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2.3 Haut-débit et étude des cancers

2.3.1 Étude au niveau de l’ADN

Il existe une relation étroite entre altération des profils génomiques et cellules tumo- rales. Il a été montré qu’il existe un lien direct entre l’analyse des gains et des pertes et le diagnostic des tumeurs [Bauer and Bastian, 2007] voire même dans le pronostic [Ali et al., 2010]. Des études ont également montré que la recherche de régions gagnées ou perdues permet également de mettre en évidence des oncogènes ou des gènes sup- presseurs de tumeurs comme acteurs clés dans l’acquisition de capacités tumorales [Hui et al., 2002; Ishizuka et al., 2002; Lassmann et al., 2007].

Différents types de puces permettent d’analyser ces altérations avec des résolutions plus au moins fines et nous décrirons plus en détail dans la partie 2.4 les puces CGH arrays et les puces SNP dans l’étude du nombre de copie d’ADN.

2.3.1.2 Polymorphismes

Chez l’homme, entre deux individus non apparentés, il existe des variations de sé- quence non pathologiques nommées polymorphismes. Ces polymorphismes peuvent être localisés dans des régions codantes ou non. Ils peuvent jouer un rôle dans divers mécanismes physiologiques et être à l’origine de la susceptibilité accrue d’individus à des maladies comme le cancer.

Parmi ces variations on peut distinguer les SNP pour Single Nucleotide Poylmorphism qui constituent la forme la plus abondante de ces changements entre les individus et qui correspond à une modification au niveau d’un nucléotide et doit exister chez plus de 1% des individus. Ils sont présents toutes les 100 à 300 paires de bases. Dans les régions codantes, ces SNP peuvent modifier ou non (grâce à la redondance du code génétique) la protéine produite, et dans les régions non codantes, ces variations peuvent modifier les sites d’épissage, les séquences des ARN non codant ou encore les régions régulatrices. Il existe également dans notre génome des séquences nucléotidiques répétées en tandem les unes à la suite des autres. Le nombre de répétition est extrêmement variable entre les individus d’où leur nom de VNTR (Variable Number of Tandem Repeat). On distingue les minisatellites qui sont des répétitions de motif de 10 à 60 paires des bases et les microsatellites qui sont des répétitions de motif de 1 à 6 paires de bases.

Enfin, il existe des séquences d’ADN répétées dispersées qui sont réparties sur l’en- semble du génome. Parmi ces séquences, on distingue les séquences SINE (Short Inter- spersed Elements) dont la longueur varie entre 130 et 500 pb et dont les plus fréquentes sont les séquences ALU, et les séquences LINE (Long Interspersed Elements) dont la longueur est de l’ordre du kilobase.

Les insertions de séquences ALU peuvent entraîner des troubles héréditaires et avoir toute leur importance dans l’étude des cancers. Le premier rapport entre des recombinai- sons ALU et cancer date de 1995 lors d’une étude sur le cancer colorectal [Nyström-Lahti et al., 1995].

2.3. HAUT-DÉBIT ET ÉTUDE DES CANCERS 2.3.1.3 Méthylation

Outre des altérations du nombre de copies ou des mutations nucléotidiques, l’expres- sion des gènes peut également être contrôlée par une régulation épigénétique. L’épigéné- tique peut être définie par l’ensemble des opérations qui modifie le profil d’expression des gènes sans changement dans la séquence nucléotidique. En effet, le contrôle de la struc- ture de la chromatine (ADN + histones) influence l’expression génique. Pour être expri- més, les gènes doivent être localisés dans une région où la chromatine est décompactée afin de permettre la fixation de facteurs trans et ainsi activer la transcription. Lors d’une conformation en chromatine ouverte, l’ADN est hypo-méthylé au niveau des cytosines des îlots CpGs et s’enroule de façon lâche autour d’histones hyper-acétylés ce qui per- met aux facteurs de transcription de se fixer et d’activer la transcription. En conformation chromatine fermée et donc blocage de la transcription, les histones sont hypo-acétylés et les îlots CpGs qui se trouvent dans les régions proximales des promoteurs pour une grande partie des gènes sont hyper-méthylés. Ces modifications chimiques se font grâce à différentes enzymes, les méthyltransférases, les déméthylases, ou encore les acétyl- transférases et les déacétylases (Fig. 2.5). L’hyper méthylation de l’ADN peut être requis pour des cas particuliers comme l’inactivation du chromosome X chez les femmes ou en- core pour protéger l’intégrité chromosomique dans des régions répétées. Il a également été montré que ces phénomènes épigénétiques pouvaient jouer un rôle dans le cancer [Kouzarides, 1999; Das and Singal, 2004]. L’hyper-méthylation de gènes suppresseurs de tumeurs pourrait rendre silencieux certains gènes cruciaux et une hypo-méthylation pourrait activer des gènes impliqués dans l’invasion et le processus métastatique.

La méthylation des îlots CpGs ne peut pas être mesurée par des sondes d’ADN complémentaires comme pour les autres puces décrites car ni la séquence d’ADN ni le nombre de copie d’ADN est directement modifié. Afin de rendre ces altérations me- surables, la technique la plus couramment utilisée, est de faire subir aux échantillons un traitement bisulfite préalable. Les amorces oligonucléotides inspectent les sites de mé- thylation des gènes putatifs dans l’ADN génomique traité au bisulfite. Le traitement au bisulfite du CpG non méthylé convertit la cytosine en uracile, tandis que les cytosines méthylées ne sont pas converties. Deux ensembles de sondes sont donc conçus pour chaque cible CpG. Un ensemble correspondant à la séquence non méthylée traitée au bi- sulfite (uracile) tandis que l’autre correspond à la séquence non traitée (5-méthylcytosine) [Bibikova et al., 2006].

Avec le développement du séquençage haut-débit, les puces ne sont plus les seules technologies qui permettent de faire de la recherche de régions hyper-méthylées ou hypo- méthylées sur génome entier [Bibikova and Fan, 2010].

2.3. HAUT-DÉBIT ET ÉTUDE DES CANCERS

FIG. 2.5: Le contrôle de la transcription par la méthylation de l’ADN.

Une région transcriptionnellement active ciblée pour devenir inactive est méthylée au niveau de l’ADN par l’action de méthyltransférases ce qui conduit au recrutement de protéines se liant aux ilôts CpG méthylés asssociées à des co-represseurs et des histones déacétylases (HDACs). Les histones déacétylés prennent une conformation plus compacte qui empêche la fixation des facteurs de transcription sur leur site.

2.3. HAUT-DÉBIT ET ÉTUDE DES CANCERS 2.3.1.4 Fixation de régulateurs

La fixation de régulateurs trans dans les régions promotrices des gènes est indis- pensable au bon fonctionnement de la machinerie transcriptionnelle. La technique d’im- munoprecipitation de la chromatine a été adaptée sur puce pour l’étude de génomes entier afin de pouvoir identifier de nouveaux facteurs de transcription impliqués dans la régulation de l’expression de gènes cibles [Ren et al., 2000]. La technique de ChIP-on- chip pour Chromatine ImmunoPrecipitation sur puce peut-être divisée en deux grandes étapes. La première pour l’immunoprécipation de la chromatine, où les protéines sont fixées in vivo par liaison covalente à l’ADN à l’aide de formaldéhyde ; l’ADN est ensuite extrait et découpé ; les fragments associés à la protéine étudiée sont sélectionnés grâce à un anticorps ; après lavage de l’excédent les complexes protéine-ADN sont dénaturés. La deuxième étape consiste à hybrider les fragments d’ADN sélectionnés sur puces afin de les identifier (Fig. 2.6).

FIG. 2.6: Schéma représentant les différentes étapes de la technique d’immunoprécipation de la chromatine sur puce.

Les protéines sont liées de façon covalente à l’ADN (avec du formaldéhyde), l’ADN est ensuite extrait puis fractionné. Les fragments d’intérêt, associés à la protéine étudiée, sont sélectionnés grâce à un anticorps. Après précipitation des complexes ADN-protéine-anticorps et élimination du surnageant, les complexes ADN-protéine sont séparés. Les fragments recueillis sont finalement analysés sur puce à ADN pour les identifier.