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1. Introduction

1.4 Les facteurs de risque de l’athérosclérose

1.4.3 Désordres lipidiques

1.4.3.2 Les acides gras et le risque de maladies cardiovasculaires

1.4.3.2.4 Les acides gras polyinsaturés (PUFAs)

Les acides gras polyinsaturés ou PUFAs sont de la famille n-3 ou n-6. Contrairement aux autres acides gras, les PUFAs ne peuvent pas être synthétisés par les humains. Ils doivent donc provenir de la diète et ils sont appelés acides gras essentiels. Le PUFA le plus abondant dans la diète est l’acide linoléique (LA), un n-6, tandis qu’une petite part de la diète procure de l’acide -linolénique (ALA), un n-3. L’acide linoléique sert de précurseur pour l’acide arachidonique qui a un effet biologique important dans le corps humain. L’ALA est converti en acide eicosapentaénoique (EPA) qui peut être ensuite allongé, désaturé et -oxydé en acide docosahexaénoique (DHA). La majeure partie des PUFAs dans le corps humain provient de la consommation de poissons gras, riches en EPA et DHA. Les acides gras oméga-6 (PUFAs n-6) jouent un rôle dans la réponse immunitaire et dans la thrombose tandis que les acides gras oméga-3 sont moins impliqués dans ces

processus. Après l’absorption, les acides gras sont incorporés dans les triglycérides, les phospholipides et les esters de cholestérol. Environ 70% du cholestérol dans le plasma est présent sous la forme d’esters de cholestérol. Les phospholipides sont importants pour la formation de la membrane des cellules du corps et fournissent une barrière imperméable à l’eau. La fluidité de la membrane est déterminée en partie par le contenu en acides gras des phospholipides de la membrane. Les acides gras avec des multiples liaisons doubles augmentent la fluidité des membranes cellulaires. Les effets des oméga-3 et des oméga-6 sur les maladies cardiovasculaires seront discutés.

1.4.3.2.4.1 Les acides gras polyinsaturés oméga-3

Des essais prospectifs et rétrospectifs dans plusieurs pays ont démontré qu’une consommation modérée d’huile de poisson diminue le risque des événements cardiovasculaires comme l’infarctus du myocarde, la mort cardiaque subite, les maladies coronariennes, la fibrillation auriculaire et la mort par insuffisance cardiaque (Lavie, Milani, Mehra, & Ventura, 2009). La consommation de poisson, d’huile de poisson ou d’oméga-3 (EPA et DHA) diminue la morbidité, la mortalité et les facteurs de risque des maladies cardiovasculaires (Adkins & Kelley, 2010). Plusieurs mécanismes ont été proposés pour expliquer les effets bénéfiques des acides gras oméga-3 sur la santé cardiovasculaire. Premièrement, les acides gras oméga-3 peuvent diminuer la concentration de triglycérides et de VLDL cholestérol (Harris, 1997b). Cette diminution est accompagnée d’une augmentation de LDL cholestérol ainsi qu’une augmentation plus légère de HDL cholestérol. De plus, une relation dose-réponse existe entre l’apport d’oméga-3 et la diminution des triglycérides. De façon individuelle, l’EPA et le DHA diminuent la concentration des triglycérides (Grimsgaard, Bonaa, Hansen, & Nordoy, 1997). Les études ont aussi démontré qu’une augmentation de l’apport d’oméga-3 est associée à une réduction légère de la pression sanguine (environ 2 à 3 mm Hg systolique et 1 à 2 mm Hg diastolique) (Geleijnse, Giltay, Grobbee, Donders, & Kok, 2002). Cet effet semble être dose-dépendant et modulé par le degré d’hypertension (Howe, 1997). De plus, le DHA

semble être plus efficace que l’EPA pour diminuer la pression sanguine (Mori, et al., 2000). Les oméga-3 ont aussi un effet sur les plaquettes. Ils diminuent l’agrégation des plaquettes, résultant en une prolongation modeste du temps de saignement (Mori, Beilin, Burke, Morris, & Ritchie, 1997). Les oméga-3 pourraient aussi avoir un effet bénéfique sur la fibrinolyse (Barcelli, Glas-Greenwalt, & Pollak, 1985). Concernant les autres facteurs importants pour l’homéostasie du sang, les études sont contradictoires. Certaines études démontrent que l’apport d’oméga-3 diminue les niveaux de fibrinogène, du facteur VIII et du facteur de von Willebrand tandis que d’autres ne trouvent pas d’association (Archer, Green, Chamberlain, Dyer, & Liu, 1998; Shahar, et al., 1993). Malgré les effets observés des oméga-3 sur l’agrégation des plaquettes, leurs effets sur la thrombose restent flous.

Les oméga-3 auraient un effet sur la prévention des arythmies par leurs effets sur le myocarde. Tout d’abord, les oméga-3 augmenteraient la variabilité du rythme cardiaque, un facteur associé à une diminution du risque de mortalité dû aux arythmies (Christensen, et al., 1996; Christensen, et al., 1997). Par la suite, il a été démontré que l’EPA et le DHA diminuent aussi le rythme cardiaque au repos et augmentent la capacité de remplissage du ventricule gauche (Grimsgaard, Bonaa, Hansen, & Myhre, 1998). Dans des études chez les animaux, un prétraitement aux oméga-3 réduit le dommage aux tissus cardiaques et prévient le développement des dysrythmies ventriculaires lorsqu’un infarctus est induit (Billman, Kang, & Leaf, 1997; Pepe & McLennan, 1996). Tous ces effets permettent de diminuer le risque d’arythmie fatale.

Les oméga-3 ont aussi d’autres effets biologiques qui peuvent diminuer le risque de maladies cardiovasculaires. Les oméga-3 augmentent la relaxation vasculaire stimulée par l’acétylcholine et améliorent la fonction endothéliale (Chin & Dart, 1995; Goode, Garcia, & Heagerty, 1997). Ces effets peuvent être attribués au fait que l’huile de poisson peut augmenter la production de NO (Harris, Rambjor, Windsor, & Diederich, 1997). De plus, les oméga-3 auraient un rôle dans l’inhibition du développement de plaque dans l’athérosclérose. Premièrement, l’EPA et le DHA altèrent le métabolisme de molécules

d’adhésion comme VCAM-1, E-sélectine et ICAM-1 (Kris-Etherton, Harris, & Appel, 2003a). Ensuite, l’huile de poisson affecterait la cascade d’inflammation en supprimant la production de cytokines inflammatoires comme IL-6, IL-1 et TNF- (Zhao, et al., 2007). Ce mécanisme pourrait contribuer à augmenter la stabilité de la plaque. Cependant, les résultats sont contradictoires lors d’études sur la susceptibilité des LDL à l’oxydation par un supplément en oméga-3. Dans les études chez l’humain, une augmentation de l’oxydation des LDL est observée tandis que dans d’autres études, aucun effet des oméga-3 sur l’oxydation des LDL n’a été observé (Bonanome, et al., 1996; Higdon, Du, Lee, Wu, & Wander, 2001; Nenseter & Drevon, 1996; Sorensen, Marckmann, Hoy, van Duyvenvoorde, & Princen, 1998). Dans les études chez les animaux, un traitement aux oméga-3 a été démontré pouvant soit augmenter ou diminuer l’oxydation des LDL (Saito, Chang, Tamura, & Yoshida, 1991; Whitman, Fish, Rand, & Rogers, 1994). Donc, la diminution de l’inflammation, de la vasoconstriction et de l’agrégation des plaquettes par les oméga-3 sont des processus qui pourraient retarder le processus d’athérosclérose.

1.4.3.2.4.2 Les acides gras polyinsaturés oméga-6

L’effet des PUFAs oméga-6 sur le risque des maladies cardiovasculaires est un sujet de controverse. Plusieurs études suggèrent qu’une forte consommation d’oméga-6 diminue le risque de maladies cardiovasculaires et coronariennes. D’autres études suggèrent qu’une réduction de la consommation d’oméga-6 pourrait prévenir les effets adverses sur la santé comme par exemple la réponse pro-inflammatoire. Premièrement, il est connu qu’une diète riche en oméga-6 diminue le cholestérol (Nichaman, Sweeley, & Olson, 1967; Shepherd, et al., 1980). Le remplacement des glucides par des oméga-6 dans la diète diminue les niveaux de LDL cholestérol dans le plasma (Katan, Zock, & Mensink, 1994). De plus, selon des méta-analyses, le remplacement des glucides par des oméga-6 procure un changement favorable au niveau du ratio cholestérol total/HDL et les concentrations de LDL (Mensink, Zock, Kester, & Katan, 2003). Les oméga-6 sont aussi efficaces pour la réduction du cholestérol total dans le plasma (Czernichow, Thomas, & Bruckert, 2010).

Des études démontrent aussi que les oméga-6 diminuent les concentrations du HDL cholestérol (Hodson, Skeaff, & Chisholm, 2001). Or, un faible taux de HDL est associé à un haut risque pour les maladies cardiovasculaires (Franceschini, 2001). Cependant, le ratio cholestérol total/HDL est un meilleur indicateur pour les maladies cardiovasculaires que le HDL cholestérol seul (Yusuf, et al., 2004). Le remplacement des acides gras saturés par les oméga-6 ou une augmentation de sa consommation induisent une réduction du cholestérol total, du LDL cholestérol, ainsi que du ratio cholestérol total/HDL. Ces éléments pourraient réduire le risque de maladies cardiovasculaires.

Les oméga-6 ont aussi d’autres effets biologiques. Au niveau de la pression artérielle, la majorité des études démontrent que les oméga-6 sont associés à une diminution de la pression artérielle (Hall, 2009). De plus, certaines études démontrent que le remplacement des acides gras saturés par les oméga-6 diminue l’agrégation des plaquettes (Hornstra, et al., 1973). Cependant, d’autres études ne trouvent pas d’effet des oméga-6 sur l’agrégation des plaquettes (Knapp, 1997). Donc, les résultats des études sur les humains ne sont pas concluants et l’effet des oméga-6 sur la thrombose doit être clarifié. Du côté du stress oxydant, ici aussi les résultats sont contradictoires. Certaines études ne trouvent pas d’effet des oméga-6 sur l’oxydation des LDL, tandis que d’autres trouvent une augmentation (Czernichow, et al., 2010).

Un des aspects les plus controversés des oméga-6 sur les maladies cardiovasculaires est l’inflammation. Ceux qui sont en faveur d’une diminution de la consommation d’oméga-6 prônent le fait que l’oméga-6 AA est le substrat pour la production d’une variété d’eicosanoïdes qui sont pro-inflammatoires, vasoconstricteurs et/ou pro-agrégations (Harris, et al., 2009). Ces molécules sont la prostaglandine E2, la thromboxane A2 et le

leucotriène B4. Cependant, l’AA est aussi le substrat pour des molécules anti-

inflammatoires et anti-agrégations comme la prostacycline et la lipoxine A4. Dans les

cellules endothéliales vasculaires, les oméga-6 ont des propriétés anti-inflammatoires, supprimant la production de molécules d’adhésion, de chimiokines et d’interleukines (IL)

(De Caterina, Liao, & Libby, 2000). Dans les études chez les humains, l’augmentation d’oméga-6 dans le sérum est associée à une diminution des niveaux des marqueurs pro- inflammatoires dans le plasma (IL-6 et le récepteur antagoniste IL-1) et à une augmentation des niveaux des marqueurs anti-inflammatoires (TGF-Transforming Growth Factor-) (Ferrucci, et al., 2006). Selon les études d’observation, la consommation élevée d’oméga-6 est associée à des niveaux inchangés ou diminués de marqueurs inflammatoires (Pischon, et al., 2003).

En conclusion, les résultats de plusieurs études épidémiologiques, d’observation et d’essais cliniques proposent que la consommation d’au moins 5% à 10% de l’énergie provenant des oméga-6 réduit le risque des maladies cardiovasculaires (Harris, et al., 2009). Aucun effet adverse de la consommation d’oméga-6 sur la pression sanguine, les marqueurs inflammatoires ou les paramètres hémostatiques n’a été trouvé. Présentement, les évidences qui supportent un effet pro-inflammatoire ou pro-athérogénique des oméga-6 chez les humains sont minces.

En résumé, les différents acides gras provenant de la diète ont des effets variés sur les maladies cardiovasculaires, en particulier sur le métabolisme des lipides et des lipoprotéines. L’acide palmitique, l’acide laurique et l’acide myristique sont les plus puissants acides gras saturés pour augmenter le cholestérol sanguin. L’acide stéarique quant à lui diminue les niveaux de cholestérol, de LDL et de HDL cholestérol et serait moins thrombogénique que les autres acides gras saturés. Les acides gras mono-insaturés augmentent le HDL cholestérol, diminuent le VLDL cholestérol et ont des propriétés anti- athérogéniques, ce qui pourrait diminuer le risque de maladies cardiovasculaires. Ensuite, les acides gras trans ont des effets néfastes sur les lipides sanguins et ils sont donc à éviter. Pour les acides gras essentiels, les polyinsaturés, l’oméga-3 est un des acides gras les plus étudiés. Les oméga-3 diminuent le risque de maladies cardiovasculaires en diminuant les triglycérides dans le plasma, en prévenant les arythmies, en augmentant la relaxation vasculaire et la réponse anti-inflammatoire et en inhibant l’agrégation plaquettaire. Les

oméga-6 quant à eux diminuent le ratio du cholestérol total/HDL et dans certains cas ils ont des propriétés anti-inflammatoires et antiplaquettaires. Cependant, les études sur les oméga- 6 et les maladies cardiovasculaires sont contradictoires. Les oméga-3 semblent avoir des effets bénéfiques plus clairs sur les fonctions vasculaires et endothéliales ainsi que sur la santé cardiovasculaire.