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Chapitre 3 Modèles d’agrégation et de diffusion de la lumière

3.1 Modélisation et analyse d’agrégats de particules

3.1.1 Agrégation de particules sphériques

3.1.1.1 Modèlés d’agrégation (DLA, DLCA, RLCA)

Dans les suspensions colloïdales, du fait de l’agitation moléculaire, les particules sont en déplacement constant. On parle de mouvement Brownien. Les collisions entre nanoparti-cules pourraient induire une agrégation, du fait notamment des forces de Van der Waals (dé-croissance en 1/r6 pour un objet nanométrique), si des forces répulsives supérieures n’exis-taient pas entre les nanoparticules. Selon le modèle DLVO (Derjaguin, Landau, Verwey, Over-beek), ces forces répulsives sont de nature coulombienne (décroissance en 1/r2) [59]. Elles sont liées à la fameuse double couche électrique [59]. L’équilibre global entre ces différentes forces est souvent exprimé sous la forme d’un potentiel zêta qui peut être positif (cationique) ou né-gatif (anionique : cas des silices colloïdales que nous étudierons). Une suspension reste stable si la barrière d’énergie répulsive électrostatique est très grande devant l’énergie de l’agitation

44 thermique k T des particules, avec b k la constante de Boltzmann et b T la température de la suspension. Ce qui se traduit en général, selon le modèle DLVO, par un potentiel zêta impor-tant en valeur absolue.

Pour rendre la solution instable et déclencher l’agrégation des nanoparticules, il existe plusieurs méthodes. Elles visent toutes à diminuer les forces électrostatiques et donc le poten-tiel zêta. Pour modifier la balance ionique on peut jouer sur le pH ou la salinité du système, on peut aussi ajouter des tensio-actifs pour « écranter » cette double couche. Dans ce cas, aux premiers instants, pour des raisons statistiques, l’agrégation est plutôt du type particule-par-ticule et donc limitée par la capacité de ces dernières à diffuser dans le solvant. Ce régime est qualifié dans la littérature d’Agrégation Limitée par la Diffusion (DLA en anglais) [131]. Aux temps plus longs, une fois que les particules individuelles se font rares ou bien pour des rai-sons chimiques, l’agrégation est plutôt du type agrégat-agrégat [10, 130]. Dans ce cas, on est plutôt dans un régime d’Agrégation Limitée par la Diffusion des agrégats (ou Clusters) ou par la Réactivité des clusters. Les acronymes anglais de ces deux régimes sont DLCA et RLCA pour respectivement Diffusion Limited Cluster Aggregation et Reaction Limed Colloid Aggregation. Dans ce travail, pour générer des agrégats synthétiques, nous avons exclusivement uti-lisé un modèle DLA développé au laboratoire [132]. L’atout fondamental et peu courant de ce dernier, est qu’il vérifie l’équation fractale (voir ci-dessous) à toutes les échelles. A noter, que le laboratoire a déjà effectué des comparaisons pour des longueurs d’onde visibles entre les diagrammes de diffusion d’agrégats DLA et DLCA, les différences étaient quasiment indétec-tables pour les paramètres considérés [132].

3.1.1.2 Codé d’agrégation DLA

Dans le code DLA 1.13 [132], les agrégats sont formés par agrégations successives de particules individuelles ayant une marche aléatoire, voir l’algorithme de la Figure 3.1. L’agré-gation d’une particule n’est autorisée que si le nouvel agrégat formé vérifie l’équation frac-tale [35]. Cette dernière n’est rien d’autre qu’une loi de puissance entre deux échelles caracté-ristiques de l’agrégat : f D g p f p R n k r       (3.1)

avec n et p r le nombre et le rayon des particules (appelées aussi monomères ou particules p primaires) qui composent l’agrégat, D la dimension fractale et f R le rayon de giration du g nouvel agrégat, k un pré-facteur fractal que nous garderons constant dans cette étude f

kf 1.593

[116]. Le rayon de giration est simplement calculé à partir de la position des centres des monomères :

p n 2 g 0 n n 1 p 1 R ( ) n

rr (3.2)

45 où r et 0 r sont les vecteurs pointant respectivement le centre de masse de l’agrégat et de la n nième particule. A noter qu’avec le code DLA 1.3, les rayons des monomères peuvent être diffé-rents (distribution normale). Cependant, dans ce qui suit nous nous limitons essentiellement au cas de particules primaires monodisperses.

Figure 3.1 Algorithme du code DLA [132, 133]

En fait, pour des raisons numériques, le phénomène d’agrégation entre une particule et l’agrégat en formation est validé si l’équation suivante est satisfaite :

f f p p p p D D g,n p g,n g,n 1 p g,n 1 R n R R n 1 R                     (3.3)

où  est un paramètre de tolérance spécifié par l’utilisateur. Ce paramètre est indispensable car, sans celui-ci, la probabilité d’agrégation serait nulle.

46 Durant le processus d’agrégation, toutes les particules primaires sont générées à une grande distance R du centre de masse de l’agrégat : p

p

p g,n

R R , où Rg,npreprésente le rayon de giration temporaire de l’agrégat en formation. Une seconde sphère de rayon Re Rp est utilisée pour borner le domaine de calcul. Si, lors de sa marche aléatoire, une particule sort du domaine R , elle est supprimée et une nouvelle particule est générée. Les rayons p R et p R e sont ajustés au cours du calcul pour s’adapter à la morphologie de l’agrégat en croissance de même que pour limiter les temps de calcul.

Figure 3.2 Copie-écran du logiciel DLA (version 1.13)

Pour finir, la Figure 3.2 montre une copie d’écran du premier onglet du logiciel DLA 1.13. Les deux autres onglets permettent de simuler des images MET et de les visualiser. Dans le premier onglet, consacré à l’agrégation, on observe six panneaux. Le plus important d’entre eux est le panneau (a) qui rassemble les paramètres d’agrégation (nombre maximal et rayon des monomères, rayon de giration de l’agrégat souhaité, rayon délimitant le domaine de calcul etc.). Le panneau (b) permet de paramétrer une rotation de l’agrégat alors que le panneau (c) permet de gérer des calculs en boucle sur n , p D , f R et g k . Les panneaux (d) et (e) affichent f la barre de progression du calcul et les différents paramètres de l’agrégat en formation : cor-données des particules, rayon de giration et dimension fractale effectifs, … Enfin, le panneau (f) rassemble les différentes options de contrôle et d’exportation des données. Il est notamment possible de générer des fichiers de sortie qui peuvent être directement utilisés pour visualiser les agrégats avec le logiciel POV-Ray [133] ou effectuer les calculs électromagnétiques.

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3.1.1.3 Exemples de résultats numériques

Avec le code DLA 1.13 on peut donc générer des agrégats synthétiques de dimension fractale variable et composés d’un nombre plus ou moins importants de monomères mono-disperses ou polymono-disperses. La Figure 3.3 montre un exemple d’agrégat de dimension Df=1.75 composé de 1000 monomères dont les rayons sont distribués selon une loi normale (rayon moyen normalisé rp , et écart-type de 0.2) avec, à gauche, une représentation 3D et les pro-1 jections principales 2D et à droite, une image en transmission mimant une image TEM. De même, la Figure 3.4 montre des visualisations 3D et en transmission d’agrégats composés du même nombre de monomères monodisperses (np=100, rp=1) mais de dimension fractale crois-sante : Df=1.3, 1.7, 2 .1 et 2.5. Des cercles de couleur sont utilisés pour visualiser le rayon de giration Rg=24.15, 11.42, 7.18, 5.25 (bleu) et le rayon équivalant en volume (Rv=4.64, identique pour tous ces agrégats). Attention les graphes ne sont pas à la même échelle. En effet, les agré-gats de basse dimension fractale sont beaucoup plus grands que ceux de dimension élevée (dans la Figure 3.4, les flèches du repère donnent une idée des tailles relatives).

Figure 3.3 Agrégat de dimension Df=1.75 composé de 1000 monomères dont les rayons sont distribués

selon une loi normale (rayon moyen normalisé rp1, et écart-type de 0.2). A gauche : représentation

3D et projections principales réalisées avec le logiciel POV-Ray. A droite, une image en transmission réalisées directement avec DLA 1.13 (les deux graphes ne sont pas à la même échelle)

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Df=1.30 ; Rg = 24.15

Df=1.70 ; Rg = 11.42

Df=2.1; Rg = 7.18

Df=2.5; Rg = 5.25

Figure 3.4 Agrégats fractals composés du même nombre de monomères monodisperses (np=100, rp=1)

et de dimension fractale : Df=1.3, 1.7, 2 .1 et 2.5. A gauche, représentation 3D, avec projections

princi-pales et cercles permettant de visualiser le rayon de giration Rg=24.15, 11.42, 7.18, 5.25 (bleu) et le

rayon équivalant en volume (Rv=4.64, pour tous les agrégats). A droite, une image en transmission

49 Comme on peut le voir dans la Figure 3.4, l’approche fractale permet de construire des agrégats synthétiques complexes et ceci avec très peu de paramètres. On constate également que l’imagerie en transmission ne donne qu’une perception très limitée de cette complexité. Lorsque la dimension fractale est faible, les agrégats sont plus ou moins allongés avec comme cas limite une chaîne rectiligne de monomères (dont la dimension tend vers 1). On observe également que pour ces agrégats la différence entre le rayon de giration Rg et le rayon équiva-lent en volume Rv (et donc en masse) est maximale, voir la Figure 3.4. Lorsque la dimension fractale est élevée, les agrégats prennent la forme de boules plus ou moins sphériques et com-pactes (avec comme cas limite un empilement hexagonal de type « Buckyball » [86] dont la dimension tend vers 3 et les rayons Rg et Rv sont relativement proches). Entre ces deux cas limites, les agrégats peuvent être qualifiés de plus ou moins « denses » ou « dilués », « com-pacts » ou « aérés ou tenus », …

3.1.1.4 Analyses des images MET d’agrégats dé sphèrés

Le laboratoire a développé différents outils d’analyse d’images MET expérimentales d’agrégats de sphères [133]. Ces outils reposent sur la méthode du comptage de boites et la méthode du rectangle circonscrit [119, 132]. Ils utilisent le code DLA pour générer des images MET synthétiques qui sont utilisées pour calibrer numériquement l’erreur de projection. Ces outils ont donné d’excellents résultats lors de l’analyse d’échantillons de suies, en permettant, notamment, de restituer des distributions pour les rayons de giration et les dimension fractales (échantillons mono ou multi-fractals). Nous n’avons malheureusement pas pu utiliser ces ou-tils dans cette thèse, faute d’échantillons MET exploitables et en nombre suffisant.

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