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Chapitre 3 : caractérisation de la colonne d’eau

2.4 Analyses des données

2.4.1 Caractérisation des signatures élémentaires et isotopiques

2.4.1.1 Le modèle de mélange

Afin de quantifier la contribution relative de chaque source à la MOP, le modèle issu du package SIAR (Stable Isotope Analysis in R ; R 2.15.2) a été utilisé (Parnell et al., 2010). Il est basé sur un système de quatre équations à n inconnues, n étant le nombre de sources de matière organique sédimentaire prises en compte. Ce système est basé sur des équations de bilan de masse établies à partir des rapports isotopiques et/ou élémentaires :

δ13C mélange = x1* δ13Csource1 + x213Csource2 +….+ xn13Csourcen δ15N mélange = x1* δ15Nsource1 + x215Nsource2 +….+ xn15Nsourcen C/N mélange = x1* C/N source1 + x2* C/N source2 +….+ xn* C/N sourcen

X1+x2+….+ xn = 1

où x1, x2, …, xn représentent les contributions relatives de chaque source à la matière organique sédimentaire. Elles sont estimées par le modèle x1 + x2 +…+ xn = 1.

107 2.4.1.2 Détermination des sources potentielles de matière organique

Les sources considérées sont celles décrites dans la littérature en lien avec l’estuaire de la Gironde (Veyssy et al., 1999 ; Etcheber et al., 2007 ; Savoye et al., 2012), c’est-à-dire la matière organique terrestre réfractaire (composant le bouchon vaseux), la matière organique labile (issue du sol et de la litière terrestre), le phytoplancton continental, la matière organique d’origine anthropique, ainsi que deux taxons microphytobenthiques (diatomées et Euglenophyceae) (cf. Chapitre 1).

Bouchon vaseux

Afin de déterminer la signature isotopique et élémentaire de la MOP caractérisant le BV, seules les observations dont les teneurs en MES étaient supérieures à 500 mg.l-1 ont été prises en compte. Le bouchon vaseux caractérise une accumulation de particules de toutes sortes, inorganiques et organiques. On définit traditionnellement la MOP du bouchon vaseux principalement par le matériel terrestre réfractaire d’origine terrestre (Fontugne & Jouanneau, 1987 ; Veyssy et al., 1999 ; Savoye et al., 2012).

Phytoplancton et MOP terrestre

La MOP du BV « sensu stricto » impacte l’ensemble des particules de l’estuaire de la Gironde. Afin de déterminer les signatures du matériel autre qu’issu du BV, il a été nécessaire de corriger les données de cette influence. Pour les signatures du phytoplancton et de la MOP terrestre labile, les données correspondant à des rapports COP/MES > 1,77% et NOP/MES > 0,22% ont été considérées car potentiellement non impactées par le BV, ce dernier possèdant des valeurs plus faibles en COP et NOP/MES. Ces valeurs considérées comme « non influencées par le BV » sont les valeurs les plus élevées susceptibles d’être observées au sein du BV car correspondant au matériel le plus labile. Afin de quantifier ce matériel, les concentrations en COP et NOP ont été calculées à partir des teneurs en COP et NOP mesurées et celles du BV :

[COP]bv = % COPbv*[MES] avec % COP = 0,0147 [NOP]bv = % NOPbv*[MES] avec %NOP = 0,002

D’où : [COP]autre = [COP]mesuré - [COP]bv et [NOP]autre = [NOP]mesuré - [NOP]bv

Dans le cas où des teneurs en COPet NOP ont été obtenues, représentatives du BV, les rapports isotopiques δ13C et δ15N ont été recalculés afin de de supprimer in fine l’effet BV.

108 Ainsi : δ13Cautre= {[COP]mesuré*( δ13C)mesuré – [COP]bv * δ13Cbv} / [COP]autre

δ 15Nautre= {[NOP]mesuré*(δ 15N)mesuré – [NOP]bv * δ15Nbv} / [NOP]autre

Pour le phytoplancton, les signatures isotopiques et élémentaires ont été estimées grâce aux données pour lesquelles (1) la salinité était nulle, afin d’estimer le phytoplancton d’origine continentale sans influence du BV et (2) le rapport [COP]autre / Chl a < 150 g.g-1, traduisant un matériel frais et donc labile tel que du phytoplancton. Savoye et al. (2003) ont montré que ces valeurs de COP / Chl a indiquent qu’au sein de la MOP considérée, il y a une dominance du phytoplancton. Ces valeurs de signature du phytoplancton d’eau douce sont en accord avec celles de Goñi et al. (2005).

Les signatures de la MOP labile d’origine terrestre ont été déterminées à partir des données associées à des débits supérieurs à 800 m-3.s-1 (Savoye et al., 2012) en faisant l’hypothèse qu’ il s’agissait de matériel apporté par les crues. Les signatures ont également été associées à des rapports [COP]autre / Chl a > 200 g.g-1 afin de différencier de l’influence du phytoplancton continental.

MOP anthropique

La MOP d’origine anthropique a été considérée étant donné la proximité d’une partie de notre zone d’échantillonnage avec la Communauté Urbaine de Bordeaux. L’échantillonnage de deux stations d’épuration a été réalisé (Lanoux, 2013) : « Clos de Hilde » en amont de Bordeaux, et « Louis Fargues » en aval de Bordeaux ; une signature unique a été caractérisée. La pondération des rapports isotopiques et élémentaires par les débits de COP (quantité de COP sortant durant 1 seconde des deux stations d’épuration) pour le δ13C et par ceux de NOP pour le δ15N et le C/N de chaque station a été faite afin d’obtenir une seule valeur de ces paramètres pour chacune des dates de prélèvement selon :

δ13C = x δ13CLF +y δ13CCH

x = QCOPLF / QCOPtotal y = QCOPCH /QCOPtotal

avec QCOPtotal = QCOPLF + QCOPCH

Les calculs sont identiques pour le δ15N et le C/N. Les débits (Q) correspondent à une quantité de COP par unité de temps (g.s-1) en sortie des deux stations d’épuration au sein de la Garonne estuarienne.

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2.4.2 Indicateurs complémentaires : rapports COP/Chl a (g/g) et

COP/NOP (mol/mol)

La chlorophylle a permet de décrire la biomasse des organismes photo-autotrophes. Le rapport entre COP et Chl a constitue un indicateur de la part relative des photo-autotrophes au sein du pool de COP. Les valeurs sont très variables d’un environnement à un autre. Une MOP présentant un rapport COP/Chl a < 200 g.g-1 (valeur seuil dans la suite du manuscrit) est considérée comme dominée par la présence d’un matériel d’origine majoritairement autotrophe (en particulier phytoplancton) ; pour un rapport COP/Chl a > 200 g.g-1, la MOP est dominée par du matériel détritique et/ou par les hétérotrophes (Cifuentes et al., 1988). Dans la partie amont (Pk 30) de l’estuaire halin de la Gironde, les valeurs de ce rapport peuvent être supérieures à 10000 g.g-1 (Savoye et al., 2012).

Le rapport des concentrations COP/NOP permet de préciser différentes sources de MOP, car le pourcentage de COP et NOP n’est pas le même dans chaque type de MOP : le matériel terrigène a une valeur différente du matériel planctonique (respectivement, C/N > 12 mol.mol-1 et < 10 mol.mol-1). Dans cette étude, le rapport de Redfield (6,6 mol.mol-1, Redfield et al., 1963) étant celui correspondant au phytoplancton, a été utilisé afin de discriminer le matériel hétérotrophe (< 6,6 mol.mol-1) du matériel autotrophe (> 6,6 mol.mol-1).