• Aucun résultat trouvé

Quarante ans apr` es : le mariage de Cassini II et les nouveau

Dans le document Science, académisme et sociabilité savante (Page 146-200)

r´eseaux d’alliance.

Pr´eparatifs et strat´egies matrimoniales : le mariage de Jacques Cassini. Des trois enfants de Jean-Dominique Cassini et Genevi`eve de Laistre, un seul vit suffisamment longtemps pour se marier. Il s’agit de leur fils Jacques, n´e `a l’Observatoire le 18 f´evrier 1677 et ´egalement connu sous le nom de Cassini II. On a vu qu’il marche rapidement sur les pas de son p`ere, qui le confie aux meilleurs professeurs de l’´epoque : lui-mˆeme, bien sˆur, mais aussi par exemple son coll`egue `a l’Acad´emie le math´ematicien Pierre Varignon, ou son propre ´el`eve Jean-Mathieu de Chazelles2. `A l’exemple de son p`ere, le jeune Cassini II soutient, avec brio bien qu’avec son fr`ere, plusieurs th`eses de math´ematiques, comme ses Theses mathematicæ de optica soutenues en 1691 au Coll`ege royal et d´edi´ees au duc de Bourgogne3.

Si cette continuation par le fils de la profession du p`ere est chose habituelle dans le monde professionnel de l’´epoque, il ne l’est pas dans le monde strictement scientifique. Et si Cassini n’est pas le seul `a fonder une « dynastie acad´emique », la profession de savant n’est pas sans avoir des points communs avec la foi, et bien souvent les ´eloges de Fontenelle font des scientifiques en herbe des ˆetres touch´es par une sorte de r´ev´elation divine, chez qui la vocation se d´eclare bien souvent `a la suite d’une esp`ece de ren- contre mystique, g´en´eralement celle de Descartes4. Contrairement `a beaucoup d’autres membres de l’Acad´emie des sciences dont la vocation scientifique a ´et´e contrari´ee par leurs parents5, tout comme la vocation religieuse de certains autres personnages, Cas- sini II a pu profiter des encouragements et de l’influence de son p`ere et de ses amis

1. Voir par exemple la lettre que Cassini adresse `a Bignon en avril 1701, `a propos de sa continuation des travaux de la m´eridienne, et dans laquelle on apprend qu’il a non seulement emmen´e sa femme avec lui, mais mˆeme qu’il n’h´esite pas `a se d´etourner de son chemin pour la conduire aux bains de Balaruc pour la soulager d’un rhumatisme au bras (transcription dans Joseph Laissus, « `A propos de Jean-Dominique Cassini », dans Comptes rendus du 90e congr`es national des soci´et´es savantes, Nice, 1965, section des sciences, Paris : Gauthier-Villars/Biblioth`eque nationale, 1966, p. 14).

2. Charles B. Paul, Science and immortality : the ´eloges of the Paris Academy of Sciences (1699- 1791), Berkeley/Los Angeles/Londres : University of California Press, 1980, note 20 p. 171.

3. Jacques Cassini, Theses mathematicæ de optica, propugnabuntur a Jacobo Cassini Parisino, die Veneris 10 Augusti MDCXCI a tertia ad Vesperam, in Collegio Mazarino ; ouvrage imprim´e avec celui de son fr`ere aˆın´e Jean-Baptiste, Problemata solvet frater ejus Joannes-Baptista Cassini Parisinus, die 2 septembris MDCXCI, a tertia ad Vesperam, in Observatorio Regio. Arbiter erit Petrus Varignon, e Regia Scientiarum Academia, et in Collegio Mazarinaeo Matheseos Professor, Paris : Vve Claude Thiboust, 1691, 59 p.

4. Voir par exemple l’´eloge de Malebranche, dans HARS 1715, p. 94 : « Un jour comme il passoit par la rue S. Jacques, un libraire lui pr´esenta le Trait´e de l’Homme de M. Descartes, qui venoit de paroˆıtre. Il avoit vingt-six ans, & ne connoissoit Descartes que de nom, & par quelques objections de ses Cahiers de philosophie. Il se mit `a la feuilleter le livre, & fut frapp´e comme d’une lumi`ere qui en sortit, toute nouvelle `a ses yeux. Il entrevit une science dont il n’avoit point d’id´ee, & sentit qu’elle lui convenoit... ». On peut rapprocher cette exp´erience presque mystique de la science de la « Nuit de feu » de Pascal, v´ecue le 23 novembre 1654 et au cours de laquelle il re¸coit la r´ev´elation divine, mˆeme s’il s’agit dans son cas du « Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, Dieu de Jacob, non des philosophes et des savants. »

5. On se souvient que Claude-Antoine Couplet a ´et´e forc´e par ses parents de suivre des ´etudes de droit avant de se placer sous la protection de Buot.

pour marcher sur ses pas, avec plus de rapidit´e toutefois puisqu’il a l’avantage sur eux d’ˆetre, quasiment d`es sa naissance, parmi les savants les plus en vue de l’Europe.

Sans ´egaler l’ˆage de son p`ere, Jacques Cassini ne s’est pas mari´e tr`es jeune : il a 34 ans en 1711, soit 6-7 ans de plus que la moyenne des hommes. Contrairement au mariage de Cassini Ier, au sujet des pr´emisses duquel on n’a aucun renseignement, les

n´egociations qui ont pr´ec´ed´e celui de son fils nous sont un peu mieux connues, grˆace au Journal de la vie priv´ee de son p`ere. En effet, celui-ci y fait plusieurs allusions, quoiqu’assez discr`etes, `a leurs recherches.

Il apparaˆıt tout d’abord que le choix d’un parti est le fruit d’une r´eflexion commune `

a plusieurs membres de la famille : Jean-Dominique Cassini, ´evidemment, mais aussi Jacques lui-mˆeme, son cousin Maraldi et mˆeme son oncle Paul de Laistre, chez qui les trois hommes se rendent pour ´evaluer les propositions faites au plus jeune1. On peut ´

egalement supposer que c’est du mariage de son fils qu’ils discutent tous quatre avec Catherine de Laistre, Mademoiselle Dumini et le p`ere Le Brun, quand Cassini note qu’ils « [parlent] ensemble des affaires de la famille » quelques jours plus tard2.

C’est en juillet 1710 que nous trouvons dans le Journal de Cassini la premi`ere ´evo- cation indubitable du futur mariage de son fils. Il rapporte en effet que « MmeBergogne,

pourtant tr`es proche des Cassini au d´ebut du XVIIIe si`ecle. demanda particuli`erement

de [son fils] [...] et fit diverses demandes qui me firent juger qu’elle pourroit avoir quelque parti `a proposer pour lui3» Deux autres propositions sont ´evoqu´ees par la suite : l’une faite par le p`ere Baumont, prˆetre de l’Oratoire (3 septembre 1710), et l’autre par le cur´e de Saint-Jacques du Haut-Pas (27 janvier 1711)4.

Si ces br`eves mentions ne nous renseignent pas, h´elas, sur les noms propos´es par ces amis des Cassini, elles nous permettent toutefois de voir que l’organisation du mariage de Jacques Cassini est pratiquement une affaire de quartier, dont le s´emi- naire Saint-Magloire@Oratoire !S´eminaire Saint-Magloire|textit et la paroisse de Saint-Jacques se mˆelent. Il est probable que les partis propos´es, au moins par les deux eccl´esiastiques, concernent des familles install´ees assez pr`es de l’Observatoire, ce qui n’a rien d’´etonnant `a une ´epoque o`u l’endogamie est la r`egle5.

Du parti qui sera finalement retenu, celui de Suzanne-Fran¸coise Charpentier du Charmoy, aucune mention n’est faite avant le 2 avril (soit deux jours avant la signature du contrat de mariage), date `a laquelle Jacques Cassini se rend chez son futur beau- p`ere, puis chez un ami de sa future belle-famille, pour « consert[er] avec eux sur quelque afaire importante6. » Il ne semble pas que les deux futurs ´epoux se soient fr´equent´es

1. « J’allay avec mon fils et M. Maraldi chez M. de Laistre pour luy communiquer des propositions faites `a mon fils... », JVP, 5 septembre 1710.

2. JVP, 10 septembre 1710.

3. JVP, 7 juillet 1710. On ignore malheureusement l’identit´e de cette Madame Bergogne.

4. Notons ´egalement que le 28 f´evrier 1711, Jacques Cassini re¸coit l’´etonnante visite d’« un seigneur qu’il avoit connu en Holande `a l’occasion de la paix de Risvik, [qui] luy fit [quel]que proposition », proposition qui pourrait ˆetre d’ordre matrimonial.

5. En particulier en milieu rural, o`u il est exceptionnel que soit d´epass´e un rayon de 10 km. La mobilit´e sociale et g´eographique plus importante des villes diminue ce ph´enom`ene, sans pour autant l’annihiler.

6. JVP, 2 avril 1711 : « Mon fils ala chez M. de Si¸conne, et de l`a chez M. Peluy, et conserta avec eux sur quelque afaire importante. »

QUARANTE ANS APRES 147

avant leur mariage. Quant `a leurs fian¸cailles, elles ont manifestement lieu dans l’inti- mit´e, la veille mˆeme de la c´er´emonie religieuse : Jean-Dominique Cassini rapporte `a ce sujet dans son Journal que son fils « le soir alla fianc´e pour le lendemain estre mari´e1. »

La famille Charpentier du Charmoy - Godeffroy - Roucy de Sissonne. Suzanne-Fran¸coise du Charmoy vit avec sa m`ere ´Elisabeth Godeffroy (v.1652-1722), veuve en premi`eres noces de Joseph Charpentier du Charmoy, ancien capitaine des Gardes de la Porte du duc d’Orl´eans, et son beau-p`ere Fran¸cois-C´esar de Roucy (mort en 1731), comte de Sissonne2. Ils sont ´etablis non pas dans le faubourg Saint-Jacques3, mais dans une maison appartenant `a l’origine `a la famille Godeffroy, situ´ee quai d’Alen- ¸

con sur l’ˆıle Notre-Dame4. Cette implantation dans le quartier du Marais les place au cœur d’un des centres parisiens les plus en vogue `a la fin du XVIIIesi`ecle, quoique net-

tement domin´e par la noblesse de robe5, dont est issue ´Elisabeth Godeffroy puisque son p`ere Jean Godeffroy est « conseiller du Roi en ses conseils d’´Etat et priv´e et maˆıtre or- dinaire en sa Chambre des comptes6. » Notons toutefois que son second mari Fran¸cois- C´esar de Roucy, le beau-p`ere de Suzanne, est pour sa part issu d’une ancienne famille de la petite noblesse d’´ep´ee, install´ee en Picardie depuis le XVe si`ecle au moins7. Page

de la Grande ´Ecurie du roi en 1673, o`u il a sans doute ´etudi´e les math´ematiques sous la direction de Claude-Antoine Couplet, puis mousquetaire et aide de camp des mar´e- chaux de Cr´equy et Boufflers, il poursuit une brillante carri`ere militaire qui l’entraˆıne `

a dilapider son h´eritage. Il ´epouse ´Elisabeth Godeffroy le 7 aoˆut 17018.

C’est donc une famille `a la fois relativement ais´ee, du fait de l’apport financier de la branche maternelle de Suzanne du Charmoy, mais ´egalement int´egr´ee dans la noblesse d’office (charges de Jean Godeffroy et de Joseph Charpentier du Charmoy), ainsi que dans l’ancienne noblesse d’´ep´ee grˆace aux Sissonne, que Jacques Cassini fait son entr´ee

1. JVP, 6 avril 1711.

2. Sissonne, d´ept. Aisne, arr. Laon.

3. On remarquera toutefois qu’en d´epit de leur implantation g´eographique l´eg`erement excentr´ee par rapport `a l’Observatoire, Suzanne du Charmoy semble fr´equenter r´eguli`erement l’´eglise Saint-Marcel (aujourd’hui situ´ee au 82 boulevard de l’Hˆopital, 13earr. de Paris) et ses chanoines, qui la surnomment

« Madame du Passage » (JVP, 1ermai 1711). La proximit´e relative de cette paroisse d’avec celle de Saint-Jacques du Haut-Pas pourrait ˆetre un des facteurs qui ont conduit `a sa connaissance par les Cassini.

4. Aujourd’hui quai d’Anjou, dans le 4earr. de Paris.

5. L. Croq, « L’autre noblesse », art. cit..

6. Voir le contrat de mariage d’ ´Elisabeth Godeffroy avec Fran¸cois-C´esar de Roucy, Arch. nat., M.C., LXXVIII, 490, 7 aoˆut 1701. On trouve ´egalement dans les archives de cette ´etude de nombreux autres actes pass´es par ´Elisabeth Godeffroy et ses sœurs, qui t´emoignent de l’aisance financi`ere de la famille et de leurs nombreuses propri´et´es immobili`eres.

7. L’anciennet´e de la noblesse de la famille est r´eaffirm´ee par Fran¸cois-C´esar lui-mˆeme en 1672. Voir la g´en´ealogie compl`ete dans Laurent Labrusse, Les quatre maisons de Roucy, Soissons, 1897, 189 p. On la maniera cependant avec pr´ecaution, certaines affirmations ´etant quelque peu douteuses, notamment l’origine du titre comtal de la famille.

8. La convention pass´ee entre les deux nouveaux ´epoux le 25 novembre 1701 (Arch. nat., M.C., LXXVIII, 491) t´emoigne du d´esarroi financier dans lequel se trouve plong´e le comte de Sissonne, puisque sa femme « promet loger et nourrir son mari et ses domestiques aussi longtemps que l’un et l’autre le voudront, pour 500 livres par an pour le comte et 250 pour chaque domestique ». Il est oblig´e le 27 juin 1706 de vendre la terre de Sissonne `a Fran¸cois Blondel, secr´etaire et intendant des bˆatiments du Roi, qui rase le chˆateau des comtes de Roucy pour le reconstruire en 1708. Fran¸cois-C´esar de Roucy mourra apr`es avoir vu disparaˆıtre toute sa fortune.

le 4 avril 1711. Cette famille cumule ainsi plusieurs avantages sociaux, et poss`ede des accointances dans diverses strates de population.

Ces accointances reposent beaucoup moins sur les r´eseaux de consanguinit´e proche que la famille de Laistre. En effet, Suzanne n’a qu’un fr`ere, Fran¸cois-Joseph Charpen- tier, seigneur du Charmoy, qui n’est pas nomm´e parmi les t´emoins de sa sœur mais appose n´eanmoins sa signature au bas du document1. C´elibataire et manifestement sans « emploi » pr´ecis au d´ebut de l’ann´ee 17112, il est toutefois mentionn´e plusieurs fois dans le Journal comme faisant partie de la soci´et´e r´eguli`ere du jeune couple Cassini. Quant `a ´Elisabeth Godeffroy, elle est la seule de sa fratrie3 `a avoir eu une descen- dance. Les cousins et cousines Barbot et Tuffet mentionn´es `a titre de t´emoins dans le contrat de mariage de Suzanne et Jacques Cassini sont par cons´equent des cousins ´

eloign´es, peut-ˆetre apparent´es `a Joseph Charpentier du Charmoy, sur lequel on n’a quasiment aucun renseignement4.

Nouvelle union, nouvelles alliances : analyse du contrat de mariage de Jacques Cassini et Suzanne-Fran¸coise Charpentier du Charmoy.

Le contrat de mariage de Jacques Cassini5pr´esente un certain nombre de similarit´es avec celui de son p`ere. Il fait ainsi, comme lui, le choix de se placer sous le r´egime de la coutume de Paris, et adopte un syst`eme comparable de partage des biens, de douaire et de pr´eciput.

Par ailleurs, il jouit lui aussi de « l’agr´eement de tr`es haut, tr`es puissant, tr`es excelant et tr`es magnanime Prince Louis, par la grˆace de Dieu roy de France et de Navarre. » Tout comme dans le contrat de mariage de Jean-Dominique, le roi n’est pas cit´e comme venant t´emoigner de la part de l’un ou l’autre des futurs conjoints. Le Roi Soleil est en effet au-dessus de tout parti et de toute client`ele, et se contente d’apporter sa lumi`ere `a l’ensemble de son peuple. Il est n´eanmoins ´evident qu’il intervient dans ce contrat en tant que protecteur des Cassini. En effet, comme le rapporte Cassini p`ere, Jacques se rendit la veille de la c´er´emonie religieuse « `a Versailles pour supplier le Roi de luy faire la mˆeme grˆace qu’il m’a fait de signer le contrat de son mariage6. »

Il n’est toutefois pas le seul `a ˆetre ainsi d´egag´e de tout ensemble de t´emoins. `A ses cˆot´es au d´ebut de l’acte, on trouve deux autres membres de la famille royale, son fils le Grand Dauphin et son petit-fils le duc de Bourgogne. Jean-Dominique Cassini ne rapporte pas que son fils leur ait sp´ecialement demand´e de viser son contrat, et le r´ecit

1. On compte en effet parmi les signatures celles de la m`ere, ´Elisabeth Godeffroy, et deux autres signatures, un « Charpentier Ducharmoy » et un « Ducharmoy ». Notons au passage la graphie en un mot, qui coexiste dans les actes notari´es avec celle en deux mots. On trouve ´egalement, plus rarement, la terminaison en -ois, utilis´ee en particulier par le scripteur du Journal.

2. Arch. nat., M.C., LXXVIII, 545, testament d’ ´Elisabeth Godeffroy, en date du 27 janvier 1711. 3. On trouvera un nombre assez important d’actes notari´es concernant ses deux sœurs Marie et Suzanne Godeffroy aux Arch. nat., M.C., dans les archives de l’´etude LXXVIII.

4. Tout lien de parent´e reliant les Barbot ou les Tuffet aux Sissonne est `a rejeter, la g´en´ealogie de la famille ´etant bien connue malgr´e les incertitudes de l’œuvre de Laurent Labrusse.

5. Arch. nat., M.C., LXXVIII, 546, contrat du 4 avril 1711, ´edit´e en annexe, p. 487. 6. JVP, 6 avril 1711.

QUARANTE ANS APRES 149

qu’il fait de leurs signatures semble sous-entendre qu’ils se trouvaient simplement l`a au moment de la ratification du document par leur p`ere et grand-p`ere1. Il est cependant tout-`a-fait normal `a l’´epoque que des membres de la famille royale autres que le Roi lui- mˆeme signent les contrats de mariage des grands personnages du royaume, comme on l’a vu pour Lully par exemple. En outre, le Grand Dauphin comme le duc de Bourgogne s’int´eressent `a l’astronomie. Le premier a fait installer, dans ce qui prendra le nom de « parterre du Globe » du jardin de son chˆateau de Meudon, un « globe terrestre de marbre, & qui est magnifiquement grav´e et dor´e, [...] un mod`ele qu’on peut suivre parce qu’il est fort exact, & qu’on n’a rien oubli´e pour le rendre utile et curieux2

», install´e avant 1692, date de sa restauration par Butterfield sur les conseils de Cassini3. Quant au second, on a vu qu’il accorde rapidement sa protection au fils Cassini, qui lui d´edie sa th`ese de math´ematiques. On peut donc penser que le fait qu’ils aient sign´e le contrat de mariage du jeune homme n’est pas qu’une simple mesure de courtoisie, mais bien le t´emoignage de leur consid´eration et de leur amiti´e.

Viennent ensuite deux ministres, un p`ere et son fils, tout comme Colbert et Sei- gnelay pour le mariage de Cassini Ier. Dans un cas comme dans l’autre, ce ne sont pas

n’importe quels ministres, mais bien ceux en charge du d´epartement de la « Culture » dans le gouvernement de Louis XIV. On a vu plus haut le rˆole des deux Pontchartrain dans l’administration de l’Acad´emie des sciences, aussi ne nous y ´etendrons-nous pas davantage. On notera cependant que le duc d’Antin, directeur des Bˆatiments du roi en charge de l’Observatoire, n’a pas particip´e `a la signature du contrat.

Mais alors que la liste des « t´emoins hors cat´egorie » du mariage de Cassini Iers’ar-

rˆetait apr`es les ministres, nous voyons ici apparaˆıtre un autre personnage, Marguerite de Beauharnais, « veuve de haut & puissant seigneur maˆıtre Guillaume de Nemond, conseiller du Roy en tous ses conseils, second pr´esident `a mortier du Parlement de Pa- ris. » Cette « haute et puissante dame », d´ecrite par Saint-Simon comme « une cr´eature suffisante, aigre, alti`ere, en un mot une franche d´evote4 », fille de madame de Mira- mion, autre c´el`ebre d´evote connue pour ses actions charitables, avait ´epous´e en 1660 Guillaume de Nesmond (1627-1693), issu d’une grande famille parlementaire. Cousine au 3edegr´e du chancelier Pontchartrain5, elle devient sa pupille `a la mort de ses parents,

ce qui explique qu’elle ait ´et´e cit´ee `a la suite des ministres du Roi. Ce n’est cependant pas au parti Cassini qu’elle se « rattache », mais bien au parti du Charmoy : elle est en effet « cousine du seigneur comte de Sissonne6. » Ainsi, `a la diff´erence de ce que fut le contrat de Cassini I, les astronomes ne sont pas les seuls `a b´en´eficier de la protection de

1. « Monseigneur et Monseigneur le duc de Bourgogne [le] signer aussi », ibid.

2. Antoine Augustin Bruzen de La Martini`ere, Le grand dictionnaire g´eographique et critique, La Haye/Amsterdam/Rotterdam, 1738, t. 8, p. 412.

3. Voir par ex. aux Arch. Obs., D3 15, Journal d’observations..., `a la date du 6 septembre 1696. 4. M´emoires, op. cit., t. III, p. 77.

5. Le grand-p`ere de ce dernier, Paul Ph´elypeaux, ´epouse en effet en 1606 Anne de Beauharnais

Dans le document Science, académisme et sociabilité savante (Page 146-200)