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et au troisième étage d'une vieille demeure patricienne. Vaste salle basse, mal éclairée, pavée de briques, où l'on accédait par un escalier à balustrade magnifique. Doumergue faisait si bien sa réclame que le conférencier avait quelque peine à se frayer un passage entre les petites chaises de paille, serrées les unes contre les autres, qu'occupaient des auditeurs venus souvent de loin: jeunes filles du Service social, Eclaireurs et Eclaireuses, étudiants en théo-logie, élèves des Ecoles Normales d'instituteurs, Sévriennes même, auxquels s'étaient jointes pour la circonstance nos anciennes élèves habitant Paris, dont plusieurs étaient devenues pour Doumergue des collaboratrices et des amies : Ml1e Giroud, déjà nommée, Mme Oéléamont, directrice du Jardin d'Enfants de la Cité Rothschild, d'autres encore.

Les premières fois, s'il me souvient bien, les conférences de l'Institut se donnèrent en plein hiver. Doumergue voulut bien en repousser la date à une saison plus favorable. C'est en mai, qu'en 1926 nous fîmes con-naissance du coquet hôtel particulier acquis au Boulevard Montparnasse pour être la Maison de Foi et Vie et du Service social. Le décor était plus avenant qu'à la Place des Vosges. Doumergue était resté le même, aussi bienveillant, aussi soucieux de nous mettre en contact avec ceux qui pouvaient nous intéresser et nous instruire. Il faisait présider nos conférences par des professeurs de Sorbonne, comme la première fois qu'il nous avait appelés.

De notre côté, nous lui fîmes connaître nos collaborateurs. M. Ferrière et MJle Descoeudres, puis M. Piaget, Mlle Butts, M. Dottrens prirent successi-vement leur place dans la Semaine de l'Institut Rousseau à Paris.

Avec Paul Doumergue notre maison a perdu un de ses plus anciens et de ses plus fidèles amis.

Cahiers de Foi et Vie. HomtnL18e à Pcwl Dormergue. 1859-1930. Paris 1931.

XXII

LES SOCIÉTI.S D'AMIS

L'existence hors de Genève, et même hors de Suisse, de Sociétés d'Amis de l'Institut J. J. Rousseau, est signilicative: si notre maison doit vivre, ces sociétés seront appelées à jouer encore dans l'avenir un rôle intéressant.

Qui sait si la commémoration de nos vingt ans, avec la constatation des périls toujours renaissants qui nous menacent, n'aura pas pour effet de redonner une nouvelle vie à ces groupes d'amis, auxquels, voici dix ans, nous avons dO, une première fois déjà, notre salut.

Je ne connais pas d'une façon très précise les origines des Sociétés d'Amis. Elles sont nées en dehors de nous, dans l'esprit et le cœur d'une de nos élèves, MJle Marcelle Chavannes, si je suis bien renseigné. Et c'est à ses démarches, appuyées par M. Ed. Vittoz, que nous en dOrnes la première réalisation : la création de la Société vaudoise des Amis de l'1 nstitut J. J.

Rousseau, le 21 avril1921. A Zurich, ce furent deux anciennes élèves aussi, M116 Usteri et MJle Baer qui se mirent en campagne. On parle encore de la belle crânerie avec laquelle elles surent relancer tous ceux qui de près ou de loin étaient suspects d'être de nos amis. A Neuchâtel, un ancien élève de nos Cours de Vacances, M. Samuel Robert, avec MJle Lucie Schmidt de l'Office d'Orientation professionnelle et M. Félix Béguin, directeur de l'Ecole Normale. A Genève, nos élèves s'adressèrent d'abord à d'anciens collabora-teurs : M. Henri Reverdin et M. Georges Thélin; ce nous fut l'occasion de nous découvrir bien des amis inconnus: William Rosier, par exemple, qui, rentré dans le rang, n'avait plus à notre endroit les mêmes objections ou les mêmes craintes. En même temps l'Espagne, Madrid et Barcelone à la fois, répondait aux démarches de MJle Mercédès Rodrigo et de M. Pedro Rossello;

un de nos tout premiers élèves, devenu secrétaire de l'Ecole du Travail, M.

Vila, acceptait la présidence de l'association nouvelle, et nos amis réussirent à intéresser d'emblée à leur effort les plus illustres représentants de l'école espagnole : MM. Manuel Cossio, Domingo Bames, José Castillejo et bien d'autres.

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A ces cinq premières Sociétés d'Amis, contemporaines de notre réor-ganisation de 1921, il parut d'abord que plusieurs autres viendraient s'ajou-ter naturellement : nous avions tant et de si bonnes connaissances au Tessin, en Belgique, en Hollande, en Roumanie; plus tard nous avons pensé que la Palestine peut-être ou la Pologne suivraient l'exemple de l'Espagne, et il en a plusieurs fois été question. En fait une seule société est venue se joindre, en dix ans, à celles qui avaient fait un si beau départ : la Société jurassienne des Amis de l'Institut j. j. Rousseau, fondée en 1928, au lendemain de notre assemblée générale de Berne. La prospérité revenue paraissait avoir ôté à nos Sociétés d'Amis quelque chose de leur raison d'être. Elles ont pu se demander à quoi elles servaient et si les quelques cents francs de cotisation que leurs membres s'imposaient pour nous justifiaient leur existence.

Raison de plus pour rappeler ici certaines initiatives prises par plu-sieurs d'entre elles.

La Société espagnole, profitant des connexions de notre ami M. Barnes avec la société éditrice La Lectura, lança tout de suite une petite collection de brochures bleues, pour publier quelques échantillons des productions littéraires de notre maison.

Depuis la fondation du B. 1. E., l'Association espagnole erses éditions se sont surtout intéressées à cet aspect-là de notre activité. Quoique organi-quement indépendants de la Société des Amis, nous avons pu considérer comme une sorte de prolongement de son influence les cours de Barcelone, qui furent placés sous nos auspices par Narcis Maso, Alexandre Gali et leurs amis.

je parlerai tout à l'heure des invitations qui nous furent adressées par différentes Sociétés d'Amis. Nos élèves zurichoises ont été particulière-ment fidèles à se réunir chaque fois que l'un de nous prenait la parole dans l'Athènes de la Limmat. Elles ne s'en sont pas tenues là. On leur doit une exposition de jeux éducatifs, commentée par un fort intelligent catalogue, qui vise à faire connaître les jeux Descoeudres et le matériel de la Maison des Petits. Installée successivement à Zurich, à Glaris, tout récemment à Berne et dans d'autres villes encore, elle a fait une utile propagande non seulement pour notre Ecole ou pour nos jeux, mais aussi pour les idées qui les inspirent.

A Genève, on le comprend, l'activité des Amis de l'Institut n'a pas pu se distinguer beaucoup de celle de l'Institut lui-même, et la Société a connu des heures de marasme. Elle brilla d'un vif éclat, en 1923, quand elle prit à sa charge toute l'organisation des (< journées de l'Institut», qui susci-tèrent tant de dévouements ingénieux pour nous procurer de quoi nous installer rue Charles Bonnet, et qui y réussirent si bien.

LES SOCIÉTÉS n'AMIS 1S3

La Société des Amis de Neuchâtel, après avoir été pendant quelques années la moins active, s'est réorganisée, en 1929, d'une façon qui marque peut-être la voie où d'autres sont appelées à s'engager. Elle a changé de nom;

c'est aujourd'hui la Société n~uchâteloise des Amis de l'Ecole Active. Aux termes de ses statuts, elle a pour but <<de répandre parmi ses membres et dans le public la connaissance des principes de la pédagogie moderne et de la pratique de l'Ecole Active; d'intéresser ses membres aux expériences faites dans les classes d'essai du canton; d'entretenir des relations avec l'Institut de8 Sciences de l'Education à Genève».

Les conférences que la Société neuchâteloise a données en 1930 ont consolidé la situation des deux classes expérimentales de Neuchâtel, dont les titulaires, Mlle Bosserdet et M. William Perret, sont de nos anciens élèves.

Elles ont décidé la Commission scolaire à créer une troisième classe de façon à permettre que l'expérience tentée soit poursuivie jusqu'au terme de l'école primaire. La Société des Amis de l'Ecole Active se heurte à beaucoup d'op-positions, dont ce n'est pas ici le lieu de rechercher la cause: une connais-sance même sommaire du cœur humain suffit à la deviner. Il est heureux qu'aux vieux amis de notre Institut soient venues se joindre les personnes les mieux qualifiées pour témoigner en faveur de la pédagogie nouvelle : les parents des enfants instruits par nos élèves.

Quant à la Société jurassienne, à peine née, elle nous a, en 1931, procuré l'~ion d'un travail des plus captivants: cette enquête statistique et psy-chologique dans toutes les classes du jura, qui lui avait été demandée à elle-même par le Comité de l'Asile jurassien pour enfants anormaux, et dont nous avons parlé plus haut.

En bref, on le voit, chacune de nos Sociétés d'Amis a trouvé, à un mo-ment donné, un rôle utile à remplir, outre celui qui consistait à nous venir en aide. Nous ne doutons pas qu'elles ne prouvent encore dans l'avenir leur raison d'être. A leurs fondateurs dans le passé, à leurs animateurs, nous sommes heureux de cette occasion de dire une fois encore merci.

xxm

VOYAGF!5

Il convenait de faire une place à part aux invitations adressées à notre maison tout entière, mais l'on se tromperait si on pensait limiter aux

«Semaines • que j'ai rappelées, l'action exercée hors de Genève par les pro~

fesseurs de l'Institut }. }. Rousseau. Chacun de nous, pendant ces vingt années a beaucoup voyagé. Nous serions bien ingrats en ne rappelant pas tout ce que nous avons dû d'inspirations stimulantes, aux personnalités et aux institutions que nous avons ainsi appris à connaître.

Il serait exagéré de mettre tous nos voyages à l'étranger au compte de l'Institut. Dès avant 1912, Claparède était persuadé, comme il l'écrivit dans notre Intermédiaire, que «le meilleur moyen de supprimer les distances, c'est de les franchir 1>. Il était allé voir Haeckel à lena, Tolstoï à }asnaia Poliana, Lombroso à Turin, et combien d'autres. Il croyait aux bienfaits des relations personnelles qui s'ébauchent dans les congrès et, non content d'accueillir et d'organiser à la perfection ceux qui siégeaient à Genève, il s'était transporté déjà à tous les coins de l'Europe pour l'amour de la phi~

losophie, de la psychologie, de la psychiatrie, de la psychanalyse et de quoi

sais~je encore? Même sans l'Institut, il se fût certainement trouvé depuis à Oxford, à Groningue, à Yale et en bien d'autres lieux.

Nous nous bornerons donc aux voyages provoqués par l'existence même de notre Institut: aux voyages d'études qui ont enrichi notre ensei~

gnement, aux invitations aimables et flatteuses obtenues pour nous par nos anciens élèves, aux missions dont quelques~uns de nos collaborateurs ont été chargés. Même ainsi nous ne pourrons pas tout dire: Mlle Descoeudres, courant l'Autriche et le Danemark, M. Vittoz en Belgique, M. Piaget pous~

sant jusqu'en Ecosse par exemple, ont été trop souvent d'une discrétion exagérée: aucun article de journal n'a consigné le récit de leurs randonnées pour la bonne cause. Heureusement que du voyage de M. Dottrens à tra~

vers l'Europe est sorti un beau livre sur l'Autriche*, et du périple de M. Fer~

rière un autre suri' Amérique du Sud*. Mais le savant rapport de M. Cla~

VOYACFS JSS

rède sur sa mission en Egypte est resté inédit *; ses aventures au Brésil alors que les balles sifflaient à Bello Horizonte, ne sont connues que de ceux qui ont entendu ses récits à l'Amicale.

Au moins que nos hôtes ne croient pas que si nous n'évoquons pas ici tattt de souvenirs agréables que nous leur devons, c'est la mémoire du cœur qui est en défaut. Eh non! c'est simplement que ce petit livre n'est pas une

«Géographie cordiale • du monde et qu'en tout il faut savoir se bomer.

Qu'on songe à ce que peuvent représenter, je ne dis pas de kilomètres, mais d'images pittoresques dignes d'être conservées, les pérégrinations d'une dizaine d'hommes et de femmes pendant vingt ans dans vingt pays au moins de quatre ou cinq continents 1 Evoquer cela en moins de dix pages! Moscou et San F ran_cisco, Le Caire et Copenhague, Edimbourg et Istamboul, Athènes et Varsovie, Bucarest et La Haye, Smyrne et Rio de Janeiro. On conçoit que nous y renoncions.

Mais parce que nous ne pourrons pas tout dire, est-ce une raison pour ne rien dire du 'tout?

Parmi tant de pages d'album, j'en choisirai deux seulement, particuliè-rement colorées peut-être et où en tout cas l'affection dévouée d'anciens élèves s'est marquée de façon touchante: le voyage de M. Claparède à Madrid en 1923,le mien en Turquie en 1930.

Le voyage de Claparède avait été préparé avec amour. Dès sa fondation l'<< Association espagnole des anciens élèves et amis de l'Institut

J.

J. Rous-seau» s'était proposé d'établir des relations personnelles entre« los hombres de l'lnstituto Rousseau • que M. Rosselle> avait présentés en une causerie familière au Musée pédagogique de Madrid, et les maîtres de l'Escuela Superior del Magisterio. En 1920 déjà, M. Claparède avait pris part à l'Ecole d'été de Barcelone.

En 1923, ce fut la ]un ta para Ampliacion de Estudios qui invita M. Clapa-rède à venir conférencer à Madrid, cette Junta à qui nous avions dû, dès la première année de l'Institut et si souvent depuis lors, des élèves boursiers qui ont compté parmi nos meilleurs étudiants, cette junta qui a fait si fidèlement une place à Genève dans les voyages pédagogiques à travers l'Europe qu'avant la dictature elle organisait chaque année pour une trentaine d'inspecteurs primaires espagnols. - cette Junta dont les directeurs, MM. Santullano et Castillejo, sont devenus pour nous de bonne heure de vrais amis. Elle est non seulement dans ses initiatives, mais dans son existence même, un exem-ple si saisissant de ce que peut le libéralisme, qu'il vaut bien la peine d'en retracer en deux mots l'origine. A son contact, en communiant dans le culte de deux saints laïques. ses héros, Don Francisco Giner de los Rios dans le

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passé, Don Manuel Cossio dans le présent, tous ceux qui ont eu le privilège d'entrer en relation avec elle ont appris de grandes leçons.

Donc, en 1907 l'Espagne avait un gouvernement libéral. Le ministre·

de l'Instruction publique fit venir Don Francisco Giner, qui depuis trente ans, avec une modestie, un effacement de soi comme il n'y en a pas eu beau-coup de pareils dans l'histoire de la culture, travaillait silencieusement dans l'Institution libre qu'il avait fondée. «Que puis-je faire pour l'école et la science dans mon pays~ demanda le ministre. -Rien, Monsieur.- Mais

encore~ Vous voyez ma bonne volonté. Que puis-je faire~ - Rien, vous dis-je. L'Espagne a besoin d'hommes; aucun décret ministériel ne saurait lui en donner. - Mais ... tout de même; je veux faire quelque chose. Que faut-il faire~ - Eh bien! Si vous portiez chaque année au budget de l'Etat une somme de 1,000,000 de pesetas pour l'avancement des études, que vous mettiez cette somme à la disposition d'un comité d'hommes de science choisis sans aucun égard à leurs opinions politiques et religieuses, et que vous vous interdisiez d'en influencer l'emploi, je crois que vous auriez bien mérité de l'école et de la science espagnole. • Ainsi fut fait. La junta com-prend tout ce que l'Espagne a de plus remarquable comme savants : sous la monarchie déjà, le prêtre y coudoyait le socialiste; elle a pendant vingt-cinq ans (sauf, il est vrai, vers la fin de la dictature de Primo de Rivera) disposé en toute liberté des sommes mises à sa disposition. D'abord elle a envoyé des jeunes hommes à l'étranger (M. josé Castillejo, son secrétaire actuel, fut le premier de ses boursiers), ensuite elle a créé les laboratoires, les biblio-thèques qui leur ont permis de poursuivre leurs travaux; elle a fondé pour eux des revues savantes. Pour les étudiants eux-mêmes elle a créé des << rési-dences>}, vrais foyers de vie intellectuelle, simples et chauds. Pour amorcer la réforme de l'instruction secondaire, elle a créé 1'/nstituto-Escuela de Madrid, sorte de collège modèle; école active où la coéducation des sexes est mise en pratique. Ça été un grand privilège pour les professeurs de notre Institut Rousseau de faire la connaissance de cette poignée d'hommes qui, sous la monarchie, sans faire de politique de parti (du moins pour la plupart d'entre eux) préparaient ce que l'Espagne nouvelle a de meilleur et de plus riche en promesses.

Donc, comme il convenait (nos amis espagnols ont un sens très heureux des hiérarchies), ce fut M. Claparède qui, en 1923, nous fraya la voie vers Madrid. Moi-même, MM. Piaget, Walther, Ferrière, avons depuis mis nos pas dans les siens.

Au Musée pédagogique, dirigé par M. Cossio, nos anciens élèves, M11e Rodrigo et M. Rossello, faisaient depuis le Jer janvier 1923 un cours

VOYAGES 157 de technique pédagogique pour instituteurs qui avait réuni 20 élèves (choisis parmi 75 candidats) venus de toutes les parties de l'Espagne et auxquels le Ministère avait accordé pour cela un congé de six mois. A Cara~

banchel, venait de s'ouvrir, de par l'initiative énergique de M. César de Madariaga, cet admirable 1 nstitut pour la rééducation des mutilés du tra~

vail, dont Mlle Rodrigo encore et un autre de nos élèves, M. José Maillart, allaient devenir les psychologues et les orienteurs attitrés.

Aussi M. Claparède fut~il reçu avec des honneurs exceptionnels. Le ministre de l'Instruction publique assista à sa première conférence et à un dîner offert en son honneur à la Légation suisse. Il invita le groupe directeur de l'Association de l'Institut à un voyage à Tolède, pour lequel il mit à leur disposition un wagon~salon officiel. Qui a visité Tolède en compagnie de M. Cossio ( experto cr ede Roberto) ne risque pas de l'oublier.

Depuis, M. Claparède en mission pédagogique, a été présenté à un roi et à des présidents; M. Maiche, M. Ferrière. ont été reçus par des dictateurs; des chefs de gouvernement, des ministres nous ont dit bien des choses aimables. Si la tête ne nous a pas tourné, c'est peut~être que tout cela a commencé par un voyage en Espagne qui comprenait une visite à l'Escurial.

N'allez pas croire, pourtant, que nous soyons blasés. Il suffira pour dissi~

per cette impression que je laisse entrevoir quelque chose des souvenirs que m'a laissés mon voyage en Turquie au printemps de 1930. Ici, c'est Ferrière qui avait ouvert la voie. Il a raconté dans sa revue Pour l'Ere Nou~

velle, la réception qui lui fut faite là~bas, en 1929, au moment même où la Turquie adoptait l'écriture latine. Mais les origines mêmes de cette invita~

tion ne s'expliquent que si nous remontons à plus de quinze ans en arrière.

En 1913, un beau matin, je voyais entrer dans mon petit bureau de la T aconnerie une demi~douzaine de messieurs. Le consul général de Turquie à Genève venait me présenter cinq de ses compatriotes, directeurs d'Ecoles Normales pour la plupart, qui avaient été choisis par leur gouvernement pour faire, à Genève, des études supérieures de pédagogie. Ils savaient peu le français. En tout cas, cela va de soi, ils ne le parlaient pas entre eux : l'entretien me convainquit que le ioc, ioc que je n'avais entendu encore qu'au Bourgeois gentilhomme n'était pas un vocable inventé par Molière. Si l'on se rappelle qu'à cette époque l'Institut était une école sans attache officielle qui n'avait pas deux ans d'existence, on ne s'étonnera pas que j'aie été dura~

blement impressionné par cette visite et par la confiance que nous témoignait le gouvernement ottoman.

Le séjour de ces messieurs à Genève fut traversé par la guerre. Tous

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