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Chapitre 1 : Etat de l’art

3. Renforcement et mécanisme de rupture

3.1. Présentation de la résilience et des mécanismes de ruptures

3.1.4. Stratégies de renforcement des matrices époxy

3.1.4.4. Ajout de thermoplastiques hautes performances

44 Le système de renforcement par ajout d’élastomères dans la matrice est limité par la diminution de la température de transition vitreuse, la réduction du module de Young mais aussi la contrainte à la rupture. C’est pourquoi dans les années 80, l’ajout d’élastomère fut remplacé par l’ajout de thermoplastiques à haute température de transition vitreuse ou semi-cristallin. Ainsi, beaucoup de mélanges ont été étudiés avec les plus courants étant, le polyéthersulfone (PES), polyetherimide (PEI), poly(phényleneoxyde) (PPO), polyimides (PI) … Cependant, leur ajout modifie énormément la viscosité du matériaux ce qui rend leur processabilité beaucoup plus compliquée et onéreuse [54], [55], [90].

Les propriétés physiques de ces matériaux, comme une température de transition vitreuse élevée ainsi qu’un module élevé en fond d’excellents candidats pour le renforcement des matrices époxy. La littérature a largement étudié le sujet ces vingt dernières années. Bucknall et al. [91] sont les précurseurs dans ce domaine en ayant ajouté un polyethersulfone à un prépolymère époxy. La ténacité est améliorée de 30% en ajoutant 40% de polyethersulfone. Même si les thermoplastiques sont moins efficaces dans ce domaine que les élastomères. La processabilité devient plus complexe car l’importante masse molaire des thermoplastiques augmente de manière significative peut elle aussi être diminuée à cause de l’augmentation de la viscosité.

La méthode couramment utilisée consiste à ajouter le thermoplastique avec le prépolymère époxy qui sont initialement miscibles. En effet, l’époxy DGEBA semble être un excellent solvant pour plusieurs polymères tels que le polyethersulfone (PES) [91], le polyétherimide [92], [93], l’éther ou l’oxyde de poly(2,6-diméthyl 1,4-phénylène) (PPE ou PPO) [92], [93] et le polyméthacrylate de méthyle (PMMA).

Lors de la formation du polyépoxyde, la masse molaire augmente et entraine une diminution de l’entropie de mélange et donc de la séparation de phase du thermoplastique. Ce phénomène de séparation de phase et la morphologie résultante dépend de la fraction massique en thermoplastique incorporée dans le mélange et peut avoir deux principes. Le premier est la décomposition spinodale qui intervient lorsque la concentration en thermoplastique est proche du seuil critique d’inversion de phase [93]. Le second est par nucléation croissante pour des concentrations plus éloignées du seuil critique.

La morphologie obtenue aura un impact direct sur la microstructure du matériau et sur les propriétés physiques et chimiques. La morphologie de ce type de mélange peut être :

- Une phase continue constituée du thermodurcissable ou du thermoplastique qui contient des nodules de l’autre constituant

- Une structure bicontinue

Cette morphologie est contrôlée par la miscibilité initiale du mélange, la vitesse de polymérisation et une éventuelle réaction entre le thermoplastique et le réseau époxyde. L’amélioration de la ténacité de la matrice passe donc par une fraction volumique maximale avant qu’il y ait inversion de phase afin d’obtenir une morphologie co-continue [93], mais aussi par l’adhésion interfaciale et les modifications de l’interface. Dans leur travaux, Girad-Reydet et al. [92] arrivent à augmenter de plus de 50% le facteur d’intensité des contraintes grâce à du PEI modifié et du PPE modifié.

L’ajout de thermoplastique permet donc de modifier les propriétés d’un matériau à condition de maitriser également les mécanismes physique et chimique à l’interface.

Dans leurs travaux à application médical, Flejszar et Chmielarz [94] résument l’utilisation de méthodes de polymérisation et de divers monomères appliqués pour la modification de surface du PEEK afin d’augmenter sa bioactivité, qui est un facteur critique pour les applications des matériaux biomédicaux.

45 Les premiers articles (2009, 2010 et 2013) sur la polymérisation par greffage de surface auto-initiée réussie de 2-méthacryloyloxyéthyl phosphorylcholine (MPC) sur PEEK par photo-irradiation ont été publiés par Kyomoto [95]–[97]. Une variété de tests effectués a révélé des améliorations significatives de la mouillabilité à l'eau, des propriétés de friction et de la résistance à l'usure des surfaces PEEK modifiées. De plus, l'impact de la concentration en monomère et du temps d'exposition aux UV sur l'étendue de la couche de PMPC greffée a été étudié. Le résultat a montré que la densité de greffage et l'épaisseur de la couche de polymère peuvent être contrôlées en ajustant la concentration du monomère et la durée d'irradiation [96].

Le PEEK non modifié est un matériau bio-inerte mais hydrophobe. Un changement de mouillabilité est le principal objectif des modifications effectuées. De plus, la formation d'une couche hydrophile à la surface du PEEK conduit à une meilleure résistance à l'usure pour la lubrification aqueuse. En se référant à ces faits, des surfaces en PEEK enrichies en AA ont été préparées par polymérisation initiée par UV [98]. En conséquence, un matériau avec une valeur d'angle de contact inférieure a été obtenu, ce qui indique clairement une augmentation de l'hydrophilie de la surface.

Plus récemment, toujours pour des applications médicales, Zheng et al. [99] ont appliqué une polymérisation par greffage initiée par les ultraviolets en une seule étape pour l'introduction de groupes sulfonate sur la surface du PEEK. L'utilisation d'acide vinylsulfonique sodique (VSA) et d'acide vinylphosphonique (VPA) pour améliorer la bioactivité de la surface PEEK traitée a ouvert une nouvelle voie de modification intensivement appliquée dans les dernières recherches [99]–[101]. Des études in vitro utilisant la lignée d'ostéoblastes MC3T3-E1 ont montré que l'adhésion initiale, l'étalement, la prolifération et la différenciation ostéogénique étaient grandement améliorées après la modification de la surface du PEEK. Comme prouvé dans des études antérieures, par rapport aux surfaces hydrophobes, les surfaces hydrophiles étaient plus favorables à l'adhésion et donc favorise les mélanges avec les thermodurcissables [102].

L'application de l’ ATRP- Polymérisation Radicalaire par Transfert d’Atome , en français- dans la synthèse de polymères greffées à partir des surfaces planes permet la possibilité d'obtenir des polymères caractérisés par une distribution étroite en masse moléculaire (MWD) et une architecture contrôlée [103]–[118]. De plus, SI-ATRP- surface initiated ATRP- permet la fonctionnalité croissante des brosses en polymère de différentes surfaces [109], [119]–[122] avec un degré élevé de flexibilité synthétique, permettant l'introduction d'une variété de groupes fonctionnels [123]–[125]. Malgré le potentiel élevé du SI-ATRP pour l'amélioration des propriétés de surface du PEEK, seules des recherches limitées ont été menées dans ce domaine.

Conclusion

Il a été montré dans ce chapitre que la miscibilité d’un mélange a une influence sur les futures propriétés du mélange. Cette miscibilité dépend de la fraction volumique mais aussi de la température, de la masse molaire et des paramètres d’interaction entre les entités. La miscibilité est un état qui est variable au cours de la réticulation d’un mélange.

Le renforcement des matrices époxy peut se faire par l’ajout de thermoplastique. La ténacité dans ce cas dépend de l’adhésion des deux entités mais aussi de la proportion de thermoplastique ajoutée dans le mélange. La ténacité dépend également du cycle de réticulation, du rapport stœchiométrique entre la résine et son durcisseur et du taux de conversion final du mélange.

La ténacité d’une matrice chargée par des particules dépend de la taille des particules de la distance interparticulaire mais aussi de la forme des particules.

46 Lorsqu’une particule est plongée dans un milieu visqueux, sa stabilité dépend de plusieurs paramètres physiques. En effet la-dite stabilité est influencée par sa masse volumique, sa forme, ses dimensions et la viscosité du liquide.

Ce travail s’organisera autour d’un deuxième chapitre qui présentera les techniques expérimentales utilisées et les matériaux en justifiant leur choix. Un procédé pour fabriquer des éprouvettes qui garantit une répartition homogène des charges dans la matrice sera détaillé.

Le troisième chapitre sera dédié à la synthèse et la caractérisation d’un oligomère de PEEK à terminaisons hydroxyles permettant de se lier chimiquement à un prépolymère époxyde. Il sera ensuite étudié la réaction d’addition permettant d’obtenir des chaines hybrides thermoplastique/thermodurcissable. Enfin, la réaction de réticulation du système thermodurcissable sera analysée en fonction de la proportion de charges ajoutées aux mélanges.

Le dernier chapitre se focalisera sur la relation entre la structure de plusieurs mélanges et leurs réponses mécaniques en traction, en flexion et résistance au choc.

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