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Chapitre II : La localisation

C. Localisation et TA, d’autres success stories

4. Adobe : un projet ambitieux

En 2009, Adobe commence à travailler à l’intégration de la traduction automatique dans le processus de localisation. Une première phase de test sur un volume de 200 000 mots ayant donné des résultats positifs, Adobe commence à employer la TA pour la localisation de la documentation accompagnant ses logiciels, les plus connus étant Acrobat, Flash et Photoshop. Deux années plus tard, en 2011, entre dix et quinze produits étaient entièrement localisés à l’aide de la TA vers cinq langues en moyenne, alors que les programmes localisés par TH sont traduits par TH dans jusqu’à 30 langues (Flournoy et Rueppel 2011). Le moteur de TA employé (de type statistique) est personnalisé avec les mémoires de traduction préexistantes et selon la terminologie spécifique à l’entreprise, afin d’assurer le résultat le plus précis possible et minimiser l’effort de PE. A partir de 2011, Adobe a commencé à envisager d’autres applications pour la TA, notamment la gist translation des contenus pour le support client, des courriels et des contenus générés par les utilisateurs comme les forums, ainsi qu’un projet d’intégration de la TA directement aux logiciels vendus.

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D. Conclusion

Dans ce troisième chapitre nous avons décrit le flux de travail de localisation tel qu’il est employé à Autodesk. Sa particularité réside dans le fait que cette entreprise a été parmi les premières à employer la traduction automatique pour localiser ses produits.

Autodesk et d’autres entreprises ont décidé d’intégrer la traduction automatique dans leur flux de travail de localisation, ce qui a entraîné l’inclusion dans ce processus d’une étape de post-édition réalisée par des traducteurs humains.

C’est ainsi que nous nous sommes intéressée à l’opinion de ces traducteurs, qui occasionnellement enfilent la casquette de post-éditeur, concernant cette nouvelle modalité de travail, dans le but de découvrir comment ils vivent le quotidien de leu profession.

Dans le prochain chapitre, nous verrons ce qui nous a poussée à nous interroger à ce sujet et ce que nous espérons découvrir par notre étude.

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TROISIEME PARTIE

Chapitre IV : Motivations, objectifs et hypothèses de l’étude

Dans le chapitre III, nous avons décrit le flux de travail de localisation mis en place à Autodesk, depuis la création des contenus originaux (principalement les interfaces logicielles et leur documentation), jusqu’à leur localisation et publication, en passant par l’intégration de la traduction automatique ; nous avons aussi parcouru d’autres success stories d’entreprises qui ont su tirer profit de la TA.

Ainsi, en prenant l’exemple d’Autodesk, nous avons pu décrire le contexte dans lequel évolue le post-éditeur. A travers cette étude, nous voulons connaître son point de vue.

Nous nous sommes donc intéressée au rapport post-éditeur – machine, à l’opinion du traducteur par rapport à cette facette de son métier qui le voit « réparer » la traduction automatique, ainsi qu’aux stratégies qu’il met en place pour trouver un compromis avec elle.

En d’autres termes, nous avons suivi une approche « ergonomique », qui nous a guidé dans la conception d’un questionnaire, un entretien et une observation.

Dans ce chapitre, nous expliquerons tout d’abord ce qui nous a poussée à faire des recherches dans le domaine de l’ergonomie (section A.) ; ensuite, nous verrons quels sont nos objectifs généraux (section B.) et finalement, les hypothèses que nous espérons vérifier (section C.). Nous verrons dans le chapitre V la méthodologie que nous avons adoptée.

A. Les motivations

Loin de l’image du traducteur de livres entouré d’énormes dictionnaires, encore aujourd’hui enracinée dans l’imaginaire collectif, le traducteur moderne voit son métier évoluer et se révolutionner constamment. Les procédés qu’il est censé maîtriser, les outils à sa disposition et les attentes des commanditaires ont changé. La localisation, l’application la plus récente de la traduction, a créé encore d’autres exigences. Celles-ci diffèrent encore si l’on ajoute à ce scénario l’emploi généralisé de la traduction automatique. Une alliée pour certains, une ennemie pour d’autres, toujours est-il que la TA a entraîné la naissance d’une nouvelle activité, un nouveau métier : celui du post-éditeur.

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Et pourtant, comme le disent Brunette et O’Brien (2011), la post-édition n’a jamais été étudiée d’un point de vue ergonomique. « À ce jour, seule a importé l’efficacité mesurable de l’opération. » affirmaient-elles très justement. Elles préconisaient une étude qui vise à définir des pratiques exemplaires qui serviraient ensuite de base à l’enseignement.

C’est précisément l’appel qu’a lancé Lavault-Olléon en 2011, quand elle a organisé à l’Université de Grenoble une conférence sur les thèmes de la traduction et l’ergonomie. En soulignant la nécessité « d’analyser l’évolution du secteur du point de vue ‘humain’ », elle proposait de faire appel au concept d’ergonomie qui « offre un cadre de référence qui permet d’analyser les aspects matériels, physiques, cognitifs et organisationnels du métier de traducteur et leur évolution. » (Lavault-Olléon 2011).

D’après la International Ergonomics Association,

“Ergonomics (or human factors) is the scientific discipline concerned with the understanding of the interactions among humans and other elements of a system, and the profession that applies theoretical principles, data and methods to design in order to optimize human well being and overall system performance.”

C’est sur ce concept et ces trois sous-catégories, l’ergonomie cognitive, physique et organisationnelle, que nous nous sommes fondée pour conduire notre expérience.

Des indications supplémentaires quant à la mise en place de l’étude recommandée par Lavault-Olléon nous viennent encore une fois de O’Brien (2013). D’après elle, des études fondées sur l’ethnographie et l’ergonomie cognitive devraient se concentrer à la fois sur les outils du traducteur et le procédé de traduction par le moyen d’une observation de ces professionnels au travail, afin de détecter ce sur quoi ils butent et ce qui est pour eux une source de frustration.

Ce challenge a été relevé par Guerberof (2013) qui a entrepris une étude qui visait les traducteurs professionnels et dont les résultats sont recueillis dans l’article « What do professional translators think about post-editing ? ». Son questionnaire, en particulier, nous a inspiré dans cette étude.

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Sur la base de la littérature et des invitations à la recherche des auteurs mentionnées, nous avons songé à nous adresser à des traducteurs professionnels dans le but de faire ne serait-ce qu’un peu de lumière sur certains des aspects qu’elles évoquent. Nos hypothèses, ainsi que nos objectifs de recherche, sont décrits ci-dessous.