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I. Bibliographie

I.2. Vieillissement dynamique et effet Portevin-le Chatelier

I.2.2. Effet Portevin-Le Chatelier

I.2.2.3. Approche microscopique

Au cours des dernières décennies, différents modèles ont été proposés dans objectif de rendre compte des observations expérimentales relatives à l’occurrence de l’effet PLC dans de nombreux alliages et d’associer aux instabilités d’écoulement des mécanismes à l’échelle microscopique.

I.2.2.3.1. Modèle de glissement visqueux

Le premier modèle en date proposant une interprétation microscopique du vieillissement dynamique et son implication directe dans l’occurrence de l’effet PLC est celui proposé Cottrell 1953 [Cottrell 1953] . Il est basé sur l’interaction dynamique entre dislocations mobiles se déplaçant de façon visqueuse, continue, et se chargeant progressivement en solutés diffusant au cours de la déformation plastique. Cottrell envisageait une alternance entre mobilité des dislocations et ancrage par les solutés diffusant vers les dislocations mobiles jusqu’à les épingler avant qu’elles ne s’en libèrent à nouveau. (alternance ancrage / désancrage des dislocations mobiles) tel qu’illustré sur la Figure I-24. Modèle initialement proposé pour les solutions solides d’insertion, il a su s’adapter à la description du comportement de certaines solutions solides de

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substitution par une approche lacunaire de l’augmentation des coefficients de diffusion des substitutionnels sous l’effet de la sursaturation en lacunes d’écrouissage. Néanmoins, cette approche requiert des sursaturations en lacunes d’écrouissage considérables pour rendre compatible la cinétique de diffusion de certains substitutionnels avec l’apparition d’une interaction dynamique avec les dislocations mobiles.

Figure I-24 Schéma du mécanisme à l’origine de l’effet PLC selon Cottrell [Cottrell 1953], diffusion des atomes solutés vers la dislocation en mouvement (a), ancrage de la dislocation (b) et libération soudaine de

la dislocation de son atmosphère de solutés (c) sous l’effet d’une contrainte appliquée croissante I.2.2.3.2. Modèles avec temps d’arrêt

Par la suite différents modèles expliquant l’origine d’un écoulement plastique saccadé ont été proposés. Penning en 1972 [Penning 1972] propose un traitement mathématique qui arrive à la conclusion que l’effet PLC trouve nécessairement son origine dans l’existence d’une sensibilité négative de la contrainte d’écoulement à la vitesse de déformation. McCormick [McCormick 1972] développe le concept proposé initialement par Sleeswyk [Sleeswyk 1958] d’un mouvement discontinu des dislocations mobiles entre obstacles de la forêt en l’appliquant à l’effet PLC. L’ancrage des dislocations par les solutés ne serait alors pas le résultat d’un phénomène de diffusion dans le volume vers les dislocations en mouvement, mais bien un processus de diffusion depuis le cœur des dislocations de forêt vers les dislocations mobiles lorsqu’arrêtées sur ces obstacles tel qu’illustré par la Figure I-16. Van den Beukel [Van den Beukel 1975] rendra cohérentes ces deux approches en proposant un modèle lacunaire dans lequel le temps d’arrêt des dislocations mobiles sur les obstacles modifie les concentrations de solutés vues par ces dernières. Dans cette approche, la sensibilité à la vitesse se décompose en deux termes l’un ne faisant pas intervenir les phénomènes de DSA et l’autre représentant la contribution de ce dernier : ça n’est alors que lorsque la contribution du DSA est prépondérante que S devient négative et que l’on peut observer l’effet PLC. Mulford et Kocks [Mulford 1979] quant à eux développeront un modèle d’écrouissage, dans lequel la diffusion des atomes n’est pas accélérée par la sursaturation en lacunes produites par la déformation, mais c’est grâce à la présence de courts-circuits de diffusion à la jonction entre dislocations mobiles et arbres de la forêt. Selon ces auteurs, on doit considérer la présence de deux origines en compétition modifiant la sensibilité à la vitesse : une contribution due à l’écrouissage de l’alliage (durcissement de forêt) et une contribution due au vieillissement dynamique (intersection strengthening). Selon ces auteurs, ce n’est que lorsque la contribution de

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l’écrouissage à la contrainte d’écoulement domine que l’on peut avoir une sensibilité négative et voir apparaître le phénomène de PLC. Ces deux approches se sont révélées complémentaires, et ont fait l’objet d’une publication commune [Van den Beukel 1982]. La Figure I-25 représente schématiquement cette approche du mécanisme à l’origine de l’effet PLC.

(a) (b)

(c) (d)

Figure I-25 Schéma du mécanisme à l’origine de l’effet PLC suivant un modèle avec temps d’arrêt sur les arbres de la forêt : dislocation mobile arrêtée sur dislocation de forêt (a), diffusion des solutés depuis les dislocations de forêt vers la dislocation mobile arrêtée (b), ancrage de la dislocation par les solutés (c), et libération soudaine de la dislocation mobile de son atmosphère de solutés (d) sous l’effet d’une contrainte

croissante. I.2.2.3.3. Modèle KEMC

Le modèle de Kubin et Estrin [Estrin 1986, Kubin 1990] fait intervenir la variation avec la déformation des densités de dislocations mobiles, mais aussi de celles de la forêt. Ils proposent une approche faisant intervenir des équations différentielles couplées rendant compte de l’évolution de ces deux densités au cours de la déformation plastique. Ces dernières étant liées par la relation , qui fait intervenir la grandeur , qui est l’incrément de déformation

produit par un saut simultané de toutes les dislocations ancrées se décrochant d’un obstacle et se déplaçant jusqu’à l’obstacle suivant, le vecteur de Burger, la densité de dislocations mobiles et la densité de dislocations de forêt. Le modèle proposé par Mc Cormick [McCormick 1988, Zhang 2001] permet de rendre compte de la modification de la loi de comportement de l’alliage sous l’effet du niveau de saturation en soluté des dislocations lors de leur temps d’attente au niveau d’obstacles dans leur plan de glissement.

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Le modèle KEMC est inspiré des modèles proposés par Kubin et Estrin et de la loi de comportement proposée par McCormick. Il s’agit d’un modèle permettant d’intégrer la contribution du DSA sur la contrainte d’écoulement et qui peut être intégré aisément dans du code élément fini. Ce modèle a été très utilisé et s’avère capable de simuler les effets du vieillissement dynamique, en particulier les effets de localisation de la déformation de type bandes de PLC [Belotteau 2009, Graff 2004, Graff 2005, Wang 2011]

I.2.2.3.4. Traînage et friction

Une approche qu’il convient de garder à l’esprit dans le cadre des travaux présentés dans ce manuscrit est l’interaction qui existe entre phénomènes de traînage des solutés pour des températures élevées et la friction de réseau qui s’exerce sur les dislocations pour les températures plus basses. Une représentation schématique a été proposée par Strudel [Strudel 1979] et qui permet de comprendre intuitivement la possibilité qui est donnée aux dislocations dans certaines conditions de sollicitations thermomécaniques d’accéder à deux gammes de vitesses distinctes à l’extérieur d’une gamme de vitesses de déplacement « interdite ». Le schéma de la Figure I-26 synthétise l’approche proposée.

Le domaine des faibles températures (fortes vitesses de déformation) est caractérisé par le fait que les dislocations se déplacent trop rapidement pour être en mesure de transporter des solutés. Les solutés présents dans le réseau le distordent mais restent immobiles, ne contribuant ainsi au durcissement de l’alliage que par effet de solution solide. Ce domaine est qualifié de mode friction. Le domaine des hautes températures (faibles vitesses de déformation) correspond au mouvement de dislocations coins traînant des atmosphères de solutés, qualifié de mode traînage. C’est dans le domaine où il y a recouvrement des deux modes de déformation plastique que peuvent intervenir les instabilités de l’écoulement, effet PLC, et qui résultent de la possibilité qu’ont les dislocations de se mouvoir selon deux régimes différents qui leurs sont accessibles : soit en mode traînage, soit en mode friction. L’effet PLC résulte du soudain désancrage de dislocations de leur atmosphère en des zones de concentration de contraintes et qui, de proche en proche, génèrent des phénomènes d’avalanches de dislocations.

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Figure I-26 Représentation schématique des différents modes de déplacement accessibles aux dislocations mobiles (trainage et friction) et du domaine de désancrage dynamique, d’après [Strudel 1979]

Ainsi, dans le domaine ou l’effet PLC se manifeste, les conditions de sollicitations thermomécaniques sont telles que la vitesse des dislocations devrait s’établir dans un domaine où elle ne peut pas être stable. La vitesse va alors se décomposer en deux modes, un mode lent (dislocation contenues dans la majeure partie de l’éprouvette) et un mode rapide (dislocations contenues dans la bande).

Dans ce manuscrit, on utilisera pour qualifier le domaine de désancrage dynamique le terme « domaine PLC », et pour désigner le domaine de traînage des solutés le terme « domaine DSA ». L’effet PLC apparaît dans un grand nombre d’alliages. Nous allons à présent nous intéresser en particulier à son occurrence dans les alliages à base de nickel.