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Actions, dispositifs, propositions depuis l’enquête ENFAMS

Partie 3 – Étude du renoncement aux soins des femmes sans logement personnel

IV. Implications

3. Actions, dispositifs, propositions depuis l’enquête ENFAMS

3.1. La création d’un dispositif pour les familles sans logement

Il existe quelques dispositifs et expérimentations depuis 2013 comme le BEEP (Bus Espace Enfants Parents) mis en place par le Samusocial de Paris en janvier 2014. Ce bus se déplace aux alentours des hôtels sociaux (hébergeant au moins 20 familles) à Paris et sa grande couronne et a pour objectif d’accueillir des familles hébergées, d’établir un diagnostic sanitaire et social et les orienter vers les structures adaptées à leurs besoins

195 et leur demande. L’équipe du BEPP est composée d’une coordinatrice médico-psycho-sociale, d’une accueillante médico-psycho-sociale, d’une infirmière, d’un médecin à mi-temps et d’un chauffeur accueillant.

A notre connaissance, ce nouveau dispositif n’a pas fait l’objet d’une publication de rapport d’activité mais quelques premiers résultats sont disponibles sur la page web dédiée à ce dispositif66. Près de 40% des familles hébergées par les services des sites visités par le Bus se sont présentées. Les principaux motifs de consultation médicale étaient généralistes (épidémies saisonnières, rhinites). Les questions le plus souvent abordées avec la médiatrice sociale portaient sur les démarches de régularisation, des demandes de suivi social, l’accès au logement et à la couverture médicale.

3.2. Les avancées des décrets, des lois sur l’hébergement des personnes sans-domicile

A la suite de la publication d’un rapport sur la santé des personnes sans chez-soi, remis à la Ministre de la Santé et des Sports, en novembre 2009 (Girard et al. 2009), un programme expérimental « un chez soi d’abord » a été mis en place entre 2011 et 2015 dans quatre villes (Lille, Marseille, Toulouse et Paris) coordonné au niveau national par Pascale Estecahandy et évalué par l’équipe du Pr Auquier à Marseille. Cette expérimentation a la même visée que le modèle « Housing First » mis en place à New-York en 1992 : partant du principe que le logement est un droit fondamental et que l’absence de logement a un impact important sur la santé, cette expérimentation propose aux personnes sans-abris souffrant de pathologies mentales sévères un accès à un logement « ordinaire » avec un accompagnement médico-social pluridisciplinaire aidant au maintien dans le domicile (Estecahandy et al. 2015). Les premiers résultats de l’expérimentation ont démontré l’efficacité du programme avec « un maintien dans le logement de plus de 80% personnes, mais aussi une diminution de leurs symptômes, une amélioration de leur qualité de vie, bien-être psychologique et estime de soi » (Premier ministre et al. 2016). Le 3 janvier 2017, la ministre des Affaires sociales et de la santé, Marisol Touraine, la ministre du Logement et de l’Habitat durable, Emmanuelle Cosse, et Ségolène Neuville, secrétaire d’Etat chargée des Personnes handicapées et de la Lutte

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contre l’exclusion, ont annoncé la publication du décret généralisant le dispositif « Un chez-soi d'abord » à l’ensemble du territoire français (Ministère des Affaires sociales et de la santé et Ministère du Logement et de l’Habitat durable 2017).

Récemment, le ministère de Logement et de l’Habitat durable a également opéré pour améliorer l’accès à l’hébergement. Une des dispositions concerne la continuité de l’hébergement à la fin de la trêve hibernale (Ministère du Logement et de l’Habitat durable 2017a) qui annonce l’augmentation de 5000 places (121 000 places existantes) pour « assurer l’hébergement inconditionnel des personnes les plus démunies prévu par le code de l’action sociale et des familles pour renforcer la prévention des expulsions ». Un autre communiqué de presse du ministère du 4 avril 2017 (Ministère du Logement et de l’Habitat durable 2017b) annonce le déploiement d’une application nationale pour mieux orienter les sans-domicile dans l’hébergement d’urgence en permettant aux gestionnaires des SIAO de connaître les places disponibles en temps réel. Elle a été lancée dans 3 départements pilotes (l’Ardèche, l’Orne et la Loire).

Il nous semble significatif que ces actualités réglementaires fassent totalement l’impasse sur la situation particulière des femmes et des enfants sans domicile. L’injonction d’autonomie des populations sans-domicile, mais aussi l’universalisme des politiques publiques françaises et l’invisibilité de ces populations dans l’espace public concourent à toute absence de prise en compte du genre, et au-delà, de la vulnérabilité spécifique des femmes et des enfants, dans l’appareil réglementaire de l’hébergement des sans-domicile.

3.3. Un exemple d’étude sur le coût de mal-logement

Cette sous-partie est largement inspirée d’un rapport, publié en 2016, sur le coût et les conséquences d’un logement « inadéquat » en Europe. Ce rapport démontre que le logement de bonne qualité pourrait permettre de réaliser des économies, en voici l’extrait de la synthèse du rapport : « Le fait de laisser des personnes vivre dans un logement inadéquat entraîne un coût total annuel de près de 194 milliards d’EUR pour les économies de l’UE. L’élimination des insuffisances en matière de logement dans l’UE, ou du moins leur amélioration à un niveau acceptable, coûterait environ 295 milliards d’EUR aux prix de 2011. Si toutes les améliorations nécessaires étaient apportées

197 simultanément, le coût pour les économies et les sociétés de l’UE serait remboursé dans les 18 mois grâce aux économies prévues, telles que des frais de soins de santé plus faibles et de meilleurs résultats sociaux. En d’autres termes, pour trois euros investis, deux seraient amortis en un an. Si tout le travail était entrepris maintenant, on estime que les économies dans le seul domaine de la prestation des soins de santé représenteraient quelque 9 milliards d’EUR la première année et continueraient à augmenter d’année en année. » (Eurofound 2016).

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Conclusion générale