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Nadège : Tout d’abord, je voulais vous demander depuis combien de temps vous travailliez

avec Monoprix, j’ai lu environ 5 ans ?

Jean-François Sacco : Ça fait un peu plus, ça doit faire huit ans environ.

N : D’accord. J’aurai aimé avoir pourquoi vous avez décidé de communiquer en mai 2017 via

ce court-métrage, pourquoi à ce moment-là, et si le choix du court-métrage était novateur pour vous dans votre communication ?

J-FS : Alors il y a plein de choses. Déjà dans le constat : le constat que tu fais est très juste. Il

s’agit de comment réenchanter une catégorie, la distribution, qui finalement était un peu pauvre en termes de communication, et tu pourrais même rajouter qu’Intermarché, Monoprix, et même un Leroy Merlin dans son épopée de la vie, toute cette catégorie adopte un langage entre le court-métrage et l’entertainment. C’est de l’entertainment, on va raconter des histoires un peu plus longues, dans des formats un peu plus longs si tu aimes vraiment un passage, pour pouvoir développer une vraie histoire avec de l’émotion. A la base de ça, c’est un prisme fondamental, c’est l’émotion. Et je crois que l’émotion, dans le cas du film d’Intermarché ou dans le nôtre, elle est assez juste. Et quand l’émotion est juste, les gens adhèrent. Parce que finalement dans la démarche de publicité, les gens ont souvent l’impression que c’est un peu fake, un peu mercantile, mais par contre, si tu arrives à raconter une histoire assez juste, une histoire d’amour, et si tu le fais de manière honnête, si l’émotion est vraie, tu convaincs les consommateurs. Et je pense que c’est en ça que cette catégorie [la grande distribution] est intéressante, c’est qu’il y a une catégorie dans le monde de la communication qui porte ça aujourd’hui en France. Ça c’est pour reprendre tes points généraux.

Sur le positionnement de Monoprix : pourquoi ça n’a pas été fait tout de suite ? Parce que je trouve que dans un premier temps il fallait un peu un nouveau langage, qui était le langage des packs, et finalement que le packaging était le média. Il y a eu tout une accroche, tout un territoire graphique sur la marque propre de Monoprix. Ça a longtemps été le support de la communication. Donc ça a dû faire 5-6 ans, et à un moment donné il faut que tu développes un autre rapport au consommateur. C’est là où ça devient intéressant d’avoir du storytelling et d’avoir ce que tu appelles du court-métrage, qui est une forme de format long de communication. On a poursuivi ça toute l’année, avec le film de la fille qui fait ses courses, qui est aussi un format long, qui est un lien entre le domaine de la musique, la communication classique, etc.

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N : Et du coup sur le choix du format long, est-ce que vous êtes d’abord partis de ce que vous

vouliez raconter et vous avez adapté le format en fonction, ou vous aviez déjà défini le choix du format long ?

J-FS : Non, c’est-à-dire le format c’était un format long qui avait été choisi, mais qui était

beaucoup plus court. Ça devait faire 1 minute 30, et en fait au montage les équipes se sont rendu compte que l’histoire était beaucoup plus intéressante en quatre minutes. Et l’idée ça a été ensuite de reporter tout le plan média, de passer de formats à peu près normaux à de formats beaucoup plus longs, mais d’en avoir très peu en fait. Je crois qu’il y a eu 15 passages en télé sur M6. Par contre en digital il y a eu pas mal de passages, et il y a eu une forte adhésion, avec plus de dix millions de vues en une semaine, je crois. Donc si tu veux il y avait la volonté de faire quelque chose de long, mais pas aussi long en tout cas. Ça a été un pari qu’on a pris.

N : J’ai lu dans votre plan média que vous aviez proposé à des consommateurs de poursuivre

l’histoire et de vous envoyer la suite : est-ce que cette proposition a eu du succès et est-ce que vous avez des retours par rapport à ça ?

J-FS : Je ne pourrai pas te citer les chiffres exacts, mais il y a eu pas mal de gens qui ont

adhéré à cette histoire en pensant à la continuer. Nous on a fait un format d’une quinzaine d’épisodes, qui ont été diffusés sur le digital avec des suites différentes. Là il y a Jean-Patrick, le cofondateur de Rosapark avec moi, et il me dit qu’il y a eu deux millions de gens qui ont vu les fins digitales, qui n’étaient pas dans le format initial. Tu peux trouver ça sur le Web, il y a plusieurs chutes qui valorisent des produits différents à la fin, on s’amuse un petit peu avec la fin du film.

N : Et par rapport à la construction du récit, je trouvais ça intéressant le fait qu vous ayez choisi

des enfants, et de les faire grandir. Pourquoi avez-vous fait ce pari, c’était pour accentuer l’émotion ?

J-FS : Non non, il n’y a pas de machine à fabriquer de l’émotion, l’idée c’est de raconter une

histoire. Je pense que si je dois être un petit peu en attaque par rapport au film d’Intermarché, je pense que le film d’Intermarché est un excellent film, ce qu’on pourrait trouver en termes de bémols et de nuances, c’est qu’il est moins fort dans l’attribution à la marque, alors que le nôtre il joue sur les packagings, sur la spécificité de la marque. Je pense que c’est là où à mon avis, d’un point de vue créatif le film de Monoprix est fort, parce qu le film de Monorpix tu ne peux pas le mettre pour autre chose. Si tu veux la performance du film de Monoprix c’est d’avoir mis dans le discours narratif l’ADN de la marque, parce qu’on joue avec les packagings.

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N : Oui j’avais noté ça et je l’avais un peu analysé dans le sens où la grande distribution avant

se basait vachement sur le prix pour passer sur un système de valeurs et se doter des attributs d’une marque. Et c’est quelque chose que vous avez fait avec Monoprix depuis déjà plusieurs années, alors qu’Intermarché n’en est pas encore à ce stade.

J-FS : Exactement, tu as très bien résumé. Finalement l’excédent de prix, il doit se justifier par

une appartenance émotionnelle à la marque. Et c’est fort ce qu’a fait Monoprix, c’est que t’as un bouclier émotionnel qui protège ta marque.

N : Et du coup dans ce spot, quel est le point de vue sur la grande distribution que défend

Monoprix ? Dans le spot Intermarché c’est le bien manger, avec les légumes, et dans le spot Monoprix j’avais plus analysé le côté plaisir et humoristique.

J-FS : Effectivement Intermarché ils se sont positionnés sur le bien manger, le bien déjeuner,

le bien gouter, ils développent ça sur le monde des enfants, sur le cœur du goût quoi. Pour Monoprix, je pense qu’une phrase assez forte de la plateforme stratégique, c’est « rendre le quotidien moins quotidien », c’est rendre le quotidien sympa. Le quotidien c’est ce qui tue tout le monde, ce qui nous tue tous quoi. C’est ce qui tue le couple, ce qui tue la fantaisie, ce qui tue le plaisir. Rendre le quotidien moins quotidien, c’est vraiment la plateforme de Monoprix. C’est en ça qu’une marque distributeur qui accompagne son quotidien peut le rendre plus fun, plus drôle, plus léger. C‘est pour ça que quand tu regardes Monoprix, il ne faut pas regarder que les films, il faut regarder toutes les opérations qu’on fait, tout ce qui est fait envers nos clients par l’activation digitale, etc. tout ce travail c’est montrer que notre quotidien doit être un peu plus léger. Rendre le quotidien moins quotidien, c’est ça vraiment la plateforme Monoprix.

N : et peut-être un peu pour boucler, ça fait à peu près un an que le film est sorti, je ne sais

pas si vous avez eu des retours ou pas : est-ce que vous avez eu des retours au niveau fréquentation, au niveau perception de Monoprix ?

J-FS : on a des très bons retours, je ne pourrai pas te donner les chiffres exacts, je sais que

c’est très positif. Après, il n’y a pas que ce film, on fait plein d’autres actions autour, quand on est un distributeur on fait des marronniers, … C’est très dur de détacher ce film-là d’une approche globale de Monoprix. Mais je pourrai essayer de voir un petit peu les chiffres. Parce que c’est un tournant qu’ils ont pris depuis longtemps. Depuis qu’on s’occupe de la marque ils ont pris le parti de la valeur ajoutée de mots différents, de connivences finalement. C’est comment une marque crée un lien avec toi et comment ce lien protège cette marque.

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Annexe n°4 : entretien avec Quentin Labat, directeur associé au sein de l’agence