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4.5 Le mélanome de la choroïde

4.5.3 Mécanismes moléculaires impliqués dans le développement des

4.5.3.2 Altérations de voies métaboliques

La voie de signalisation des MAP Kinases (Mitogen-Activated Protein Kinases)

Les MAP kinases sont des sérine/thréonine kinases qui peuvent être activées par de nombreux et différents stimuli. Il existe trois grandes familles de MAPK : les protéines ERKs 1, 2 et 3 (Extracellular signal-Regulated Kinases) ; les protéines JNKs 1, 2 et 3 (c-Jun NH2-terminal Kinases) ; et les protéines p38 α, β, γ, δ (p38M AP Ks). La voie des

MAP kinases peut être activée par différents récepteurs comme ceux à activité tyrosine kinase ou les récepteurs couplés aux protéines G. Dans tous les cas, l’activation d’une MAP kinase résulte de l’activation successive d’une MAP kinase kinase kinase puis de l’activation d’une MAP kinase kinase qui elle-même activera la MAP kinase (Fig. 4.17).

La voie des MAP kinases est activée dans 86% des mélanomes uvéaux [Weber et al., 2003]. Cependant, contrairement aux mélanomes cutanés qui présentent une mutation activatrice de BRAF dans 62% des cas (principalement une mutation V600E), les méla- nomes uvéaux ne présenteraient pas de mutation dans cette protéine [Edmunds et al., 2003; Rimoldi et al., 2003; Weber et al., 2003]. Certaines études montrent que cette mutation peut tout de même être mise en évidence dans les mélanomes uvéaux par des techniques plus sensibles car cette mutation BRAF pourrait être présente dans un sous-ensemble de la tumeur [Janssen et al., 2008; Maat et al., 2008]. Ceci permettrait d’expliquer la présence de mutation BRAF dans des lignées cellulaires de MU [Calipel et al., 2003; Kiliç et al., 2004; Calipel et al., 2006].

L’activation de la voie des MAP kinases peut également se faire par l’activation de NRAS dans les mélanomes cutanés, cependant cette mutation n’a jamais été montrée dans les mélanomes uvéaux [Zuidervaart et al., 2005].

Des études récentes permettent d’envisager une possibilité permettant l’activation de la voie MAP kinase. Effectivement cette voie peut être activée par l’activation de récep-

4.5. LE MÉLANOME DE LA CHOROÏDE

FIG. 4.17: La voie des MAP kinases.

Figure d’aprèshttp: // www. cellsignal. com/ pathways/ map-kinase. jsp

teurs couplés aux protéines G. Il a été montré dernièrement qu’environ 50% des méla- nomes uvéaux présentaient des mutations activatrices dans GNAQ [Onken et al., 2008; Bauer et al., 2009; Raamsdonk et al., 2009] ou GNA11 [Raamsdonk et al., 2009, 2010], sous-unité α des protéines G. Ces protéines G sont des hétérodimères qui se couplent à des récepteurs transmembranaires et permettent la transformation du GDP en GTP per- mettant ainsi le clivage de PIP2 (phosphatidylinositol (4,5)-bisphosphate) en IP3 (inosol triphosphate) et DAG (diacyl glycerol) via PLCβ. DAG active ensuite la protéine kinase C (PKC) qui permet d’activer des voies en aval dont celle des MAP kinases.

Les protéines GNAQ et GNA11 présentent dans certains mélanomes uvéaux une mu- tation Q209L qui entraine la perte de leur activité GTPase, ne permettant plus l’hydrolyse du GTP en GDP et donc une activation constitutive de PLCβ et de la voie MAP kinases. Dans une étude comparant des nævi, des mélanomes uvéaux et des métastases de mé- lanomes uvéaux, la mutation dans GNAQ est présente dans 55% des nævi, 45% des mé- lanomes uvéaux et 22% des métastases alors que la mutation GNA11 est présente dans 7% des nævi, 32% des tumeurs et dans 57% des métastases [Patel et al., 2011]. Cela suggère que des mutations GNA11 sont plus associées à un risque accru de métastases dans le mélanome uvéal que des mutations GNAQ. Ces mutations sont fréquentes mais elles seraient précoces dans la tumorigénèse et ne sont pas significativement associées à l’apparition de métastases [Onken et al., 2008; Bauer et al., 2009].

4.5. LE MÉLANOME DE LA CHOROÏDE La voie de signalisation PI3K/AKT

La PI3 kinase (PhosphoInositide 3-kinase) joue un rôle crucial dans un large éventail de fonctions cellulaires en réponse à différents signaux extracellulaires (Fig. 4.18). La sérine-thréonine kinase AKT est un effecteur en aval de PI3K, qui en réponse à son ac- tivation, va phosphoryler de nombreuses cibles incluant d’autres kinases ou encore des facteurs de transcription et ainsi jouer un rôle important dans de nombreuses fonctions cellulaires. PI3K est activée par des récepteurs couplés aux protéines G ou des récep- teurs à activité tyrosine kinase et catalyse la conversion du PIP2 (PhosphoInositol-3,4- biPhosphate) en PIP3 (PhosphoInositol-3,4,5-triPhosphate) permettant ainsi l’activation d’AKT (PKB) impliqué dans la prolifération et la survie. Cette voie de signalisation est né- gativement contrôlée par PTEN qui active la conversion de PIP3 en PIP2 et donc diminue l’activation d’AKT.

L’activation de PI3K a été montrée dans des lignées de mélanomes uvéaux [Naus et al., 2000; Abdel-Rahman et al., 2006; Babchia et al., 2010]. Elle pourrait être due à une perte d’expression de PTEN [Abdel-Rahman et al., 2006]. PTEN est un gène sup- presseur de tumeurs localisé en 10q23.3 et impliqué dans différents cancers [Li et al., 1997; Steck et al., 1997]. Des études ont montré une perte dans 30% à 50% des méla- nomes cutanés dans cette région [Herbst et al., 1994; Healy et al., 1998] qui serait as- sociée avec un mauvais pronostic [Rodolfo et al., 2004]. Des analyses de cytogénétique ont montré une perte du chromosome 10 dans 27% des mélanomes uvéaux [Höglund et al., 2004]. Abdel-Rahman et al. ont identifié une perte de PTEN dans les mélanomes uvéaux agressifs comparés aux tumeurs moins agressives [Abdel-Rahman et al., 2005] et ont identifié une microdélétion en 10q comme étant le mécanisme majeur entraînant la perte d’expression de PTEN Abdel-Rahman et al. [2006]. PTEN pourrait donc jouer un rôle dans la classification des tumeurs de mauvais pronostic et être utilisé dans les thérapies ciblées.

Une des cibles majeur en avale de AKT est mTOR (mammalian Target Of Rapamycin) qui joue un rôle dans la progression du cycle cellulaire et donc la prolifération cellulaire et son activation a été montrée dans des lignées de mélanomes de la choroïde [Babchia et al., 2010]. Cependant en testant un inhibiteur de mTOR (la rapamycine) sur ces cel- lules, les effets sur la prolifération et l’apoptose ont été décevants. Cette étude a permis de montrer que l’inhibition de mTOR dans les cellules de mélanomes uvéaux par la rapa- mycine entraînait une rétroaction négative de mTOR en augmentant la phosphorylation de AKT et entraine ainsi l’activation de la voie cycline D1 via GSK3. Dans cette étude effectuée sur des lignées, Babchia et al. montrent que les voies de signalisation PI3K et BRAF/ERK sont des voies parallèles qui coopéreraient dans la prolifération cellulaire des mélanomes uvéaux. Cette équipe avait déjà montré que la voie BRAF/ERK contrôlait la prolifération cellulaire dans les mélanomes uvéaux en régulant l’expression de la cycline D1 [Calipel et al., 2006] et dans cette étude [Babchia et al., 2010], ils montrent que l’acti- vation de la cycline D1 nécessiterait l’activation de ces deux voies quel que soit le statut mutationnel de BRAF (qui n’est pas fréquent dans les mélanomes uvéaux comparé aux mélanomes cutanés).