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Antoine Peillon. - Je vous remercie de vos propos sur le rôle de ceux qui ont comme métier de faire connaître au public la réalité du

Dans le document N 87 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE (Page 181-184)

AUDITION DE M. ANTOINE PEILLON, JOURNALISTE AU JOURNAL LA CROIX

M. Antoine Peillon. - Je vous remercie de vos propos sur le rôle de ceux qui ont comme métier de faire connaître au public la réalité du

intérêts. Aujourd’hui avouer une fraude fiscale n’est pas du tout profitable.

Même quand on fait ses aveux bien orchestrés médiatiquement, on ne paye rien. Le seul motif qui poussera les fraudeurs à avouer serait la possibilité de payer moins dans le cas où ils auraient avoué. L’Etat doit être fort. Je rêve qu’un jour l’éducation soit suffisante pour que l’on puisse se passer d’un système répressif, mais nous avons pour l’instant besoin d’un système judiciaire fort. Il est en effet aujourd’hui tellement faible que les fraudeurs règnent en maître. Je suis informé quasiment quotidiennement de ce qui se passe dans la banque UBS France, au plus haut niveau. La direction se moque du monde. Ses déclarations récentes sont des pieds-de-nez à la justice et à l’information. UBS paye des fortunes à des cabinets d’avocats et des cabinets d’enquête privés, assurée que rien ne lui résistera. C’est la mentalité des fraudeurs et de ceux qui les servent.

M. Jacques Chiron. – Nous avions évoqué la possibilité de faire de la communication auprès de l’opinion publique. Cette dernière ne peut comprendre pourquoi elle est imposée normalement quand certains viennent se réfugier fiscalement sur son territoire et sont imposés anormalement. En Suisse, certains cantons refusent ce type de situation. Je salue votre rôle en tant que journaliste.

Le découplage entre le lieu réel de l’économie et les lieux juridiques n’est donc pas acceptable. Les États vont-ils s’en rendre compte ? Cela pourrait permettre de régler la fraude de certains grands groupes.

M. Antoine Peillon. - Je vous remercie de vos propos sur le rôle de

L’organe de presse français s’est désolidarisé de la publication des fichiers. Je suis interpellé par le silence qui règne aujourd’hui sur cette question.

M Antoine Peillon. – J’ai eu connaissance de cette enquête avant sa publication. J’ai été informé des données précises recueillies, notamment concernant Singapour. J’ai pu constater la qualité de ces informations, leur défaut étant qu’elles ne comportaient que des noms de sociétés écrans. Il n’y avait en effet aucune donnée précise concernant les comptes bancaires et les ayants droit. L’évaluation de l’aspect illégal ou non de ces structures juridiques n’a pas non plus été effectuée. Le nom de Monsieur Augier a par exemple été cité sans que le journal ait la moindre capacité de nous éclairer sur la légalité de ses sociétés.

Je n’aurais pas personnellement publié cette enquête en l’état. Je n’en ai d’ailleurs pas compris la finalité ; la preuve en est qu’elle n’a eu aucune suite.

Le renseignement s’interroge par ailleurs beaucoup sur une manipulation de l’opinion publique, notamment européenne, pour des motifs psychosociaux faisant partie de la guerre économique en cours entre le monde anglo-saxon et le vieux monde européen. Certaines personnes du renseignement européen décryptent les choses ainsi.

M. Eric Bocquet. – La DCRI a remis un document à nos collègues députés, faisant état de la difficulté à exercer leur mission. Qu’est-il advenu de cette démarche ?

M. Antoine Peillon. – J’ai publié dans La Croix un article sur ce sujet. La note était double. La première partie analysait le manque d’articulation et de moyens de tous les services de police œuvrant dans la répression de la fraude fiscale. La seconde portait sur le défaut d’action judiciaire concernant la question d’UBS alors que des officiers avaient eu connaissance très tôt des délits. Ils ont été empêchés de transmettre ces informations au judiciaire sous des prétextes de secret-défense mais selon eux, davantage pour des motifs de protection de certains clans politiques.

Cela a fait scandale à l’Assemblée Nationale. La note a été perçue par certains comme fantaisiste.

Ces officiers ont décidé de transmettre cette note au juge d’instruction. Deux juges se sont saisis de la question. Les sources policières ont été reçues au moins deux fois.

Mme. Nathalie Goulet. – J’ai déposé un amendement pour que la Haute Autorité de Transparence puisse avoir des liens institutionnels avec TRACFIN. Pensez-vous que cela soit une bonne idée ?

M. Antoine Peillon. – Je ne pense pas avoir la capacité de vous répondre. Cependant, l’organisation TRACFIN dispose d’une grande quantité de données. La problématique du passage au judiciaire se pose encore une fois. Il existe des pratiques très discrétionnaires. Je sais que

certaines informations de grande qualité ont été conservées par la direction de TRACFIN et qu’elles n’ont pas été exploitées judiciairement. Cet outil est très efficace mais sous-exploité.

M. François Pillet, président. – Je vous remercie beaucoup. Vous avez apporté de riches informations.

Il est beaucoup fait mention de la Suisse, du Luxembourg, de Londres, du Delaware. L’évasion fiscale est-elle vraiment une invention occidentale ? La Russie, la Chine et les Etats du Moyen-Orient sont-ils coopératifs ?

M. Antoine Peillon. – Nous avons l’assurance qu’ils ne le sont pas.

Hongkong s’est transformée en une place particulièrement opaque et résistante à toute enquête judiciaire. L’évasion fiscale est devenue un outil normal de notre système économique. Les pays que vous citez sont particulièrement concernés par l’articulation terrible qui existe entre le crime organisé et la fraude fiscale. Toutefois, l’outil suisse reste central. J’ai ainsi constaté le besoin des grands de ce monde d’évoluer dans des environnements luxueux. La dimension mondaine est un motif sociologique fort.

M. François Pillet, président. – Nous vous remercions tous beaucoup.

AUDITION DE M. FABRICE ARFI, JOURNALISTE À

Dans le document N 87 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE (Page 181-184)