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Abondance des glucides incluant les 4-désoxy hexopyrannoses

1.2. Importance de l’étude des glucides

1.2.1. Abondance des glucides incluant les 4-désoxy hexopyrannoses

Les glucides constituent la classe de molécules organiques la plus abondante sur la planète.7 Cette grande diversité provient de la possibilité d’assembler différents monomères saccharidiques, et ce, à différentes positions sur le cycle pyrannose ou furannose. En plus d’avoir la possibilité d’une poly substitution sur une même unité monomérique (ramification), la complexité de ces molécules peut s’accroître en raison de leur potentiel à former des isomères α et β en position anomérique. In vivo, les

informations structurales véhiculées par ces molécules peuvent être décodées par les lectines (protéines pouvant lier une et/ou des unité(s) saccharidique(s)) impliquées dans plusieurs évènements physiologiques et pathologiques. Ainsi, cette section portera tout d’abord sur les glucides abondants dans la nature, ensuite sur les glucides d’importance médicinale et finalement sur les 4-désoxy hexopyrannoses.

Parmi les glucides naturels les plus abondants, la cellulose 1.1 est constituée d’une chaîne homopolymérique linéaire de D-glucose liée par des liaisons β-(1ĺ4)

variant de quelques dizaines à quelques milliers d’unités monomériques de glucose (Figure 1.1). Il s’agit du constituant principal des végétaux (bois et fibres textiles) puisqu’elle est constitutivement présente dans la paroi des cellules végétales. Bien que la cellulose ne soit pas digérée par l’homme, celle-ci est utile pour le fonctionnement des intestins et elle représente une source de fibres végétales.8

Un autre composé important du point de vue commercial et biologique est l’amidon, lequel est composé de deux homopolymères (l’amylose 1.2 et l’amylopectine

1.3) de taille variant entre six cents et cent millions d’unités glucosidiques. L’amylose est

un polymère possédant des liaisons α-(1ĺ4) et l’amylopectine est un polymère de glucose possédant des liaisons α-(1ĺ4) avec des ramifications α-(1ĺ6) à toutes les 24 à 30 unités. Cette réserve d’énergie végétale, particulièrement abondante dans les légumineuses, est facilement assimilable par l’humain via les amylases (enzymes présentes dans la salive) ainsi que par le suc pancréatique, permettant son hydrolyse en dextrine, en maltose et en sa plus simple unité: le glucose.

Dans le même ordre d’idées, la chitine 1.4 est l’un des principaux composants de l’exosquelette des insectes et autres arthropodes. La structure de cette dernière est similaire à celle de la cellulose, à la différence d’un enchainement des unités monomériques de N-acétylglucosamine selon des types de liaisons identiques. La chitine est la deuxième classe de saccharides la plus produite dans la nature, après la cellulose.

Un autre glucide très abondant dans la nature est le peptidoglycane (muréine) 1.5 qui est un hétéropolymère composé de N-acétylglucosamine et d’acide N- acétylmuramique liés via des enchaînements β-(1ĺ4). Ce polymère compose la paroi bactérienne (autant Gram-positive que négative) et bien que d’autres types de glucides s’y retrouvent, la muréine en est le principal constituant. Le saccharose (sucrose ou β-D- fructofurannosyl-(2ĺ1)-α-D-glucopyrannoside) 1.6 est quant à lui un diholoside extrait de la canne à sucre et possède des propriétés édulcorantes servant de référence dans l’échelle des produits sucrants. Cette molécule a longtemps été utilisée pour assaisonner la nourriture.

Le lactose 1.7 est un glucide naturel trouvé dans le lait des mammifères et représente une source d’énergie essentielle pour les jeunes de ces derniers. Le lactose est lui aussi un diholoside composé d’une molécule de D-galactose et d’une unité D-glucose

pas l’enzyme nécessaire à sa digestion, mais il existe toutefois des comprimés de lactase, l’enzyme capable de dissocier ce lien glycosidique spécifique.

Finalement, le glucose 1.8 est un aldohexose qui peut être directement assimilé par l’organisme. Celui-ci se retrouve dans les plus grandes familles des matériaux à base de glucides, tels la cellulose, l’amidon, le saccharose et le lactose. Le glucose est une source d’énergie immédiate et stabilise la pression osmotique du sang. Il est important de noter que le glucose sert de précurseur pour la formation du glycogène et pour la biosynthèse des acides gras.1

Théoriquement, chaque classe de biomolécules pourrait être isolée sous sa forme glycosylée et une estimation récente suggère que près de la moitié des médicaments potentiels dérivés de produits naturels sont des métabolites secondaires glycosylés.9 Plusieurs revues de la littérature suggèrent qu’en altérant le degré de glycosylation de l’un de ces métabolites, de nouvelles classes d’agents thérapeutiques pourraient ainsi être générées.10 Autre fait important, toutes les parois des cellules sont couvertes de glucides, couche aussi appelée «glycocalyx».11 Cette dernière, d’une épaisseur variant entre 10 à 100 nm,12 se compose de glycoprotéines, de protéoglycanes, de glycolipides13 et de protéines liées aux glycophosphatidylinositols.14, 15 Les degrés de glycosylation des protéines et des lipides varient en réponse aux stimuli à la fois intra- et extracellulaires et reflètent l’état physiologique réel de la cellule.16 C’est pour cette raison que beaucoup

d’efforts sont déployés pour le développement de nouvelles méthodes de synthèse ou de biosynthèse des glycopeptides et glycolipides.17 En effet, ces glycomimétiques imitent le comportement de saccharides biologiquement actifs présents dans les cellules. Les Figures 1.2-1.5 illustrent des exemples de ces glucides d’intérêt thérapeutique présents dans la nature.

D’abord, le sulfate de chondroitine (1.9) est un acide glycosylaminé présent à la surface des cellules (Figure 1.2). Il se compose de résidus N-acétylgalactosamine et d’acide glucuronique pouvant avoir une taille de 100 unités monosaccharidiques.18 Il est également un composant important du cartilage, ce qui explique son utilisation comme

supplément alimentaire pour le traitement de l’ostéoporose.19 Une autre glycoprotéine d’importance est la vancomycine (1.10) qui est synthétisée par l’Amycolatopsis

orientalis, une bactérie de la famille des Pseudonocardiaceae.20 Cette molécule suscite

l’intérêt à la fois des biologistes moléculaires et des chimistes organiciens et sa synthèse a été pendant longtemps un défi synthétique de taille.21 La vancomycine est utilisée lors d’infections bactériennes Gram-positives qui ne répondent pas aux antibiotiques moins puissants.22

Figure 1.2. Exemples choisis de glucides d’importance significative: le sulfate de

chondroitine (1.9) et la vancomycine (1.10)

Les glycoprotéines ne se localisent pas uniquement dans la cellule; ils sont également présents à la surface des parois cellulaires sous forme de glycoprotéines (Man9GlcNAc21.11 et le polysaccharide 1.12) ou de glycolipides (Globo-H 1.13) (Figure

1.3). La protéine gp120 de l’enveloppe glycoprotéique du virus de l’immunodéficience humaine (VIH) est entre autres constituée du Man9GlcNAc2,23 tandis que Globo-H est

présent à la surface des certaines cellules cancéreuses (incluant les cancers de la prostate et du sein).24 Le composé 1.12 est l’unité répétitrice du polysaccharide capsulaire

d’Haemophilus influenzae type B.25 D’importance médicinale, ces derniers glycoconjugués représentent des outils pour l’élaboration de vaccins à base de glucides.

Figure 1.3. Exemples choisis de glucides d’importance significative: le Man9GlcNAc2

1.11, un polysaccharide capsulaire 1.12 et le Globo-H 1.13

Un autre exemple d’un composé isolé d’une bactérie est la paromomycine (1.14) (Figure 1.4). Cet aminoglycoside a été extrait du Streptomyces krestomuceticus pour la première fois au milieu du 19e siècle.26 Les aminoglycosides forment une large famille possédant une grande variété de substituants de glucides.27 Dans le même ordre d’idée, un autre exemple d’un glucide présent dans la nature est la ribothymidine (1.15). Ce ribonucléotide résulte de l’attachement de la thymine avec le ribofurannose, lequel est transcrit par l’ARN polymérase. Cette molécule, présente dans les chaînes polymériques de l’acide ribonucléique (ARN), constitue le messager de la synthèse des protéines.

Figure 1.4. Exemples choisis de glucides d’importance significative: la paromomycine

(1.14) et la ribothymidine (1.15)

Finalement, les quatre derniers exemples sont des métabolites glycosylés d’intérêt biologique et synthétique (Figure 1.5).10 L’amphotéricine B (1.16),28 l’aeruginosine 205B (1.17),29 la doxorubicine (1.18)30 et la calicheamicine (1.19)31 ont été isolées respectivement des souches de Streptomyces nodosus,32 Oscillatoria agardhii,33

Streptomyces peucetius,34 et Micromonospora echinospora.35 Leurs synthèses ont suscité

l’attention de plusieurs groupes de recherche.28-31

Figure 1.5. Exemples choisis de glucides d’importance significative: l’amphotéricine B

Puisque ce travail focalise sur la synthèse des 4-désoxy hexopyrannoses, l’abondance de ceux-ci dans la nature sera abordée. Par exemple, la vancomycine (1.10), la doxorubicine (1.18), l’aeruginosine (1.17) et la calicheamicine (1.19) sont des métabolites glycosylés avec des glucides possédant une déficience en fonctions hydroxyles (Figures 1.2 et 1.5). Par contre, les 4-désoxy hexopyrannoses sont considérés comme des glucides rares en comparaison de leurs homologues plus abondants 2-désoxy hexopyrannoses.

La Figure 1.6 illustre des exemples choisis de la littérature de 4-désoxy hexopyrannoses présents dans la nature. Premièrement, les polysaccharides 1.20 et 1.21 ont été isolés de lipopolysaccharides bactériens Citrobacter braakii36 et Citrobacter,37 respectivement.38 Le motif 4-désoxy hexopyrannose est présenté en bleu. Ensuite, le disaccharide 1.22 est un oligosaccharide uronique insaturé produit par certaines bactéries et relâché lors de l’invasion d’une cellule hôte.39 Ce type de molécule est le substrat des glucuronyles hydrolases impliquées dans la dégradation des glycosyl aminoglycanes des mammifères.40 L’érythromycine A1 (1.23) et la chalcomycine (1.24) sont des macrolides antibiotiques, dont la famille présente plusieurs membres de structures variées.27 Généralement, un ou des désoxy sucres sont attachés aux squelettes des macrolides et les unités glucides sont nécessaires à l’obtention d’une activité biologique. La désosamine présentée en bleu sur le macrolide 1.23 (un amino glycoside) et la chalcose (en bleu) sur le macrolide 1.24 sont tous deux des 4-désoxy sucres. Les unités 4-désoxy hexopyrannoses composent également des molécules ayant une propriété autre qu’antibiotique. En effet, les membres de la famille des peptidyles nucléosides sont des métabolites secondaires microbiens ayant des propriétés antifongiques.41 Trois membres de cette famille sont représentés par la nikkomycine B (1.25), l’ézomycine A2 (1.26) et

l’ézomycine B2 (1.27). Ces trois produits naturels uniques se composent d’une

nucléobase et d’un glucide 4-désoxy hexopyrannose central. Notons que l’unité désoxy glycosidique sur les ézomycines se nomme acide ézoaminuroïque (en bleu). La dernière famille de glycosides a être présentée dans cette section se compose d’indole-N-glycosyle (1.28-1.31). Cette famille de molécules a été isolée de souches bactériennes42 et

représente l’un des rares exemples de composés faisant appel à un atome d’azote pour lier la position anomérique avec une unité indole.

2 1+ +2& 2+ 2 2 2 +1 2 1+ + + 2+ 5 +2& 2 2 2+ 2+ 2 2 2 +2 2 2 +2 1 20H 2+ 2 2 2 2 2+ 2 1 +2 2+ 5 5 2 2+ 20H 2 2 20H 20H +2 2  eU\WKURP\FLQH $ &KDOFRP\FLQH e]RP\FLQH $ 5 5 + 5 &21+ 5 20H 1pRVLGRP\FLQH 5 20H 5 &1 5 20H 6) 5 20H 5 &21+ 5 20H .DKDNDPLGH $ 5 20H 5 &21+ 5 1+ .DKDNDPLGH % 2 5 2 1 2+ 2+ 1+ 2 2 1 + &2+ 2 +2 1+ 2+  1LNNRP\FL QH % 2 +2 2 2+ 2 +2 2 2+2 2+ 2 2 2 +2 +2 Q 2 2 +2 $F+1 2+ 2 2 +2 $F+1 2 +2 +2 2 Q 2 2 +2 +2 +2& 2 +262 $F+1 2+ 262+    1+ 1+ 2 2 e]RP\FLQH % 5 1 1+ 2 2

Figure 1.6. Exemples choisis de la littérature de 4-désoxy hexopyrannoses présents dans