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Application à la stimulation corticale

Dans le document Outils pour le pavage de surfaces (Page 127-132)

La stimulation chronique du cortex moteur (SCM) par l’utilisation d’électrodes péridurales dans le contexte du contrôle de douleurs chroniques a été mise en évidence à de nombreuses reprises [84, 8, 85]. Cette pratique chirurgicale consiste à implanter des électrodes entre la dure-mère et l’os du crâne, au dessus du sillon central, et à installer un boîtier de stimulation qui délivrera des impulsions électriques régulièrement.

7.3.1 Contexte médical

Le positionnement des électrodes, et donc la localisation des sites d’implantations, est essentiel dans la qualité du contrôle des douleurs. Cependant, le choix de la position des électrodes est aujourd’hui en partie déterminé par une approche empirique. Une analyse comparative a posteriori de la qualité des soins suivant la position des électrodes est un élément essentiel pour affiner les choix futurs des praticiens, comme nous l’avions remarqué dans une publication préliminaire [40] de la méthode que nous présentons ici.

Or la localisation d’informations à la surface du cortex n’est pas facilitée par l’uti- lisation de représentations 3D. De plus, l’anatomie de chaque patient ne pouvant être identifiée à un volume de référence, il est nécessaire d’envisager une représentation adap- tée au patient, et facile d’accès. La cartographie planaire de la région d’intérêt du cortex cérébral constitue donc une réponse pertinente à ces besoins.

7.3. Application à la stimulation corticale 113

7.3.2 Construction des cartes

Afin de répondre aux besoins de visualisation des neurochirurgiens qui pratiquent la sti- mulation corticale, nous avons mis en place différentes projections sur les cartes dépliées, en exploitant les différentes modalités disponibles. Pour cela, on calcule les informations nécessaires en chacun des points de la surface du cerveau, dans la zone d’intérêt, puis l’on s’appuie sur le résultat du dépliage (section 7.2.2) pour reporter les valeurs sur la carte plane.

Électrodes

La première information que nous avons choisi de projeter sur les cartes dépliées est la position des électrodes. Puisque cette information ne peut être ponctuelle (car la projec- tion n’est pas forcément unique), nous avons choisi de construire une carte des distances pour chacun des contacts composant les électrodes (figure 7.3).

Ainsi, pour un contact c, on construit une carte des distances euclidiennes qui à chaque sommet s de la surface discrète associe la distance euclidienne |c, s|3 de R3. Une fois

projetée dans le plan par la fonction résultat du dépliage, on obtient une carte avec un « point chaud » correspondant à la partie de la surface la plus proche de c.

En construisant une telle carte pour chacun des contacts c de l’électrode, et en fusion- nant ces cartes par addition, on obtient une carte globale permettant de lire la position de chacune des électrodes à la surface du cortex. Pour des questions de lisibilité, nous avons choisi d’inverser sur la carte finale les valeurs afin que les zones blanches correspondent aux points les plus proches des électrodes (figure 7.6(b)).

Profondeur à l’os

La deuxième carte que nous avons choisi de construire a pour objectif de faciliter la lecture, en introduisant des informations anatomiques connues pour le praticien. La forme des sillons et convolutions, si elle varie d’un individu à l’autre, constitue un élément structurant fort de la surface du cerveau. Cette deuxième carte a donc été construite de manière à permettre aux praticiens de retrouver ces informations.

Nous avons pour cela calculé en chaque sommet s du maillage décrivant la surface du cerveau la distance euclidienne entre s et l’os du crâne. Cette information, interprétée comme une profondeur, et calculée par une méthode approchée (type distance de chan- frein) est là aussi projetée sur la carte en utilisant le résultat du dépliage. On obtient alors une carte en niveaux de gris (figure 7.6(a)), que nous avons là aussi choisi d’inverser, afin que les sillons soient représentés dans des teintes sombres.

Étiquetage manuel

La dernière carte que nous avons construit utilise un troisième type de données éven- tuellement disponibles. Ainsi, lorsque l’on cherche à situer avec efficacité les électrodes, il peut être utile de disposer d’une classification automatique ou d’un détourage manuel étiquetant les différents voxels suivant leur appartenance à une région anatomique don- née. Cette classification étant généralement réalisée dans le volume 3D, la fonction de projection dans le plan permet de construire une carte plane portant ces informations d’étiquetage (figure 7.6(c)). Si nous avons ici exploité les informations de segmentation manuelles disponibles, la méthode peut être également utilisée de manière plus générale,

114 Chapitre 7. Application médicale

Fig. 7.3 –Schéma d’une électrode utilisée lors de la stimulation corticale.

Fig. 7.4 – Coupe issue d’un volume 3D résultat d’un détourage manuel des aires anatomiques

par exemple en exploitant les informations issues du recalage d’un atlas anatomique sur le volume du patient.

7.3.3 Résultats et discussion

Nous avons appliqué notre algorithme à douze volumes IRM de patients présentant des douleurs neuropathiques et traités par SCM. La localisation anatomique de la cible a été calculée en utilisant un système de navigation 3D (ISIS, Saint-Martin d’Hères, France). Pendant l’opération, deux électrodes, chacune avec quatre contacts (voir figure 7.3), ont été implantées sur la dure mère près du sillon central.

Protocole

Le protocole expérimental fournit une IRM anatomique préopératoire (1.5T, taille de voxel 0.49 × 0.49 × 1 mm3) et un scanner postopératoire (taille de voxel 0.53 × 0.53 × 1.25 mm3)

indiquant la position finale des quatre contacts des deux électrodes. On dispose également d’un détourage manuel des contacts des électrodes et des aires anatomiques (figure 7.4) telles que les circonvolutions frontales supérieure (F1), moyenne (F2) et inférieure (F3) ainsi que les circonvolutions post-centrale (GPost) et pré-centrale (GPre). Ces segmen- tations sont exprimées dans le référentiel de l’IRM après fusion des données TI et IRM réalisée en utilisant l’algorithme d’information mutuelle [110].

Étant données les informations disponibles, nous avons fixé le centre de la carte au barycentre des huit contacts détourés. Ainsi, les seules étapes manuelles de notre mé- thode dans ce contexte sont le choix du rayon de la carte, et la longueur maximale des α-jonctions. La méthode de dépliage complète et automatisée, depuis la segmentation jusqu’au dépliage, a été appliquée sur les douze patients.

7.3. Application à la stimulation corticale 115

(a) Carte produite sans cor- rection topologique des α- jonctions.

(b) Interface interactive de navigation 2D/3D. Un curseur commun est visible sur les deux vues.

Fig.7.5 – Cartes produites par le dépliage avec et sans correction topologique des α-jonctions.

Pertinence de la correction topologique

Afin de valider la pertinence de l’utilisation de la correction topologique des α-jonctions, nous avons également appliqué la totalité de la chaîne en supprimant l’étape de correction. Les topologies complexes sont alors prises en compte par l’outil de découpage topologique. Cette étape introduit alors de grands découpages à travers la surface, pour relier les bords aux α-jonctions. La complexité de la forme du bord qui résulte de ce découpage entraîne un dépliage conforme qui n’est pas satisfaisant, comme l’illustre la figure 7.5(a) : la bijection entre surface originale et le morceau du plan n’est pas du tout assurée, la carte est « froissée ». La figure 7.5(b), produite en appliquant sur la même surface la chaîne complète permet de comparer le résultat obtenu avec ou sans utilisation de la correction des α-jonctions.

Interface de navigation interactive

Si d’un point de vue théorique le dépliage conforme à bord libre n’assure pas une bijection entre surface initiale et surface dépliée, en pratique dans cette application, les cartes ne comportent pas de replis, excepté parfois sur les bords de la carte. Cette qualité du dépliage nous a permis de développer une interface de navigation 2D/3D, présentant simultanément une carte plane et une vue en coupe de l’IRM initial (figure 7.5(b)). La navigation interactive utilise le résultat du dépliage, et la propriété de bijection résultante pour localiser un curseur commun aux deux vues. L’utilisateur peut à sa guise piloter les vues depuis la carte plane, ce qui entraînera une mise à jour de la vue 3D avec éventuel changement de coupe, ou utiliser la vue 3D pour afficher sur la carte plane le point correspondant le plus proche.

En présentant dans cette interface l’ensemble des cartes générées (section 7.3.2), les praticiens disposent d’une visualisation complète et fonctionnelle des différentes propriétés anatomiques, fonctionnelles et applicatives.

La jeunesse d’une telle représentation et son originalité rendent difficile son évaluation par des praticiens. Cependant, les deux neurochirurgiens avec qui nous avons travaillé autour de ce développement ont pu tester le prototype, et constater que la vue planaire, couplée à la navigation interactive, permettait une visualisation efficace des différentes informations utiles.

116 Chapitre 7. Application médicale

(a) Carte de la distance à l’os (dépliage par ABF).

(b) Carte de la distance aux contacts des élec- trodes (dépliage par ABF).

(c) Carte de la segmenta- tion manuelle (dépliage par ABF. En vignette, coupe d’une vue 3D cor- respondante).

(d) Carte de la distance à l’os (dépliage par circle packing).

(e) Carte de la distance à l’os (dépliage par ABF, avec approximation des plus courts lacets non séparants).

Fig. 7.6 – Visualisation d’informations en utilisant la projection issue d’une IRM anatomique.

Temps d’exécution

Dans le cas d’un traitement postopératoire, voire même dans le cas d’une préparation d’intervention guidée par l’image, les temps de calculs que nous avons obtenus pour la chaîne de traitement complète sont largement satisfaisants. En effet, sur les données que nous avons exploitées, et pour une zone d’intérêt d’un rayon de 120 mm, la génération des cartes depuis l’IRM init ale nécessite moins d’une heure sur un ordinateur portable Intel® Core™ 2 Duo cadencé à 2.60 GHz.

Plus précisément, le temps d’exécution sur un exemple typique est le suivant : environ 10 secondes pour calculer le masque de suppression du scalp et de l’os, puis environ 4 minutes pour la segmentation et le calcul du masque du cerveau. 6 minutes sont ensuite nécessaires pour appliquer la correction des α-jonctions (on a ici choisit α = 15 mm). Le découpage topologique final prend lui 18 secondes. Nous avons testé à la fois un dépliage par circle packing (figure 7.6(d)), qui prend environ 15 minutes, et un dépliage par ABF (figure 7.6(b)), dont le temps d’exécution est sur l’exemple cité de 25 secondes.

À noter ici que les courbures gaussiennes importantes dues aux correction des α- jonctions ne facilitent pas la convergence de ces algorithmes. Ainsi, la première version d’ABF que nous avons utilisée manipulait des flottants simple précision, et divergeait sur de nombreuses surfaces issues d’acquisitions IRM. La version d’ABF embarquée par

7.4. Conclusion et perspectives 117

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