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Chapitre II. Modélisation

II.2 Équations de l’écoulement

II.4.2 Activation des suies

𝜕𝑡(𝜌̅𝑁̃) +𝑠 𝜕 𝜕𝑥𝑖(𝜌̅𝑣̃ 𝑁𝑖̃) =𝑠 𝜕 𝜕𝑥𝑖(𝜌̅𝐷𝑑𝑖𝑓𝑓 𝜕𝑁̃𝑠 𝜕𝑥𝑖 − 𝜌̅𝑣𝑗 𝑁𝑠 ̃ ) (II.4.5)

Avec 𝐷𝑑𝑖𝑓𝑓 le coefficient de diffusion massique du mélange, donné par :

𝐷𝑑𝑖𝑓𝑓 = 𝜇

Sc (II.4.6)

Avec Sc le nombre de Schmidt, fixé à 1. L’équation (II.4.5) est ajoutée au système d’équation global résolu dans CEDRE. Le scalaire 𝑁𝑠 est dit passif car sa valeur n’affecte pas les propriétés du fluide (par exemple 𝜌, 𝑣 ou 𝜇) et son équation de transport (II.4.5) ne contient pas de terme source. Autrement dit, nous ne considérons aucune rétroaction de la densité des particules sur les propriétés de l’écoulement.

En résumé, nous pouvons à présent définir un champ de densité de particule de suie 𝑁𝑠(𝑥, 𝑦, 𝑧), auquel est associé un rayon 𝑟𝑠(𝑥, 𝑦, 𝑧), correspondant à la taille des particules au point 𝑀(𝑥, 𝑦, 𝑧).

II.4.2 Activation des suies

Nous modélisons ensuite dans CEDRE les processus d’activation se déroulant à la surface des particules de suie, leur conférant des propriétés hydrophiles. Rappelons que deux voies d’activation sont prises en compte : l’adsorption de molécules soufrées et la collecte de particules volatiles (H2SO4, H2O). La couverture des particules de suies est évaluée par la fraction de surface activée 𝜃𝑎𝑐𝑡, c'est-à-dire le rapport entre la surface de suie activée 𝐴𝑎𝑐𝑡 et la surface totale de suie disponible 𝐴𝑠 :

𝜃𝑎𝑐𝑡 = 𝐴𝑎𝑐𝑡

𝐴𝑠𝑢𝑖𝑒 = 𝜃𝑎𝑑𝑠+ 𝜃𝑐𝑜𝑙 (II.4.7)

Avec

- 𝜃𝑎𝑑𝑠 la fraction de surface activée par le processus d’adsorption ; - 𝜃𝑐𝑜𝑙 la fraction de surface activée par le processus de collecte.

83 Dans l’équation (II.4.7), 𝜃𝑎𝑐𝑡 est la somme des deux contributions à l’activation des suies. 𝜃𝑎𝑐𝑡 quantifie, en chaque position de l’espace ayant une densité de particules de suie non nulle, la fraction surfacique totale de suie ayant acquis des propriétés hydrophiles. Ces surfaces deviennent alors des sites de condensation potentiels. Nous décrivons dans la suite la modélisation de chacun de ces deux processus.

II.4.2.1 Adsorption des molécules SO3 et H2SO4

L’adsorption des molécules de gaz sur les suies est décrite par un modèle de type Langmuir [Masel, 1996], en l’absence de désorption. La Figure 28 donne une représentation schématique de ce processus. Les adsorbats (SO3 et H2SO4), présents autour de la particule de suie, peuvent être adsorbés en se fixant sur des sites d’adsorption disponibles à la surface de l’adsorbant (la particule de suie). L’adsorption peut se produire selon différents processus, comme les interactions de Van der Waals ou les interactions dipolaires. À la fin du processus d’adsorption, se forme une monocouche moléculaire recouvrant partiellement la particule de suie.

Figure 28 : Schéma du processus d’adsorption des molécules de SO3 et de H2SO4 sur les sites d’adsorption à la surface des particules de suie

La vitesse d’adsorption dépendant des concentrations des adsorbats, le modèle utilisé suit naturellement une approche cinétique. Nous modélisons pour une espèce 𝐸𝑖, initialement dans un état « libre », le passage vers un état « adsorbée », en introduisant une espèce supplémentaire 𝐸𝑖,𝑎𝑑𝑠 :

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La modélisation du processus d’adsorption ajoute donc une équation au système pour chacune des espèces adsorbées. L’introduction de ces espèces supplémentaires est nécessaire car cela garantit la conservation de la masse globale des espèces du mélange. Le taux d’adsorption 𝑠𝑎𝑑𝑠𝑖 de l’absorbat 𝐸𝑖, contribuant au terme source 𝑠𝑖 de l’équation de conservation de la masse (II.2.21), est donné par Wong et al. [2008] :

𝑠𝑎𝑑𝑠𝑖 = −𝜋𝐷𝑠

2𝛼𝑎𝑑𝑠𝜌𝑦𝑖𝑁𝑠𝑣𝑡ℎ,𝑖

4𝑀𝑖 (1 − 𝜃𝑎𝑐𝑡) (II.4.9)

Avec

- 𝐷𝑠 le diamètre des suies sèches ;

- 𝛼𝑎𝑑𝑠 la probabilité de fixation des molécules sur la suie ;

- 𝑣𝑡ℎ,𝑖 la vitesse quadratique moyenne de l’absorbat 𝐸𝑖 (SO3 et H2SO4) ;

𝛼𝑎𝑑𝑠 est choisie égal à 1 lorsque 𝑇 ≤ 420 K et vaut 0 lorsque 𝑇 > 420 K. Cela signifie que les particules de suies ne peuvent être activées par adsorption dans la partie chaude du jet.

𝑣𝑡ℎ,𝑖 est donnée par exemple par Pruppacher et Klett [1997] :

𝑣𝑡ℎ,𝑖 = √ 8𝑘𝐵𝑇

𝜋 𝑚𝑚𝑜𝑙,𝑖 (II.4.10)

Avec 𝑘𝐵 la constante de Boltzmann et 𝑚𝑚𝑜𝑙,𝑖 la masse d’une molécule de l’espèce 𝐸𝑖.

Dans l’équation (II.4.9), 𝜃𝑎𝑐𝑡 est évaluée en fonction de 𝜃𝑎𝑑𝑠 et 𝜃𝑐𝑜𝑙 selon l’expression (II.4.7). 𝜃𝑎𝑑𝑠 est calculée en fonction des fractions massiques des espèces adsorbées 𝑦𝑖,𝑎𝑑𝑠 comme suit : 𝜃𝑎𝑑𝑠 = ∑ Na𝜌𝑦𝑖,𝑎𝑑𝑠 𝜋𝐷𝑠2𝑁𝑠𝜎0𝑀𝑖 𝑖,𝑎𝑑𝑠 (II.4.11)

Où 𝜎0 représente la densité surfacique moyenne estimée de sites disponibles à la surface des particules de suie. Celle-ci vaut environ 𝜎0 ≈ 5 ⋅ 1018 m−2. Cette densité est calculée à partir du diamètre moléculaire d’une molécule d’acide sulfurique (𝐷H2SO4 = 0,487 nm) qui nous donne la taille d’un site d’adsorption :

85 𝜎04

𝜋𝐷H22SO4 (II.4.12)

Quant à l’expression de 𝜃𝑐𝑜𝑙, elle dépend du nombre et de la taille des particules volatiles collectées sur la suie. Elle sera donnée dans le paragraphe suivant, dédié à la modélisation du processus de collecte de particules.

Le terme source de l’équation de conservation de masse de l’espèce adsorbé 𝐸𝑖,𝑎𝑑𝑠 s’écrit alors :

𝑠𝑎𝑑𝑠𝑖,𝑎𝑑𝑠= −𝑠𝑎𝑑𝑠𝑖 (II.4.13)

L’équation (II.4.9) montre que le taux d’adsorption augmente avec la fréquence d’impact entre particules de suie et adsorbats. En effet, le taux est proportionnel aux concentrations des éléments mis en jeu et à la vitesse quadratique des absorbats. Il est également proportionnel à la surface médiane de la suie 𝜋𝐷𝑠2/4. Plus la particule est grosse, plus fortes seront les chances de collision avec les adsorbats. Le facteur (1 − 𝜃𝑎𝑐𝑡) traduit les effets de ralentissement de l’adsorption, liés à la saturation des sites à la surface de la suie. Il limite également la couverture à une mono couche de molécules, correspondant à 𝜃𝑎𝑐𝑡 = 1. Par ailleurs, rappelons que la couverture surfacique des suies ne se produit pas uniquement par le processus d’adsorption mais également par celui de la collecte des particules volatiles. Autrement dit, la collecte des particules volatiles contribue également à l’effet de saturation, en intervenant dans le facteur (1 − 𝜃𝑎𝑐𝑡)

II.4.2.2 Collecte des particules (H2SO4, H2O)

Comme indiqué dans le paragraphe I.3.1, la collecte des particules volatiles se produit en présence de gouttelettes d’acide sulfurique hydratées (H2SO4, H2O) qui ont été formées par nucléation binaire homogène dans les premiers instants du panache. Ces agrégats contribuent à étendre la surface activée des suies par un processus de coagulation. Cette dernière correspond à l’adhérence des particules volatiles soufrées à la surface des suies suite à leur collision, causée par l’agitation thermique.

Dans le cadre de cette thèse, nous ne modélisons pas la simulation des processus de nucléation binaire homogène et de coagulation menant à la formation de particules volatiles dans le panache. Afin d’obtenir les concentrations précises des particules volatiles dans le

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panache, il aurait été nécessaire dans un premier temps de prendre en compte en amont la chimie impliquant les éléments ioniques du panache. Ces espèces ioniques jouent en effet un rôle central dans la coalescence des molécules du panache, entraînant la formation d’aérosols soufrées chargés [Yu et Turco, 1997]. La présence de micro-particules chargées favorise alors les processus de condensation et de coagulation dans le panache en raison des effets électrostatiques. La concentration des particules (H2SO4, H2O) dépend par conséquent grandement de ces processus.

Afin d’étudier les processus d’activation des particules suie par la collecte de particules volatiles, nous avons choisi d’estimer la concentration et la taille moyenne des particules (H2SO4, H2O) dans le panache de manière simple. La littérature fournit des mesures et des simulations des propriétés de particules volatiles dans les panaches d’avion en fonction de la teneur en soufre du carburant et de l’âge du panache. Par exemple, la Figure 29 présente des résultats de simulation de Yu et al. [1999] pour une teneur initiale en carburant de 20 ppm à différents temps de vie du panache. Pour un panache âgé de 0,5 s, les particules volatiles sont principalement regroupées en deux classes en fonction de leur diamètre, à savoir une classe à très petits diamètre (inférieur à 2 nm) et une classe centrée à 3 nm. Les gouttelettes d’acide sulfurique hydratées (H2SO4, H2O) sont principalement représentées dans la première catégorie. La représentation des concentrations de particules (H2SO4, H2O) que nous proposons consiste alors à simuler la présence des particules dans le panache en les injectant directement dans le domaine de calcul à partir de la sortie primaire du moteur. Leur taille correspond à celle donnée par la littérature pour une teneur en soufre donnée et un panache âgé de 0,5 s. L’indice d’émission des particules (H2SO4, H2O) à la sortie du moteur est choisi de manière à ce qu’il soit équivalent, après dilution, à celle donnée par la littérature pour un panache âgé de 0,5 s à la teneur en soufre correspondante. On parle alors d’indice d’émission apparent.

87 Figure 29 : Distribution en taille des particules volatiles à 4 âges différents du panache, pour

une teneur en soufre du carburant de 20 ppm Source : [Yu et al., 1999]

La modélisation des phénomènes d’activation des suies par collecte nécessite l’introduction de deux quantités conservées supplémentaires. L’une représentant la densité de particules (H2SO4, H2O) 𝑁𝑣𝑜𝑙, et l’autre la densité de particules (H2SO4, H2O) collectées 𝑁𝑣𝑜𝑙𝑐𝑜𝑙 à la surface des particules de suies. Ces deux quantités conservées sont régies par des équations de transport s'écrivant : 𝜕 𝜕𝑡(𝜌𝑁𝑣𝑜𝑙) + 𝜕 𝜕𝑥𝑖(𝜌𝑣𝑖𝑁𝑣𝑜𝑙) = 𝜕 𝜕𝑥𝑖(𝐷𝑑𝑖𝑓𝑓 𝜕𝑁𝑣𝑜𝑙 𝜕𝑥𝑖 ) − 𝜌𝑠𝑐𝑜𝑙 (II.4.14) 𝜕 𝜕𝑡(𝜌𝑁𝑣𝑜𝑙 𝑐𝑜𝑙) + 𝜕 𝜕𝑥𝑖(𝜌𝑣𝑖𝑁𝑣𝑜𝑙 𝑐𝑜𝑙) = 𝜕 𝜕𝑥𝑖(𝐷𝑑𝑖𝑓𝑓 𝜕𝑁𝑣𝑜𝑙𝑐𝑜𝑙 𝜕𝑥𝑖 ) + 𝜌𝑠𝑐𝑜𝑙 (II.4.15)

Avec 𝑠𝑐𝑜𝑙 le taux massique de collecte des particules (H2SO4, H2O) qui est une grandeur positive. Cela signifie qu’une particule volatile, une fois collectée, reste à la surface de la particule de suie.

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Les particules (H2SO4, H2O) sont ainsi assimilées à un gaz, ce qui revient à négliger leur inertie propre compte tenu de leur petite taille. 𝑠𝑐𝑜𝑙, qui modélise la vitesse de collecte des particules (H2SO4, H2O), est calculée par une équation de coagulation [Kärcher, 1998] :

𝑠𝑐𝑜𝑙 = 𝐾(𝐷𝑠, 𝐷𝑣𝑜𝑙) 𝑁𝑣𝑜𝑙 𝑁𝑠 (1 − 𝜃𝑎𝑐𝑡) (II.4.16)

Avec 𝐾(𝐷𝑠, 𝐷𝑣𝑜𝑙) le coefficient de coagulation entre les particules de suie de diamètre 𝐷𝑠 et les particules volatiles de diamètre 𝐷𝑣𝑜𝑙. Ce coefficient décrit la probabilité qu’ont ces particules de coaguler. Ainsi, plus le coefficient est faible, plus les particules auront de chance de rebondir l’une contre l’autre. 𝐾(𝐷𝑠, 𝐷𝑣𝑜𝑙) est donné par la relation de Fuchs [1964] :

𝐾(𝐷𝑠, 𝐷𝑣𝑜𝑙) = 2𝜋 (𝐷𝑠+ 𝐷𝑣𝑜𝑙)(𝐷𝑑𝑖𝑓𝑓𝑠 + 𝐷𝑑𝑖𝑓𝑓𝑣𝑜𝑙 ) (𝐷𝑠+ 𝐷𝑣𝑜𝑙) (𝐷𝑠+ 𝐷𝑣𝑜𝑙) + (𝜆𝑠2+ 𝜆2𝑣𝑜𝑙)1/2+ 4(𝐷𝑑𝑖𝑓𝑓 𝑠 + 𝐷𝑑𝑖𝑓𝑓𝑣𝑜𝑙 ) (𝐷𝑠+ 𝐷𝑣𝑜𝑙)(𝑣𝑡ℎ,𝑠2 + 𝑣𝑡ℎ,𝑣𝑜𝑙2 )1/2 (II.4.17) Avec

- 𝐷𝑑𝑖𝑓𝑓𝑖 le coefficient de diffusion de la particule 𝑖 ; - 𝜆𝑖 le libre parcours moyen de la particule 𝑖

𝜆𝑖 est donné par :

𝜆𝑖 =8𝐷𝑑𝑖𝑓𝑓

𝑖

𝜋𝑣𝑡ℎ,𝑖 (II.4.18)

Le lecteur pourra trouver davantage d’informations sur les processus de coagulation en consultant par exemple Pruppacher et Klett [1997].

De manière analogue à la modélisation de l’adsorption, le taux de collecte augmente avec la fréquence de collision des particules (H2SO4, H2O) avec les particules de suies. De même, le facteur (1 − 𝜃𝑎𝑐𝑡) de l’équation (II.4.16) limite la couverture de la surface de la suie et permet de prendre en compte les phénomènes de saturation de la surface en éléments soufrés.

La contribution des particules (H2SO4, H2O) collectées à la couverture de la surface des particules de suies est alors déterminée à partir de leur densité :

89 𝜃𝑐𝑜𝑙 =𝑁𝑣𝑜𝑙 𝑐𝑜𝑙 𝑁𝑠 𝜋𝑟𝑣𝑜𝑙2 4𝜋𝑟𝑠2 = 1 4 𝑁𝑣𝑜𝑙𝑐𝑜𝑙 𝑁𝑠 ( 𝑟𝑣𝑜𝑙 𝑟𝑠 ) 2 (II.4.19)

Avec 𝑟𝑣𝑜𝑙 le rayon des particules (H2SO4, H2O) collectées. Nous rappelons que nous considérons les particules dans le panache comme sphériques. La surface de la particule de suie égale donc 4𝜋𝑟𝑠2. Dans l’équation (II.4.19), chaque particule collectée contribue à une couverture 𝜋𝑟𝑣𝑜𝑙2 de la surface de la suie. Cette estimation correspond à la surface médiane de la particule (H2SO4, H2O). Finalement, la surface activée totale est obtenue par la somme des deux contributions (voir l’équation (II.4.7)).