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A.2.a. Nature de la transformation malolactique

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 29-0)

La fermentation malolactique (FML) est définie comme la décarboxylation de l’acide L-malique en acide L-lactique se manifestant sous la forme d’un dégagement de dioxyde de carbone. Cette réaction biochimique est réalisée par l’enzyme malolactique isolée pour la première fois par Lonvaud (1975). Elle nécessite les cofacteurs NAD+ et un ion manganèse (Mn2+) (Lonvaud-Funel et Strasser de Saad, 1982 ; Spettoli et al., 1984 ; Naouri et al., 1990).

Cette décarboxylation est à l’origine d’une diminution naturelle de l’acidité totale, et d’une légère augmentation du pH, due au remplacement d’un diacide (l’acide malique) par un monoacide (l’acide lactique). D’un point de vue organoleptique, la FML apporte de la rondeur et de la souplesse au vin, l’acide lactique étant beaucoup plus doux en bouche que l’acide malique. Sans cette fermentation, l’acidité renforcerait la sensation d’astringence provoquée par les tanins présents dans les vins rouges.

La FML permet également une certaine stabilisation microbiologique des vins par épuisement de substrats autres que l’acide malique tels que l’acide citrique et certains pentoses ou hexoses. Ces métabolismes bactériens secondaires sont également à l’origine de modifications chimiques affectant la perception olfactive et gustative du vin (Henick-Kling, 1993 ; Bartowsky et al., 2002 ; Matthews et al., 2004).

11 I.A.2.b. Diversité des souches de bactéries lactiques

Pendant les premiers jours de la vinification et dès le remplissage des cuves, la population bactérienne du moût est comprise entre 102 et 104 UFC/mL. Les espèces identifiées appartiennent généralement aux genres Lactobacillus, Leuconostoc, Pediococcus et Oenococcus. Ces BL à Gram positif sont chimiotrophes, c'est-à-dire qu’elles tirent l’énergie nécessaire à l’ensemble de leur métabolisme de l’oxydation de composés chimiques. La plupart des BL tolèrent la présence d’oxygène, mais ne l’utilisent pas dans les mécanismes énergétiques. Selon les espèces, leur métabolisme peut être homofermentaire, caractérisé par la production majoritaire d’acide lactique ou hétérofermentaire, entrainant la libération de quantités significatives de CO2, d'éthanol ou d’autres acides en plus de l’acide lactique (L et/ou D).

Au début de la FA, la concentration bactérienne diminue et une sélection naturelle des souches résistantes à un environnement de plus en plus stressant (augmentation du niveau d’éthanol, présence de SO2, pH faible) s’opère, souvent au profit de l’espèce Oenococcus oeni. C’est l’espèce de BL préférentielle de la FML car elle résiste au pH bas, décompose l’acide malique en priorité, secondairement les sucres, et forme peu d’acidité volatile. Le développement d’autres bactéries, telles Lactobacillus, peut entrainer l’altération du vin (Peynaud, 1981). Pour prévenir ce risque, on peut envisager l’ensemencement de BL sélectionnées pour leur bonne résistance au vin, leur faible temps de latence et leur capacité à réaliser rapidement la fermentation.

I.A.3. Interactions levures/bactéries lactiques : état de l’art

Levures et bactéries interagissent dès les premières heures de la vinification jusqu’au début de la fermentation malolactique. L’évolution des différentes populations au cours de la vinification est en partie due à l’antagonisme entre les levures et les bactéries. Plusieurs études montrent que le type et le degré d’interactions dépendent de plusieurs facteurs, dont le couple levures/bactéries impliqué. Ces interactions entre microorganismes sont variables suivant les souches présentes et pourraient être à l’origine de changements métaboliques chez les levures ou les BL, influençant la composition chimique du vin et donc ses arômes (Beelman et al., 1982 ; Lonvaud-Funel et al., 1988a ; Henschke and Jiranek, 1993).

12 I.A.3.a. Les interactions microbiennes au cours de la vinification

Les interactions observées entre levures et bactéries sont complexes et évoluent au cours de la vinification (Figure 3).

Figure 3. Evolution des populations de levures S. cerevisiae et de bactéries lactiques O. oeni au cours de la vinification (adaptée de Ribéreau-Gayon et al., 2012a).

On observe dès les premières heures de la vinification une inhibition des BL par les levures. L’inoculation expérimentale d’un moût par S. cerevisiae et O. oeni, même lorsque cette dernière atteint des concentrations cent fois supérieures, mène toujours à une croissance rapide des levures au détriment des BL. Non seulement celles-ci ne se multiplient pas, mais elles sont de surcroît partiellement éliminées (Lonvaud-Funel et al., 1988b). Le premier paramètre envisagé pour expliquer cette observation est l’appauvrissement du milieu en nutriment par les levures, notamment en acides aminés (Fornachon, 1968). L’éthanol, synthétisé au cours de la FA, est également un inhibiteur de la croissance bactérienne, bien que son impact soit négligeable les premiers jours (Ribéreau-Gayon et Peynaud, 1964). Il a également été suggéré que certains métabolites libérés par les levures aient un effet toxique sur les BL comme le dioxyde de soufre (Fornachon, 1968; Henick-Kling et al., 1994) ou les acides gras de taille moyenne (entre 6 et 12 atomes de carbone) (Lafon Lafourcade et al., 1983; Lonvaud-Funel et al., 1988b). L’effet de ces différents composés combiné à l’augmentation de la teneur en éthanol et au pH acide du milieu renforce l’inhibition des BL par les levures (Lonvaud-Funel et al., 1988b).

13 Lorsque le milieu s’appauvrit et que la population de levures entre en phase stationnaire, les effets négatifs liés au métabolisme de la levure finissent par être compensés par leurs effets positifs. La période de latence entre la fin de la FA et le début de la FML est liée à l’adaptation des BL ayant résisté pendant la FA au vin (Figure 3). Ce délai pourrait dépendre de la libération de certains métabolites levuriens. En effet, la lyse des levures entraine le relargage de nutriments stimulant la croissance bactérienne : vitamines, bases azotées, acides aminées, peptides, glucanes ou encore mannoprotéines (Llaubères et al., 1987

; Charpentier et Feuillat, 1993 ; Alexandre et al., 2001). A cet effet stimulant peut être ajouté un phénomène d’inhibition des levures par les BL, qui va accélérer la phase de déclin des levures. Des études ont en effet mis en évidence l’activité de glucosidases et de protéases bactériennes probablement responsables de la lyse des parois levuriennes pendant cette période de latence (Lonvaud-Funel et al., 1988b).

De nombreuses études ont montré que la nature des interactions entre levures et BL est liée aux souches présentes dans le milieu et qu’elles sont même très spécifiques du couple utilisé pour réaliser les fermentations alcoolique et malolactique (Lonvaud-Funel et al., 1988a

; Comitini et al., 2005 ; Arnink et Henick-Kling, 2005). Ces interactions entre microorganismes n’influencent pas seulement leur croissance au cours de la vinification mais aussi probablement leur métabolisme et de ce fait la composition en molécules aromatiques du vin.

I.A.3.b. Influence des interactions levures/bactéries sur la composition chimique et le profil aromatique des vins

L’impact du couple levures/BL sur la concentration des composés impliqués dans la perception de l’arôme fruité des vins a été peu étudié. La plupart des travaux se sont en effet principalement intéressés à l’effet de la FML ou de la souche de BL sur la modulation de l’arôme fruité et de ses composés. Il en résulte une grande hétérogénéité dans les résultats présentés. Certaines études montrent en effet une augmentation de l’arôme fruité après FML quand d’autres parlent au contraire de diminution ou de masquage (McDaniel et al., 1987 ; Henick-Kling et al., 1994 ; Sauvageot et Vivier, 1997 ; Antalick et al., 2012). De même, l’impact de la souche de BL sur des composés volatils donnés varie en fonction des études, qui peuvent montrer un effet significatif, traduit par une augmentation ou une diminution de leur concentration, ou au contraire un effet non significatif (Malherbe et al., 2011 ; Vestner et

14 al., 2011 ; Antalick et al., 2012 ; Ruiz et al., 2012). La grande variabilité de l’influence de la FML sur l’arôme fruité ne peut être attribuée à un simple effet souche et semble impliquer des phénomènes bien plus complexes. Ces variations seraient le reflet d’interactions entre la matrice, les levures et les BL, où chaque composante a son importance.

La composition chimique du vin après FA est un élément essentiel pour expliquer les changements aromatiques engendrés par les BL au cours de la FML. Or, ce paramètre dépend directement des métabolites libérés par les levures au cours de la FA ou suite à leur autolyse.

Ce phénomène est lui-même dépendant de certains paramètres œnologiques tels que la température de fermentation ou la composition du moût initial. Delaquis et al. (2000) ont en effet montré que la composition aromatique des vins est influencée par la souche de levures et de bactéries mais également par les conditions de fermentation. Antalick et al. (2013) mettent également en évidence un effet couple sur la modulation de l’arôme fruité et de certains composés aromatiques. Ils montrent aussi que le moment de l’inoculation des BL (co-inoculation versus (co-inoculation séquentielle) est un paramètre important dans la modulation de l’arôme du vin. Les résultats sont cependant très variables et dépendent fortement de la souche et de la matrice utilisées.

Enfin, Sun et al. (2013) ont évalué l’influence de différents couples levures/BL sur la composition aromatique de "vins" de cerise. L’étude met en évidence le caractère unique de chaque produit tant du point de vue de sa composition chimique que de sa perception sensorielle ; néanmoins, il semblerait que l’effet de la souche de levures sur l’arôme fruité et sur les composés présents soit prédominant face aux légères modifications apportées par les BL au cours de la FML.

I.B. Connaissances sur les composés aromatiques impliqués dans l’expression de l’arôme fruité des vins rouges

Le vin est une matrice complexe composée de centaines de molécules responsables de son goût et de ses arômes. Contrairement aux cépages blancs dits "aromatiques", aucune expression variétale fruitée corrélée à la présence de molécules aromatiques clés n’a pu être mise en évidence dans les vins rouges. L’existence même d’une expression fruitée spécifique aux vins issus de cépages rouges a jusque dans les années 2000 été l’objet d’une vive controverse (Piombino et al., 2003). Grâce à l’utilisation de verres noirs, permettant d’écarter

15 toute influence de la couleur des vins, Pineau (2007) a montré l’existence d’un arôme fruité spécifique aux vins rouges de Bordeaux. Ses travaux ont également permis de définir un espace sensoriel olfactif propre aux vins rouges marqués par des notes de "fruits noirs" et de

"fruits confiturés". Si l’existence de molécules aromatiques clés responsables de la typicité des vins rouges n’est pas à exclure, de nombreuses études ont démontré qu’une composante de cet arôme est souvent le reflet d’interactions perceptives entre plusieurs familles de composés aromatiques issus du raisin, des fermentations et de réactions chimiques lors du vieillissement (Ferreira et al., 2002 ; Segurel et al., 2004 ; Escudero et al., 2007 ; Pineau et al., 2009).

I.B.1. Les composés d’origine variétale

De nombreux composés aromatiques sont présents dans la baie de raisin sous forme de précurseurs non volatils inodores. Ces arômes sont libérés dans le vin par activité enzymatique ou hydrolyse acide au cours de la vinification. Parmi ces nombreux composés, trois familles de molécules impliquées dans l’arôme fruité des vins peuvent être particulièrement distinguées : les norisoprénoïdes à 13 atomes de carbone, les lactones et les thiols (Tableau 1).

I.B.1.a. Les norisoprénoïdes à 13 atomes de carbone

La β-damascénone, isolée à partir d’huile de rose bulgare par Demole et al. (1970), a été identifiée quelques années plus tard dans le vin par Schreier et Drawert (1974). Elle présente une odeur à la fois florale, fruitée et épicée avec des notes particulières de pomme cuite, de miel et de tabac (Pineau et al., 2007). Son seuil de perception dépend très fortement de la matrice, allant de plusieurs nanogrammes par litre en solution hydroalcoolique à quelques microgrammes par litre dans le vin (Guth, 1997 ; Pineau et al., 2007) (Tableau 1).

16 Tableau 1. Principaux composés d’origine variétale à caractère fruité identifiés dans les vins rouges.

Composé Formule chimique Seuil de perception

(µg/L) Descripteurs

Norisoprénoïdes à 13 atomes de carbone

β-damascénone 0,05 [1] ; 7 [2]

γ-undécalactone nd pêche, melon

γ-dodécalactone nd cireux, fruité, lourd

Thiols

3-sulfanylhexanol 0,012 - 0,015 [7] pamplemousse, fruits

de la passion acétate de

3-sulfanylhexanol 0,002 - 0,003 [7] buis, fruits de la

passion

3-sulfanyl-2-méthylpropanol 3 [8] sueur, grillé

[1] solution hydroalcoolique (10 % v/v éthanol) (Guth, 1997) ; [2] vin rouge (Pineau et al., 2007) ; [3] eau (Buttery et al., 1997) ; [4] vin (Etievant, 1991) ; [5] vin synthétique (11 % v/v éthanol, 7 g/L glycérine, 5 g/L acide tartrique, pH 3,4) (Ferreira et al., 2000) ; [6] vin synthétique (18 % v/v éthanol, 100 g/L sucre, pH 5) (Cutzach et al., 1998), [7] eau (Tominaga et al., 1998), [8] eau (Bouchilloux et al., 1998)

C

17 Sa faible teneur dans les vins la rend difficilement perceptible de façon directe, mais il est fort probable qu’elle joue un rôle dans l’expression du caractère fruité des vins via des interactions perceptives (Pineau et al., 2007).

L’α- et la β-ionone ont des odeurs plus florales que la β-damascénone avec des nuances de framboise fraîche et de violette respectivement. Leur seuil de perception dépend également de la matrice et oscille entre plusieurs dizaines voire centaines de nanogrammes par litre (Etievant et Bayonove, 1983 ; Buttery et al., 1997 ; Ferreira et al., 2000) (Tableau 1).

Il semble cependant que les ionones et en particulier la β-ionone aient des seuils de perceptions dans les vins rouges proches des concentrations habituellement retrouvées (Kotseridis, 1999), ce qui suggère une possible contribution aromatique. Cependant, de récents travaux ont mis en évidence qu’une partie importante de la population (environ 50 %) est peu sensible à la β-ionone (Plotto et al., 2006 ; Tempere et al., 2011).

Plusieurs études ont clairement démontré l’importance des métabolismes levurien (Segurel et al., 2009 ; Loscos et al., 2010) et bactérien (Boido et al., 2002 ; D’Incecco et al., 2004) dans la libération de ces norisoprénoïdes. Ils peuvent également être synthétisés au cours du vieillissement à la suite de l’hydrolyse de certains précurseurs et de réarrangements chimiques en milieu acide (Strauss et al., 1987 ; Schneider et al., 2001).

I.B.1.b. Les lactones

Les lactones sont des composés largement présents dans les aliments y compris dans les vins. La γ-butyrolactone est la plus représentée dans les vins (plusieurs dizaines de milligrammes par litre). Elle est caractérisée par une faible odeur crémeuse légèrement fruitée et ne participe probablement pas à l’arôme fruité. Les lactones les plus intéressantes du point de vue de l’arôme fruité sont les γ- et les δ-lactones avec 8 à 12 atomes de carbone. Elles possèdent une odeur de noix de coco et de pêche, de plus en plus marquée en fonction de la longueur de leur chaine carbonée (Tableau 1). Leur concentration dans les vins est inférieure à leur seuil de perception, mais cet écart peut être relativement faible pour certaines d’entre elles (Ferreira et al., 2004). La γ-nonalactone pourrait ainsi jouer un rôle important dans la note fruitée des vins rouges au cours du vieillissement (Ferreira et al., 2004). Néanmoins, de récentes études ont montré que ce composé pouvait également contribuer à l’arôme de vieillissement prématuré des vins rouges (Pons et al., 2008), apportant des notes de pruneau indésirables. La contribution des lactones à la note fruitée des vins n’a jamais été clairement

18 étudiée et établie. Néanmoins, l’omission de lactones dans des reconstitutions aromatiques a montré des différences significatives et laisse envisager un effet de ces composés sur la modulation de la note fruitée des vins rouges (Loscos et al., 2007).

La voie de formation des lactones a été beaucoup moins étudiée que celle des norisoprénoïdes. Les résultats de plusieurs études laissent envisager une origine variétale sous forme de précurseurs glycosylés ou hydroxylés, libérés par les levures ou les BL au cours des différentes fermentations (Ferreira et al., 2000 ; Wanikawa et al., 2000 ; Loscos et al., 2007 ; Segurel et al., 2009).

I.B.1.c. Les thiols

Ces puissants composés aromatiques ont d’abord été mis en évidence dans les vins blancs. La contribution de la 4-mercapto-4-méthylpentan-2-one (4MMP) à l’arôme de goyave de vins de Sauvignon Blanc sud-africains a d’abord été évoquée par Du Plessis et Augustyn (1981). Par la suite, la 4MMP ainsi que d’autres thiols variétaux ont été identifiés comme étant des composés clés de l’arôme typique du Sauvignon Blanc (Darriet et al., 1995 ; Tominaga et al., 1998). Certains d’entre eux comme le 3-sulfanylhexanol (3SH), l’acétate de 3-sulfanylhexanol ou le 3-sulfanyl-2-méthylpropanol ont également été trouvés dans d’autres cépages blancs tels que le Muscadet ou le Bacchus (Schneider et al., 2003) et des vins rouges de Cabernet Sauvignon, de Merlot (Bouchilloux et al., 1998 ; Lavigne et al., 1998) ou de Grenache (Ferreira et al., 2002) à des concentrations avoisinant leurs seuils de perceptions (Tominaga et al., 1998) (Tableau 1). Le 3SH semble être le plus impliqué dans l’arôme fruité des vins rouges. Ce composé est présent sous forme de deux énantiomères évoquant le zeste de pamplemousse et le fruit de la passion pour les formes R et S respectivement. Dans les vins rouges, il renforcerait le caractère "fruits rouges" (Ferreira et al., 2002 ; Rigou et al., 2014).

Ces composés, présents dans le moût sous forme de précurseurs inodores non volatils car S-conjugués à la cystéine et au glutathion, sont libérés pendant la FA sous l’effet du métabolisme levurien (Tominaga et al., 1998 ; Peyrot des Gachons et al., 2002). Un précurseur du 3SH, le S-3-(hexan-1-ol)-L-cystéine, identifié dans le moût par Bouchilloux et al. (1998), est ainsi séparé de sa partie aminée grâce à une β-lyase levurienne (Thibon et al., 2008). Une autre voie de synthèse à partir du (E)-2-hexèn-1-al a également été suggérée par Schneider et al. (2006). Enfin, la souche de levures impliquée tient une place essentielle dans la libération de ces composés. Leur capacité à hydrolyser les précurseurs de ces composés est

19 en effet très variable en fonction de l’espèce et même de la souche de levures utilisée pendant la fermentation (Dubourdieu et al., 2006).

I.B.2. Les alcools supérieurs

La famille des alcools supérieurs inclut tous les alcools ayant plus de 2 atomes de carbone avec un poids moléculaire et une température d’ébullition supérieurs à l’éthanol.

Dans le vin, ils représentent quantitativement le groupe le plus important des composés aromatiques issus de la FA.

Les alcools supérieurs sont divisés en deux groupes : aliphatique et aromatique (Tableau 2). Les principaux alcools aliphatiques sont le propan-1-ol, le butan-1-ol, l’isobutanol (ou 2-méthylpropan-1-ol), le 2-méthylbutan-1-ol et le 3-méthylbutan-1-ol. Ce dernier, aussi appelé alcool isoamylique, est le principal alcool supérieur synthétisé par les levures au cours de la FA et représente entre 40 et 70 % de la concentration totale en alcools supérieurs dans le vin (Ribéreau-Gayon et Bertrand, 1971). Le principal alcool aromatique est le 2-phényléthanol. Selon leur concentration, ces composés peuvent avoir un effet positif ou négatif sur l’arôme du vin. Plusieurs études ont ainsi démontré qu’en dessous de 300 mg/L, les alcools supérieurs ont un impact positif et contribuent à la complexité aromatique du vin.

Au-dessus de 400 mg/L, ils apportent des notes âcres, caustiques, qui diminuent la qualité du vin (Rapp et Mandery, 1986 ; Rapp et Versini, 1991). De récents travaux réalisés dans notre laboratoire mettent en évidence l’effet masquage de certains alcools vis-à-vis de la note fruitée dans une solution modèle principalement composée d’esters (communication personnelle).

Les alcools sont principalement formés par la levure à partir des acides aminés du raisin par la réaction d’Ehrlich qui consiste en la désamination des acides aminés, suivi d’une décarboxylation en aldéhydes qui peuvent être réduits en alcools. Une deuxième voie métabolique est possible : ces alcools peuvent être formés à partir des acides α-cétoniques issus du métabolisme des sucres qui rejoindront la voie d’Ehrlich. L’utilisation de marqueurs radioactifs a montré que 65 % des alcools supérieurs provenaient des acides aminés, les 35 % restant étant issus des sucres (Zoecklein et al., 1990). Plusieurs facteurs influencent la production d’alcools supérieurs au cours de la fermentation. La concentration en précurseurs dans le moût, notamment en acides aminés, joue évidemment un rôle essentiel (Schulthess et

20 Ettlinger, 1978). D’autres paramètres tels que la teneur en éthanol, le pH, la température de fermentation, le cépage, le degré de maturité influencent grandement la synthèse de ces composés (Fleet and Heard, 1993). Toutefois, la principale source de variation est la souche de levures. Mateo et al. (1991) ont mis en évidence l’impact significatif de différents genres de levures (Brettanomyces, Candida, Rhodotorula, Hanseniaspora, Kloeckera, Dekkera, Saccharmomyces spp) sur la production d’alcools supérieurs. Au sein même du genre Saccharomyces, la synthèse de ces composés varie de manière significative d’une espèce à l’autre (Rankine, 1967). Les travaux de Giudici et al. (1990) montrent finalement que la synthèse d’alcools supérieurs est un caractère intra spécifique de la souche de levures S.

cerevisiae et distinguent deux catégories, les souches productrices et peu productrices. Ils en concluent que la capacité à produire plus ou moins d’alcools supérieurs pourrait servir de critère dans la sélection des souches industrielles. En effet, ce caractère est aujourd’hui de plus en plus pris en compte.

Tableau 2. Principaux alcools supérieurs synthétisés par la levure au cours de la fermentation alcoolique (d’après Lambrechts et Pretorius, 2000).

Composé Formule éthanol) (Villanova et Martinez, 2007) ; [5] vin synthétique (11 % v/v éthanol, 7 g/L glycérine, 5 g/L acide tartrique, pH 3,4) (Ferreira et al., 2000).

21 I.B.3. Les acides volatils

Le vin contient de nombreux acides saturés et insaturés issus du métabolisme levurien.

Le vin contient de nombreux acides saturés et insaturés issus du métabolisme levurien.

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