1.3 Le point chaud de Crozet
2.1.4 Analyse de l’Argon par spectrométrie de masse
Les mesures de l’Ar sont effectuées sur le même aliquote que celui employé pour
déterminer les teneurs en K. La technique d’analyse (méthode Cassignol-Gillot) que nous
avons utilisé est décrite par Gillot and Cornette (1986). Cette méthode permet de mesurer
de faibles teneurs en
40Ar radiogénique aussi bien pour la détermination des âges anciens
que des âges jeunes, sans utiliser la dilution isotopique via l’ajout d’un spike
38Ar. Les
analyses ont été effectuées au laboratoire Intéraction et Dynamique des Environnements
Sédimentaires (UMR 4148, Université Paris Sud XI, Orsay), en collaboration avec G.
Delpech.
L’
40Ar issu de la désintégration du
40K est un gaz piégé au sein de la mésostase de
l’échantillon. Il convient d’extraire ce gaz puis d’éliminer les gaz autres que l’Ar avant
la mesure de sa composition isotopique par spectrométrie de masse. Pour ces analyses,
nous utilisons une ligne d’extraction de l’argon en acier inoxydable qui est séparé en deux
parties (fig. 2.2) :
– la partie d’extraction et de purification du gaz, maintenue à un vide secondaire de
l’ordre de 10
−7Torr au moment de l’extraction des gaz.
– la partie du spectromètre de masse. Cette zone est maintenue à un vide secondaire
poussé de l’ordre de 10
−8Torr, à l’aide d’une pompe turbo-moléculaire associée à
une pompe primaire. Cette ligne va permettre l’attraction du gaz depuis la première
zone vers le spectromètre.
2.1.4.1 Extraction de l’Argon :
La masse de fraction de mésostase pesée pour l’analyse de l’
40Ar dépend directement
de la concentration en K mesurée dans le même aliquote, elle sera donc pesée avec
préci-sion. Cette fraction est placée dans un creuset en molybdène préalablement dégazé et situé
à l’intérieur d’un tube de quartz sous ultra-vide (ordre de 1.10
−7Torr). Cette enceinte est
alors chauffée par un four à induction (solénoide parcouru par un courant alternatif de
haute fréquence) à des températures proches de 2000°C, et est refroidie par circulation
d’eau. Les phases minérales constituant la mésostase fondent entre 800°C et 1200°C,
li-bérant ainsi tous les gaz qu’elles contiennent : H
2O, CO
2, et l’Ar. Pendant la fusion de la
mésostase, un doigt de charbon actif placé plus en aval de la ligne (fig. 2.2) est refroidi
par de l’azote liquide afin d’optimiser l’extraction et le piégeage des gaz.
2.1.4.2 Séparation de l’Argon :
La séparation de l’argon des autres gaz repose sur des étapes successives de
purifica-tion chimique. Une fois l’extracpurifica-tion des gaz complète, le doigt de charbon actif est isolé
du reste de la ligne et réchauffé à 300°C pour libérer tous les gaz qu’il a piégé lors de
l’extraction. En parallèle, un doigt de mousse de titane (fig. 2.2) est également chauffé
à 700°C pendant 1 heure pour piéger tous les gaz non-inertes et isoler les gaz rares. La
température et le temps de chauffe sont suffisamment élevés pour considérer que tout l’Ar
contenu dans l’échantillon a été récupéré et purifié. La qualité de purification du gaz est
contrôlée et améliorée par une série de getters (i.e. pièges à gaz) de type SAES Al-Zr, qui
sont placés tout au long de la ligne jusqu’au spectromètre de masse et évitent l’apparition
de gaz rémanents dans la ligne.
FIGURE2.2 –Schéma de la ligne d’extraction de l’Argon. Dans le secteur d’extraction et de purification,
il existe 2 lignes identiques et mises en parallèle (#1 et #2), dont une seule des deux est mise à contribution
lors de l’analyse.HF = Haute Fréquence.
2.1.4.3 Analyse isotopique de l’Argon :
Le gaz inerte situé dans la zone d’extraction et de purification est désormais composé
d’argon, d’hélium et d’autres gaz (néon, krypton) en quantité négligeable par rapport à
l’argon. Après l’heure de purification, l’Ar est attiré et piégé dans le second secteur (fig.
2.2) en refroidissant les doigts de charbon actif dans de l’azote liquide. La condensation
du gaz purifié permet l’élimination de l’hélium, dont la température de condensation est
bien inférieure à celle de l’azote liquide. Ce gaz sera évacué de la ligne par pompage sur
la seconde pompe turbo-moléculaire du second secteur (fig. 2.2).
Préalablement à l’analyse, la calibration du spectromètre est vérifiée en mesurant une
dose d’Ar atmosphérique de référence, dont la valeur est connue. Cette dose a été calibrée
par volumétrie (0,1 cm
3) et comparée à des géostandards de référence, dont le standard
GL-O (Cassignol and Gillot, 1982; Odin, 1982; Gillot and Cornette, 1986). En effet, le
nombre d’atomes d’
40Ar de cette dose est calibré par mesures de ce standard et estimé à
1,606.10
13atomes. La dose calibrée est détendue dans un volume identique à celui du gaz
échantillon puis mesurée par le spectromètre de masse. Les isotopes
40Ar et
36Ar sont
me-surés simultanément sur un double collecteur pendant 2 à 3 minutes, avec une mesure des
pics de signaux en ces deux isotopes toutes les secondes. Le nombre d’atomes en
40Ar de
cette dose calibrée étant connue et équivalente à une certaine valeur du signal électrique,
nous pourrons donc déduire la teneur en Ar par gramme d’échantillon analysé. Une fois
la mesure effectuée et validée, la dose calibrée présente dans l’enceinte du spectromètre
est évacuée par cryopompage.
Les doigts de charbon piégeant l’Ar de l’échantillon purifié sont réchauffés et le gaz
est introduit dans le spectromètre de masse (fig. 2.2). Les mesures des isotopes 40 et 36 de
l’Ar se font dans les mêmes conditions que celles de la dose calibrée. Toutefois, une partie
de l’
40Ar mesuré n’est souvent pas due à la désintégration du K mais à une contamination
de l’échantillon par de l’Ar d’origine atmosphérique. Une correction de cette «
conta-mination atmosphérique » doit être alors appliquée. Cet
40Ar peut être retenu dans les
minéraux de la mésostase depuis leur formation, adsorbé à la surface des grains ou dans
les zones d’altération de l’échantillon, ou encore intégré à ce dernier lors de sa
prépara-tion (chauffe des matériaux utilisés). Une correcprépara-tion du signal de l’échantillon de cette
« contamination atmosphérique » est alors nécessaire. Cette correction est possible car
l’isotope stable
36Ar est uniquement d’origine atmophérique. Le rapport atmosphérique
40