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II. Hiérarchisation des enjeux environnementaux

2. Apport de l’ACV à la hiérarchisation des enjeux

Les méthodes ACV apparaissent comme un outil permettant de faciliter la hiérarchisation des enjeux, et ce pour les 3 différentes approches identifiées, comme le résume la

Figure 17.

Figure 17: Synthèse de l’apport de l’ACV aux méthodes de hiérarchisation  L’ACV et la « multiplication » des impacts environnementaux

Si l’analyse de Cycle de Vie a l’avantage de pouvoir « automatiquement » quantifier les impacts environnementaux d’un produit sur les principaux enjeux environnementaux, elle a le défaut de sa qualité, à savoir de fournir à l’utilisateur une information très (trop) riche à travers des indicateurs d’impact très nombreux, représentant chacun un enjeu environnemental différent, rendant l’interprétation d’un résultat d’ACV complexe, voire très difficile pour un non expert.

L’ACV comme outil de « normalisation » permettant de faciliter la hiérarchisation des enjeux pour l’approche de l’impact relatif

Pour faciliter l’interprétation des résultats d’une ACV et permettre une hiérarchisation entre les enjeux environnementaux, il est possible de ramener les résultats ACV d’un produit à la pollution totale sur une zone géographique. Cette étape, appelée normalisation, transforme chaque résultat d’indicateur en le divisant par une valeur de référence, par exemple la valeur de la pollution totale par habitant selon le même indicateur. Cela permet donc d’identifier, pour chaque produit, les enjeux environnementaux pour lesquels le produit a une contribution plus ou moins importante par rapport à l’ensemble des activités et produits de la zone considérée.

A titre d’illustration, la figure suivante présente les résultats d’ACV normalisés de la fabrication d’un mètre carré de panneau PV, par rapport à l’impact moyen au niveau mondial d’un habitant sur l’année 2010.

Figure 18 : Résultats d’ACV normalisé pour la production d’1m² de panneau solaire photovoltaïque Il ressort de cette analyse normalisée que la production d’1 m² de panneau photovoltaïque, est particulièrement contributrice (en rapport avec les impacts des autres activités) sur les impacts de Toxicité humaine et d’Ecotoxicité. Ainsi, la production d’un mètre carré de panneau entraîne 1,5 fois plus d’émissions de substances contribuant à la toxicité humaine (cancer) que la pollution européenne totale ramenée à un habitant.

Cette approche de normalisation peut donc mettre en évidence des enjeux environnementaux en les ramenant à une même échelle. Cette étape étant optionnelle dans la norme IS0 14044, la normalisation peut être utilisée lors de la phase d’interprétation, mais ces résultats sont peu présentés par les entreprises. Toyota, constructeur automobile japonais oscillant entre le première et la deuxième place du classement mondial des constructeurs (en nombre d’unités vendues), présente ce type d’évaluation dans les ACV publiques disponibles sur son site internet.

Toyota se distingue par son rôle de pionnier sur le marché de l’automobile hybride, avec le lancement de la première Prius en 1997. En tant qu’entreprise engagée dans la réduction des impacts environnementaux, Toyota a adopté depuis de nombreuse années une approche cycle de vie dans l’évaluation de ses produits, c’est-à-dire de l’extraction des matières premières à la fin de vie des véhicules. Ainsi, dans le document de présentation de leur démarche « Life Cycle Zero CO2 emissions challenge », Toyota indique clairement sa volonté de travailler sur l’ensemble du cycle de vie des véhicules. Toyota présente également dans ce document le détail de ses émissions de GES au niveau du Scope 3 pour justifier cette approche holistique (le scope 3 regroupe toutes les émissions indirectes de GES non liées aux consommations énergétiques). Dans le cas de Toyota, l’utilisation des véhicules représente plus de 80% des émissions du scope 3.

ENJEUX ENVIRONNEMENTAUX, HIERARCHISATION ET INTEGRATION STRATEGIQUE : QUELLE PLACE POUR L’ACV ET LES LIMITES PLANETAIRES

Etude SCORE LCA n° 2016-01 – Rapport Final

A ce titre, Toyota a conduit en 2015 des ACV (soumises à revue critique) sur cinq gammes de produits et diffusées sur le site internet du groupe. Dans l’ACV du modèle Mirai (voiture hydrogène), Toyota effectue notamment une analyse comparative avec deux autres véhicules (une voiture essence et un modèle hybride). L’élément qui nous intéresse ici réside dans l’analyse des résultats proposée par Toyota. En effet, au-delà de la simple présentation des indicateurs ACV traditionnels, Toyota propose les résultats sous la forme normalisée. Sous cette forme, l’enjeu environnemental qui ressort est clairement l’utilisation de ressources abiotiques et le véhicule Mirai est moins performant sur cet aspect (ces résultats sont présentés de manière tout à fait transparente). Toyota explique d’ailleurs que, sous la forme normalisée, l’indicateur sur les ressources est beaucoup plus contributeur à l’impact que le changement climatique, indicateur qui représente pourtant le focus principal des constructeurs automobiles. Cet impact sur les ressources est principalement dû aux terres rares et particulièrement au Platine.

Source : Toyota – Mirai-LCA report- 2015, p.26

L’ACV comme base de données facilitant la monétarisation et donc la hiérarchisation par l’approche de l’impact absolu

L’ACV peut aussi être couplée avec une approche de monétarisation des impacts environnementaux, telle que décrite dans la première section de cette partie. Ainsi, les indicateurs d’impacts de l’ACV, ou les flux, peuvent être multipliés par un facteur monétaire, permettant d’obtenir une valeur économique globale. Tout en étant conscient des limites et de la variabilité des méthodes de monétarisation (cf. précisions page 49 et le rapport SCORE LCA sur le sujet), il est donc possible d’analyser quel enjeu environnemental représente la part la plus importante de cet impact monétaire, ce qui est une façon de hiérarchiser les enjeux environnementaux.

Dans le cas de Kering, présenté plus haut dans ce rapport, les principales activités ont été modélisées à l’aide de base de données « classiques » reconnues de l’ACV afin de pouvoir, dans un premier temps, évaluer l’impact environnemental de l’ensemble de sa chaine de valeur (impact direct et impact de toute la supply chain). A partir de ces éléments, les flux et les impacts environnementaux ont ensuite été « monétarisés » (multiplication par une valeur monétaire) pour aboutir à l’EP&L décrit précédemment.

 Les indicateurs de prélèvement de ressources : un indicateur de détection de la

vulnérabilité aux ressources et donc d’impact pour l’entreprise

Les indicateurs d’ACV permettent de tracer l’ensemble des flux entrants et sortants. Une activité étant, par nature, dépendante de l’ensemble des flux entrants dans le processus de cette activité, elle peut être vulnérable au tarissement ou au renchérissement de ces ressources. A ce titre, l’utilisation des indicateurs ACV de consommation d’eau, d’épuisement des ressources énergétiques ou des indicateurs d’épuisement des ressources non énergétiques (pondérées par la rareté des ressources) peut être utile pour détecter une vulnérabilité potentielle à l’une de ces ressources. Au-delà des indicateurs « midpoint », il peut être utile de se référer directement aux flux élémentaires entrants, pour permettre de croiser ces flux avec une évaluation du risque associé à ces ressources qui soit plus détaillée et pertinente que les coefficients disponibles dans les méthodes ACV actuelles (cf. fiche épuisement des ressources non énergétiques). Les informations issues de l’ACV peuvent donc intervenir dans une stratégie de gestion des risques.

3. Apport des Limites planétaires à la hiérarchisation des enjeux : un changement dans