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Il est bien connu qu’un grand nombre de plantes, de microorganismes et d’animaux (Baudrimont et al., 2005) ont la capacité d’accumuler divers éléments chimiques tels que les métaux lourds. Ainsi, le phytoplancton contient en moyenne 300 ppm de Zn, 900 ppm de Fe, 60 ppm de Cu et 3 ppm de Cd (SAVENKO, 1988), des concentrations bien supérieures à celles présentes dans les eaux naturelles.

Plusieurs études ont signalé, vers la fin des années quatre-vingt, l’utilisation de ces propriétés de la biomasse comme outil de préconcentration préalablement à l’analyse des

éléments traces trop dilués pour la résolution des appareils d’analyse de l’époque (MAHAN et al., 1989). Cette utilisation deviendra de plus en plus marginale compte tenu de la mise en œuvre de nos jours d’appareils d’analyse de plus en plus sensibles.

L’application des propriétés accumulatrices des diatomées à des fins de dépollution est appelée biorémédiation ou phytorémédiation lorsqu’il s’agit de végétaux. Généralement, une distinction est faite entre l’adsorption des métaux à la surface des cellules par complexation passive - il s’agit du phénomène de biosorption - et le stockage des métaux à l’intérieur des cellules par l’intermédiaire de mécanismes métaboliques ou non, on parlera alors de bioaccumulation. Le choix de l’une ou l’autre technique est effectué en fonction de la concentration en métal dans les eaux. L’étude des mécanismes de biorémédiation de Cd par la diatomée Phaeodactylum tricornutum (TORRES et al., 1998) a montré que pour une concentration en cadmium allant jusqu’à 25 mg/L la majeure partie du métal extrait de la solution est stocké à l’intérieur de la cellule suivant une relation linéaire entre le taux de cadmium stocké dans la cellule et la teneur en cadmium de la solution. Par contre, au-delà de cette concentration, il semblerait que les cellules soient trop endommagées du point de vue métabolique pour pouvoir absorber activement le cadmium. La majorité du stockage du cadmium s’effectue alors par adsorption à la surface de la cellule.

La phytorémédiation par les algues peut se faire soit avec des cellules vivantes, soit avec des cellules mortes. La biomasse morte, qui n’agit que par des processus d’adsorption à sa surface, à l’avantage de pouvoir être régénérée après utilisation (par lavage dans des solutions acides par exemple) (ZHOU et al., 1998), mais elle ne permet pas d’utiliser les propriétés d’accumulation (nécessitant parfois une activité métabolique de l’organisme) à l’intérieur des cellules. Ainsi, la biomasse morte est le plus souvent utilisée lorsque les concentrations en métaux sont suffisamment élevées, voire létales pour les cellules.

Le choix de la biomasse comme agent de dépollution est lié à son faible coût de revient comparé aux autres techniques de précipitation ou de purification par passage dans des résines échanges d’ions, à sa forte capacité d’absorption (supérieure à celles des zéolites naturelles et des charbons activés) et sa haute spécificité vis à vis de certains métaux lourds, même en présence d’autre métaux alcalins ou alcalino-terreux (MATHEICKAL and YU, 1999). Comparées aux autres organismes, les algues présentent l’avantage d’utiliser la lumière comme source d’énergie grâce à leur activité photosynthétique. Certains auteurs divisent les plantes utilisées en biorémédiation en 3 groupes suivant les éléments qu’elles peuvent accumuler : (1) les accumulatrices de Cu/Co, (2) celles de Zn/Cd/Pb, et (3) celles de Ni (MEJARE and BULOW, 2001). Afin d’améliorer la capacité de phytorémédiation de certaines plantes, l’introduction de protéines et de peptides complexant les métaux est actuellement développée.

Les diatomées sont actuellement comme d’autres types d’algues, de sérieuses candidates pour la phytorémédiation (TIEN, 2004 ; CETINKAYA DONMEZ et al., 1999; PISTOCCHI et al., 2000). En règle générale, les critères de sélection des espèces sont d’une part une vitesse de croissance suffisamment rapide et, d’autre part, une forte capacité d’accumulation des métaux souvent corrélée avec la tolérance de l’organisme aux conditions élevées de pollution (OMAR, 2002). Par exemple, Phaeodactylum tricornutum est une diatomée très tolérante au cadmium ce qui en fait un bon candidat à la biorémédiation, surtout pour de faibles teneurs en métaux si elle est utilisée vivante (TORRES et al., 1998).

Pour les algues en général, de très nombreuses études comparatives ont été effectuées pour déterminer quels étaient les organismes les plus à même d’être utilisés comme agent de biorémédiation. Une des applications les plus courantes est la détoxification des effluents industriels (SCHIEWER and WONG, 2000). Dans cette étude, les propriétés d’accumulation de différentes espèces d’algues brunes (Sargassum hemiphyllum, Colpomenia sinuosa et

Petalonia fascia) et verte (Ulva fascia) ont été comparées par estimation du nombre de sites

disponibles. Il a alors été montré que pour la complexation du cuivre et du nickel, les capacités de biorémédiation des quatre algues se classent comme le nombre de sites disponibles: Petalonia fascia ~ Sargassum hemiphyllum > Colpomenia sinuosa > Ulva fascia. CETINKAYA DONMEZ et al.(1999), ont comparé au moyen d’isothermes de Langmuir et

de Freundlich les propriétés d’adsorption de Cu, Ni, et Cr(VI) par trois algues, Chlorella

vulgaris, Scenedesmus obliquus et Synechocystis sp.. Les isothermes d’adsorption ont permis

de déterminer les capacités maximales de chaque espèce du point de vue de la biorémédiation. (OMAR, 2002) a testé l’absorption du zinc par deux algues vertes Scenedesmus obliquus et

Scenedesmus quadricauda grâce à la détermination des paramètres de leurs isothermes

d’adsorption de ce métal.

D’autres études ont été consacrées à l’influence des paramètres physico-chimiques du milieu extérieur sur la biorémédiation. Outre le pH, un paramètre important de la biosorption est la force ionique de la solution, notamment pour le traitement des eaux usées qui contiennent en général beaucoup de sodium. Ce dernier s’associe par liaison électrostatique avec les groupes fonctionnels présents sur la biomasse (le plus souvent des groupes carboxyliques) ce qui engendre des phénomènes de compétition à la surface des cellules (FOLSOM et al., 1986).

En définitive, la connaissance de la structure des biosorbents est essentielle pour modéliser et prédire leur capacité en tant qu’agents de biorémédiation pour les métaux lourds. L’identification et la caractérisation des propriétés des groupes fonctionnels (pKa et densité de sites) permet d’effectuer une première sélection des candidats potentiels pour des utilisations industrielles.

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