3.4 Investigation théorique : résultats et discussion
3.4.1.3 Analyse SAPT
Les résultats de la décomposition énergétique obtenue par les calculs
SAPT sont rassemblés dans le tableau 3.10 et présentés dans le diagramme
de la figure 3.29. Les calculs ont été effectués sur les géométries optimisées
par la méthode MP2+BSSE (excepté le modèle Gexp ; le modèle H n’a pas
été étudié à cause du trop grand nombre d’atomes).
Avant d’aller plus loin et de discuter de ces résultats, il est important de
mettre en évidence certaines différences dans les résultats de calculs présentés
ici et ceux publiés par R. Gleiter. Comme on peut le voir sur le tableau 3.11,
les valeurs de E6int,SAP T−311G∗∗ sont équivalentes mais nous sur-estimons Eelst et
sous-estimonsEdisp. Etant donné la durée d’un calcul SAPT (il faut compter
environ une semaine à une semaine et demie de calcul en continu), des tests
pour évaluer l’origine de ces différences n’ont pas été réalisés. Les conditions
de calculs, bases et options choisies, ne nous ont toujours pas été
communi-quées par R. Gleiter à ce jour. La différence peut raisonnablement venir d’un
problème de fonctions de base. Les bases indiquées dans la publication ne
A B C D E F
Db i
s
Eb i
s
F bi s G o p
t
G e x
p
- 3 , 0
- 2 , 5
- 2 , 0
- 1 , 5
- 1 , 0
- 0 , 5
0 , 0
0 , 5
1 , 0
E
n
e
rg
ie
(
k
c
a
l.
m
o
l
-1)
E
e l s tE
i n dE
d i s pE
e x c hFigure 3.29 – Contributions des énergies électrostatiques (E
elst), d’induction (E
ind),
de dispersion (E
disp) et d’échange-corrélation (E
exch) à l’énergie d’interaction E
SAP Tint
calculées par le programme SAPT2006
Tableau 3.10 – Décomposition des termes d’interaction énergétique pour les modèles
A-G provenant de l’analyse SAPT en énergie électrostatique (E
elst), d’induction (E
ind),
de dispersion (E
disp) et d’échange-corrélation (E
exch)
Modèle Eelst Eind Edisp Eexch Eint,SAP T6−311G∗∗
A 0.606 -0.334 -2.304 0.377 -1.951
B 1.038 -0.543 -2.740 0.633 -2.217
C 1.004 -0.356 -2.721 0.544 -1.931
D 0.904 -0.314 -2.639 0.492 -1.906
E 1.130 -0.407 -2.839 0.710 -1.852
F 1.242 -0.269 -2.823 0.607 -1.575
Dbis 1.009 -0.288 -2.885 0.576 -1.918
Ebis 1.285 -0.420 -2.831 0.629 -1.796
Fbis 1.113 -0.273 -3.033 0.624 -1.904
Gopt 1.209 -0.238 -3.317 0.720 -1.932
Gexp 0.928 -0.248 -2.021 0.339 -1.283
seraient pas celles réellement utilisées. Autre hypothèse, les calculs n’ont pas
été réalisés dans le formalisme DCBS (ce qui est le cas de nos calculs) et pour
le savoir, des calculs avec d’autres options devraient être effectués. Après
dis-cussion avec K. Szalewicz (l’un des concepteurs du programme), il s’avérerait
que la cause des différences soient très probablement des bases différentes, et
dans le cadre de cette hypothèse, les bases utilisées par R. Gleiter seraient
moins étendues que celles employées ici. En résumé, nos résultats concernant
les deux modèles A et B dont nous nous étions servi comme "référence" nous
ont permis de mettre à jour des différences entre les résultats publiés et les
nôtres, ce qui montre que les données fournies par R. Gleiter ne seraient pas
suffisantes pour reproduire correctement leurs résultats. Toutefois, les
diffé-rences étant identiques pour les deux modèles A et B (sur-estimation deEelst
et sous-estimation deEdisp), nos résultats sont tout de même exploitables.
Tableau 3.11 –Comparaison des résultats SAPT obtenus pour les modèles A et B avec
ceux obtenus par R. Gleiter
Modèle Eelst Eind Edisp Eexch Eint,SAP T6−311G∗∗
A Louvain 0.606 -0.334 -2.304 0.377 -1.951
A Gleiter 0.430 -0.320 -2.120 0.390 -1.920
B Louvain 1.038 -0.543 -2.740 0.633 -2.217
B Gleiter 0.820 -0.530 -2.570 0.640 -2.210
Nous notons, en regardant la figure 3.29, que la force de dispersionEdisp
est la contribution majeure à l’interaction intermoléculaire pour tous les
systèmes étudiés, et elle est de nature liante puisque l’énergie est négative. La
force d’induction,Eind, est également de nature liante pour tous les systèmes
mais à moindre échelle. Il est à noter également que la valeur absolue des
forces de dispersion et d’induction augmente lorsque la force de l’accepteur
augmente, du modèle A au modèle B, ou encore du modèle D au modèle E, ce
qui est en accord avec la polarisabilité du soufre. Les énergies électrostatiques
et d’échange sont répulsives par nature.
Ces résultats sont très intéressants, et dans l’ensemble, on retrouve les
résultats obtenus précédemment. Par exemple, si on regarde les modèles A,
B et C, les forces de dispersion et d’induction augmente de A à B, et celles
du modèle C sont intermédiaires, ceci soulignant encore une fois le caractère
accepteur moyen du Me-S-S-Me. Si on regarde à présent les modèles D, E et
F, on remarque que le changement de groupement accepteur a un effet moins
marqué que pour les modèles A, B et C. On se souvient que la géométrie du
modèle D est dirigée par la présence de liaisons hydrogène et une interaction
S· · ·S très limitée. En comparant les modèles D et F, on s’aperçoit tout
d’abord que le Me-S-S-Me esta priori un donneur faible, comme on a pu le
conclure à partir des géométries et de l’analyse NBO, car l’énergie d’induction
diminuant légèrement entre les modèles E et F (tableau 3.10), et on retrouve
un comportement similaire pour les modèles Dbis, Ebis et Fbis.
Si maintenant on regarde les modèles F et Fbis, la différence entre les
deux étant un groupement méthyle qui pointe ou non vers la molécule voisine
(figure 3.28, page 144), on s’aperçoit que l’énergie électrostatique ne varie
quasiment pas d’un modèle à l’autre, et que l’énergie de dispersion augmente
du modèle F au modèle Fbis, traduisant l’interactionS· · ·Slégèrement plus
importante dans le modèle Fbis (3,72 Å contre 3,75 Å pour le modèle F).
Intéressons-nous enfin au modèle G, optimisé et expérimental. Pour le
premier, la force de dispersion est la plus importante parmi nos systèmes,
mettant en évidence une interaction intermoléculaire relativement
impor-tante, et une force d’induction plus faible signifiant que l’interaction n’est
pas principalement d’origine orbitalaire (de typeσ∗−p). Maintenant, pour le
modèle Gexp, ce sont les résultats qui sont probablement les plus difficiles à
interpréter et qui soulignent, une nouvelle fois, la nature "intermédiaire" de
l’atome de soufre. Cela se traduit dans les résultats SAPT par des évolutions
minimes des différentes énergies en fonction des modèles, évolutions pas aussi
marquées que dans l’étude de R. Gleiter (où sont comparés les chalcogènes).
Pour le modèle Gexp, la force de dispersion est beaucoup plus faible que celle
des autres modèles, et l’énergie d’induction est identique à celle du modèle
Gopt. Ce qu’il est possible de dire, c’est que pour ce modèle, l’interaction
intermoléculaire est plus faible que pour les autres, et qu’il est difficile de la
décrire en termes simples "interaction orbitalaire" ou "liaison hydrogène". Si
on se réfère aux résultats de R. Gleiter, le modèle Gexp serait proche, d’après
SAPT2006, d’un système modèle duMe2O· · ·OMe2 pour lequel les forces de
dispersion sont faibles à cause de la faible polarisabilité de l’oxygène
"accep-teur". Ceci suggère que le pont disulfure "accepteur", dans le cristal, n’est
pas aussi accepteur que le serait un atome de soufre mais se comporterait
de manière similaire à un atome d’oxygène. Si on compare avec les résultats
de l’analyse NBO, laquelle nous disait que l’interaction intermoléculaire au
sein du modèle Gexp était principalement d’origine orbitalaire, on s’aperçoit
que loin d’être contradictoire, les résultats SAPT nous rappellent juste que
les calculs sont effectués sur les géométries cristallines non optimisées et ils
peuvent contenir des erreurs ou artefacts dus au fait que la géométrie ne se
situe pas sur un minimum d’énergie. Maintenant, la tendance observée dans
les résultats SAPT pourrait effectivement conduire à conclure que,
d’ori-gine orbitalaire, l’interactionS· · ·Sdans le sel[(H3N−CH2−CH2−S−)2]PbI4
(puisque la géométrie initiale est tirée de ce composé) est difficile à décrire
à cause des nombreuses autres interactions se produisant dans le cristal,
interactions dont la géométrie porte la trace, et ce pourrait être l’origine
du résultat SAPT concernant Gexp. Cela laisse sous-entendre qu’il faudrait
augmenter la taille des systèmes modèle afin d’estimer les interactionsS· · ·S
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Relations Structures-Propriétés dans des matériaux hybrides multifonctionnels : Investigations structurales et théoriques
(Page 145-149)