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PARTIE I : Introduction bibliographique

I. Vascularisation tumorale

2. Angiogenèse tumorale

L’angiogenèse tumorale est définie comme la formation de nouveaux vaisseaux à partir de vaisseaux préexistants sous l’influence directe ou indirecte d’un foyer tumoral [129]. Ce sont les cellules tumorales elles-mêmes qui produisent et sécrètent des facteurs diffusibles capables de stimuler la croissance, la migration et la différenciation des cellules endothéliales.

A l’état physiologique, l’angiogenèse joue un rôle essentiel au cours de l’embryogenèse, mais également à l’âge adulte lors par exemple des phénomènes de cicatrisation, de réparation tissulaire, de l’adaptation musculaire à l’effort. A l’état pathologique, l’angiogenèse est impliquée dans de nombreuses maladies telles que la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) [130] et le cancer.

En cancérologie, l’angiogenèse tumorale est initiée par l’état hypoxique de la tumeur. En effet, la tumeur d’une taille inférieure à 1-2 mm3 est indépendante (tumeur in situ) et les apports en O2 et nutriments sont assurés par simple diffusion. Lorsque la tumeur augmente en volume, l’O2 et les nutriments n’atteignent plus les cellules centrales. La tumeur entre alors dans un état hypoxique. Ce stress déclenche la production et la sécrétion de facteurs pro-angiogéniques (notamment le VEGF) par les cellules tumorales, entrainant la rupture de l’équilibre entre facteurs anti-angiogéniques et facteurs pro-angiogéniques : c’est le switch

angiogénique [129, 131, 132]. La tumeur passe de la phase dormante ou avasculaire à la phase vasculaire. Les néovaisseaux tumoraux assurent l’apport en O2 et nutriments nécessaires à la croissance tumorale et permettent l’évacuation des déchets issus de cette croissance ainsi que la libération de métastases (Figure 12).

Figure 12 : L’angiogenèse tumorale. Etape1 : activation des cellules endothéliales vasculaires par le VEGF sécrété par les cellules tumorales. Etape 2 : détachement des péricytes et dégradation de la lame basale. Etape 3 : migration des cellules endothéliales vasculaires vers la tumeur par chimiotactisme. Etape 4 : prolifération des cellules endothéliales vasculaires. Etape 5 : formation de néovaisseaux, recrutement des composants de la paroi vasculaire par les cellules endothéliales.

Sans cette vascularisation, la tumeur stoppe sa croissance, voire s’asphyxie. C’est pourquoi les nouvelles stratégies anti-tumorales visent à inhiber les processus d’angiogenèse tumorale [133-135].

Etape 1:

Initiation

Sécrétion de facteurs pro-angiogéniques (VEGF, FGFb) par les cellules tumorales, induite par l’hypoxie

Etape 2: Dégradation de la membrane basale Etape 3: Migration des cellules endothéliales Etape 4: Prolifération des cellules endothéliales Etape 5: Remodelage vasculaire Rôle des MMP, uPA, tPA Rôle des MMP, uPA, tPA, VEGF, VEGFR Rôle du VEGF et VEGFR Rôle du PDGF, TGFȕ, Ang-1 et Tie 2

Péricytes Membrane basale

Cellules endothéliales

Etape 1:

Initiation

Sécrétion de facteurs pro-angiogéniques (VEGF, FGFb) par les cellules tumorales, induite par l’hypoxie

Etape 2: Dégradation de la membrane basale Etape 3: Migration des cellules endothéliales Etape 4: Prolifération des cellules endothéliales Etape 5: Remodelage vasculaire Rôle des MMP, uPA, tPA Rôle des MMP, uPA, tPA, VEGF, VEGFR Rôle du VEGF et VEGFR Rôle du PDGF, TGFȕ, Ang-1 et Tie 2

Péricytes Membrane basale

a. Initiation de l’angiogenèse : la switch angiogénique

L’expression du facteur de croissance VEGF (vascular endothelial growth factor) est absolument requise pour le switch angiogénique [131]. L’hypoxie est un des principaux facteurs déclenchant la synthèse du VEGF-A par les cellules tumorales [131, 134] (Figure 13). Ce processus implique le facteur de transcription HIF (hypoxia inductible factor) qui agit au niveau du promoteur du gène codant le VEGF-A.

Cytoplasme Noyau Protéasome Ubiquitine Normoxie Hypoxie p p Cytoplasme Noyau Protéasome Ubiquitine Normoxie Hypoxie Cytoplasme Noyau Protéasome Ubiquitine Normoxie Cytoplasme Noyau Protéasome Ubiquitine Normoxie Hypoxie p p

Figure 13 : Activation de l’expression du VEGF-A par l’état hypoxique de la cellule, d’après [136]. Une enzyme appelée prolyl-4-hydroxylase lie l’O2 et le fixe sur des résidus spécifiques de proline du facteur de transcription HIF-1Į. Une autre protéine, appelée protéine de von Hippel-Lindau, lie ensuite le HIF-1Į oxydé. Le complexe ainsi formé est ensuite ubiquitinylé et dégradé dans le protéasome. En hypoxie, HIF-1Į n’est pas oxydé et se dimérise avec HIF-1ȕ. Ce complexe est transféré dans le noyau où il peut agir comme facteur de transcription sur le promoteur cible.

Le VEGF ainsi sécrété par les cellules tumorales diffuse dans le microenvironnement tumoral. En se liant aux récepteurs impliqués au niveau des cellules endothéliales, le VEGF induit la libération d’oxyde nitrique (NO) ainsi qu’un changement de morphologie des cellules endothéliales, induisant une vasodilatation des vaisseaux sanguins et une perte de fonctionnalité des jonctions serrées [134]. Il s’en suit une fuite des composés plasmatiques dont le fibrinogène et autres facteurs de coagulation, et le dépôt de fibrine dans l’espace extravasculaire qui transforme le stroma endothélial en environnement pro-angiogénique sur lequel les cellules endothéliales activées pourront migrer [137].

b. Bourgeonnement

Le bourgeonnement correspond à l’apparition de petites masses de cellules endothéliales sur la face externe des vaisseaux sanguins préexistants situés à proximité du foyer tumoral. En effet, les cellules endothéliales activées prolifèrent et donnent rapidement naissance à plusieurs générations de cellules filles dont l’accumulation locale forme des bourgeons endothéliaux.

Le plasminogène extravasé dans le milieu périvasculaire est transformé en plasmine sous l’action des activateurs du plasminogène : l'urokinase (uPA) et l'activateur tissulaire du plasminogène (tPA). La plasmine active ensuite des métalloprotéinases (MMP, matrix metalloproteinases), endopeptidases zinc-dépendantes sécrétées par les cellules tumorales, stromales et endothéliales. Ces enzymes vont permettre la dégradation des composants de la matrice extracellulaire (fibronectine, laminine, structures protéiques de protéoglycane) et de la membrane basale. Les péricytes se détachent et les jonctions entre cellules endothéliales sont altérées. Cette dégradation locale de la matrice extracellulaire (MEC) permet aux cellules endothéliales de migrer. Le facteur de croissance FGFb, et certains isoformes du VEGF sont alors libérés.

c. Migration

Les cellules endothéliales acquièrent les propriétés nécessaires à leur migration dans la matrice extracellulaire et migrent en direction de la source du stimulus angiogénique (la tumeur) par chimiotactisme. Les principaux facteurs de croissance intervenant dans le stimulus sont le FGFb et le VEGF [138]. La fixation de ces facteurs à leurs récepteurs exprimés à la surface des cellules endothéliales entraine la sécrétion de protéines extracellulaires par ces cellules telles que des protéases qui dégradent la MEC, et la fibronectine et la tenascine qui facilitent la migration cellulaire [129]. Enfin, pour interagir avec les protéines de leur nouvel environnement, les cellules endothéliales activées expriment de nouveaux récepteurs de la MEC, notamment les ICAM-1 (intercellular adhesion molecule-1), les VCAM-1 (vascular cell adhesion molecule-1), les sélectines E et P et les intégrines (e.g.αvβ3,α5β1), absentes des cellules endothéliales quiescentes.

d. Remodelage vasculaire

Le remodelage vasculaire correspond à l’adaptation continue du réseau vasculaire aux besoins du foyer tumoral. En permanence, au sein des réseaux vasculaires péritumoraux, des capillaires disparaissent pendant que d’autres se développent rapidement, drainant à leur profit l’essentiel du flux circulatoire sanguin. De plus, de nouveaux bourgeons capillaires formés lors de phases successives de stimulation angiogénique fusionnent avec les capillaires préexistants.

Au terme de la migration, les capillaires néoformés entrent dans une phase de stabilisation qui aboutit à la réorganisation de la paroi vasculaire. La mise en place de la paroi vasculaire est caractérisée par la formation d’une lame basale riche en laminine et en collagène IV ainsi que par l’accolement de péricytes, résultant de la différenciation locale de cellules mésenchymateuses non spécialisées.

II. Facteur de croissance endothélial vasculaire

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