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Pour les démarches de scolarisation, en raison de la mutualisation de leurs connaissances fait, la procédure ne semble pas poser de difficultés aux communautaires.

« Pour la santé, ça dépend des familles, toutes n’ont pas la carte vitale. Pour

l’école, on sait comment ça marche et donc on met les enfants à l’école. On fait les démarches nous-mêmes auprès de la mairie, la plupart des gens savent lire et écrire. » Femme, 28 ans.

Concernant le logement, le fonctionnement est proche de l’emploi, la majorité des personnes passent par un réseau de propriétaires privés.

« Au début, beaucoup ont trouvé des logements chez les Arabes à Bobigny,

Saint-Denis. On leur a proposé de refaire leur maison, de rajouter des pièces en échange de pouvoir y loger. Du coup, il y a des immeubles où il y a que des Oseni. Depuis, il y a des gens du village qui sont devenus propriétaires et qui louent à d’autres. Le logement reste difficile à trouver. On essaye de passer par les Français, voir si les familles où on garde les enfants peuvent nous louer un logement. On a essayé de passer par des assistantes sociales mais c’est très long, la plupart des gens de chez nous sont dans des logements privés. Quand le loyer est déclaré, on fait les démarches pour toucher les APL mais on est encore beaucoup à être au noir. » Homme, 41 ans.

DIFFICULTÉS ET POINTS À RETENIR

Les migrations reposant sur un fonctionnement communautaire appartiennent à un modèle classique et ancien que l’on retrouve chez la plupart des nationalités. Dans les modes d’organisation les plus fermés comme ceux mis en place par les migrants chinois en France38, un certain nombre de règles et d’institutions propres se mettent en place afin de codifier ce fonctionnement. Dans ce système, les derniers arrivés acceptent d’être exploités pendant plusieurs années par leurs compatriotes avant de pouvoir à leur tour emprunter de l’argent et monter leur affaire reposant sur une main d’œuvre bon marché constituée par les nouveaux arrivants. Le modèle décrit par les “communautaires” semble s’éloigner de ce fonctionnement. Ils ne cherchent pas à édifier un fonctionnement parallèle à la société française. Au contraire, ils tendent vers une normalisation en déclarant de plus en plus leurs activités via le statut d’auto-entrepreneur ou les chèques emploi service. En revanche, les “communautaires” n’échappent pas aux rapports de dépendance évoqués parfois comme pesants et qui freinent leur insertion sociale en France.

Contrairement à une idée répandue, pendant l’étude aucune des personnes s’étant spontanément déclarée “Rom” au cours de nos entretiens n’appartient au type “communautaire”. Plutôt que de chercher des explications culturelles hasardeuses, il faut souligner que la mise en place de ce type de fonctionnement nécessite du temps car elle

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38Gao Yun et Véronique Poisson, Le trafic et

l’exploitation des migrants chinois en France, OIT,

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repose sur la création d’une réputation dans un secteur professionnel précis. Si quelques groupes de migrants ont réussi à se faire reconnaître comme travailleurs inspirant la confiance, il est probable que les a priori autour des Roms aient considérablement limité ce type de stratégie.

Les quatre stratégies d’insertion identifiées par l’analyse des entretiens ne doivent pas être perçues comme cloisonnées ou uniquement liées aux profils des personnes. Elles ne doivent pas être davantage interprétées comme une critique à l’égard des personnes particulièrement investies dans l’accompagnement. Certaines familles considérées comme “autonomes” ou “sélectionnées” ont eu recours pendant une période limitée à des tiers avec lesquels elles ont noué des liens particuliers pour intégrer un projet dédié ou trouver un travail. Parmi les “protégés”, on observe que le conjoint ou la conjointe a parfois développé des stratégies proches des “autonomes” grâce à l’expérience acquise lors de l’accompagnement du “protecteur”. L’investissement des accompagnants, Schéma 6 : schéma synthétique des difficultés par type

quelque soit leur place, y compris dans des cas où la durée fut très limitée, est décrit par la majorité des familles comme un facteur décisif39 dans leur parcours d’insertion. Ces stratégies sont aussi le produit de facteurs externes. De ce point de vue, la fin de la période transitoire est la mesure décrite comme ayant le plus d’impact sur les stratégies mises en place. Si on se fonde sur l’observation des personnes de l’échantillon arrivées en 2014, il semble que la catégorie dite “autonome”, qui repose sur un accès à l’emploi sans passer par des dispositifs dédiés, soit devenue accessible à des personnes ne disposant pas d’un réseau de connaissances important ou d’un très bon niveau de français.

La finalité de cette typologie n’est pas de catégoriser les individus mais de comprendre les raisons qui les ont poussés à privilégier telle ou telle stratégie. Et ainsi de pouvoir proposer, au niveau local, le suivi le plus adapté aux personnes pour favoriser leur insertion.

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Estimation du temps d’insertion par type de parcours

39 Décrit en terme de réconfort ayant entraîné un processus de résilience.

Suivant l'ancienneté des premiers migrants, la durée de la période "grise" et de la "situation transitoire" se font en une année maximum pour les nouveaux arrivants.

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Comme nous l’avons vu, ce travail de recherche nous a permis de distinguer quatre types