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MATERIEL ET METHODES

A) La place du médecin généraliste : Accompagner

1) Accompagner un malade plus complexe

Les généralistes interrogés mettaient en avant leur présence auprès des patients à toutes les étapes de la maladie : ils intervenaient au stade de la prévention et du dépistage, puis au moment du diagnostic. Par la suite, ils accompagnaient les malades pendant la phase des traitements anticancéreux. Parfois, cet accompagnement pouvait s’étendre jusqu’à la fin de vie. Ils exprimaient cependant que la prise en charge du malade atteint de cancer s’avérait particulièrement complexe, et ce pour plusieurs raisons.

De la maladie aux effets secondaires

Une première difficulté résidait dans le terrain poly-pathologique s’associant fréquemment à la maladie néoplasique. Ainsi, la prise en charge d’un symptôme ou d’une maladie fréquemment rencontrés en médecine générale pouvait générer chez les médecins des craintes inhabituelles dans le contexte de cancer : « c’est plus difficile de prendre une poussée tensionnelle euh… en charge chez quelqu’un qui peut être fragile (…) quand ils ont la pathologie tumorale en plus, on a peur de… de de…de l’effet que va faire le médicament que l’on va introduire » (M2).

Parallèlement, ils étaient amenés à prendre en charge des effets secondaires directement liés aux chimiothérapies, même s’ils ne constituaient pas toujours le motif principal de la consultation. « J’avais un patient qui avait des problèmes cutanés, qui avait des espèces d’ulcères sous chimio et où là, ben là je m’en aperçois au cours … au cours de la consultation. Donc ce n’est pas forcément les gens qui viennent pour euh… pour signaler » (M2). Certains symptômes, très spécifiques, les mettaient dans un sentiment d’inconfort. «Les lésions hépatiques avec les insuffisances hépatiques avec les encéphalopathies hépatiques (…) on se dit : mais jusqu’à quand est-ce qu’on peut ? Jusqu’à quand est ce qu’on doit ? » (M6). En revanche, d’autres symptômes plus fréquents et peu spécifiques pouvaient être soulagés facilement par de petits moyens. Dans ces situations, les médecins prodiguaient des conseils pour améliorer la qualité de vie et jouaient un rôle fréquent de réassurance auprès des malades : «et puis je sens que ça leur fait plaisir de venir partager, d’être rassuré, que finalement c’est normal s’il y a tel effet secondaire, que c’est dû à ça, ça les rassure au final, je pense » (M8).

Une prise en charge psychologique lourde

Les participants relevaient que le soutien psychologique concernait un grand nombre de malades et prenait une place majeure dans leur prise en charge : « je fais plus une consult’ psy qu’une consult’ vraiment médicale de toute façon » (M8).

Les médecins généralistes notaient souvent l’insuffisance de prise en charge psychologique des patients par les oncologues et les structures de soins : « je pense qu’il lui manquait un accompagnement, peut-être plus psychologique » (M6).

Ils relevaient, entre autres, que le discours et les messages livrés aux patients n’étaient pas toujours adaptés à ce qu’ils étaient en mesure d’entendre : « on vient leur donner une

sentence généralement avec un pronostic, une, une, une date de péremption ! C'est super chaud quoi » (M4).

Une multiplication des intervenants

Les médecins interrogés déploraient également le manque de globalité de prise en charge des malades par les oncologues. La sur-spécialisation des oncologues engendrait une multiplication des interlocuteurs, ce qui pouvait être déstabilisant pour leurs malades : « parce que tout le monde disait : je m’occupe du cancer de l’utérus, je m’occupe du cancer du côlon et puis la vessie, vous irez voir l’urologue » (M8).

Un environnement important à prendre en compte

Plusieurs participants relevaient l’insuffisance de prise en compte des conditions de vie des malades par les équipes soignantes. Les médecins exerçant en milieu rural insistaient d’ailleurs sur les difficultés que rencontraient les malades qui vivaient éloignés de leur structure de soins : «les médecins qui la prenaient en charge ne savaient même pas qu'après elle rentrait sur (ville rurale) » (M3). Par ailleurs, les oncologues ne considéraient pas assez l’entourage des malades, qui selon eux, participait grandement au bon déroulement des traitements. L’encadrement paramédical au domicile en faisait partie. «Ils se sont pas renseignés si il y avait une infirmière » (M1).

L’entourage familial a une place centrale. Contrairement aux oncologues, les médecins interrogés disaient avoir souvent une grande connaissance des proches : « la patiente je la connais, je connais sa famille » (M4). Selon eux, les aidants pouvaient constituer dans certaines circonstances difficiles, un appui dans la prise en charge : « on peut quand même modérer avec la famille » (M2). La prise en charge globale du patient passait aussi par le soutien de ses proches : « avec une prise en charge psychologique évidement réelle pour

avoir les bons mots au bon moment envers le patient, la famille, les enfants, les parents, les grands-parents et les amis » (M6). Cette approche globale permettait de mieux appréhender les situations précaires ou de solitude pouvant perturber le bon déroulement des traitements : « ils se sentent très vite abandonnés (…) ils se sentent seuls chez eux avec leurs effets secondaires » (M6).

La problématique délicate de la fin de vie

Cette proximité et cette connaissance des patients amenaient parfois les médecins généralistes à les accompagner dans leur fin de vie. Cette étape de la maladie était pour la plupart un moment très complexe à gérer : « c’est vrai que des fois c’est un peu difficile, enfin c’est plus que c’est des patients en fin de vie (…) plus que des chimiothérapies quoi…qui nous, qui nous pose des problèmes » ; « on n’a peut-être pas toutes les connaissances nécessaires pour euh… euh… pour les derniers, enfin les fins de vie » (M10). La présence de structures d’appui (HAD, réseau de soins palliatifs) et l’anticipation pouvaient alors faciliter l’accompagnement des derniers moments de vie : « c’est des gens qui avaient décidé, comme c’est des choses qui évoluaient depuis longtemps, que… qu’ils voulaient que ça se finisse à la maison et pas à l’hôpital et où on a pu du coup en amont euh… tout mettre en place » (M2).

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