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Rapport

Introduction

Le mot «  senior  » renvoie à une notion étymologiquement relative  ; il s’agit d’un emprunt au latin « senior » qui signifie plus âgé. Il a, dans une certaine mesure, conservé jusqu’à aujourd’hui ce caractère relatif. Utilisé dans le domaine de la pratique sportive, le mot désigne des concurrent.e.s qui ont dépassé l’âge limite des juniors et qui ne sont pas encore vétérans. Dans le monde du travail, les seniors sont les personnes actives (en emploi ou au chômage) qui ont entamé leur deuxième partie de carrière. Mais cette notion de « deuxième partie de carrière » est elle-même très ambiguë : selon les sources, elle commence à 45 ans, 50 ou 55 ans ; sa limite supérieure est également mouvante puisqu’elle est fonction de l’âge de départ en retraite qui peut varier selon les individus mais qui constitue surtout un enjeu collectif, le législateur déterminant, en fonction d’arbitrages économiques et financiers, un âge minimum de retraite et les conditions dans lesquelles sont acquis les droits à pension.

La notion de senior semble assez étroitement liée aujourd’hui à l’activité, à la capacité de faire, à l’autonomie. Ainsi, les retraité.e.s très présent.e.s et actif.ve.s dans le champ associatif sont aussi désigné.e.s comme des seniors. Même en faisant abstraction de la compétition sportive où la définition de senior s’applique à des individus décidément très jeunes, la

« seniorité » entre vie professionnelle et investissement associatif peut ainsi s’appliquer à une très longue période de l’existence. Certain.e.s peuvent être très longtemps senior avant de devenir des personnes âgées.

Pour en revenir au marché du travail, les bornes d’âge retenues par la statistique publique (tableaux mis en ligne sur le site internet de l’Insee, rubrique marché du travail) sont très variables, et ce bien que les données proviennent de la même source, l’enquête emploi. Certains tableaux sont présentés par âges quinquennaux (50-54 ans ; 55-59 ans ; 60-64  ans  ; plus rarement au-delà), d’autres sur des plages plus larges (50-64  ans et/ou 55-64 ans). Les données sont parfois détaillées par années mais pas au-delà de 64 ans. La présentation statistique ignore, le plus souvent, les seuils et les plafonds définis dans les principaux régimes de retraite, actuellement 62  ans pour l’âge minimal et 67  ans pour bénéficier d’une retraite à taux plein sans condition de durée d’assurance1. Ce choix de l’appareil statistique est en fait dicté par le souci de préserver la construction de séries longues, jusqu’à plus de 40 ans, selon des normes qui ont été arrêtées dans un contexte assez différent de l’actuel. Quant aux publications « emploi » d’Eurostat, elles restent basées, par convention, sur un âge actif compris entre 15 et 64 ans. En ce qui concerne les seniors, les comparaisons européennes relatives à leur situation sur le marché du travail s’effectuent sur la tranche 55-64 ans.

1 La loi n° 2014-40 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, a porté à 62 ans l’âge d’ouverture des droits à la retraite (nouvel article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale). Les personnes disposant de la durée de cotisation requise peuvent bénéficier d’une pension complète, sans pénalité de minoration (décote), à 62 ans. L’article L. 351-8 du code de la sécurité sociale prévoit que : « Bénéficient du taux plein même s’ils ne justifient pas de la durée requise d’assurance ou de périodes équivalentes dans le régime général et un ou plus autres régimes obligatoires : 1°- les assurés qui atteignent l’âge prévu à l’article L. 161-17-2 du code de la sécurité social augmenté de cinq années (…) » Il s’agit donc de personnes ayant atteint l’âge de 67 ans. Leur pension de retraite

AVISDÉCLARATIONS/SCRUTINRAPPORTANNEXES En termes de politiques publiques, les jeunes et les seniors sont deux groupes d’actif.

ve.s qui ont fait, dans la durée, l’objet d’un traitement spécifique sur le marché du travail, les premiers au titre de difficultés d’insertion et les seconds au titre de difficultés de maintien dans l’emploi. A l’inverse, la tranche d’âge intermédiaire des 25-49 ans ou 30-49 ans, n’est jamais identifiée comme appelant un traitement particulier, peut-être d’ailleurs à tort, puisqu’une lente érosion, dans la longue durée, des taux d’activité et d’emploi des hommes de cette tranche d’âge apparaît désormais comme un sujet de préoccupation dans plusieurs pays développés dont le nôtre.

S’agissant de l’emploi des seniors, le fait marquant des quarante dernières années est constitué par le retournement des discours et des politiques publiques au tournant du siècle.

L’ampleur de ce retournement est à la hauteur de l’enjeu attaché à la question du travail des seniors, au regard du marché du travail, de l’équilibre financier des régimes de retraites dans un contexte de vieillissement démographique et des équilibres sociaux dans leur ensemble.

En l’espace d’environ une décennie, la France est passée d’une politique très largement axée sur les retraits précoces du marché du travail notamment par le biais de préretraites, à une politique d’allongement des fins de carrière.

La pratique des préretraites sur financement public dans le contexte de restructurations industrielles de la fin des années 1970 et des années 1980 a permis aux grandes entreprises de diminuer leurs effectifs en évitant des licenciements secs. Une autre justification du recours aux préretraites, d’ordre macro-économique, résidait dans l’espoir de libérer des emplois pour des actif.v.e.s plus jeunes et contribuer ainsi à résoudre le problème du chômage de masse. Cet objectif n’a pas été atteint.

Aujourd’hui, les politiques de maintien en activité et en emploi des seniors sont guidées par le souci de préserver l’équilibre financier des retraites. Une justification macro-économique est également avancée, selon laquelle une forte mobilisation des actif.ve.s, un taux d’emploi élevé est en soi créateur de richesse et de bien-être collectif. L’avenir tranchera sur cette dernière option.

Pour l’heure, un enjeu essentiel de cohésion sociale pour les pouvoirs publics et les partenaires sociaux est d’éviter que l’allongement progressif des fins de carrière, tel qu’il est déjà programmé, ne se traduise par une augmentation du chômage en général et des seniors en particulier.

La première partie du rapport sera consacrée à un retour sur l’évolution de l’emploi des seniors, sur les politiques publiques et les pratiques conventionnelles successivement mises en œuvre.

La deuxième partie mettra en lumière les initiatives et expérimentations en cours en matière de déroulement de carrière et de recrutement, d’entrée en formation et d’accompagnement en emploi, d’amélioration des conditions de travail et de solutions organisationnelles en vue de sécuriser les parcours professionnels des seniors.

Rapport

I - L’EMPLOI DES SENIORS :