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4.4.1 Mise en place du modèle

Il est maintenant possible d’appliquer la méthode pour la propagation de fissure sur une sphère creuse en compression uni-axiale. Quelques précautions supplémentaires sont à prendre en considération par rapport aux essais sur plaque. Tout d’abord, l’énergie élastique peut être décomposée en énergie élastique de déformation et en énergie élastique de contact, voir la figure4.15. La valeur de rigidité de contact est choisie afin de limiter l’énergie de contact tout en évitant les instabilités liées à une rigidité trop importante.

FIGURE4.15 – Bilan d’énergie lors de la compression, stabilisation et rupture dynamique (0,1 cr) d’une sphère creuse

L’énergie cinétique induite par une mise en compression rapide de la sphère creuse peut amener à une instabilité de la structure avant la rupture. Un coefficient d’amortissement important (α = 0,5) est introduit dans le modèle pendant la phase de

compression et de stabilisation puis fixé à 0 lors de la rupture. Il permet de réduire les effets inertiels. La vitesse de déplacement imposée n’est pas constante comme dans le cas de la plaque mais comporte une phase d’accélération et de décélération limitant la mise en mouvement brusque de la structure.

Enfin, les deux éléments situés à l’extrémité de la sphère aux points de contact avec les plateaux de compression sont fixés avec ces mêmes plateaux afin d’éviter la rotation de la sphère lors de la phase de compression ou de rupture. En effet, dans un premier temps, aucun frottement de contact n’est pris en compte dans le modèle.

La rupture d’une sphère creuse à une vitesse de 0,02 cr est représentée sur la

figure4.16. Le code couleur correspond au déplacement perpendiculaire à la propagation de fissure afin de mettre en évidence l’ouverture en mode I de la sphère creuse. La rupture est ici idéalisée : nette, sans branchement et parfaitement rectiligne. Il serait ici possible de réaliser des propagations de fissure suivant le chemin de fissure observé expérimentalement. Une rupture rectiligne est conservée car les chemins de fissures observés ne présentent pas de bifurcation ou de branchement importants dans l’ensemble. Les vitesses de propagation observées de l’ordre de 0,1 cr à 0,15 cr sont

éloignées d’un facteur 4 par rapport à la vitesse de propagation de 0,6 cr où intervient

théoriquement le branchement pour des raisons inertiels (YOFFE[1951]).

FIGURE4.16 – Propagation d’une rupture dynamique (0,02 cr) sur une sphère creuse de type B Des essais de rupture sont conduits à des vitesses de propagation variant de 0,0001 cr

à 1 cr et pour des longueurs de fissure de 1/2 à une fois le périmètre (0 − 2π) de la sphère

creuse. À la différence des essais sur plaque, une vitesse de propagation de 0,0001 cr est

nécessaire afin d’atteindre la limite haute (peu d’évolution par rapport à une vitesse de propagation de 0,001 cr) du facteur de correction dynamique.

La figure4.17présente l’évolution de l’énergie de rupture cumulée pour une fissure allant d’un angle de 0 rad à π rad sur la sphère creuse. L’énergie de rupture cumulée n’est pas linéaire avant un angle d’environ 3π/8, ce qui veut dire que le taux de restitution d’énergie n’est pas constant. La vitesse de propagation de la fissure ne devrait donc pas être constante sur tout le pourtour de la sphère. De plus, le mode de propagation en mode I n’est pas assuré près des points de contacts. Le cisaillement près des bords implique un mode de propagation mixte de la fissure où il est difficile de quantifier le rôle de chacun des modes. Le suivi de la propagation de fissure par caméra rapide se limite d’ailleurs à la surface visible et il n’est pas possible de remonter à la vitesse de fissuration près de l’amorçage au niveau des points de contacts. La figure4.18présente les mêmes résultats mais normalisés par rapport au résultat ayant pour vitesse de propagation 0,0001cr,

considéré comme le cas quasi-statique. Cette représentation ne permet pas d’identifier directement le facteur de correction dynamique associé à un mode de propagation en mode I.

Le calcul du facteur de correction dynamique doit donc être réalisé sur la partie linéaire de l’énergie de rupture cumulée. Une régression linéaire est réalisée pour chaque vitesse de fissuration entreπ/2 et 3π/4. La valeur maximale du coefficient directeur de

FIGURE4.17 – Évolution de l’énergie de rupture cumulée lors de la propagation d’une fissure au sein d’une sphère creuse en fonction de la position angulaire du sommet de fissure à différentes vitesses de propagation

la pente est donnée par le régime de propagation supposé quasi-statique. Le facteur de correction dynamique pour chaque vitesse de propagation est estimé en comparant le coefficient directeur de la pente ou l’énergie dissipée par rapport au cas quasi-statique.

Ce post-traitement est effectué pour 3 géométries de sphères différentes ayant un rapport rt de 0,12 ; 0,08 et 0,043. Les deux derniers rapports concernent respectivement

les sphères de type B et A.

Les résultats sont présentés sur la figure 4.19, le facteur de correction dynamique est tracé en fonction des vitesses de fissuration par rapport à la vitesse des ondes de Rayleigh. Un zoom sur la figure permet de s’intéresser à la plage de vitesse observée expérimentalement. La première constatation est que l’évolution du facteur de correction dynamique ne suit pas du tout une décroissance quasi-linéaire comme dans le cas de la plaque. Le taux de restitution d’énergie critique dynamique GIDc∗ estimé dans la

première partie par le rapport 1 − ˙a/cr n’est donc pas adapté dans le cas de sphères

creuses. Les effets inertiels générés par la propagation de fissure sur une sphère creuse sont beaucoup plus importants que sur plaque. Une vitesse de propagation supérieure à 0,2 cr implique un facteur de correction dynamique proche de 0 donc une valeur de

GIDc proche aussi de 0. Dans ce cas, la vitesse de propagation est limitée bien avant 0,6 cr

puisque GIDc ne peut être égal à 0.

Les résultats mettent aussi en évidence l’influence de la géométrie : plus le ratio rt

est faible, plus les effets inertiels sont importants pour une même vitesse de propagation. C’est d’ailleurs pour cela qu’expérimentalement, la vitesse de propagation observée est légèrement supérieure pour les sphères de type B par rapport aux sphères de type A. Pour des vitesses de propagation de 0,1 cr le facteur de correction dynamique est de l’ordre de

FIGURE 4.18 – Facteur de correction dynamique global d’une sphère creuse en fonction de la position angulaire du sommet de fissure à différentes vitesses de propagation

FIGURE4.19 – Facteur de correction dynamique en fonction de la vitesse de propagation de la fissure sur sphère creuse pour différentes épaisseurs de coque

4.4.2 Énergie de frottement

Les calculs précédents n’intègrent aucune autre dissipation d’énergie que la rupture. Il est possible d’étudier l’influence du frottement entre la sphère et les plateaux ou entre les bords de la fissure. Ces deux possibilités ont été analysées. La figure 4.20illustre les résultats concernant l’introduction de frottement aux bords de la fissure : un frottement inter-éléments pour des vitesses de propagation de 0,025 cr à 0,35 cr. Les résultats pour

l’introduction de frottement au niveau des plateaux de compression étant similaires, ils ne sont pas présentés ici.

On observe sur la figure4.20aque le frottement n’a quasiment aucun impact sur le facteur de correction dynamique. Par contre, si l’on s’intéresse aux autres énergies et notamment aux effets inertiels, le frottement entraîne une diminution de ceux-ci. Plus le temps de simulation est important (et plus la vitesse de propagation est faible) et plus le système va dissiper l’énergie des effets inertiels résiduels par le frottement, voir la figure 4.20b. C’est d’ailleurs ce qui se passe expérimentalement, la sphère oscille avant de se stabiliser après un certain temps, dû entre autres aux différents frottements.

(a) Facteur de correction dynamique en fonction de la vitesse de propagation

(b) Effets inertiels (énergie élastique et cinétique) en fonction de la vitesse de propagation

FIGURE4.20 – Analyse numérique de l’influence du frottement des surfaces rompues sur sphère creuse (rt= 0, 08)

4.4.3 Application du facteur de correction dynamique

Le facteur de correction dynamique est appliqué pour les différents essais et une synthèse des résultats est présentée dans le tableau4.2. Le taux de restitution d’énergie critique dynamique est calculé d’une part avec la relation 1 − ˙a/cr (GIDc∗) puis avec les

nouvelles relations dépendantes de la géométrie de la sphère creuse (GIDc). Une forte

dispersion des résultats est observée (0,4 à 0,84 kJ/m2) alors qu’une unicité des résultats est attendue. En effet, même si le taux de restitution d’énergie critique dynamique est dépendant de la vitesse de fissuration, les vitesses sont assez proches pour ne pas provoquer une variation importante de GIDc. Si cette méthodologie ne permet pas de

remonter à une valeur précise de GIDc, elle parvient néanmoins à mettre en évidence la

grande part d’effets inertiels lors de la rupture d’une sphère creuse. Elle montre aussi que la dispersion sur la mesure de la position du sommet de fissure (et donc du calcul de la vitesse de propagation) a une grande influence sur le calcul du facteur de correction dynamique. Une erreur de 5 % sur la vitesse de fissuration peut influencer la valeur du facteur de correction dynamique de l’ordre de ± 50 % alors que dans le cas de la relation

linéaire du facteur de correction dynamique sur plaque, l’erreur finale sera toujours de 5 %.

La valeur moyenne de GIDc calculée est ici de 550 ± 200 J/m2. JOUDON[2014] trouve

des valeurs de GIDc de 220 J/m2à 800 J/m2 pour des vitesses de propagation variant de

135 m.s−1à 440 m.s−1sur la résine pure Hexply R

M21. Les résines de type époxyde faisant intervenir des charges micrométriques de type silice ont un taux de restitution d’énergie critique estimé entre 100 et 1400 J/m2(KOHet collab.[1993];RAGOSTAet collab.[2005]).

TABLEAU4.2 – Synthèse de la mesure des vitesses de propagation de fissure et nouvelle estimation de GId c, moyenne des résultats de chaque type d’essai

Sphère rt v (m.s−1) a/c˙ r (N) GI0(kJ/m2) GId c* (kJ/m2) GId c (kJ/m2)

A 0,043 8, 3 10−5 0,08 ± 0,01 2,7 ± 0,4 2,5 ± 0,4 0,45 ± 0,4 B 0,08 8, 3 10−5 0,12 ± 0,02 4,0 ± 0,7 3,55 ± 0,7 0,84 ± 0,5 A 0,043 1,53 ± 0.17 0,09 ± 0,0 3,9 ± 1,2 3,5 ± 1,1 0,69 ± 0,3 B 0,08 1,32 ± 0.18 0,14 ± 0,02 3,4 ± 0,3 2,9 ± 0,25 0,4 ± 0,3

4.5 Prise en compte numérique du taux de restitution