• Aucun résultat trouvé

verre et matrice minérale se justifie par les points suivants :

⇒ L’échelle nanoscopique correspond à l’étude des liaisons atomiques et des migrations moléculaires. Le transfert de charge dépend fortement de la liaison fibre/matrice. La cohésion de liaison est déterminée par la nature chimico-physique de l’interphase.

⇒ A l’échelle microscopique, l’analyse porte sur les interactions entre les filaments au sein d’un fil et sur les interactions filament/matrice. Des interactions de multiples natures sont observables et la modélisation de ces phénomènes est indispensable à une bonne compréhension des mécanismes dirigeant le comportement du matériau.

⇒ A l’échelle mésoscopique, la structuration du matériau souligne l’im-portance de paramètres tel que l’arrangement des fibres, le taux de renfort, la longueur et orientation des fibres ou encore la géométrie des fils et du renfort. Le comportement mécanique est modélisé au travers de lois non linéaires.

⇒ A l’échelle macroscopique (de la structure), peu d’études portent sur l’analyse d’éléments de structure porteurs en composite à matrice mi-nérale. Néanmoins, ce marché est en pleine expansion et quelques ap-plications structurales ont été réalisées et étudiées. L’utilisation de ces matériaux de faible épaisseur est susceptible de modifier significative-ment la réponse en déformation d’élésignificative-ments de structures simples (loca-lisation de zones d’endommagement dues à la fissuration au voisinage des appuis, sensibilité de la déformation de la structure vis-à-vis des faibles rigidités de cisaillement).

2.2 Approche nanoscopique

2.2.1 Définition et structure de la liaison nanoscopique

L’interface représente la frontière d’épaisseur nulle entre deux phases qui ne présente pas d’évolution des propriétés physico-chimiques. La notion d’in-terface met en avant le fait de passer «brutalement» d’une phase à une autre. Cette vision classique fait actuellement place au concept d’interphase dans la mesure où une zone différente en structure et en composition est constatée au voisinage immédiat de la jonction renfort/matrice. L’interphase est une

zone de transition d’épaisseur non nulle où les propriétés physico-chimique et mécanique, issues de processus complexes, sont différentes de celles du ren-fort en masse et s’étendent jusqu’à celles de la matrice en masse (Bergeret & Krawcak, 2006).

Dans les années 1960, Bikerman (Bikerman, 1961) émit l’hypothèse de la formation d’une interphase caractérisée par une cohésion différente de celles des deux phases en présence (matrice et fibre). La complexité de cette in-terphase peut être illustrée à l’aide du modèle schématique 2.2. Le début et la fin de l’interphase sont caractérisés par une variation des propriétés par rapport au cœur de la fibre et de la matrice.

Fig. 2.2 – Modèle schématique d’une interphase selon Bikerman (Bikerman, 1961)

L’interphase se forme au cours de l’élaboration du composite. La zone interphasiale se caractérise par des propriétés différentes de celles de l’adhé-rant (le substrat) et de l’adhéré sur les plans physique, chimique et méca-nique. Cette différence peut provenir de processus physico-chimiques mul-tiples, comme par exemple la modification de la stœchiométrie par absorp-tion préférentielle, la nucléaabsorp-tion à la surface des fibres, l’orientaabsorp-tion locale des chaînes ou le traitement initial des fibres (ajout d’une ou plusieurs phases supplémentaires) (Bouix et al. , 2001) (Kaflou, 2006) (Triconnet, 2007). L’in-terphase est le siège de réactions ou d’interactions spécifiques au couple sub-strat/adhéré.

2.2. APPROCHE NANOSCOPIQUE 27

L’épaisseur de l’interphase est un paramètre variable, dépendant de la structure de la matrice, de la fibre et des couches de protection de la fibre. Les propriétés interphasiales sont également régies par l’épaisseur de ces couches (Hinoki et al. , 1998). L’épaisseur de l’interphase peut varier de quelques na-nomètres à une dizaine de micromètres, voire plus dans certains cas de com-posites thermodurcissables. Buryan et Novikov (Buryan & Novikov, 2002) proposent différents modèles afin de déterminer l’épaisseur d’interphases de différentes natures, homogènes et non-homogènes.

L’importance de l’interphase se justifie pleinement au regard du rôle cru-cial de cette zone. Le fait que l’interphase influe sur l’intégrité structurelle des composites est communément admis (Degallaix & Ilschnier, 2007). Outre la fonction de protecteur vis-à-vis du vieillissement des matériaux, l’inter-phase contribue essentiellement à la transmission des efforts mécaniques ainsi qu’à l’amorçage et à la propagation des fissures. L’efficacité du transfert de charge est une condition sine qua non à l’obtention de composites à hautes performances. Une forte liaison interfaciale entraine de hautes rigidités et résistances mais contribue également à une faible ténacité, une certaine fra-gilité et une sensibilité aux chocs (figure 2.3) (Ibrahim, 1997). Les fissures se propageront perpendiculairement à l’axe des fibres jusqu’à la ruine du composite. La mise en place de liaisons faibles (interphase souple) peut en revanche permettre l’accroissement de l’absorption d’énergie. La fissure sera déviée vers l’interphase et l’impact sera limité à quelques fibres uniquement.

Fig. 2.3 – Courbes de transfert de contraintes pour une interphase de plus ou moins forte cohésion (Ibrahim, 1997)

ma-trice polymère afin de déterminer la nature physico-chimique de l’interphase. Cette dernière va diriger le transfert de charge entre la fibre et la matrice en fonction de la qualité d’adhésion. Nous présentons ci-dessous les plus impor-tantes.

2.2.2 Caractérisation de l’interface/interphase

Connaissances physico-chimiques de la composition d’une inter-phase

Aujourd’hui, il n’existe pas de méthode normalisée pour quantifier la qua-lité d’une interphase. Néanmoins, différentes techniques ont été développées et sont utilisées à cet effet. Les premières méthodes consistent à essayer de « voir » l’interphase au moyen d’analyses microscopiques suffisamment fines. De plus, une analyse physico-chimique de l’interphase peut être réalisée au moyen d’analyses directes et indirectes.

Analyses microscopiques

Il est possible de visualiser la zone d’interphase par microscopie élec-tronique par transmission à « balayage » (STEM) à l’échelle nanoscopique (Vicens et al. , 2003). Cette technique est utilisée par Jiang (Jiang et al. , 1999) afin d’observer la qualité de cohésion à l’interface fibre/matrice (voir figure 2.4).

Fig. 2.4 – Observation par STEM d’interphases à faible cohésion et forte cohésion (Jiang et al. , 1999)

Des techniques de SEM (Scanning Electron Microscope) peuvent égale-ment être utilisées pour connaître par exemple la présence de défaut à la surface d’une fibre (Orlowsky et al. , 2005).

2.2. APPROCHE NANOSCOPIQUE 29

Commentaire : La compréhension du rôle exact de l’interphase dans les mécanismes d’endommagement demeure encore sommaire, même si des ef-forts de rationalisation sont réalisés. Différents auteurs ont donc recours à des techniques d’analyses physico-chimiques afin de caractériser finement l’inter-phase à l’échelle nano.

Analyses physico-chimiques directes

La plupart des techniques d’analyses physico-chimiques directes sont des techniques d’analyses spectroscopiques de surface qui permettent une ana-lyse élémentaire et/ou une étude des liaisons chimiques. La spectroscopie de photoélectrons se base sur la mesure de l’énergie cinétique des électrons sous l’impact d’un faisceau de photons. Vicens (Vicens et al. , 2003) a recours à un couplage entre HRTEM et EDX (Energy Dispersive X-ray spectroscopy, spec-troscopie de photoélectrons) afin de déterminer le pourcentage et la nature d’atomes présents dans les zones étudiées. La spectroscopie de photoélectrons dénommée ESCA (Electrons Spectroscopy for Chemical Analysis), permet la détection de tous les éléments sur une profondeur de 5 à 10 nm, à l’exception de l’hélium et de l’hydrogène. La technique EELS (Electron Energie Loss Spectroscopy) peut également être utilisée afin de connaître le pourcentage relatif d’atomes (Jiang et al. , 1999) (Jacques et al. , 1996). Cette technique couplée avec des micrographies de type STEM permet de connaître les liai-sons qui se forment au niveau de l’interphase ainsi que les rudiments des processus complexes intervenant durant sa formation. La spectrométrie de masse d’ions secondaires (SIMS) permet d’apporter des informations sur la nature du traitement de surface à travers des profils de concentration en épaisseur, mais aussi sur l’homogénéité de répartition de l’ensimage (Zinck, 1999). La spectroscopie des électrons Auger ou AES (Auger Electron Spectro-scopy) permet également de dresser un profil de concentration atomique dans la zone interphasiale (Bertrand et al. , 2001). La mesure de l’énergie de sur-face est basée sur divers modèles d’adhésion comme des modèles mécaniques, d’attraction électrostatique, de diffusion, d’absorption thermodynamique et de formation de liaisons chimiques (Dhakate & Bahl, 2003).

Analyses physico–chimiques indirectes

Les analyses physico-chimiques indirectes de l’interphase sont principale-ment des techniques d’analyses thermiques, micro-thermoanalyses, spectro-scopiques et chromatographiques. Ces analyses se basent sur la densité de réticulation, sur la température de transition vitreuse ou encore sur proprié-tés viscoélastiques dans le but : de connaître la mobilité des chaînes

molécu-laires, et d’apprécier leur organisation, dans le cas de matrice polymère. La variation du coefficient thermique (évaluée à partir d’analyses thermoméca-niques TMA) peut également être considérée comme une grandeur physique permettant de caractériser l’interphase, en particulier dans les composites à fibres unidirectionnelles (Tangolu et al. , 2001). Les modèles d’analyses spec-troscopiques vibrationnelles, comme les spectroscopies infrarouge ou Raman sont fréquemment appliqués à l’étude de l’interphase fibre/matrice (Bouchet, 2000). Avec ces techniques, il est possible de déterminer le mécanisme sus-ceptible de régir la formation de l’interphase, qu’il s’agisse d’un mécanisme thermodynamique ou d’un mécanisme contrôlé par un gradient de diffusion (Bergeret & Krawcak, 2006). L’identification des réactions interphasiales est possible par spectrométrie RMN (Résonance Magnétique Nucléaire) (Tan-golu et al. , 2001). Cette technique est limitée par la résolution des spectres qui dépendent directement de la puissance des champs magnétiques utilisés pour exciter les atomes. Enfin, l’analyse chromatographique par perméation de gel (Gel Permeation Chromatography) renseigne sur la distribution des masses moléculaires en poids et en nombres (Tsirlin et al. , 2002). Cette technique se base sur la séparation des molécules selon leur taille.

Commentaire : Ces différentes analyses permettent de caractériser la na-ture physico-chimique de l’interphase, c’est-à-dire la nana-ture et la concen-tration des atomes ainsi que les mouvements de chaines macromoléculaires. Ces techniques d’analyses directes et indirectes demandent l’utilisation d’un matériel spécifique et l’intervention d’un personnel compétent. Les dispositifs expérimentaux présents au laboratoire ne nous permettent pas ce type d’ana-lyse. Néanmoins, ces différentes analyses, applicables pour les composites à matrice polymère, peuvent théoriquement être étendues aux composites à matrice minérale (Degallaix & Ilschnier, 2007).