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2.1 L’oral et la compétence à communiquer oralement

2.1.3 Les approches didactiques de l’oral

Au cours des dernières décennies, les didacticiens de l’oral ont pu identifier différentes approches didactiques de l’oral (Dumais, Soucy et Plessis-Bélair, 2017). Nous entendons par approche didactique de l’oral, que l’on peut aussi nommer courants d’enseignement de l’oral ou paradigmes, des points de vue ou manières de concevoir l’enseignement de l’oral dans le but d’amener les élèves à développer leurs compétences à communiquer oralement (Dumais, Soucy et Plessis-Bélair, 2017; Soucy, 2019).

Trois approches didactiques ont été identifiées : l’oral pragmatique, l’oral intégré et l’oral par les genres (Dumais, Soucy et Plessis-Bélair, 2017; Soucy, 2019).

L’oral pragmatique est l’enseignement/apprentissage de l’ensemble des règles et façons de faire, sur le plan linguistique comme sur le plan extralinguistique, qui s’appliquent lors d’une situation de communication orale. Les façons de communiquer oralement peuvent être nombreuses et très variées et le choix des mots, le registre utilisé, l’intonation et le non-verbal comptent parmi les nombreux éléments qui produiront un effet sur le l’interlocuteur lors d’un acte de parole, dans un contexte précis (Dumais, Soucy et Plessis-Bélair, 2017). L’unité de travail de cette approche didactique est l’acte de parole que l’on définit comme étant « un énoncé réalisé par un locuteur dans une situation donnée qui permet d’agir sur autrui, d’entrainer une certaine modification de la situation interlocutive et de produire un certain effet (Kerbrat-Orecchioni, 2012 ; Dumais et Plessis-Bélair, 2017). Dumais et Nolin (2018) mentionnent que les actes de parole sont utilisés fréquemment dans les différentes situations de la vie quotidienne, qu’ils permettent une communication harmonieuse et que nous les utilisons sans cesse.

Ces actes servent, par exemple, à interrompre un interlocuteur, à remercier, à s’excuser, à poser une question, à nous présenter ou à donner un ordre (Dumais et Nolin, 2018).

Dumais et Plessis-Bélair (2017) définissent l’oral intégré comme une approche didactique de l’oral dans laquelle l’oral est intégré aux différentes activités d’enseignement/apprentissage réalisées en classe dans les différentes disciplines scolaires, à partir de conduites discursives, c’est-à-dire entendues comme « une structure composée d’une suite d’énoncés reliés entre eux et dotés d’une organisation », de façon à atteindre un objectif, comme argumenter, décrire ou expliquer (Dumais, 2014, p. 329). Pour atteindre ces différents objectifs, le locuteur devra choisir et utiliser des procédés discursifs comme la description, la comparaison, la définition, l’exemple, le contre-exemple, la citation ou la reformulation, pour ne nommer que ceux-ci. Le rôle de l'enseignant est très important dans l’oral intégré, car il lui incombe de distinguer

les objectifs disciplinaires des objectifs langagiers et d’agir comme modèle pour les élèves (Soucy, 2019). Cette approche didactique de l’oral a été moins documentée au Québec que l’oral pragmatique ou l’oral par les genres (Dumais et al., 2017).

L’oral par les genres est une approche didactique qui utilise le genre comme point central des activités d’enseignement/apprentissage permettant aux élèves de construire leurs capacités langagières. Il permet aux élèves de s’approprier les caractéristiques et éléments des genres correspondant à différentes situations de communication de la vie courante (Dumais et al., 2017). Ce sont, en quelque sorte, des balises de communication auxquelles l’élève peut se référer puisqu'ils ont des caractéristiques assez stables et reconnaissables (Soucy, 2019). On définit le genre comme « un ensemble de productions langagières orales ou écrites qui, dans une culture donnée, possèdent des caractéristiques communes d’ordres communicationnel, textuel, sémantique, grammatical, graphique ou visuel et/ou d’oralité, souples mais relativement stables dans le temps » (Chartrand et Émery-Bruneau, 2015, p. 3) Ce sont des caractéristiques qui sont relativement stables dans le temps, malgré l’évolution de la langue (Chartrand et al., 2015). C’est donc une catégorie qui réunit plusieurs textes, écrits ou oraux, qui répondent aux mêmes critères, bien que ces catégories soient parfois plutôt hétérogènes (Canvat, 2008). Grâce au genre, on peut structurer sa parole selon les critères de la catégorie et le destinataire aura plus de facilité à comprendre, car son intention d'écoute sera reliée au genre (Dolz et Schneuwly, 1998). Tous les texte, oraux et écrits, s’inscrivent inévitablement dans un genre particulier (Chartrand et al., 2015). À l’oral, on retrouve une variété de genres dont le débat, l’entrevue, la discussion et le slam.

L’oral par les genres permet de mettre en contexte, à l’école, les expériences langagières des élèves tirées de la vie réelle (Chartrand et Émery-Bruneau, 2015).

Comme le genre possède une structure qui varie peu et qui permet de l’identifier par rapport aux autres genres, il permet à l’élève de développer ses compétences langagières (Dumais et al., 2017)

Chaque genre est associée à une conduite discursive dominante. Par exemple, pour le genre discussion, la conduite discursive dominante est la justification (conduite justificative) (Chartrand et al., 2015). Pour chaque conduite discursive, des procédés discursifs lui sont associées et permettent de réaliser la conduite discursive. Par exemple, pour la conduite discursive, nous retrouvons entre autres les procédés discursifs suivants : la citation, la comparaison, la définition et l’exemplification (Dumais, Bouchard, Tremblay, Carle et Charest, 2015). Le tableau 1 présente différents exemples de genres, et ce, tant à l’oral qu’à l’écrit (MÉLS, 2011; Chartrand et al., 2015).

Tableau 1 : Exemples de genres

Dominantes Exemples de genres

Genres à dominante argumentative

Message publicitaire Texte d’opinion argumentée Lettre ouverte

Débat

Genres à dominante descriptive Capsule d’information

Article [de revue, de journal ou sur le Web]

Documentaire audiovisuel Consigne, procédure Quatrième de couverture Article de dictionnaire Biographie

Compte rendu Entrevue

Résumé [d’un article de journal ou d’un autre média] et [d’un texte d’analyse]

Genres à dominante explicative Article de vulgarisation scientifique

Exposé explicatif

Chapitre de manuel scolaire de sciences et d’histoire

Reportage audiovisuel

Genres à dominante justificative Justification de la solution d’un problème de grammaire

Table ronde Discussion

Critique de film, exposé critique Genres à dominante narrative Album de littérature, bande dessinée

Roman d’aventures Roman psychologique Roman policier Roman de fantasy Roman de chevalerie Fable

Conte traditionnel, légende, mythe Nouvelle

Roman fantastique, roman de science-fiction Roman historique

Roman réaliste

Genres dramatiques (théâtre) Comédie et tragédie classiques

Genres poétiques Poème ludique

Poème à trame descriptive ou narrative Chanson et poème lyriques

Sonnet et ballade, poèmes classiques Slam

(Tableau inspiré de Chartrand et al., 2015)

Les différents genres oraux ne se retrouvent pas uniquement en classe de français, mais partout dans la société. On peut les observer à la télévision, à la radio ou sur le web.

Puisque nous en sommes bombardés sur les médias sociaux et dans la vie de tous les jours, ces genres deviennent pertinents à travailler en classe, car ils collent à la réalité de l’apprenant (Lafontaine, 2004a). Il est donc avantageux pour les enseignants d’élaborer des activités d’enseignement/apprentissage à partir de ces genres. On peut, par exemple, présenter en classe des débats ou des discours oraux provenant de l’extérieur à des fins d’observation et d’analyse. La structure, les caractéristiques ainsi que les contextes d’utilisation d’un genre particulier peuvent alors être discutés en classe (Lafontaine, 2004a). Utiliser l’approche didactique de l’oral par les genres permet de se baser sur les expériences langagières des apprenants, que ce soit à l’école ou dans la vie de tous les jours, afin de mettre en contexte leurs apprentissages (Chartrand et al., 2015).