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La délinquance des mineurs retrace l’ensemble d’infractions commises par des mineurs, que ce soit un crime, un délit ou une contravention67. Il s’agit d’une conduite caractérisée par

des délits analysés sous un aspect social mais également pénal, criminologique et psychologique68.

En ce sens, la délinquance des mineurs est « un phénomène multiple, qui d’après les théories de la réaction sociale, est une construction juridique produite par les règles pénales dictées par la société »69.

Tous les jours, des faits de délinquance commis par des mineurs sont portés à notre connaissance. L´augmentation de la gravité de ces comportements délictuels et l’âge très jeune de leurs auteurs préoccupent les responsables politiques et sociaux.

Non seulement les enfants se considèrent menacés par cette délinquance, mais également les adultes d’une manière générale. Laurent Mucchielli affirme que « lorsqu’on focalise l’attention sur des faits présentés comme des menaces sans en donner véritablement les clefs d’analyse, on ne peut qu’exacerber les peurs… »70.

67Les faits commis par les mineurs doivent être des actes graves et signalés, ces derniers peuvent être des crimes, des délits (dans ce cadre la justice déterminera leur niveau de gravité) ou des contraventions qui sont les infractions les moins graves.

68La délinquance des mineurs prend la forme d’une délinquance utilitaire matérialisée par des vols, cambriolages et agressions sur la voie publique, la prostitution y occupe une place importante. Cette délinquance regroupe toutes les formes de délinquance et les actes antisociaux. Elle présente aussi une description fondée de plusieurs catégories de délits, mettant en avant le mode de perpétration de chaque acte, les circonstances, le mobile, les réactions ressenties pendant et après, et les conséquences judiciaires.

69Omari (F.), « La délinquance juvénile, les discours des mineurs délinquants comme écho familial, vers une meilleure compréhension de la délinquance à travers la dynamique rationnelle parents –enfants » Thèse de doctorat, sciences de l’éducation, psychologie et criminologie, Université de Rennes II, haute Bretagne, UFR sciences humaines, Décembre 2008, P. 83.

« S´agit-il essentiellement d´une recrudescence de manifestations connues ou de l´apparition de nouvelles formes de délinquance ? La violence de ces actes risque-t-elle de s´intensifier ? N'a-t-on pas plus de risque d'être un jour victime ? Les craintes ressenties sont- elles justifiées ? Les interrogations qui se multiplient marquent la difficulté à résoudre ce phénomène»71.

Le débat sur la délinquance des mineurs a tendance à s’orienter également vers les parents et leurs capacités à éduquer leurs enfants, et surtout les difficultés à intégrer une société qui doit faire face à des problèmes aussi cruciaux que ceux du chômage ou de la pauvreté.

La notion du mineur délinquant, telle que définie par M.H. Michard, inspecteur de l’éducation surveillée72en France « est en train de se modifier, de perdre la belle simplicité

que lui avait donné les juristes du siècle passé. Car, au fur et à mesure qu’on se penche de plus près sur le problème, il se révèle plus complexe, on oserait presque dire plus mystérieux, plus riche aussi d’enseignements »73.

En réalité, la définition du mineur en conflit avec la loi74ou mineur délinquant, se

rapproche de celle plus générale de l’enfant inadapté75ou irrégulier que M.M Dechaume

Girard et Gallavardin76définissent comme celui : « qui du fait des tares physiques, mentales

ou sociales, ne se présente pas dans des conditions régulières d’adaptation et exige des

71Blatier (C.), « délinquance des mineurs, l’enfant, le psychologue et le droit», Op.cit., P. 9.

72La Loi du 24 mai de 1951, est venue pour modifier l'Ordonnance du 2 février 1945 sur l'enfance délinquante, et pour abroger la Loi du 5 août 1850 qui admettait le placement des mineurs condamnés dans les colonies pénitentiaires et correctionnelles devenues maisons d'éducation surveillée en 1927.

73Michard (H.), «Que fait la société ? », l’esprit, juillet, 1950.

74Un mineur est en conflit avec la loi lorsqu’il a commis ou a été accusé d’avoir commis une infraction. Un enfant peut être également en conflit avec la loi lorsqu’il est pris en charge par le système de justice pour mineurs pour être considéré comme en danger en raison de son comportement ou de l’environnement dans lequel il vit. 75 Lagache en 1946 avait fourni une définition autour de la notion d’enfant inadapté. De même Heuyer et Lafon avait précisé la notion d’une manière plus claire en 1950 et 1952. Ils présentent les catégories d’inadaptés déficients et handicapés physiques (malades chroniques, handicapés sensoriels, moteurs) inadaptés mentaux (déficients intellectuels caractériels et délinquants, malades mentaux, épileptiques). D’autres catégories sont considérées comme des inadaptés scolaires et sociaux.

mesures particulières, thérapeutiques, éducatives, ou de placement pour que soit assurée son intégration correcte dans la collectivité »77.

Le mineur délinquant, n'est pas nécessairement coupable des actes ou des infractions qu’il a perpétrés, il peut être victime de sa famille, de son âge, de son milieu, de son immaturité et de beaucoup d’autres facteurs78. Son acte a donc une signification et

certainement une portée qu'il faut découvrir. C’est la raison pour laquelle la criminalité des mineurs s’explique par différentes théories.

La théorie criminalistique79met en exergue les failles des politiques criminelles80, surtout

celles des sanctions pénales. La théorie économiste 81signale la misère et la pauvreté. La

théorie culturaliste82évoque une déficience dans le système des valeurs socio-morales qui doit

en principe montrer aux personnes leur ligne de comportement.

77Cario (R.), « L’éducation surveillée et le reclassement des mineurs délinquants » In population, 9 ème année numéro 4, 1954, Persée, P. 637.

78Trepanier (J.) et Tulkens (F.), « Délinquance et protection de la jeunesse », De Boek, université de Montréal, 1995.

79 La théorie criminalistique réunit l’ensemble des procédés résultant de l’application de données scientifiques, de l’établissement de la preuve des infractions, et de l’identité de l’auteur. Ainsi cette théorie apparaît comme une méthode indispensable pour le chercheur dans l’établissement de la preuve alors que la procédure pénale va s’intéresser seulement aux règles qui régissent l’admission de la preuve. La criminalistique s’intéresse à l’application de ces procédés. Cette discipline a été créé par Hans Gross, grand criminaliste du 19 ème siècle. Ce dernier a créé les archives d’anthropologie criminelle et de criminalistique.

80Le philosophe allemand Ludwing Feuerbach formulait la règle suivante : « Pour que le mal dont on est menacé à cause du délit devienne un motif déterminant de la conduite, il faut qu’il soit supérieur au plaisir que l’on espère se procurer par l’acte criminel». A l’encontre de ces comportements délinquants, une politique criminelle tente de proposer des réponses étatiques ou sociétales. Feuerbach affirmera ainsi : « la politique criminelle c’est la sagesse de l’Etat légiférant ». Cependant, des penseurs comme Platon, Cicéron, et Montesquieu s’exprimaient déjà en politico -criminalistes lorsqu’ils situaient dans la pensée politique et le contexte sociologique de leur temps l’origine, la finalité et l’esprit d’application des lois pénales.

81Une théorie économique est une théorie scientifique analysée selon deux objectifs : -Etudier la réalité économique (aspect dit positif ou descriptif);

-Analyser les propositions de ces règles pour favoriser un meilleur rendement de l'économie (aspect dit normatif, de propositions politiques).

82La personnalité sociale est une structuration des liens entre les rôles sociaux que chaque personne a appris tout au long du procédé de socialisation. La socialisation est donc une voie dans laquelle la personne incorpore peu à peu les traits spécifiques de la culture de son groupe d’origine qui définit son appartenance sociale. L’enfant assimile très top des modèles de comportement qui exercent des influences sur ses conduites tout au long de sa vie. Autrement dit, l’approche culturaliste, considère la culture comme extérieure à l’individu et elle doit être progressivement intériorisée durant sa vie, jusqu’à devenir partie inhérente à sa personnalité durant l’âge adulte.

La spécificité de la délinquance des mineurs correspond à des personnes qui sont en cours de formation et de constitution et qui n'ont pas toujours une vision claire de la gravité de leurs agissements et de leurs conséquences.

En effet, la période de l’adolescence et de la jeunesse peut être définie comme une période d´adaptation et de découverte de soi-même, qui devrait amener à la prise de décisions et à l’affirmation de l’être.

En ce sens, le phénomène de la délinquance des mineurs peut être étudié sous plusieurs aspects qui s’entremêlent pour montrer la spécificité de ce phénomène.

En effet, la délinquance des mineurs, analysée sous plusieurs visions et conceptions, se révèle comme dénonciatrice d’un manque de socialisation ressentie dans la société.

Le premier titre de cette étude délimite les contours de la délinquance des mineurs selon différents paradigmes, en affirmant la spécificité de son caractère lié à des considérations criminologiques, sociologiques et juridiques, disciplines inévitables à traiter dans un sujet si sensible.

En effet, pour que l'analyse du phénomène de la délinquance des mineurs puisse être objective et générale, il faut impérativement s’intéresser à l'effet des régulateurs de la délinquance, car s'il y a tout un ensemble de facteurs qui conduisent à l'expansion et à l'évolution de la délinquance, il y a aussi des déterminants qui la contiennent, et la laissent à un niveau plus au moins admissible et empêchent son expansion.

Dans ce titre nous analyserons la construction d’une théorie explicative de la délinquance des mineurs (Chapitre 1) puis le rôle de l’autorité de l’école et de la responsabilité des parents afin de cerner de manière plus claire les contours de cette délinquance (Chapitre

2).

On peut donc affirmer que la théorie culturaliste donne de l’importance aux vécus de l’enfance et les disciplines basiques inculquées par la culture du groupe d’origine.

Chapitre 1 Vers une théorie explicative de la délinquance des

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