Partie IV Prise en compte de la composante spatiale dans un modèle de
Chapitre 6 - Point sur les modèles intégrant la composante spatiale en
4. Application à un paysage réel
Le modèle spatio-temporel en paysage réel est adapté à An. hyrcanus dans les zones
rurales de Camargue (delta du Rhône). La dispersion des Anopheles est liée à l’évolution des
sites de pontes et à la structure du paysage. Comme démontré par Tran et al. (2008) et Cailly
et al. (2011), les rizières sont les habitats larvaires préférentiels des Anopheles de cette espèce,
ont les larves peuvent être secondairement trouvées dans les roselières et les marais à joncs et
scirpes. Rioux (1958) qualifiait déjà An. hyrcanus d’espèce « accompagnatrice du riz ».
4.1. Description et représentation du paysage réel dans le modèle
La Camargue correspond à la zone du delta du Rhône (entre 43,33° et 43,73° de latitude et
4,05° et 4,93° de longitude). Cette région a un climat méditerranéen caractérisé par des étés
chauds et secs et des hivers doux et humides. Peu peuplée, cette zone est une mosaïque
d’écosystèmes façonnée par la mer au sud et les activités agricoles au nord. Les paysages du
sud sont influencés par la présence d'eau salée et sont composés des associations de plantes
halophiles et de marais salants. Pendant l'été, l'évaporation conduit à un déficit hydrique
compensé par une inondation artificielle liée aux activités humaines (culture, élevage extensif
de taureaux et de chevaux, chasse et pêche). La végétation associée à l'eau douce est
composée de roselières, prairies humides et de forêts riveraines. Les paysages du nord sont
principalement composés de rizières et de pâturages. Il s’agit de la même zone d’étude
présentée dans la Partie II et le Chapitre 5, zone pour laquelle nous disposons de données
entomologiques de terrain pour calibrer ou valider les modèles.
L’ouverture du paysage évolue au cours de l’année en fonction des saisons, mais aussi du
fait de l’activité humaine (agriculture, chasse…). Nous avons considéré que seuls les degrés
d’ouverture des milieux « rizières » et « cultures de céréales » évoluaient au cours de l’année
en fonction du développement des plants. Pour en tenir compte, nous avons réalisé trois cartes
de distance-coût (Fig. IV.7.6) :
- janvier, février, mars, avril, septembre, octobre, novembre, décembre : les rizières et les
champs de céréales
11sont considérés comme ouverts (pas de plant ces mois-là) ;
- mai : les rizières sont considérées comme ouvertes (pas de plant ce mois là) et les
« cultures de céréales
12» comme semi-ouvertes (plantations développées) ;
- juin, juillet, août : les milieux « rizières » et « cultures de céréales » sont semi-ouvertes
(végétation développée).
Il est nécessaire de disposer du coût du chemin entre chaque pixel du paysage et tous les
autres pixels de la grille. Ainsi, il est nécessaire de générer autant de cartes de distance-coût
que de pixels et ce, pour chacune des trois périodes de l’année. La création des cartes de
distance-coût a été automatisée (Python 2.4 et ArcGis 9.2 Spatial Analyst).
Les cartes de distance-coût représentent l’hétérogénéité du paysage qui conditionne le
déplacement des individus (§ IV.7.3.2.2 et § IV.7.3.2.3). Ces cartes sont construites à partir de
cartes d’occupation du sol avec des pixels pondérés par des coefficients liés à l’ouverture du
paysage : 1 (fermé), 2 (semi-ouvert) et 3 (ouvert).
11
Défini comme étant le lieu de culture des céréales, pareil pour rizières
Partie IV Prise en compte de la composante spatiale dans un modèle de dynamique de population
Figure IV.7.6 : Construction des cartes de distance-coût en fonction du mois de l’année à partir de la
carte d’occupation du sol de la Camargue. Pour chacune des trois périodes de l’année, il y a autant de
cartes de distance-coût que de pixels (ou cellules de la grille du modèle spatio-temporel).
La disponibilité et les caractéristiques des sites de ponte d’An. hyrcanus évoluent au cours
de l’année en fonction de l’activité agricole (rizières), de la disponibilité en eau (pluviométrie)
et de la mise en eau des marais de chasse. Nous avons fixé différentes capacités des rizières,
roselières et marais à jonc et à scirpes à constituer des habitats larvaires au cours de l’année,
de très défavorable à très favorable. Nous avons généré cinq cartes d’attractivité et de
disponibilité en sites de ponte à partir de la carte d’occupation du sol (Tab. IV.7.1 et Fig.
IV.7.7) :
- janvier, février, mars, avril, octobre, novembre, décembre : les rizières sont très
défavorables, les roselières sont moyennement favorables et les marais à joncs et scirpes
sont peu favorables ;
- mai, juin : les rizières deviennent très favorables (mises en eau pour la culture) ;
- juillet : les roselières et marais à joncs et scirpes sont peu favorables, alors que les rizières
restent très favorables ;
- août : les roselières sont peu favorables, les marais à joncs et scirpes sont très
défavorables et les rizières moyennement favorables ;
- septembre : les rizières sont peu favorables, les roselières sont moyennement favorables et
les marais à joncs et scirpes sont peu favorables.
Tableau IV.7.1 : Disponibilité et caractéristiques des sites de ponte d’An. hyrcanus évoluant au cours
de l’année en fonction de l’activité agricole (rizières), de la disponibilité en eau (pluviométrie,
température) et de la mise en eau des marais de chasse.Les cartes d’attractivité et de disponibilité en
sites de ponte correspondantes sont présentées dans la figure IV.7.7.
Disponibilité et caractéristiques des sites
de ponte
Mois où le paysage change Rizières Roselières Marais à joncs et scirpes
Jan.,Fev.,Mar.,Avr.,Oct.,Nov.,Dec.
Mai, Juin
Juillet
Aout
Sept.
Attractivités des sites de ponte :
très
défavorable favorable peu moyennement favorable favorable très
0 0,03 0,06 0,9
Les cartes d’attractivité et de disponibilité en sites de ponte ont été définie à partir de la
répartition des larves dans les différents habitats larvaires utilisés dans le Chapitre 5 (Tran et
al., 2008 ; Cailly et al., 2011) (Tab. IV.7.1) : 0 (très défavorable, i.e. pas de site de ponte
disponible), 0,03 (peu favorable), 0,06 (moyennement favorable) et 0,9 (très favorable).
Figure IV.7.7 : Construction des cartes d’attractivité et de disponibilité en sites de ponte en fonction
du mois de l’année à partir de la carte d’occupation du sol de Camargue.
Partie IV Prise en compte de la composante spatiale dans un modèle de dynamique de population