode des éléments finis de frontière (BEM)

La méthode des éléments finis de frontière (BEM) est une méthode numérique basée sur la méthode des résidus pondérés (Sumithra and Thiripurasundari, 2017). Elle est particulièrement adaptée à l'analyse des champs électromagnétiques qui repose sur la résolution de la représentation intégrale des équations de Maxwell avec une frontière discrète. Cette méthode est semblable à la méthode MoM puisqu’elle utilise la même formulation de surface, la seule différence concerne ses fonctions de base et de pondération qui ne sont définies que sur une surface. D’autre part, la méthode BEM supporte la résolution d’un problème 3D dans la même façon qu’un problème de frontière 2D, ce qui permet de réduire le nombre d'inconnues et de l'appliquer ainsi à des problèmes à domaine ouvert pour lesquels les solutions des problèmes volumiques, telles que la FEM, sont limitées (Pommerenke and Sakaguchi, 2002). Cette méthode présente plusieurs avantages qui consistent notamment dans la possibilité de modéliser des structures hétérogènes complexes ainsi que de calculer des champs rayonnés sans aucune condition absorbante, aux surfaces extérieures du maillage volumique. Même si cette méthode présente beaucoup d’avantages mais elle a également plusieurs inconvénients puisqu’elle n’est pas adaptée ni aux géométries complexes, ni aux conducteurs électriquement courts et est limitée par un temps de calcul très important.

4. La méthode des différences finies dans le domaine temporel (FDTD)

La méthode des différences finies dans le domaine temporel (FDTD : Finite Difference Time Domain) est une méthode de résolution d’un système d’équations aux dérivées partielles par un calcul de différences finies. Cette méthode, appelée aussi méthode de Yee (Kane Yee, 1966; Yee and Chen, 1997), permet d’obtenir directement l’évolution du champ électromagnétique en fonction du temps, puis à partir de la réponse temporelle et en se basant sur des transformées de Fourier, la réponse fréquentielle du système peut être facilement déduite. Cette technique d'analyse numérique est basée sur la discrétisation des équations de Maxwell directement dans les domaines temporel et spatial. D’ailleurs, les équations de Maxwell sont souvent discrétisées en cellules élémentaires de maillage, de forme généralement parallélépipédiques, afin d’obtenir une solution

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numérique pour les problèmes de champs électrique E et magnétique H impliquant ainsi des objets tridimensionnels complexes dont les formes et les caractéristiques de matériaux sont arbitraires (Cabello et al., 2017; Mix et al., 1998).

La méthode FDTD est pertinente pour l’analyse des structures non homogènes et à géométrie très complexe du fait de sa robustesse pour la résolution de problèmes d'interaction électromagnétique. En revanche, cette méthode n’est pas adaptée ni pour les géométries de surfaces ni pour les conducteurs électriquement courts. De plus, une forte fréquence d’étude ainsi que la présence de quelques objets ayant de grands volumes contenant petites géométries complexes, peuvent imposer un maillage très fin de la structure qui demande alors un long temps de calcul ainsi qu’un espace mémoire très important.

5. La méthode TLM

Bien que la méthode TLM (Transmission-Line Modeling) présente des similitudes avec la méthode FDTD, elle est unique. En effet, la méthode TLM est une technique spéciale de calcul des différences finies dans le domaine temporel. Cette méthode, développée par Christopoulos dans les années 1970 (Christopoulos, 1995), est basée sur une discrétisation spatio-temporelle des équations de Maxwell. Cette discrétisation consiste en des cellules élémentaires parallélépipédiques pour l’analyse de la propagation des ondes électromagnétiques via un réseau virtuel de lignes de transmission interconnectées. Cependant, contrairement à la méthode FDTD qui utilise soit un maillage pour le calcul du champ électrique E soit un maillage pour le calcul du champ magnétique B, la méthode TLM utilise un seul maillage à la fois pour les champs E et B où les sommets sont interconnectés par un réseau de lignes de transmission virtuelles (Mescco, 2013).

Comme la méthode FDTD, la méthode TLM présente des avantages et des inconvénients. Certes, l’avantage majeur de la TLM, par rapport aux autres techniques, est la possibilité d’analyser des structures à géométries très complexes. D’autre part, elle offre une grande flexibilité étant donné qu’elle peut incorporer des propriétés de champs EM et leur interaction avec les frontières et les milieux des matériaux. Cependant, la méthode TLM nécessite un temps de calcul élevé pour les grands systèmes, car plus le maillage est complexe plus la mémoire nécessaire par sommet est importante. Ces différents points rendent la méthode TLM plus coûteuse en termes de calcul par rapport aux précédentes méthodes.

6. La modélisation analytique

La modélisation analytique permet l’évaluation quantitative des interférences EM en s'appuyant sur des formules et des lois physiques. Cette approche est supportée par l’analyse des équations physiques correspondantes vis-à-vis du couplage identifié et de son mode de propagation (différentiel et commun). Elle consiste en la résolution des équations de Maxwell, généralement combinée à la discrétisation et aux maillages des surfaces, en se basant à la fois sur les paramètres physiques et géométriques des composants (câbles source/victime). L'évaluation quantitative est alors basée non seulement sur les équations physiques mais aussi sur la structure topologique de l’architecture E/E définie.

L’avantage principal de cette méthode est qu’elle s’appuie sur des équations mathématiques, rapides à calculer, permettant la synthèse d’un dimensionnement géométrique ou physique d’une architecture et pas seulement l’analyse d’une architecture particulière dans des conditions de simulation données, proposée dans les méthodes précédentes. Elle peut ainsi être facilement couplée dans un processus d’optimisation (PIDO= Process Integration Design Optimization), sans augmenter considérablement les temps de calcul.

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Une description plus détaillée du processus est présentée ci-dessous dans le cas d’une IEM particulière : la diaphonie étrangère dans la section C.

7. La méthode de KRON

Comme un système est généralement constitué de plusieurs sous-systèmes, il est judicieux d’avoir une vision macroscopique de chaque sous-système afin d'analyser les liens entre eux. Une telle approche topologique peut fournir une métrique, qui donne la valeur de chaque connexion, permettant ainsi d’analyser les différents chemins de propagation des perturbations EM. Cette approche topologique, appelée approche d'ingénierie basée sur l'Analyse Tensorielle des Réseaux, a été développée par Gabriel Kron pour les machines électriques et a été étendue aux problèmes de CEM (Maurice, 2016a). Ainsi, l’analyse tensorielle permet de prendre en compte non seulement les perturbations conductrices mais aussi les couplages de rayonnement ainsi que les couplages non linéaires tout en étudiant les IEM de manière abstraite. Les bases de l’analyse tensorielle sont rappelées dans l’Annexe 4. Dans ses travaux, Maurice a adapté la méthode de G. Kron pour l’analyse des IEM dans les grands systèmes actuels (Maurice, 2007b). Cette méthode, basée sur une approche topologique via la représentation des diagrammes et graphes topologiques associés permet ainsi une bonne visualisation du problème d’ensemble. Puis une modélisation des interactions entre les sous-systèmes, à travers des circuits électriques équivalents, où chaque circuit peut être représenté par un ensemble de résistances, d’inductances et de capacités liées à des forces électromotrices (fem) relatives aux IEM, permet une analyse physique de ces phénomènes d’IEM. Les équations, relatives aux interactions multiphysiques mises en jeu, peuvent être facilement déduites grâce à l’utilisation des espaces tensoriels et notamment des éléments constituants du système (arêtes, sommets et mailles). La résolution de ces équations tensorielles s’effectue alors dans l’espace le mieux adapté afin de retrouver les courants perturbés dans les différents systèmes électroniques.

Finalement, en s’appuyant sur une modélisation de la structure topologique et algébrique de façon rigoureuse d’un système E/E via un système d’équations simples, l’efficacité du formalisme de l’analyse tensorielle est justifiée pour résoudre les problèmes d’IEM issus des réseaux électriques.