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PROGRAMME INTERDISCIPLINAIRE DE RECHERCHE / ART, ARCHITECTURE ET PAYSAGE / RAPPORT FINAL ■' MARS 2008 ,

7.4 ACTIONS SITUATIONNELLES

Un autre dispositif partagé par plusieurs interventions a été le fait de déclancher des (interstices-) actions à partir de « situations ». Si les “situations” des situationnistes consistaient à “fédérer les instants, les alléger de plaisir, en dégager la promesse de vie”131, les situations interstitielles qu’on a provoquées, rajoutent la question de la production: Comment ces situations deviennent-elles « productives » ? Quels sont les ingrédients -lieux, temps, personnes...- qui créent des situations interstitielles ? Comment reforcer des interstices existants? Comment en créer d’autres ? Comment connecter des interstices entre eux ?

On s’est rendu compte qu’une action situationnelle peut devenir productive par le simple fait de transporter des situations d’un lieu à un autre. Par exemple Rotor ont importé dans le projet IUT des situations développées dans leur projet d’ « autonomie aérienne » Autonomiarea à Barcelone.132 De la même manière, Syn- on importés des situations explorés dans leur projet Hypothèses d’insertions à Montréal133.

Nous avons aussi essayé de travailler sur des temporalités situationnelles longues, sur des dilations de temps à travers des intensifications ou des dispersions spatiales. Ces dilatations se sont formalisés par des répétitions et des cycles (voir les interventions de Syn-, Agence, ALD et AAA).

Les chercheurs ont travaillé pour la plupart à l’intérieur de la situation, à la fois comme des chercheurs ethnologues, entremêlés, mais aussi comme des chercheurs habitants et usagers, pris avec leurs intérêts et usages dans la situation, ou comme des chercheurs « interventionistes », créant eux-mêmes des situations. Nous avons travaillé aussi la « situation » comme forme de communauté posant la question de ce que c’est qu’une « communauté interstitielle » (Voir dans ce sens les

interventions de aaa, de Rotor et de Syn). v

131 Raoul Vaneigem, T ra ité d e sa voir-vivre, o p. cit., p.l 19 132 Cf. www.Rotorrr.org

133Cf ; wwwamaiTages.com

INTERSTICES URBAINS TEMPORAIRES. ESPACES INTERCULTURELS EN CHANTIER, LIEUX DE PROXIMITÉ

PROGRAMME INTERDISCIPLINAIRE DE RECHERCHE • ART. ARCHITECTURE ET PAYSAGE / RAPPORT FINAL / MARS 2008

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Le Jeu au Bout du Plongeoir - un moment de subjectivation collective

Avec l’intervention de François Deck et du groupe « Au bout du plongeoir » au siège associatif Pôle Sud et dans le jardin ECObox, il s’agissait de créer une situation interstitielle par un jeu de société. Comme les situationnistes, mais aussi comme Syn-, et Rotor dans leurs interventions à IUT, ce groupe à exploré la particularité de la situation ludique de créer des dynamiques (personnelles et collectives), de catalyser de rencontres, de brasser des subjectivités.

« Au bout du plongeoir » est un jeu inventé dans le cadre de constitution d’une structure alternative, qui aide à penser la société, à tester son propre jugement, à vérifier sa propre position à partir d’une mise en situation par le jeu : on assume des rôles sociaux fictifs, on imagine des situations de vie et de société.

L’enjeu commun du jeu était de faire se rencontrer dans une situation d’activité à la fois critique et ludique des personnes qui n’ont pas beaucoup de lieux ou d’opportunités pour cela, de créer une situation ludique pour se donner du courage à dire et à réfléchir collectivement, lorsqu’on n’a pas l’habitude de le faire et de permettre ainsi l’échange à la fois d’idées personnelles et d’histoires intimes. Le dispositif du jeu a crée un interstice dans la subjectivité de chacun, tout en agençant des moments de subjectivation collective. C’était en même temps un interstice dans le processus de recherche, un moment de transversalité conviviale engageant des chercheurs, des habitants, des invités sur le même plan, en tant que «joueurs». Sans définir nécessairement une thématique commune à suivre d’une manière précise et systématique pendant la recherche, nous avons fabriqué ensemble, pour un moment, un terreau collectif à partir de questions apportées par chacun, mélangées à des fictions et des histoires personnelles.

IN1 ERSÏK.LS URBAINS TEMPORAIRES. ESPACES INTERCULTURELS EN CHANTIER. LIEUX DE PROXIMITÉ

PR OG R AM M E INTERDISCIPLINAIRE DE R EC H E R C H E ART A R CH IT EC T UR E ET PAYSAGE. . R APP OR T FINAL ' M A R S 2008

Nous avons observé que le déplacement des usages standardisés intensifie et stimule les relations de voisinage, en valorisant la « pluralité » et la « différence ». Par exemple, dans le cas de la cour située au 72bis Philippe de Girard, afin de pouvoir maintenir un usage interstitiel partagé, des programmes à identité forte, comme celui du temple; doivent déplacer leurs limites et négocier continuellement leur différence avec les autres.

Comme disait la théoricienne féministe Trinh T. Minh-ha, « C’est par le déplacement actif et désordonné de la différence, par l’insistance à démontrer qu’ « il n’y a pas de territoires du chef » et qu’il faut lutter contre « ce monde qui classifie » et contre son pouvoir de rependre un ordre qui exclut.’ Elle parie aussi de « l’anarchie de la différence ».134

Cette affirmation de « l’anarchie de la différence », ces usages négociés sans hiérarchie, ces changements de postures corporelles, ces déplacements de limites et ces intensifications des relations sociales, on les retrouve dans presque tous les autres interstices observés ou suggérés par les interviews : la librairie qui organise des débats politiques dans son propre espace, en utilisant parfois le café d’en face, tenu par un algérien, le café portugais qui accueille habituellement les séance de travail de la radio locale, des rencontres, des débats ainsi que des jeux de cartes, quelques cafés kabyles ou algériens qui prêtent leur locaux occasionnellement pour des répétitions de musique ou de théâtre, des projections et des concerts, etc.