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Adsorption du radon pour le gaz de la chambre de dérive de SuperNEMO

5. Chapitre 5 : résultats des mesures d’adsorption

5.4 Adsorption du radon pour le gaz de la chambre de dérive de SuperNEMO

Le gaz à purifier dans l’expérience SuperNEMO est principalement constitué d’hélium. Afin de pouvoir dimensionner une usine anti-radon, il faut connaitre le coefficient d’adsorption du radon sous flux d’hélium. Pour cela, les meilleurs adsorbants de chaque catégorie ont été mesurés à - 50 °C. Les flux utilisés dans l’expérience SuperNEMO étant importants (1 m3/h), il convient donc de réutiliser ce gaz. Par ailleurs, ce gaz se révèlera contenir de l’alcool, produit qui est susceptible d’influencer le coefficient d’adsorption du radon. Cet aspect des choses sera également étudié.

Suite aux résultats de ces études, une usine anti-radon préliminaire pour le développement du tracker a été construite au CPPM.

5.4.1 Étude et limite de l’adsorption du radon dans l’hélium

1 4 5 6 7 8 9 10 11 13 15 16 y = 2280,5x - 59,724 R² = 0,8166 -100 0 100 200 300 400 500 600 0 0,05 0,1 0,15 0,2 0,25 K à -50 °C ( kg /m3 ) Volume de pore 0,5<x<0,7 nm (cm3/g)

139 Les matériaux les plus performants sous flux d’azote ont également été mesuré sous flux d’hélium à - 50 °C. Leurs coefficients d’adsorption K sont listés dans le Tableau 26 suivant.

Échantillons K à - 50 °C (kg/m3) K à - 80 °C (kg/m3) K48 spécial 1702 ± 47 K48 1460 ± 40 Shirasagi G2x4 1400 ± 30 4560 ± 130 carboact 5200 ± 200 Carbosieve SIII 6800 ± 300 Carboxen 1012 3780 ± 130 5400 ± 210 Aérogel D 3000 ± 90

Tableau 26 : Coefficient d’adsorption K à - 50 °C et - 80 °C sous flux d’hélium

Les coefficients d’adsorption du radon au sein de l’hélium sont de 6 à 8 fois supérieurs à ceux de l’adsorption dans un courant d’azote. Cependant, comme l’adsorption est grande, le temps de mesure est de l’ordre d’une dizaine de jours avec seulement 0,3 g d’échantillon. L’activité en radon présent dans l’échantillon a alors le temps de décroître. Cependant, comme nous travaillons avec de très faibles quantités de radon, son adsorption est directement proportionnel à la quantité de radon (ou la pression partiel en radon) présente dans le gaz. Par conséquence, le rapport K devrait rester constant.

Malgré cela, les analyses prenant plusieurs jours, il arrive que la trappe se bouche à cause de l’accumulation de l’humidité. Cela risque de faire varier fortement le flux et fausser la mesure. Afin d’obtenir une valeur plus précise, il faut réduire le temps de mesure en réduisant, par exemple, la masse. Mais, en faisant cela, l’imprécision de la mesure sur la masse augmente énormément.

Les résultats obtenus dans l’hélium sont néanmoins très bons, mais, il reste que le gaz de SuperNEMO n’est pas uniquement constitué d’hélium.

5.4.2 Étude de l’effet de la présence d’alcool dans le gaz

Initialement, l’hélium utilisé dans SuperNEMO devait être purifié du radon avant d’être mélangé avec de l’éthanol et de l’argon pour constituer le gaz du tracker (95 % d’He). Cependant, le débit de gaz utilisé est très important, de l’ordre de 1 m3/h. Il convient donc, par souci d’économie et d’écologie, de recycler ce gaz pour le réutiliser. Il doit être une nouvelle fois purifié afin d’éviter toute pollution due au radon. Par conséquent, il faut connaitre le coefficient d’adsorption dans ce type de mélange de gaz.

Pour recycler le gaz du tracker, l’alcool et l’hélium sont séparés. Pour effectuer cela, le gaz est refroidi à - 50 °C, ce qui a pour effet de condenser l’alcool. Ce gaz est ainsi dépourvu de la majeure partie de l’alcool. Cependant, il reste encore des traces d’alcool dans le gaz (correspondant à la pression de vapeur saturante à - 50 °C).

Tout comme l’humidité qui fait baisser le coefficient d’adsorption, l’éthanol nuit également à l’adsorption du radon à cause du phénomène de compétition. Pour mesurer le coefficient d’adsorption

140 en présence d’éthanol, le banc de mesure est légèrement modifié. Avant d’être radonisé l’hélium est chargé en éthanol. Pour cela, il passe dans un bulleur rempli d’éthanol placé à - 50 °C.

Afin d’étudier l’effet de traces d’éthanol sur l’adsorption du radon, le coefficient du charbon Shirasagi G2x4 est ainsi mesuré à - 30 °C, la première fois sous un flux d’hélium pur, et la seconde sous un flux d’hélium contenant des traces d’alcool (Tableau 27).

Échantillons K à - 30 °C Sans alcool (kg/m3) K à - 30 °C Avec alcool (kg/m3) Shirasagi G2x4 700 ± 29 180 ± 10

Tableau 27 : Coefficient d’adsorption K du charbon Shirasagi G2x4 sous un flux d’hélium contenant des traces d’éthanol

Le coefficient d’adsorption diminue d’un facteur quatre environ en présence d’alcool. Afin de purifier efficacement le gaz du tracker, il est donc nécessaire de se débarrasser le plus possible de l’alcool car les vapeurs restantes après condensation suffisent à réduire l’efficacité du charbon actif. Pour y parvenir plusieurs options sont envisageables. La première est de surdimensionner l’usine anti-radon et d’insérer un module préliminaire qui a pour but d’adsorber l’alcool restant dans le gaz. La seconde est d’utiliser des membranes filtrantes (développées par l’Institut Européen des Membranes), qui sépareront l’alcool et l’hélium.

5.4.3 Construction d’une usine anti-radon préliminaire pour SuperNEMO

L’émanation tracker du module 0 de SuperNEMO est d’abord testé avec, comme gaz, de l’azote. Malheureusement, lors des premiers tests, le taux de radon dans l’azote était trop important (0,4 à 1 mBq/m3). Il a donc fallu construire une usine à radon préliminaire afin purifier le gaz du tracker et vérifier que la concentration de radon soit bien inférieure à 150 Bq/m3.

La principale difficulté, lors de la construction d’une usine anti radon, est de réussir à refroidir l’adsorbant et le gaz. En effet, il existe peu de dispositif bon marché capable de descendre bas en température (- 80 °C) avec un apport constant de chaleur. Pour cette raison, l’usine anti-radon qui a été construite se compose de deux modules. Le premier est un congélateur à - 50 °C avec 1,5 kg de charbon actifs pour un pré-refroidissement et une pré-purification du gaz. Le second est un congélateur à - 80 °C composé de seulement 0,5 kg de charbons actif afin de limiter la production de radon par émanation du charbon actif. Ce second module est le lieu véritable de purification du radon (Figure 92).

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Figure 92 : Usine anti-radon composée de deux modules

Le charbon actif choisi n’est pas le plus pur possible, mais devrait néanmoins diviser le radon par un facteur dix compte tenu des coefficients d’adsorption mesurés dans l’azote. Pour améliorer l’usine anti-radon, cette dernière est construite de façon à facilement le changement des cartouches d’adsorbant.

Figure 93 : Photographie de l’usine anti-radon

Les premières mesures effectuées à l’UCL ne révèlent aucune émanation en radon de l’usine. Le premier résultat concernant la purification de l’azote est retranscrit dans le Tableau 28 suivant :

Gaz Source Concentration en radon

(µBq/m3)

He bouteille 70 - 100

N2 bouteille 400 - 1000

N2 évaporation 90 - 140

N2 Bouteille + usine

anti-radon 20

142 Le taux de radon après purification est de 20 µBq/m3, bien en-dessous des 150 µBq/m3 requis pour le fonctionnement de SuperNEMO. Il est difficile de parler ici de facteur de purification car, pour obtenir une mesure, il faut plusieurs mètres cubes de gaz et le taux de radon d’une bouteille à l’autre est très variable. Ce résultat est très encourageant pour la purification, par la suite, de l’hélium car le coefficient d’adsorption du radon est bien plus grand dans l’hélium que dans l’azote. La purification n’en sera donc que meilleure.

Figure 94 : Photographie de l’usine anti-radon installée à l’UCL reliée au tracker de SuperNEMO pour des tests d’émanation

En conclusion, même avec un charbon actif pas très pur, il est possible de purifier un gaz à très basse activité. L’émanation d’un adsorbant est limitée par l’auto-adsorption de celui-ci. Ainsi, la pureté d’un adsorbant n’aura pas un grand impact à partir du moment où il possède un grand coefficient d’adsorption.