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Une approche de l’activité de conception et de construction : le modèle du contexte de coopération

collective liée au chantier

3.1. Le secteur AIC : un initiateur de modèles

3.1.2. Une approche de l’activité de conception et de construction : le modèle du contexte de coopération

Le modèle du contexte de coopération développé au CRAI est une seconde approche de la modélisation appliquée au secteur de la construction. Basé sur des entités que l’on retrouve régulièrement dans d’autres applications, le modèle se focalise sur la description de l’activité de coopération. Dans un premier temps, les travaux se sont concentrés sur son application lors de la phase de conception de bâtiment (Hanser 2003; Bouattour 2005). Par la suite, les études menées sur la phase de réalisation ont permis d’étendre le modèle et de se concentrer sur les aspects spécifiques à l’activité de chantier.

3.1.2.1. Le développement du contexte de coopération, synthèse des travaux antérieurs

En s’imprégnant des principes de l’IDM (Ingénierie Dirigée par les Modèles) et du MOF (MetaObject Facility), les travaux de modélisation de l’activité coopérative s’orientent vers une

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PAS signifie "spécification publiquement disponible", ce qui est réservé à des spécifications élaborées à l'extérieur de l'ISO et ayant fait l'objet d'un vote positif de la majorité des pays membres du comité, Source BuildingSmart.

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Illustration issue de Lebègue, E. (2005). "Les IFC et les applications concrètes de la maquette numérique de construction". Notes de cours, CSTB.

La modélisation de la connaissance du domaine 126 architecture multi-niveaux telle que le préconise l’OMG89. Cette approche « par méta-modèle » offre les avantages suivants (Hanser 2003) :

- L’adoption d’une architecture multi-niveaux permet de garantir l’interopérabilité entre les divers outils exploités par les intervenants sur le projet de construction, car elle permet d’ouvrir la porte à la définition de passerelles avec d’autres modèles plus complets (ex. orientés processus, organisation, données du bâtiment,…).

- Cette structuration permet en outre de rendre plus lisible le modèle en différenciant les concepts génériques (Niveau M2), des concepts spécifiques au domaine du bâtiment (Niveau M1).

- Elle permet également de faciliter les extensions des modèles qui seraient nécessaires à certains utilisateurs.

Figure 54. L'évolution du contexte de coopération (2003-2006)

Le méta-modèle originel (proposé par (Hanser 2003) et (Halin 2004a)) se base sur la théorie de l’activité afin de définir un méta-modèle le plus généraliste possible et détaché de tout domaine d’application. Il s’organise autour des trois entités principales suivantes : « Document », « Acteur », « Activité » et de leurs relations (voir Figure 55) :

- L’entité « Document » évoque les documents métier. Il s’agit des composants des délivrables dont le contrat délimite les contours.

- L’entité « Acteur » fait référence à une personne (par ex. un architecte, un ingénieur,…) ou un groupe (par ex. agence d’architecture, bureau d’études,…) qui est doté d’une autonomie décisionnelle et qui trouve sa place au sein de l’organisation.

- L’entité « Activité » présente plusieurs niveaux de granularité (Projet, Phase, Tâche). Ces activités peuvent avoir des objectifs différents tels que la coordination, la production ou encore la synthèse.

- Les relations identifient la nature du lien existant entre deux entités du méta-modèle.

o La relation « Acteur-Activité » est centrale dans la coopération car elle correspond à la notion de rôle au sein de l’activité (ex. un acteur est responsable d’une activité). Le méta-modèle distingue deux types de rôle : le rôle

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OMG = Object Management Group. L’OMG est un consortium international d’industries informatiques à but non lucratif et à adhésion libre. L’OMG développe des standards d’intégration d’entreprise pour une large gamme de technologies. Le standard de modélisation développé par l’OMG permet de renforcer la conception visuelle, l’exécution et la maintenance des outils informatiques. Source : http://www.omg.org/

La modélisation de la connaissance du domaine 127 organisationnel, qui décrit le cadre contractuel d’une coopération, et le rôle opérationnel, qui décrit l’implication d’un acteur dans une activité en fonction de ses responsabilités et de ses compétences.

o La relation « Acteur-Document » correspond aux relations identifiées dans l’édition d’un document (ex. Produit, Consulte,…).

o La relation « Activité-Document » correspond à la production d’information (ex. Utilise, Génère,…).

o La relation « Activité-Activité » est liée à l’ordonnancement (ex. Suit, Dépend,…).

o La relation « Acteur-Acteur » est fonction de la configuration organisationnelle et se fonde sur une terminologie proche de la gestion des ressources humaines (ex. Dirige, Collabore,…).

o La relation « Document-Document » est proche de la gestion des versions (ex. Nouvelle version).

Figure 55. Le méta-modèle de coopération originel (2003)

Le second modèle propose une continuité des travaux décrits ci-dessus et suggère « un méta-modèle de coopération permettant la prise en compte des relations existantes entre les éléments d'un projet, tout en s’intéressant plus particulièrement aux informations sémantiques véhiculées par les objets de la conception », (Bouattour 2005), p. 149.

L’entité « Objet » évoquée s’inspire du modèle des IFC et plus particulièrement de la classe « IfcObject » qui inclut les « ouvrages » physiquement réels (par ex. un mur, une poutre,…) et les « artéfacts » physiquement existants (par ex. un espace, une zone, un niveau). Comme nous l’avons vu, le modèle des IFC (voir section 3.1.1) est un modèle centré sur le produit. Or, l’approche menée sur le méta-modèle de coopération vise à représenter plus globalement le contexte de l’activité coopérative par les entités présentes et les relations qu’elles entretiennent (Halin 2004a). Aussi, l’intégration des deux points de vue mène à la proposition de M. Bouattour qui suggère l’extension du méta-modèle de coopération par l’intégration de l’entité « Objet » (voir Figure 56) :

La modélisation de la connaissance du domaine 128 - L’entité « Objet » représente tout ce qui est concevable dans un processus. Cette entité

peut être instanciée en :

o Entité « Espace » qui représente une étendue plus ou moins délimitée. Elle supporte le caractère fonctionnel de l’ouvrage bâti. Elle est associée aux ouvrages construits qui délimitent les espaces (ex. quatre murs délimitent une pièce de vie).

o Entité « Ouvrage » résulte du travail d’un acteur et constitue toute brique de base du bâtiment.

- Les nouvelles relations qui s’inscrivent alors dans le méta-modèle de coopération sont les suivantes :

o La relation « Objet-Objet» est relative à la conception des objets, à leur agencement dans l’espace et à leur perfectionnement dans le temps.

o La relation « Objet-Acteur » fait état des interventions des acteurs sur les ouvrages. Cette relation permet de distinguer l’apport de chacun des intervenants.

o La relation « Objet-Document » caractérise les spécifications et les documents de référence qui contiennent une partie de la sémantique de l’ouvrage.

o La relation « Objet-Activité » détermine les tâches nécessaires à la conception de l’objet et caractérise plus globalement l’évolution de l’objet au cours du cycle de vie du bâtiment.

Figure 56. Le méta-modèle de coopération et l'intégration du concept d'ouvrage (2005)

Les derniers travaux réalisés sur ce méta-modèle ont été menés par S. Kubicki (Kubicki 2006a). L’approche se veut plus généraliste encore car jusqu’ici, les études présentées visaient exclusivement la représentation du contexte de coopération en phase de conception d’un bâtiment, désormais, il s’agit de traiter également de la phase de réalisation.

La modélisation de la connaissance du domaine 129 Figure 57. Le méta-modèle et l'introduction des concepts d'outil et d'artefact (2006)

C’est pourquoi quelques changements ont été apportés à la version préalablement présentée (voir Figure 57) :

- L’introduction du concept d’ « artefact ». Au vu de la proximité des concepts de « Document » et d’ «Objet», l’évolution consiste à les regrouper sous une catégorie supérieure dénommée « Artefact ». La théorie de l’activité décrit la notion d’artefact comme le médiateur entre le sujet qui réalise l’activité et l’objet de l’activité (au sens d’objectif) (voir section 2.3.5). Aussi, dans cette version du méta-modèle de coopération, ce concept permet d’exprimer les objets (conçus ou réalisés) et les documents (réalisés ou exploités).

- L’introduction du concept d’ « Outil ». Ce concept se focalise sur l’outil logiciel dont la particularité est double : il médiatise la perception du contexte de l’activité collective par l’acteur. En outre, il permet à l’acteur d’agir sur l’objet de l’activité.

- Les nouvelles relations :

o La relation « Artefact-Acteur » exprime l’intervention d’un acteur sur un artefact.

o La relation « Artefact-Activité » détermine les tâches nécessaires à la réalisation de l’artefact.

o La relation « Artefact-Artefact » est relative à la conception et la réalisation des artefacts. Elle détermine l’enchaînement des artefacts et leur évolution au cours du temps.

o La relation « Outil-Activité » exprime l’usage d’un outil en vue de la réalisation d’une activité.

o La relation « Outil-Artefact » exprime l’exploitation de l’outil pour mener une action sur les artefacts, ou encore pour percevoir leur état.

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o La relation « Outil-Acteur » est relative à la personnalisation de l’outil par l’utilisateur et décrit également le type d’outil utilisé par des catégories d’acteurs données.

o La relation « Outil-Outil » évoque l’interopérabilité et l’intégration des outils. Il s’agit également du point de départ d’une réflexion que nous menons actuellement sur les services métiers sur lesquels reposent les outils informatiques.

Nous exploiterons cette dernière version dans la suite de notre travail afin de supporter nos propositions. Nous retiendrons que ce méta-modèle a pour objectif de mettre en relation quatre entités essentielles : l’activité, l’acteur, l’artefact et l’outil. Nous ne visons pas l’exhaustivité de ce méta-modèle pour représenter l’ensemble de la connaissance du contexte de coopération. Toutefois, nous estimons qu’il peut garantir l’interopérabilité entre divers outils en jouant le rôle de pilier central capable d’assurer la mise en relation de différents modèles.

3.1.2.2. L’infrastructure de modèles

Le méta-modèle (M2) et le modèle conforme à ce méta-modèle (M1) permettent de décrire la connaissance liée à l’activité coopérative dans le cadre d’une opération de construction, les travaux présentés ci-dessus permettant de décrire, tant les activités de conception, que celles de réalisation de l’ouvrage bâti. Ces travaux ont également conduit à la définition d’une infrastructure globale garantissant l’intégration de modèles pour la construction de vues du contexte de visualisation. Par vue, nous entendons les « vues métier » manipulées de manière quotidienne par les professionnels afin d’effectuer leur travail (ex. Vue planning). Aussi, chaque vue nécessite un modèle (Modèle des concepts de la vue) afin de représenter son contenu sémantique. Il s’agit du seul aspect sur lequel se focalise cette approche. Les dimensions techniques, les modèles de navigation, ou encore les modèles de tâches ne font pas partie du champ de réflexion. La Figure 58 illustre l’infrastructure pour l’exploitation des modèles. Chaque vue y est représentée par trois niveaux d’abstractions tout comme c’était le cas pour le méta-modèle de coopération. Le modèle de la vue représente les concepts manipulés par la vue et le méta-modèle de la vue fait référence à un langage de description. Si nous considérons l’exemple du planning. Le modèle de la vue représente des « tâches », des « dépendances » des « ressources ». Le méta-modèle de la vue peut être le langage de modélisation UML. La pyramide se construit autour du méta-modèle de coopération qui représente la connaissance « métier » du domaine de la construction. Autour, s’organisent les vues du contexte de coopération qui sont implémentées dans des outils. Chaque vue nécessite une transformation de modèles afin d’extraire les entités nécessaires à la composition de la vue du modèle du contexte de coopération. Au niveau le plus de bas de la pyramide, la vue nécessite une sélection de données à visualiser.

Le développement d’une telle infrastructure de modèles offre les perspectives suivantes : elle permet d’ajouter de nouvelles vues en fournissant le modèle des concepts de la vue et les transformations nécessaires. Elle permet également d’assurer la mise en relation des concepts composant les différentes vues.

La modélisation de la connaissance du domaine 131 Les propositions que nous formulerons dans la suite de ce travail reposeront sur cette infrastructure. Nous retiendrons que le modèle du contexte de coopération ainsi obtenu renferme la connaissance relative à l’activité de construction, et en cela, il contient l’ensemble de l’information relative à la confiance dans la bonne progression de l’activité collective.

Figure 58. Une infrastructure pour l'exploitation des modèles90

3.2. L’analyse des outils d’assistance à la coordination du chantier