• Aucun résultat trouvé

Section I La prise en considération de la bonne foi en matière civile

A- L’affirmation jurisprudentielle

136. Le droit français de la propriété intellectuelle semble indifférent à la bonne foi. Par exemple, en matière de droit d’auteur, de marques, d’obtention végétale et de brevets, il n’est fait, de manière générale, aucunement référence à un quelconque élément intentionnel dans les textes visant le traitement civil de la contrefaçon255. C’est ainsi que légitimement, nécessairement même, suivant le rôle prétorien qui lui est reconnu, la jurisprudence est venue clarifier et interpréter ce silence législatif256.

1° En matière de droit de marque

137. S’agissant de la contrefaçon de marque, la position jurisprudentielle est invariable et précise : « la bonne foi est inopérante en matière de contrefaçon de marque »257. La justification théorique de ce principe tient au caractère absolu258,

exclusif du droit sur la marque, envisagé en tant que droit privatif; justification dont se font l’écho les tribunaux depuis une cinquantaine d’années: « la propriété d’une marque régulièrement déposée est absolue et confère à celui qui en est investi une action contre ceux qui y portent atteinte de bonne ou de mauvaise foi»259.

D’un autre côté, il semble que, s’agissant de la marque, l’article L.716-1 du CPI renvoie, en matière civile, aux droits du titulaire tels qu’ils sont définis aux articles L.713-2 à L.713-4. Or, en matière pénale, les articles L.716-9, L.716-10 ne

255 Le CPI va dans ce sens, aucun élément intentionnel n’étant requis par les articles L. 615-1, L.623-

5, L.716-1. Il s’ensuit qu’un élément intentionnel n’est pas nécessaire à la sanction civile. Aussi, concernant ces PI, si l’élément matériel est bien le même s’agissant de l’infraction ou du délit civil, l’élément intentionnel n’est pas requis en matière civile alors qu’il l’est en matière pénale. La jurisprudence peut considérer que « la bonne foi est indifférente dans une instance en contrefaçon »

256 CA Paris, 29 octobre 1989 : Ann. prop. ind. 1989, 126 – CA Paris, 30 juin 2000 : PIBD

2000.707.III.516 – Cass.com., 30 janvier 1996, 608.III.187

257 CA Paris, 5 juin 1996, Gaz. Pal. 1996, 2, somm. P. 516; RJDA 1997, n° 142; plus récemment: TGI

Paris, 27 septembre 2002, PIBD 2002, n° 759, III, 137 : « attendu que la contrefaçon est exclusive de la bonne foi (...) »; CA Paris, 27 novembre 2002, n° 761, III, 189.

258 Il convient toutefois de préciser que la terminologie de « droit absolu » en matière de marques

mérite d’être tempérée quant à sa signification: Si le droit sur la marque est bien absolu, il l’est cependant dans les limites des produits ou services pour lesquels ce signe distinctif a été déposé et enregistré et ce, conformément au principe de spécialité; de même, ii ne l’est que dans le cadre des relations d’affaires. Le droit de marque ne permet donc pas une appropriation absolue du signe en tant que tel, mais relativement à des usages déterminés.

259 Cass. Civ. 12 juin 1956,; Cass. Corn., 26 juin 1973, 13. 1974, P. 558, note J. Foulon Piganiol; CA

font pas de renvoi à ces articles, mais définissent les faits de contrefaçon pénalement répréhensibles. Il apparaît que l’élément matériel de l’infraction ne coïncide pas avec celui du délit civil. En effet, selon les articles L.713-2, L.713-3, sont interdits : « la reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, l’usage d’une marque reproduite, la suppression ou la modification d’une marque régulièrement apposée » et « l’imitation d’une marque ou l’usage d’une marque imitée », pour des produits identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement, le risque de confusion étant nécessaire en cas de produits similaires ou d’imitation. Ces différents faits de contrefaçon seront alors les seuls faits sanctionnés s’agissant de la contrefaçon en tant que délit civil.

2° En matière de droit d’auteur

138. En matière de droit d’auteur, la jurisprudence est constante à ce principe d’indifférence de la bonne foi depuis une quinzaine d’années260. Elle se montre même de plus en plus affirmative, des arrêts relativement récents de la Cour de cassation consacrant, en effet, sans équivoque, expressis verbis l’indifférence de l’élément moral dans la qualification de l’acte de contrefaçon : « La contrefaçon est caractérisée, indépendamment de toute faute ou mauvaise foi, par la reproduction, la représentation ou l‘exploitation d‘une œuvre de l‘esprit en violation des droits de propriété intellectuelle qui y sont attachés »261 ; encore plus catégorique : « Dans ses

rapports avec le titulaire des droits méconnus, la bonne ou mauvaise foi du contrefacteur est indifférente »262.

Ainsi, l’édition, la diffusion, le débit, toute fixation, reproduction, communication ou mise à disposition du public, éléments matériels de l’infraction de

260 Cass. civ. 1”, 6 juin 1990, Bull. civ. I, n°144, p. 103, JCP E 1991, 11, obs. L. Parléani: “la

mauvaise foi des personnes qui ont participé à une contrefaçon n’est pas une condition de l’action civile exercée par l’auteur en vue d’obtenir réparation de la perte pécuniaire que lui a causé l’usurpation de son droit de propriété intellectuelle. »

261 Cass. civ.1, 29 mai 2001, Bull. civ. I, n° 154, P.100, Prop. intell., octobre 2001, n°l, p.71, obs. P.

Sirinelli, Com. com, élect., juin 2002, n° 8, p.24, obs. C; Caron; Cass. civ. l, 26 juin 2001, Com, com. élect.,juin 2002, n° 8, p. 24, obs. C ; Caron ; Cass. civ. l0, 3 décembre 2002, Bull. civ. I, n° 292 , p. 228 ; Propriétés intellectuelles, janvier 2003, n° 6, p. 54.

262 Cass. civ.1, 26 juin 2001, Com. com, élect., juin 2002, n° 8, p. 24, obs. C; Caron; Cass. civ. 1 , 3

décembre 2002, Bull. civ. I, n° 292, ,p.228; Propriétés intellectuelles, janvier 2003, n° 6, p.54.; Cass. civ. l, 3 avril 2001, Bull. civ.I, n°95, P. 61: « la bonne foi est inopérante en la matière. »

contrefaçon en matière de droit d’auteur tels que définis par les articles L.335-2263 et

suivants, seront sanctionnés en matière civile par l’article L.122-4, en ce qu’ils sont constitutifs de reproduction ou de représentation. Les faits de contrefaçon ont le même élément matériel en matière civile et pénale, mais l’élément intentionnel ne sera pas nécessaire en matière civile.264 En revanche, l’article L.335-2 sanctionne « l’exportation ou l’importation d’ouvrages contrefaits », comportements n’entrant pas dans les provisions de l’article L.122-4. Dès lors, il convient de penser que la contrefaçon par importation ou exportation n’est pas un délit civil détachable du délit pénal de contrefaçon et que l’élément intentionnel devra être pris en compte pour caractériser l’infraction donnant lieu à réparation. En l’absence d’élément intentionnel, la réparation de la contrefaçon par importation ou exportation n’aura pas pour fondement la contrefaçon, mais bien la responsabilité civile délictuelle pour faute.265

139. En matière de dessins et modèles français - Il convient de rappeler qu’en raison du principe de l’unité de l’art, les dessins et modèles bénéficient de la protection accordée par le droit d’auteur dès lors que ce sont des œuvres remplissant les conditions de protection du droit d’auteur266. Comme le rappelle Madame

Gaumont-Prat, « ceci étant, cela ne fait pas grande différence en pratique puisque l’atteinte au droit d’auteur est également constitutive de contrefaçon »267. En effet,

du fait de l’unité de l’art, la contrefaçon en matière de dessins et modèles sera sanctionnée, en l’absence de l’élément intentionnel, sur le fondement du droit d’auteur. Il s’ensuit que la jurisprudence ne permet pas d’apprécier l’existence de cet élément en matière de dessins et modèles, appliquant indifféremment les dispositions

263 Le délit civil de contrefaçon repose sur l’article L.122-4 CPI qui ne reprend pas explicitement ce

terme. À la lecture de cet article, énonçant que « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de son auteur ou de ses ayants cause est illicite », l’élément intentionnel n’est pas pris en compte.

264Voir Gautier, Pierre-Yves. op. cit. ; Voir Linant de Bellefonds, Xavier, and Célia Zolynski. op.

cit. ; V° Lucas, André, and Henri-Jacques Lucas. op. cit.

265 Voir Gautier, Pierre-Yves. op. cit. ; Lucas, André, and Henri-Jacques Lucas. op. cit. ; Linant de

Bellefonds, Xavier, and Célia Zolynski. op. cit.

266 Voir Bertrand, André. « Marques Et Brevets, Dessins Et Modèles Appellations D'origine, Brevets

Français, Européens, Communautaires Et Internationaux ». Propriété Intellectuelle. Paris: Delmas,

1995. Print. ; Lalanne-Gobet, Catherine, and Patrice de Candé. « Dessins Et Modèles De L'entreprise

concernant les dessins et modèles et le droit d’auteur268. S’agissant de la protection

spécifique des dessins et modèles, si l’article L.521-10 du CPI (la loi n° 2007-1544 du 29 octobre 2007) exige la présence de l’élément intentionnel en matière de délit pénal269, l’article L.513-4, énonçant que « sont interdits…la fabrication, l’offre, la mise sur le marché, l’importation, l’utilisation ou la détention à ces fins d’un produit incorporant le dessin ou modèle », ne semble pas requérir la présence d’un quelconque élément intentionnel en matière civile.270

3° En matière de brevets et en matière d’obtention végétale

271

140. Il est vrai que l'élément intentionnel de la contrefaçon n'est pas toujours exigé. Ainsi, il convient de voir son rôle en matière de brevet. Ce sont les alinéas 1er et 2 de l'article L. 615- 1 du Code de la propriété intellectuelle, qui précisent que « toute atteinte portée au droit du propriétaire du brevet tels qu'ils sont définis aux articles 1.613-3 à 1. 613-6, constitue une contrefaçon. La contrefaçon engage la responsabilité civile de son auteur ». On peut déduire de ce texte que la bonne foi ne fait pas disparaître la contrefaçon. Mais l'article L. 615- 1 alinéa 3 du même Code dispose:

« Toutefois, la mise dans le commerce, l'utilisation, la détention en vue de l'utilisation ou la mise dans le commerce d'un produit contrefait, lorsque ces faits sont commis par une autre personne que le fabricant du produit contrefait, n'engage la responsabilité de leur auteur que si ces faits ont été commis en connaissance de cause».

267 Gaumont-Prat, Hélène. « Droit De La Propriété Industrielle. » Objectif Droit Cours Licence-

Master. 2e éd. ed. Paris: Litec, 2009. Print,p. 117, n°341

268 Cass. Civ. 1, 6 juin 1990 : Bull. n°144 ; JCP E 1991, II, 151,

269 Art. L. 521-10. – « Toute atteinte portée sciemment aux droits garantis par le présent livre est

punie… »

270 Voir Gosselin, Philippe, and France Assemblée nationale Commission des lois constitutionnelles

de la législation et de l'administration générale de la République., « Rapport fait au nom de la

commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république sur le projet de loi (N° 175), de lutte contre la contrefaçon N°178 », Enregistré à la

Présidence de l’Assemblée nationale le 26 septembre 2007.Sénat : 226, 420 et T.A. 135 (2006-2007). [Impressions] Ed. Nationale, Assemblée. Paris: Assemblée nationale, 2008. [ réf. Du 1 mai 2011] Disponible sur :http://www.assemblee-nationale.fr/13/rapports/r0178.asp

Le législateur impose donc une distinction entre deux types de contrefacteurs. Les premiers, dits contrefacteurs directs, ne peuvent invoquer leur bonne foi car ils heurtent directement le droit du breveté. Il y a indifférence de l'élément moral. Ces contrefacteurs sont ceux qui fabriquent le produit breveté et mettent en œuvre le procédé puis commercialisent les produits ainsi obtenus. Ils ne peuvent invoquer leur bonne foi pour échapper à la sanction. La jurisprudence assimile au fabricant l'importateur, considérant que « la responsabilité du contrefacteur direct lequel s’entend non seulement du fabricant breveté mais également de l’importateur, est engagé par la seule matérialité de la commission de l’infraction »272 En revanche, les contrefacteurs indirects ne peuvent être poursuivis que s'ils ont agit en connaissance de cause. Cette restriction légale, en tant que tempérament exprès à ce principe, fera l’objet d’une étude détaillée postérieurement (B).

B- Une indifférence nuancée : L’intervention de l’élément moral dans

la qualification civile de la contrefaçon

141. Le principe d’indifférence de la bonne foi n’est pas absolu. Ces nuances peuvent résulter tant de la loi que de la jurisprudence, qui va nécessairement faire intervenir l’élément moral dans la qualification civile de la contrefaçon en matière de brevets. Pour le contrefacteur indirect, il y a prise en considération de l'élément moral. Les contrefacteurs indirects sont ceux qui ont commercialisé ou utilisé le produit contrefaisant ou l'ont obtenu selon un procédé breveté, sans avoir eux-mêmes fabriqué ce produit ou mis en vente le procédé. Pour que ceux-ci soient sanctionnés, il convient d'établir la preuve qu'ils ont agi en connaissance de cause. Il faut donc prouver qu'ils connaissaient le caractère contrefaisant des produits qu'ils ont commercialisés ou utilisés.

271 Il en va de même en matière de certificat d’obtention végétale, l’articles L.623-25 et L.623-32

renvoyant tous deux à l’article L.623-4

Comme cela a été précédemment évoqué, la loi réserve en matière de brevets d’invention un sort particulier à certains contrefacteurs de second rang que la doctrine désigne habituellement sous le nom de contrefacteurs indirects. Selon le professeur Paul Mathély, « ce sont ceux qui n’ont pas réalisé eux-mêmes la contrefaçon proprement dite, mais qui commettent des actes seconds : il s’agit là de ceux qui utilisent ou commercialisent un produit contrefait qu’ils n’ont pas eux-mêmes obtenu (...). Ces contrefacteurs sont excusables, car ils peuvent ignorer la contrefaçon. Parfois ils ne peuvent même pas avoir le moyen de la connaître. (...) Il n’est donc pas juste de condamner le contrefacteur indirect en raison de la seule matérialité de l’atteinte aux droits du breveté, il faut encore une condition supplémentaire : « un élément intentionnel». Ainsi, l’article L. 615-l alinéa 3 du Code de la propriété intellectuelle dispose que « l’offre, la mise dans le commerce273, l’utilisation, la détention en vue de l’utilisation ou la mise dans le commerce d’un produit contrefait274, lorsque ces faits sont commis par une autre personne que le fabricant du produit contrefait, n’engagent la responsabilité de leur auteur que si les faits ont été commis en connaissance de cause. »

Le champ d’application de cette disposition est ainsi rigoureusement et explicitement défini. La mauvaise foi s’entend donc de la connaissance de cause. La jurisprudence a défini la connaissance de cause comme la connaissance, non seulement de l’existence du brevet mais surtout du caractère contrefaisant de l’objet suspecté275. Elle doit être établie par tous moyens par le breveté poursuivant276. Elle peut résulter notamment de la mise en garde par le titulaire277, elle résulte toujours de

273 La mise dans le commerce comprend la vente mais aussi toute forme de commercialisation, elle

s’entend de toute opération matérielle tendant à mettre le produit en circulation. Cass. com., 26 avril 1994, PTBD 1994, n°576,III,519.

274 La terminologie n’est pas rigoureuse il faut entendre par «produit contrefait» non seulement le

produit contrefaisant mais également celui obtenu directement par un procédé contrefaisant.

275 TGI Paris, l6 mai1973, PIBD 1973, n° 113, III, 331 ; TGI Paris, 6 avril 1994, Dossiers Brevets

1994,III,4 PIBD 1994, n° 570, III, 376: « Le contrefacteur indirect doit, pour que sa responsabilité soit engagée, avoir eu connaissance du caractère contrefaisant de l’objet qu’il commercialise, c’est-à- dire avoir connaissance que son acte constitue la contrefaçon d’un brevet. »

276 TGI Paris, 6 avril1994, précité

277 TGI Paris, 20janvier 1977, PIBD 1977, n° 200, III, 358 Dossier Brevets 1977, II, 2 Cass. com., 1

mars 1994, PIBD 1994, n° 567, III, 287. L’utilisation de lettres de mise en garde doit être mesurée, une lettre imprudente de mise en garde pouvant être constitutive d’une faute dommageable au sens de l’article 1382 du Code civil : CA paris, 23 mai1997, PIBD 1997, n°639,III,498.

l’assignation en contrefaçon278. La preuve positive n’est pas toujours exigée et peut

être en effet présumée ou déduite des circonstances et, principalement, de la qualité de professionnel spécialisé de la branche considérée. La présomption d'innocence est de rigueur279, donc le défendeur pourra, dans tous les cas, apporter la preuve contraire et établir ainsi sa bonne foi. De manière plus particulière, ce même élément moral est aussi exigé précisément par le Code de la propriété intellectuelle pour la fourniture de moyens280. L'article L. 613-4 CPI, pose à la fois une condition quant au tiers fournisseur de moyens et une condition quant au destinataire de cette fourniture. Ces deux conditions ont en commun de pouvoir être aisément rapportées par le titulaire du brevet, du fait du libellé de l'article lui-même et de la jurisprudence.

142. L'acte de contrefaçon par fourniture de moyens est autrement qualifié d'acte de contrefaçon indirecte ou secondaire, par opposition à l'acte de contrefaçon dit primaire réalisé en vertu de l'article L. 613-3 du Code de la Propriété Intellectuelle. En revanche, l'acte de contrefaçon primaire n'exige pas de la part de son auteur que la violation du droit ait été effectuée en connaissance de cause. Qu'en est-il en matière de fourniture de moyens? L'article L. 613-4, 1 requiert que le tiers fournisseur sache ou ne puisse ignorer que les moyens sont aptes et destinés à cette mise en œuvre. Pour le Professeur Le Stanc281, cette disposition rend la faute de fourniture de moyens

indifférente à tout élément moral, au sens de la «connaissance de cause»282. En effet,

selon l’auteur, « ce que le texte exige est que le tiers sache ou que les circonstances rendent évident que les moyens fournis sont aptes et destinés à cette mise en œuvre ». La mise en œuvre de l'invention, peu importante qu’elle soit, que le tiers fournisseur ait conscience ou non de participer à la commission d'un acte de contrefaçon. [ ... ].

278 CA Paris, 20novembre 1996, PIBD 1997, n°628,III, 133.

279 Cass. com., 12 mars 2002, PIBD 2002, n°743,III,239. Il s’agit d’une présomption simple: CA

Paris, 22 avril 1983, PIBD 1983, n°334, III, 247; CA Paris, 20 novembre 1996, précité.

280 L’article L. 613-4.CPI : « 1 ° Est également interdite, à défaut de consentement du propriétaire du

brevet, la livraison ou l'offre de livraison, sur le territoire français, à une personne autre que celles habilitées à exploiter l'invention brevetée, des moyens de mise en œuvre sur ce territoire, de cette invention se rapportant à un élément essentiel de celle-ci, lorsque le tiers sait ou lorsque les circonstances rendent évident que ces moyens sont aptes et destinés à cette mise en œuvre.

2° Les dispositions du 1 ° ne sont pas applicables lorsque les moyens de mise en œuvre sont des produits qui se trouvent couramment dans le commerce, sauf si le tiers incite la personne à qui il livre à commettre des actes interdits par l'article 1. 613-3. »

281 Juris-Classeur Brevet, Fascicule 4610« Acte de contrefaçon. Élément moral» 282 exigée par l'article L. 615-1 du Code de la Propriété Intellectuelle

Il suffirait à présent que le fournisseur, sans nécessairement connaître l'existence du brevet et pressentir qu'il lui porte atteinte, ait simplement conscience, de ce à quoi pourra servir la fourniture effectuée ou offerte en tant qu'objectivement cela permet la reproduction de l'invention brevetée. » Ainsi, selon le Professeur Le Stanc, l'acte de contrefaçon par fourniture de moyens se rapprocherait de l'acte de contrefaçon primaire, qui n'exige aucune connaissance de cause de la part de son auteur. Selon cette conception, la condition tenant à la mauvaise foi du tiers serait encore plus assouplie. Cette analyse effectuée par le Professeur Cristian Le Stanc est satisfaisante puisqu'elle s'attache à la lettre même de l'article L. 613-4 du Code de la Propriété Intellectuelle. Cette conception semble être cependant contraire à l'interprétation donnée par une autre partie de la doctrine, et de fait par la jurisprudence.

143. A cet égard, il convient de rappeler la position des Professeurs Foyer et Vivant. Selon ces derniers283, il doit être prouvé que le tiers savait qu'il participait à des activités de contrefaçon ou du moins qu'il ne pouvait raisonnablement l'ignorer.

284Avant de commencer l'analyse quant à la condition de mauvaise foi du tiers

fournisseur, deux textes peuvent trouver application : l'article L. 615-1 alinéa 3 et l'article L. 613-4 du Code de la Propriété Intellectuelle. Tout d’abord, l'article L. 615-1 exige la connaissance de cause de celui qui se livre à des actes de contrefaçon et plus précisément des actes de contrefaçon indirecte, puis l'article L. 613-4 énonce des modalités pour établir la preuve de la connaissance de cause. 285Il apparaît dans la jurisprudence que la connaissance que les moyens livrés sont aptes et destinés à la mise en œuvre de l'invention est établie par la connaissance du caractère contrefaisant de la mise en œuvre. 286

Ainsi, cette connaissance est confirmée dans la plupart des cas par l'envoi d'un écrit par le titulaire du brevet avertissant le tiers, qui fournit les moyens essentiels de

283Foyer, Jean, and Michel Vivant. « Le Droit Des Brevets ». op. cit. : « La contrefaçon suppose ici

Documents relatifs