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Chapitre 1. De la géographie à l’économie : des contributions diverses pour

1.1. Une approche géographique des risques

En géographie, des revues exhaustives relatives à la définition des concepts liés au risque

sont consultables dans Blaikie et al. (1994), Dauphiné (2001), Veyret (2004), Hufschmidt et al. (2005),

Pigeon (2005), ou Viscusi (2006). Ces études permettent de mesurer l’évolution de ce pan de la

discipline et montrent de quelle façon des aspects connexes (le caractère législatif, spatial ou social)

des risques y ont été intégrés. Notre réflexion est menée dans un cadre disciplinaire et terminologique

précis. Cette mise au point s’appuie sur notre propre positionnement basé sur : (i) des concepts

existants et directement applicables à notre objet d’étude (i.e. les coulées boueuses) ; (ii) la prise en

compte des impératifs spatiaux et temporels, qu’ils soient considérés de façon indépendante ou

associée.

1.1.1. Emergence des concepts et notions associés au risque en géographie

a. Risque, danger, catastrophe

Qu’elles soient disponibles dans les dictionnaires du langage courant ou les dictionnaires

disciplinaires, les définitions du « risque » reflètent toute la complexité sous-jacente à ce concept.

Le Petit Larousse (Editions 2008) le détermine tel « qu’un danger, un inconvénient plus ou

moins probable auquel on est exposé ». Dans le Petit Robert (Editions 2008), le risque est « un

danger éventuel plus ou moins prévisible ». Dans ces définitions d’un terme utilisé couramment, la

notion de probabilité liée à un événement prédomine. Dans les deux cas, le risque est associé au

danger, entraînant une certaine ambigüité entre ces deux termes. Contrairement au risque qui est

fortement lié à une probabilité d’occurrence, le danger est toute source potentielle de dommage, de

préjudice ou d'effet nocif à l'égard d'une chose ou d'une personne.

Dans le domaine des risques, ici technologiques, la directive dite Seveso 2

3

définit le danger

comme la propriété intrinsèque d'une substance ou d'une situation physique à provoquer des

dommages pour la santé humaine et/ou l'environnement et le risque comme la probabilité qu'un effet

spécifique se produise dans une période donnée ou dans des circonstances déterminées.

Les origines de la démocratisation de la notion de « risque » remontent à l’émergence des

politiques assurancielles, relatives aux augmentations des accidents du travail, lors des grandes

périodes d’expansion industrielles du 19

ème

siècle (Ewald, 1986). Le risque résulte alors d’une activité

humaine et génère des situations potentiellement dangereuses. Mais cette interaction entre les

Hommes, leurs systèmes sociaux et leur environnement (qu'il soit naturel ou non) faisait déjà débat au

18

ème

siècle (Peretti-Watel, 2000; Veyret et Reghezza, 2005). La communauté scientifique

reconnaissait la prépondérance des actions anthropiques sur l’apparition de risques naturels. Elle en

concluait que des actions de prévention devaient être mises en place : la création de zones à risques

et l’application de schémas d’aménagement et de construction différents auraient un impact positif sur

la diminution des risques (Hufschmidt et al., 2005).

La géographie prend en compte ces deux aspects : à savoir les caractéristiques de la source

du risque (l’aléa) et les impacts répertoriés sur le système social dans son ensemble (la vulnérabilité).

Le risque se définit d’ailleurs comme une combinaison entre l’aléa et la vulnérabilité. Nous avons

cherché les différentes combinaisons de ces éléments du risque dans la littérature. L’approche

classique du risque se traduit par l’équation suivante [Eq. 1.1] :

[Eq. 1.1]

où : R = le risque ; A = l’aléa et V = la vulnérabilité

Cette équation retranscrit une approche duale du risque, ce dernier étant facteur ici de deux

éléments à savoir la vulnérabilité et l’aléa. Nous évoquons ici une relation de type « fonction » entre

ces deux éléments : pour certains auteurs, cette équation est un croisement entre l’aléa et la

vulnérabilité (Ledoux, 2006) tandis que d’autres voient cette relation comme un produit (Dauphiné,

2001). Malgré quelques avantages à l’utilisation de cette équation (une simplicité dans la

détermination d’indicateurs cartographiques), la trop grande segmentation entre les deux éléments

rend cette appréhension du risque trop incomplète aux yeux de nombreux géographes (Pigeon, 2005;

Veyret et Reghezza, 2005; Ledoux, 2006).

En effet, ces derniers soulignent l’importance d’une analyse spatio-temporelle, qui doit

nécessairement accompagner la définition du risque. Dans cette optique, D’Ercole (1996) précise une

équation plus complète prenant en considération l’aléa et la vulnérabilité, qui restent les deux

éléments principaux, complétés par leurs évolutionsspatiales et temporelles. Cette équation [Eq.

1.2] illustre la prise en compte globale et intégrée de l’ensemble des éléments constitutifs du risque et

oriente notre propre réflexion autour de la caractérisation des risques.

[Eq. 1.2]

où : R = le risque ; A = l’aléa et V = la vulnérabilité ; s = espace ; t = temps

       

3

Directive 96/82/CE du Conseil du 9 décembre 1996 concernant la maîtrise des dangers liés aux accidents

( )

= AV

R ,

( ) ( )

[ ]

= At s V t s

R , , ,

Avant d’entrer davantage dans le détail de la notion de risque, nous allons rappeler les

travaux majeurs sur les caractéristiques et les évolutions de l’aléa et de la vulnérabilité. Les

conclusions tirées de ces études nous permettrons de positionner notre utilisation de ces termes pour

le risque de manière générale et celui des coulées boueuses plus précisément.

b. L’aléa

Le concept d’aléa a emprunté son utilisation au langage des probabilités. Jusqu’à la fin du

19

ème

siècle, la difficile prévision de l’aléa le rejetait dans la catégorie des sciences occultes répondant

aux forces mystérieuses de la Nature (Dewolf et Bourrié, 2008). Aujourd’hui, bien que des techniques

de prédiction aient été élaborées (Cerdan et al., 2002; Jetten et Favis-Mortlock, 2006; Malet et al.,

2006) il est admis que l’aléa se traduit surtout par une probabilité d’occurrence d’un phénomène et

son intensité (Dauphiné, 2001).

Tout comme la notion de risque, l’aléa trouve de nombreuses définitions en fonction des

disciplines. En Sciences de la Terre, par exemple, Alain Marre, dans Dewolf et Bourrié (2008), définit

l’aléa comme « une manifestation rapide d’un processus naturel qui participe à l’évolution normale de

la surface de la Terre ». Selon cet auteur, les actions de prévention ou de limitation des risques

doivent d’ailleurs être prioritairement menées sur l’intensité de l’aléa. Mais, malgré une bonne

adaptation des types de protection à l’aléa ciblé, les éventails des travaux pouvant être utilisés

demeurent immenses. D’autant plus que, comme nous avons pu le mentionner précédemment, l’aléa

reste un phénomène qui se caractérise aussi par son imprévisibilité, qui est fonction de :

- l’intensité du phénomène. Malgré les efforts techniques mis en place, l’intensité de phénomènes

sociaux (sociopolitiques, par exemple) ou de phénomènes naturels (tels que des orages

localisés), garde un caractère souvent imprédictible à petite échelle. Toutefois, des calculs

statistiques ou des simulations tentent de prévoir les intensités de certains d’entre eux. Dans le

cas de précipitations, des modélisations du fonctionnement du système à petite échelle tentent de

prévoir les intensités d’événements significatifs (de durée de retour de 10 ans, 50 ans ou 100 ans)

en fonction de paramètres environnementaux précis et de lois statistiques basées sur des

données issues d’événements précédents. Ces prévisions se placent généralement dans une

optique de dimensionnement d’ouvrages de protection. Mais ces opérations seraient difficilement

réalisables sans une estimation de l’intensité des aléas concernés ;

- son occurrence. Nul ne peut dire avec certitude le moment où le phénomène va se produire.

Dans certains cas, des régularités temporelles de survenance peuvent être observées. Parfois,

des signes annonciateurs peuvent faire redouter l’arrivée d’un phénomène, sans qu’il soit pour

autant possible de déterminer exactement le moment où il va se produire (les avalanches, les

éruptions volcaniques). Enfin, certains phénomènes, tels les accidents technologiques ou liés aux

transports de matières dangereuses sont totalement imprévisibles (lorsqu’ils ne relèvent pas de

négligence). Par retour d’expérience, il est possible de retracer le cheminement de l’aléa après la

catastrophe et de conclure, à ce moment là, à la nécessité de mener à bien des aménagements

futurs pour protéger les populations ;

- sa durée. L’aléa peut avoir des échelles de grandeur différentes selon les phénomènes. La

cinétique d’un événement fait référence à cette durée par rapport à l’échelle de vie humaine. Elle

est dite « rapide » pour les aléas de type coulée torrentielle et « lente » pour les aléas liés à de

long processus, tel que l’érosion, par exemple (Dauphiné, 2001) ;

- l’espace concerné pris en compte. Pour certains phénomènes il est possible de prévoir des

aires susceptibles d’être touchées permettant d’identifier les zones les plus sensibles. Il est

cependant difficile de savoir où se manifestera exactement l’aléa. S’il est possible de dresser des

cartes des régions menacées par les séismes par exemple, personne ne peut prévoir quel sera le

prochain site touché. De plus, chaque aléa possède un mode de diffusion spatial qui lui est

propre, sur lequel il est parfois impossible d’avoir un impact, ce qui est le cas pour les trajets de

cyclones ou de nuages toxiques, par exemple.

Les aléas se combinent parfois entre eux rendant leurs conséquences encore plus

redoutables. Les effets dominos illustrent cette surimposition : aux aléas d’origine viennent se greffer

des aléas dérivés, qui deviennent à leur tour source de nouveaux aléas, etc. (Provitolo, 2005). Ces

combinaisons d’aléas prennent deux formes : (i) une surimposition de catastrophes d’origine naturelle

dont les conséquences sont enregistrées sur des infrastructures industrielles (« nat-tech ») ou (ii) un

emboîtement de catastrophes technologiques entraînant des conséquences naturelles dénommé

« tech-nat » (Dauphiné, 2003; Provitolo, 2005).

De même, les sociétés par leurs comportements, peuvent aggraver l’intensité ou la fréquence

de certains aléas et l’étendue de leurs effets. Par exemple, la dimension comportementale entre en

compte dans la propagation des effets de panique. Provitolo (2005) propose une modélisation des

effets de panique dans le cas de risques naturels ou technologiques. Par le biais de cette

modélisation, cette auteure a également pu démontrer l’importance d’intégrer l’évolution d’un système

« risque » dans le temps. Cette évolution dans le temps ne concerne pas que les modifications de

nos environnements, mais aussi les évolutions en termes d’outils d’aide à la décision. Dans bien

des cas, les outils de gestion ne sont pas les mêmes que les outils de prévention de catastrophe. Les

mouvements de panique illustrent parfaitement les difficultés d’action : ils entravent bien souvent

l’acheminement des secours et provoquent des mouvements centripètes (secours sur les lieux) ou

centrifuges (évacuation spontanée). Les interventions n’en sont que plus difficiles, les mouvements de

panique étant particulièrement compliqués à estimer et à juguler. Il faut de ce fait établir des mesures

préventives à long terme (information de la population, meilleure éducation sur les bons

comportements à adopter face aux situations à risque) et à court terme (gestion de la phase d’alerte)

pour éviter l’éclosion de tels comportements.

La difficile prédiction de l’aléa, la prise en compte d’éventuels effets dominos, les

conséquences des situations à risques sur la propagation ou la fréquence des risques sont autant

d’éléments qui mettent en avant un réel besoin de sa connaissance pour adapter les réactions au

risque encouru. En effet, Grothmann et Reusswig (2006) rappellent que les comportements à suivre

face à l’aléa à l’origine d’une catastrophe (les inondations, dans leur cas) sont souvent mal connus et

trop variables d’un individu à un autre. Nous constatons que les actions sur l’aléa uniquement sont

parfois difficiles et bien souvent seuls des systèmes d’observation, de prévention et d’alerte peuvent

être mis en place. Et la qualité de ces systèmes dépend des moyens dont disposent les sociétés pour

mener des recherches scientifiques et techniques sur les aléas. A l’image de notre orientation

scientifique, d’autres auteurs (Chardon, 1994; Gaillard, 2007) exposent que des actions sur la

vulnérabilité sont fortement porteuses de résultats en termes de diminution des dommages.

c. La vulnérabilité

La vulnérabilité détermine l’exposition, la sensibilité ou l’adaptation de la société face à un

aléa (Berry et al., 2006). De ce fait, il est important de pouvoir la quantifier au plus juste, et cela dans

le but de définir les solutions adéquates de protection des populations face à un risque. L’intérêt que

nous trouvons à l’utilisation de la vulnérabilité dans l’étude des risques se situe essentiellement dans

la possibilité de moduler les échelles d’analyse des phénomènes : échelle individuelle, liée à un

groupe d’individus ou échelle de la société dans son ensemble. Cette différenciation attire l’attention

la vulnérabilité. A chaque échelle correspondent des niveaux de conséquences et des niveaux de

prises de décision dans la gestion des espaces soumis aux risques.

Veyret (2006) note que les études sur le risque passent désormais d’une entrée surtout

matérielle (notamment par l’aléa) à une entrée beaucoup plus complexe prenant en compte la

vulnérabilité dans sa globalité. André (2004) pose tout de même le problème d’une définition globale

de ce concept. Les notions associées ont évoluées et une réelle difficulté à estimer la vulnérabilité (en

termes de quantification physique, causes ou conséquences sociales) existe. Le concept même de

vulnérabilité se doit alors d’être décliné en fonction des enjeux étudiés (le bâti et les infrastructures ;

la société avec les enjeux de cohésion sociale ; le paysage et l’environnement) et des types de

systèmes qui y sont associés (biodiversité, écologie, société).

Cutter et al. (2003) listent 17 déclinaisons différentes de la vulnérabilité qu’ils synthétisent en

deux principales visions : (i) celle des sciences de l’ingénieur, correspondant à la vulnérabilité des

structures et à la susceptibilité des hommes et des infrastructures corrélées au risque ; (ii) celle des

sciences sociales, correspondant à la vulnérabilité des hommes par le biais de leur capacité

d’anticipation, de résilience et de résistance.

Pour préciser davantage la vulnérabilité, certaines définitions y associent des adjectifs. La

vulnérabilité physique, par exemple, ne se rapporte qu’à des faits « matériels » quantifiables, à une

quantité de biens potentiellement détruits, à la valeur des ressources considérées, éventuellement

traduite en un coût monétaire. Autre exemple, la vulnérabilité sociale dans laquelle Chambers (1989)

n’inclut que des facteurs internes, c'est-à-dire une capacité de la part de la société à répondre à un

risque et à ces externalités. Cette vulnérabilité sociale peut également correspondre à l’exposition de

groupes de personnes à un stress résultant d’impacts de changements environnementaux (Adger,

2000). Les stress subis sont, le plus souvent, reliés aux aspects sociaux et économiques d’un territoire

et se manifestent par une baisse du sentiment de sécurité ou des pertes d’habitat. Cette définition

permet alors d’établir un parallèle avec une autre notion : celle de la capacité d’adaptation. Cela

correspond au niveau à atteindre par la société pour tirer les enseignements des catastrophe subies

et les utiliser dans les préventions futures (Klein et al., 2003). La capacité d’adaptation englobe des

dimensions sociale, spatiale et économique.

Les Anglo-saxons définissent cette notion par deux termes distincts, avec d’une part la

vulnérabilité d’un territoire (susceptibility), correspondant à la caractérisation de la fragilité d’un

système ou d’éléments matériels exposés (Hufschmidt et al., 2005) et d’autre part à la notion de

capacité d’une société à se relever des dégâts ou effets négatifs induits par une catastrophe (que

nous retrouverons sous le terme de résilience ou coping capacities).

Cette capacité de réponse revêt un caractère de plus en plus important dans l’analyse de la

vulnérabilité, car elle permet d’appréhender les aptitudes inhérentes aux sociétés à surmonter une

catastrophe (Wisner et al., 1994; Adger, 2000; Folke et al., 2002; Klein et al., 2003; Pelling, 2003;

Provitolo et Dauphiné, 2007). Les notions de transitoire, de passager et l’aspect temporel (par la

prévention, la préparation au risque) y prennent toute leur importance. Cela autorise une comparaison

entre échelles, qu’elles soient spatiales ou relatives aux modifications entraînées par la société dans

le temps : systèmes d’éducation, densification du réseau social, etc.

Selon D’Ercole (1994), le « système » de vulnérabilité induit un grand nombre de variations

naturelles et humaines dont la dynamique dans le temps et dans l’espace peut engendrer des

situations plus ou moins dangereuses pour une société exposée. Anderson-Berry (2003) note à ce

sujet que dans certains cas, la mise en place de mesures de protection entraîne une augmentation de

la population, qui se sent protégée face à un éventuel risque. Son implantation ne fera alors

qu’augmenter la vulnérabilité, qui devait pourtant être initialement diminuée. Emerge ainsi l’idée d’une

approche spatiale ou territoriale à des échelles d’analyse différentes. De nombreux facteurs pour la

qualifier sont alors déterminés. Ils incluent l’économie, la technologie, les relations sociales, la

démographie et la santé, la biophysique, les perceptions individuelles, les prises de décisions

institutionnelles, les facteurs culturels et historiques (Wilhelmi et Wilhite, 2002). Cette approche

globale implique l’acquisition d’un grand nombre d’indicateurs et de ce fait, les comparaisons entre

les territoires, en termes de quantification des causes ou conséquences sociales, ne sont pas toujours

aisées. A titre d’exemple, trop souvent la résilience sociale n’est déterminée qu’à l’échelle de la

commune et non pas à celle de l’individu, impliquant un manque de précision dans son analyse.

Se pose la question de l’évaluation de la vulnérabilité, omniprésente dans la caractérisation

des facteurs générateurs de catastrophes. Les facteurs qui aggravent la vulnérabilité d’un espace sont

de deux ordres : (i) l’anthropisation des milieux urbains (par une extension des surfaces construites et

imperméabilisées dans des zones dangereuses, comme cela peut être le cas pour les coulées

boueuses) et (ii) la morphologie des villes qui exacerbe la vulnérabilité des sites. Thouret et D’Ercole

(1996) entrent davantage dans le détail de la quantification de la vulnérabilité en définissant

précisément les quatre classes de facteurs en jeu :

1. la croissance périurbaine ;

2. les facteurs de développement socio-économiques et les choix des politiques dans

l’aménagement du territoire ;

3. la morphologie urbaine ;

4. la segmentation accentuée de la société urbaine et les conflits socio-économiques dans un

espace limité.

Ils ont définit trois démarches pour analyser la vulnérabilité.

- La démarche qualitative permet de cerner la vulnérabilité à travers les différents facteurs qui

tendent à la faire varier. Ces facteurs sont liés à la croissance démographique, au mode

d’occupation du sol et à son utilisation et à des facteurs socio-économiques, socio-culturels,

psychologiques, culturels et historiques, techniques, fonctionnels et politico-administratifs.

- La démarche semi-quantitative a pour objectif de cartographier les zones les plus vulnérables

par le croisement d’une quinzaine de facteurs tels que les facteurs naturels, techniques ou

sociaux. La résultante est la caractérisation de la propension à subir des dommages catégorisés,

socialement et spatialement, par rapport aux éléments exposés (Chardon, 1994; Lavigne et

Thouret, 1994).

- La démarche quantitative se fonde sur des éléments vulnérables à partir desquels les

conséquences sont mesurées par la détermination des pourcentages de pertes et de leurs

répercussions économiques, par des analyses de coûts pour des actions de prévention ou

d’information, par des analyses coûts-bénéfices, etc.

Nous nous plaçons à la croisée d’une démarche quantitative (nombres de dégâts, fréquence

de survenue) et qualitative (facteurs socio-psychologiques, culturels, historiques). Cette superposition

de deux démarches, pourtant distinctes, est nécessaire car elle oriente directement les choix effectués

dans la détermination des modalités des enquêtes utilisées. Elle permet, en outre, de sélectionner

clairement les facteurs qui nous semblent essentiels à une gestion réfléchie de la vulnérabilité

(Chapitre 4). Par l’expression « gestion de la vulnérabilité», nous entendons la détermination de

réponses publiques ou privées / individuelles ou collectives (généralement coordonnées par des

institutions publiques), dont le but est de contribuer à l’amélioration des politiques de réduction des

risques.

Un des objectifs de ce travail étant de mettre à jour le rôle des représentations des risques

par les acteurs impliqués, quel que soit leur niveau d’action, un rapprochement entre l’estimation de la

vulnérabilité et la dimension sociale du risque prend tout son sens. Ce lien permettra, à terme, de

développer et de proposer à certains acteurs clé, des outils spécifiques pour améliorer leurs

interventions. Il est clair que le risque s’illustre par une complexité des facteurs à prendre en

considération dans son estimation.

d. Synthèse : le risque nécessite une approche pluridisciplinaire

La nature des études de risques en géographie montre surtout le caractère pluridisciplinaire

de son analyse. Une vision cohérente et intégrée du risque revêt un caractère primordial : le risque

doit prendre en compte les aspects physiques mais aussi sociaux, culturels, historiques, etc. du

milieu qui y est soumis. De ce fait, comme le souligne Pigeon (2005), il n’y a pas une géographie des

risques mais des géographies des risques. Chacune des démarches induites par ces approches

utilise une entrée dans les champs disciplinaires différents (sociogéographique, historico-spatiale par