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LEGITIMITE COGNITIVE

1. Les apports de la TNI « renouvelée » pour analyser les efforts des acteurs

1.1. Retour sur la perspective de l’acteur et des actions

1.1.1. Mise en perspective de l’acteur : des réponses à l’influence de l’institutionnalisation Le chapitre précédent évoque le renouvellement de la théorie néo-institutionnelle pour remédier au manque d’analyse du processus d’institutionnalisation au niveau local (Barley, 2008) et à une approche excessivement passive de l’acteur (Battilana & d’Aunno, 2009). C’est au sein même de la TNI que les auteurs critiquent la focalisation excessive sur les phénomènes de convergence (e.g. Di Maggio, 1988 ; Greenwood & Hinings, 1996 ; Hirsch & Lounsbury, 1997 ; Stinchcombe, 1997), particulièrement le mimétisme34, qui sous-tendent implicitement la passivité de l’acteur (Lounsbury, 2008)35. Pour y remédier, l’agenda de recherche néo-institutionnelle s’est orienté vers l’agence qui traduit le pouvoir d’agir des acteurs et leur capacité d’interprétation vis-à-vis de l’institution (Scott, 2008, p. 77-78)36

. Pour cela, les travaux néo-institutionnels ont étudié l’agence à partir de trois visions principales de l’acteur : l’Etat, les organisations et les individus (Meyer & Jepperson, 2000). En sachant que le niveau par lequel « l’acteur » est mentionné n’est pas toujours clair (Hwang & Colyvas, 2010) il convient de clarifier le regard porté par notre étude sur l’acteur organisationnel. Il s’agit de concevoir les dynamiques d’actions au niveau des grossistes – acteurs organisationnels- sans que cela n’empêche d’explorer les actions locales effectuées par certains individus. Pour éviter les confusions possibles nous proposons que le terme acteur se réfère aux organisations (grossistes) et celui de « personnage » aux individus qui donnent vie à l’organisation. L’acteur organisationnel peut être étudié selon deux orientations principales prises par la TNI. La première est ancrée dans l’article d’Oliver (1991) qui conçoit l’agence au travers des stratégies en réponse à l’institutionnalisation ; la seconde démarre avec l’article de Di Maggio (1988) sur l’entrepreneur institutionnel pour étudier l’agence à l’origine de l’institution.

• Agence et stratégies institutionnelles

Suite à l’orientation prise avec l’article d’Oliver (1991), Lawrence (1999) propose le concept de « stratégie institutionnelle ». Il s’agit des stratégies de préservation ou de transformation

34 L’isomorphisme mimétique serait l’idée la plus citée et discutée dans les articles recensés depuis 1980 du Strategic

Management Journal qui font références à la TNI (Ben Slimane & Leca, 2010, p. 54).

35 « La critique principale de la théorie néo-institutionnelle concerne le postulat d’une passivité de l’acteur et son incapacité

à exercer un comportement stratégique et à exercer une influence sur l’institutionnalisation » (Oliver, 1991, p. 173).

36 Cette définition de l’agence par Scott (2008) s’appuie sur les travaux de Giddens pour évoquer le pouvoir et ceux

d’Emirbayer and Mische (1998) pour l’interprétation. Creed et al. (2010, p. 1337) proposent une définition semblable avec la “capacité d’agir sur la base de choix et de pouvoir affecter l’environnement”

38 des standards institutionnels qui ne sont pas toujours appliquées de manière intentionnelle. Un exemple est donné avec la mise en place d’une nouveauté, en réponse à la demande des clients, qui conduit à de nouveaux standards. Cette notion de stratégie institutionnelle invite à concevoir les dynamiques de réponses aux transformations du champ pour tous types d’acteurs, sans distinctions particulières. Elle permet en plus de concevoir en retour les effets de ces stratégies sur l’évolution des standards (de manière plus ou moins volontaire) pour une vision relativement complète des dynamiques d’interaction entre l’institution et l’organisation.

L’article théorique de Kondra & Hinings (1998), qui a permis de concevoir les suiveurs « actifs » (en page 32), s’inscrit dans cette orientation. Les auteurs soulignent les comportements spécifiques permettant au final de parvenir au même résultat. Cet article repose sur le principe d’équifinalité qui est repris en postulat pour notre travail de thèse, et qui encourage à s’intéresser aux réponses spécifiques des acteurs-suiveurs. Plus largement ces deux contributions invitent à regarder l’agence par les stratégies d’actions face à l’institution au-delà de l’avantage concurrentiel37 - au même titre que les différents travaux présentés dans le Tableau 6. Ces différents travaux, en s’inspirant d’Oliver (1991), valorisent une explication de l’agence par les facteurs organisationnels en interne tels que la taille, l’âge et la compétitivité (e.g. Oliver, 1991), les valeurs (e.g. Lawrence & Hardy, 1999), les pratiques, ressources et systèmes de relations différents (e.g. Lepoutre & Valente, 2012). Ces exemples montrent également que les liens entre les stratégies organisationnelles et la structure institutionnelle sont devenus bien établis dans la TNI. Toutefois, on s’aperçoit qu’il s’agit majoritairement de contributions théoriques alors que les illustrations empiriques ont été limitées et mériteraient d’être plus amplement développées (Greenwood & Hinings, 1996 ; Lounsbury, 2008)38. Ce défaut semble en partie s’expliquer par l’orientation plus forte de la TNI vers l’entrepreneur institutionnel au détriment des stratégies institutionnelles.

Tableau 6 Exemples de travaux sur les stratégies de réponse en référence à Oliver (1991)

Westphal & Zajac (1994)

Illustration du comportement de manipulation d’une organisation qui effectue un découplage stratégique entre l’affichage et l’adoption effective des pratiques comptables, en référence à Oliver (1991) pour contrer la vision passive de l’acteur et souligner la poursuite de ses propres intérêts.

Rao (1998) L’article met en avant les multiples stratégies (dans un même contexte) des associations allant de la résistance à l’acquiescement en référence à l’approche d’Oliver (Rao, 1998, p. 951)

Kondra et Hinings

Explication théorique des hétérogénéités et agence des organisations en fonction : du degré de performance et de conformité à l’institution

37 “Institutional strategy is not so much concerned with gaining competitive advantage based on existing institutional

structures as it is concerned with managing those structures-preserving or transforming institutional standards and rules in order to establish a strategically favorable set of conditions.” (Lawrence, 1999)

38 De nouveaux travaux sont observés plus récemment avec l’extension de l’approche du travail institutionnel (e.g. Battilana

39 (1998) Diversité de comportement observée avec les « équifinalistes » c’est-à-dire les suiveurs qui avaient un comportement d’isomorphisme (des opérateurs institutionnels) et qui vont agir pour le changement face aux évolutions du contexte en mettant en place des spécificités.

Lawrence & Hardy (1999)

Variations de réponses des organisations dites « médiatrices » dans des domaines où les organisations ont des logiques différentes (e.g. les activistes) en fonction des valeurs en interne plus proches des acteurs centraux ou les acteurs marginaux du champ

• Entrepreneur institutionnel : une approche à dépasser

La notion d’entrepreneur institutionnel a été introduite par Di Maggio (1988) pour sortir d’une vision excessivement orientée vers le poids de la structure. Di Maggio (1988) définit ainsi l’entrepreneur institutionnel comme un « agent qui dispose des ressources suffisantes pour influencer les règles institutionnelles et donc, modifier l’environnement lorsqu’il a un intérêt particulier dans certaines structures institutionnelles » (Ben Slimane & Leca, 2010). Elle est devenue dominante au cours des années 2000 pour mieux concevoir le rôle des acteurs dans la formation de l’institution. Les travaux qui en découlent ont permis d’affiner la condition de l’agence, tel un entrepreneur institutionnel, en fonction de la position sociale au sein du champ (e.g. Maguire et al. 2004 ; Battilana, 2006). Les travaux sur l’entrepreneur institutionnel ont aussi contribué à mieux décrire cette influence au travers de l’usage des compétences socio-politiques (Leca et al. 2008) qui seront reprises dans la section suivante (e. g. Garud et al. 2002 ; Hwang & Powell, 2005 ; Battilana et al. 2009). Enfin, ils font plus fréquemment mention à des facteurs externes qui déclenchent l’agence, tel que le degré d’institutionnalisation (e.g. Dorado, 2005) et la multiplicité des références institutionnelles (e.g. Creed et al. 2002 ; Seo & Creed, 2002 ; Rao et al. 2003)39. En conséquence l’approche par l’entrepreneur institutionnel (EI) a été centrale pour expliquer que l’acteur cherche et parvient à influencer l’environnement institutionnel dans son intérêt (e.g Glynn & Lounsbury, 2001). Toutefois, l’approche d’origine encourage à se focaliser sur les efforts des acteurs dominants principalement (Di Maggio, 1988) – avec le regard sur les acteurs disposant du plus de ressources – tel que l’évoquent Garud et al. en 2002. Les développements par cette approche deviennent alors de plus en plus éloignés de la TNI avec la focale sur l’acteur « champion » (Maguire et al. 2004), qui serait doté de qualités exceptionnelles (Delmestri, 2009). Cette approche de l’agence a été critiquée pour cette focale (e.g Zilber, 2002 ; Hallett, 2010) dans la mesure où l’entrepreneur institutionnel ne peut réussir seul mais a besoin du collectif (Dorado, 2005). Pour notre thèse, nous prenons de la distance par rapport à l’entrepreneur institutionnel et proposons de nous intéresser à toutes sortes d’acteurs, sans

39 Oliver mentionne également que l’agence dépend de la force des institutions (degré d’institutionnalisation faible et

40 qu’ils ne soient dominants (e.g. suiveurs), ni que leurs actions ne traduisent une capacité politique et aptitude réflexive exceptionnelles (Delmestri, 2009) et une efficacité irrémédiable (Hardy & Maguire, 2008 ; Lawrence et al. 2011). Bien au contraire, notre recherche souhaite pouvoir explorer toutes sortes de dynamiques d’actions avec une approche par le processus éloignée de la vision statique avec l’entrepreneur institutionnel – focalisée sur l’acteur plutôt que l’action (Ben Slimane & Leca, 2010)40. Le regard sur les stratégies institutionnelles (Lawrence, 1999) est privilégié car il élargit l’analyse aux réponses multiples et potentiellement sources de changements des standards41.

Nous retiendrons néanmoins qu’en réponse aux critiques qui lui ont été adressées, la notion d’entrepreneur institutionnel a évolué pour s’intéresser à d’autres acteurs que le dominant (e.g. nouveaux entrants- Ben Slimane, 2012) et pour proposer une approche moins manichéenne de l’agence. Garud & Karnoe (2003), par exemple, croisent la notion d’entrepreneur institutionnel au bricolage institutionnel et montrent les interactions de cet acteur avec d’autres pour réussir l’institutionnalisation. Phillips & Tracey (2007) proposent le bricolage de l’entrepreneur en interne à l’organisation pour ouvrir la notion d’EI aux stratégies organisationnelles. Ce type de contributions permet d’élargir la recherche vers le processus et le niveau local des actions dans le cadre de la nouvelle orientation de la TNI qui adopte une approche plus complexe de l’agence en interaction aux institutions. Cette approche se développe avec le concept de travail institutionnel, qui permet d’intégrer les contributions précédentes (d’EI, stratégies institutionnelles) en dépassant leurs limites.

1.1.2. La prise en compte des efforts de tout type d’acteur

Nous avons annoncé dans le premier chapitre le positionnement de la recherche dans le cadre du travail institutionnel parce qu’il offre une vision plus complexe et complète des comportements. La notion de travail institutionnel (TI) est proposée par Lawrence & Suddaby en 2006 – en réponse aux critiques sur l’entrepreneur institutionnel- pour explorer les actions (plutôt que les acteurs) et le processus. Suite à l’intérêt grandissant pour cette approche, Lawrence, Suddaby et Leca (2011, p. 53) affinent la définition du travail institutionnel comme étant l’ensemble « des efforts des individus et des acteurs collectifs pour affronter, persévérer, consolider, déstabiliser, démolir, s’immiscer dans, transformer et créer de nouveau les structures institutionnelles dans lesquelles ils vivent, travaillent, évoluent et qui leur confèrent

40 Lorsqu’il propose ce concept en 1988, Di Maggio avait pourtant proposé la distinction entre l’institution en tant que

résultat et l’institutionnalisation en tant que processus afin d’encourager les recherches sur cette dernière.

41 D’autre part, les stratégies institutionnelles sont liées au questionnement du succès et de la survie organisationnelle qui est

41 rôles, relations, ressources et routines ». L’approche par le TI permet de nuancer l’agence en considérant que les acteurs – organisationnels et les individus en interne- sont contraints par l’institution mais tout de même capables d’y naviguer et de la modeler (Voronov & Vince, 2012, p. 58).

• Elargissement du périmètre d’action : de la création à la déstabilisation

Le concept de travail institutionnel a tout d’abord permis d’élargir le périmètre d’analyse de l’agence - jusque-là concentrée sur la modification de l’institution - à trois étapes (la création, le maintien et la déstabilisation) qui sont synthétisées dans le tableau suivant.

Tableau 7 Le travail institutionnel pour trois étapes d’institutionnalisation ou légitimation

Efforts de création de l’institution

Opérations visant à légitimer la nouvelle institution, c'est-à-dire à faire accepter les nouvelles règles de fonctionnement et pratiques. Lawrence & Suddaby (2006) proposent une liste non exhaustive de TI (plaider, définir, motiver, construire des identités, coupler les nouvelles et anciennes pratiques, etc.) en notant qu’il s’agit de l’étape la plus travaillée par la TNI. Elle a ensuite donné lieu à de nouveaux travaux au niveau de l’institution (e.g. mécanismes provoquant le « tournant » avec Guérard et al. 2013 ; processus politique pour la création de standards avec Bartley, 2007) ; cette étape est également saisie au niveau de la légitimation organisationnelle par Kraatz (2009 ; TI servant à la création de l’intégrité organisationnelle).

Efforts de maintien

Efforts pour défendre le statu quo de l’institution. Bien que le champ soit mature, l’institution n’est pas stable par nature mais demande un effort pour s’assurer l’adhésion aux règles et de la reproduction des normes et croyances par les autres individus selon Lawrence & Suddaby (2006). Les auteurs proposent à nouveaux différents TI possibles (e.g. création de mythes et de routines, contrôle de maintien d’ordre etc.) qui rendent compte d’efforts continus (versus immobilisme) pour maintenir les règles, normes et des systèmes de croyances, même lorsque le degré d’institutionnalisation est élevé. Cette étape est appréhendée avec les acteurs centraux qui ont le plus d’avantages avec l’institution existante ; puis avec les actes de résistance au changement (Marquis et Lounsbury, 2007 avec la dérégulation du secteur bancaire). Cette dynamique de maintien est aussi envisagée au regard de l’intégrité organisationnelle (Kraatz, 2009) et finalement du maintien de la survie (Washington et al. 2008)

Déstabilisation

Opérations de remise en cause de l’institution existante qui sont différentes de celles de création puisqu’il s’agit de fragiliser (plutôt que de construire), voire même, de détruire l’institution (e.g. dissocier les pratiques de leurs fondements moraux, contester les croyances, déconnecter les sanctions des récompenses etc.). Les nouveaux travaux avec ce périmètre d’actions (e.g. Maguire et Hardy (2007 ; Ben Slimane 2012, Peton 2013) décrivent une étape marquée par les confrontations entre les tenants du maintien et les partisans du changement.

Ces trois formes se retrouvent et peuvent s’appliquer au niveau du champ puisque Fligstein (2001) a proposé son analyse à trois niveaux : de création, stabilisation et transformation du champ. Par ailleurs, ces efforts peuvent s’observer parallèlement en considérant que ces trois périmètres d’actions peuvent interagir simultanément (Creed et al. 2010) dans une dynamique plus large de maintien de la survie organisationnelle (e.g. Rao, 199842 ; Washington et al. 2008) après une remise en cause, qui a été peu étudiée du point de vue du travail

42 L’étude de Rao (1998) ne concerne pas déjà le travail institutionnel, mais en soulignant les efforts du fondateur de

42 institutionnel. Washington et al. (2008) ainsi que l’étude de Kraatz (2000) soulignent que la plupart des travaux portent sur le travail institutionnel vis-à-vis de l’institutionnalisation au niveau macro alors que cette notion permettrait aussi d’explorer les efforts de maintien de la survie organisationnelle. Notre thèse s’oriente dans cette perspective en constatant, à partir des stratégies institutionnelles (Lawrence, 1999), que ces efforts se traduisent par des opérations de maintien, création ou de déstabilisation des standards institutionnels, sans que cela ne soit entièrement intentionnel. L’approche par le travail institutionnel permet d’affiner la perspective d’influence des standards par les stratégies institutionnelles, à ces trois périmètres d’actions. L’objectif est ainsi d’explorer les efforts de maintien de la survie façonnés et façonnant les standards institutionnels pour répondre au besoin d’une meilleure articulation entre « comment l’organisation est constituée » et « comment elle incorpore et façonne les pressions institutionnelles » (Suddaby et al. 2010: 1238).

La participation de multiples acteurs, parfois involontaire, avec le travail institutionnel Lawrence et al. (2011) insistent sur la notion d’effort pour marquer la dimension d’intentionnalité qui est au cœur de l’approche par le travail institutionnel, mais parfois oubliée. Cette intention peut être orientée selon trois axes temporels (Lawrence et al. 2011) : prospective (pour les projets futurs), présente (dans le but d’aménager la situation présente), passée (appui sur des tactiques et schémas d’actions allant de soi parce qu’ils ont été développés à partir des interactions passées). Selon Lawrence et al. (2011) les contributions NI sur le type d’efforts (cf. Tableau 8) se sont surtout orientées vers l’intention projective. Tableau 8 Contributions des travaux néo-institutionnels sur le type d’efforts pour le travail institutionnel43

Efforts sur les Pratiques

Travaux qui conduisent à regarder les pratiques pour faire face ou modeler l’institutionnalisation (ancrage complémentaire avec la théorie des réseaux, la sociologie des pratiques). Exemples : Lawrence & Zietsma (2010) proposent trois types d’agence (habituelle, pragmatique, projective) à partir des efforts sur les pratiques et frontières ; Peton (2013) offre un ensemble de répertoires sur les tactiques d’institutionnalisation.

TI sur les schémas culturo- cognitifs

Pour saisir le TI, Lawrence & Suddaby (2006) ont encouragé le développement de travaux sur la construction du sens conduisant à mobiliser le sensemaking (e.g. Weber & Glynn, 2006); les pratiques de cadrage (e.g. Kaplan, 2008). Plus largement cela a conduit à un développement largement orienté vers les actions au niveau cognitif (au détriment de l’émotionnel, Voronov & Vince, 2012) à partir des efforts de rhétorique.

TI discursif et rhétorique &

symbolique

Face au manque d’analyse des mythes et des récits pour appréhender les efforts institutionnels (Lawrence & Suddaby (2006) de nombreux travaux se sont développés. Exemples : analyse discursive dans le cadre des efforts de désinstitutionalisation (e.g. Maguire & Hardy, 2010) ; importance du récit pour favoriser l’institutionnalisation (e.g. Zilber, 2007) ; au cours des actions politiques (e.g. Zilber, 2002, 2007 ; Bartley, 2007), pour les réseaux sociaux (e.g. Rojas, 2010), le modelage des frontières (e.g. Garud et al

43 Ce tableau sépare ces différents types d’efforts mais les considère possiblement liés. Par exemple : les efforts au niveau des

schémas culturo-cognitifs sont composés des efforts rhétoriques et intégrés dans les pratiques ; ils sont aussi sous-jacents au travail identitaire qui peut être à la source des efforts sur les pratiques et frontières.

43 2003), etc. Importance du récit au cours du travail identitaire (e.g. Creed et al. 2010)

TI identitaire

Les efforts identitaires sont évoqués avec l’entrepreneur institutionnel (e.g. Greenwood et al. 2002) mais la notion d’identité est devenue un mécanisme clef plus avec le TI, où la construction et la performance d’identités particulières peuvent affecter l’institution (e.g. Glynn, 2008). Marquis & Lounsbury (2007) soulignent que l’identité professionnelle est source de résistance au changement (e.g. Meyer & Hammerschmid, 2006). Creed et al. (2010) illustrent plus précisément le travail identitaire.

Ce tableau offre une liste non exhaustive des contributions issues des recherches traitant du travail institutionnel et met à notre disposition une grille élargie pour saisir les efforts des grossistes pour survivre en maintenant leur activité d’intermédiaire. Le travail envisagé s’apparente à celui de Kraatz (2009) et de Washington et al. (2008) qui mentionnent par exemple la création de mythes, les récits et histoires de vie par le leader institutionnel, pour créer une vision permettant de modeler les attentes et représentations des parties prenantes (externes et internes). Kraatz (2009) plus particulièrement, propose sept formes de travail institutionnel qui sont semblables à celles recensées dans le tableau (e. g. de rhétorique, de travail identitaire ou encore de modelage des frontières) pour maintenir l’intégrité organisationnelle. Les deux contributions théoriques de Kraatz (2009) et de Washington et al. (2008) encouragent l’utilisation de la notion de travail institutionnel pour ouvrir la boite noire de l’organisation et explorer le maintien de l’intégrité organisationnelle. C’est en écho à cet appel que nous proposons d’ancrer la recherche sur les grossistes dans une approche du TI qui se focalise sur les actions engagées, celles-ci devant être envisagées par rapport aux institutions (e.g. Kraatz (2009) qui regarde ces efforts face aux demandes institutionnelles plurielles).

La notion de travail institutionnel invite à regarder l’intention qui sous-tend les efforts déployés (Lawrence et al. 2011). En dépassant les limites de l’entrepreneur institutionnel, le travail institutionnel permet de nuancer la notion d’action.

Premièrement, le travail institutionnel relativise les efforts de l’acteur dominant en postulant que l’institutionnalisation est un processus trop complexe pour pouvoir être influencé par un seul acteur (Dorado, 2005). Le travail institutionnel invite à concevoir les interactions de l’institution avec un ensemble d’acteurs, indépendamment de leurs statuts, de leurs positions ou des ressources qu’ils détiennent (Lawrence et al. 2009). C’est ainsi que les travaux ont pris en compte l’intervention des acteurs marginaux et challengers (vu en CHP1, 2.2.2) ainsi que le rôle des professionnels et experts (e.g. Marquis & Lounsbury, 2007) sans

44 que cela ne remette en cause l’entrepreneur institutionnel44. Les travaux de Zilber mettent en évidence cette interaction entre de multiples acteurs pour l’interprétation (e.g. ethnographie de 2002) et les efforts de rhétorique (e.g. étude de 2007) au cours de l’institutionnalisation. L’aspect collectif n’a donc pas été négligé. Peu de travaux, néanmoins, semblent rendre compte de l’intervention ponctuelle et non volontaire de certains acteurs, lorsque les efforts dans un but personnel viennent s’imbriquer dans un acte collectif (Hwang & Powell, 2005).

Deuxièmement, l’analyse du travail institutionnel relativise les actions en postulant qu’elles