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Chapitre III : La stérilisation

III. β.β Stérilisation par l’oxyde d’éthylène

L’oxyde d’éthylène est un éther cyclique dont la structure chimique est représentée dans

la Figure 20. Il est gazeux à pression atmosphérique et à température ambiante.

Figure 20 : Structure chimique de l’oxyde d’éthylène

L’oxyde d’éthylène a des propriétés bactéricides, virucides, sporicides et fongicides, mais il

est inefficace vis-à-vis des Agents Transmissibles Non Conventionnels (ATNC : des agents infectieux de nature protéique, qui ne sont ni des virus ni de bactéries (concept du prion) et

sont à l’origine de plusieurs maladies humaines neurologiques). Son action stérilisante est due

à son pouvoir alkylant vis-à-vis des groupes amines des acides nucléiques des

microorganismes par l’ouverture de son cycle, ce qui lui permet aussi de participer à des réactions d’hydroxy-éthylation qui favorise son action.

L’efficacité de l’oxyde d’éthylène est fonction de 4 paramètres :

O

H

2

C

84 - la concentration en oxyde d’éthylène (en moyenne 400 à 1000 mg/L) qui est utilisé à l’état

pur dans des appareils fonctionnant en dépression ou en mélange avec un gaz inerte tel que

l’azote pour les appareils fonctionnant en surpression (1 à 6 bars),

- la durée de l’exposition (en moyenne γ à 6 heures),

- la température (50 à 60°C),

- l’humidité relative μ l’eau est indispensable à l’action stérilisante de l’oxyde d’éthylène

(30 à 60 % d’humidité relative).

Cette méthode de stérilisation est peu coûteuse et permet de stériliser les produits thermosensibles car elle se déroule à une température relativement faible par rapport aux techniques présentées précédemment. Mais elle présente néanmoins de nombreux inconvénients :

- L’oxyde d’éthylène est inflammable à l’air à partir d’une concentration supérieure à

3 %, c’est la raison pour laquelle il est utilisé sous pression réduite, pur ou mélangé avec un gaz inerte tel que l’azote.

- Il possède des propriétés cancérigènes et mutagènes, et peut entraîner des irritations des muqueuses oculaires et respiratoires, des nausées, des vomissements et des troubles nerveux.

- L’oxyde d’éthylène est rapidement absorbé par la plupart des matériaux plastiques, il

peut ainsi réagir avec les molécules de polymères et forme des composés toxiques, ce qui est dangereux pour les manipulateurs et pour le patient.

Pour toutes ces raisons, une désorption des produits stérilisés est nécessaire après chaque

cycle afin d’éliminer tout résidu toxique.

źn effet, l’oxyde d’éthylène piégé dans le matériau après une mauvaise désorption peut

entraîner chez le patient des problèmes sanguins graves tels que des syndromes

hémorragiques ou encore des fibrinolyses. Ө’est pourquoi les autorités réglementaires limitent

de plus en plus l’utilisation de cette méthode aux matériaux qui ne peuvent pas supporter

les autres techniques de stérilisation.

III.2.3 Stérilisation par gaz plasma

Le plasma est un gaz dont les atomes et les molécules sont excités et/ou ionisés. Il est obtenu

par l’intermédiaire d’un gaz qui reçoit de l’énergie par l’action d’une décharge ; cette dernière

85 couronne ou des décharges à barrière diélectrique. Différents types de gaz peuvent être utilisés μ des gaz inertes tels que l’argon ou l’hélium, des gaz comme par exemple l’oxygène ou l’azote, l’air, l’hydrogène, la vapeur d’eau, ou des agents stérilisants tels que le peroxyde d’hydrogène ou l’acide peracétique.

On peut distinguer deux types de plasma : le plasma direct (le traitement se produit dans le plasma) et le plasma différé (le traitement s’effectue dans la zone de post décharge). Pour

le plasma en mode direct, les espèces réactives sont les ions, les photons et des espèces

neutres, tandis qu’en mode différé seuls les photons et les espèces neutres ont une action.

La stérilisation par plasma est un procédé non toxique comparé à l’oxyde d’éthylène. Ө’est un

procédé particulièrement intéressant pour les matériaux thermosensibles. Il est préconisé pour

les promédicaments. Mais cette technique possède l’inconvénient de modifier la surface des

matériaux entraînant ainsi une variation possible des propriétés de biocompatibilité du matériau.

III.2.4 Stérilisation par les rayonnements ionisants (RI)

La stérilisation par rayonnements ionisants peut être une méthode de choix alternative dans le cas où les autres méthodes ne peuvent être utilisées. Cette méthode est actuellement largement utilisée dans différents secteurs de l’industrie (pharmaceutique, médical, alimentaire…) [129, 130], car elle possède un pouvoir pénétrant qui permet la stérilisation de

produits préalablement conditionnés dans un emballage étanche.

L’effet des radiations ionisantes sur les micro-organismes est essentiellement dû à des modifications chimiques de l’AөN et l’ARN qui entraînent une inhibition de la croissance

pour de faibles doses, puis la mort des cellules pour la dose stérilisante. A ces effets directs

des radiations ionisantes, viennent s’ajouter les effets indirects liés à la radiolyse de l’eau qui

est le constituant majoritaire des micro-organismes.

Les rayonnements ionisants produisent des ionisations dans la matière qu’ils traversent. L’ionisation est la conséquence d’un transfert d’énergie du rayonnement aux atomes irradiés conduisant, quand elle est suffisamment forte, à l’éjection d’un électron de son orbitale et donc à l’ionisation de la cible traitée (ion positif) :

AB → AB+

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Өomme l’énergie délivrée est supérieure à celle de la liaison de l’électron avec l’atome, l’excédent d’énergie est transmis par l’électron éjecté (secondaire) sous forme d’énergie

cinétique. Aussi, l’électron en question est accéléré et va, à son tour, produire d’autres

ionisations pour être finalement capté par un autre atome, ce qui aboutit ainsi à la formation

d’un ion négatif :

AB + e- → AB-

(6)

Өependant, lorsque l’énergie absorbée est insuffisante et ne permet pas d’éjecter un électron,

une modification de type excitation est obtenue :

AB → AB * (7)

L’ionisation et l’excitation sont des réactions dites primaires. źlles dépendent de l’énergie du rayonnement et sont en équilibre avec d’autres réactions secondaires plus complexes. Ces derniers sont responsables de l’ensemble des modifications physico-chimiques de la matière

soumise aux rayonnements ionisants. Ces réactions secondaires ont lieu en raison de

l’instabilité des espèces formées et elles conduisent à des réarrangements par recombinaison,

dissociation et formation de radicaux libres.

En radio-stérilisation, deux catégories de rayonnements ionisants sont utilisées :

 Les rayonnements d’origine électromagnétique telle que l’irradiation gamma ( ).  Les rayonnements d’origine corpusculaire tels que les faisceaux d’électrons accélérés

(źA) encore appelés irradiation béta ( ).

La dose de rayonnement absorbée à laquelle les produits doivent être soumis doit permettre la destruction totale des micro-organismes. Avant de revenir sur ces deux types de rayonnements ionisants nous allons définir quelques grandeurs caractéristiques :

 Energie d’un rayonnement :

Exprimée en électronvolts (eV), elle détermine, en partie, le pouvoir de pénétration du traitement.

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 Dose absorbée :

La dose absorbée par un échantillon est la quantité d’énergie absorbée par la cible par unité de masse. Son unité est le Gray (Gy), qui représente l’absorption d’une énergie d’un Joule par

kilogramme de matière. (1 Gy = 1 J/kg = 6,24.1018 eV/kg).

Il faut noter que la dose de stérilisation recommandée par les autorités réglementaires européennes est de 25 kGy [2].

 Débit de dose :

Le débit de dose correspond à la dose absorbée par unité de temps, (la vitesse à laquelle

l’énergie est absorbée par la cible) et se mesure en Gy/s (seconde).

III.2.4.1 Les rayonnements électromagnétiques – Irradiation gamma ( )

La découverte des rayons gamma est due à Paul Villard, chimiste français (1860-1934). Le premier stérilisateur utilisant les rayons gamma a été développé par Ethicon (Johnson and Johnson) et a été commercialisé en 1956 [131].

Les rayons gamma sont des ondes électromagnétiques de courtes longueurs d’onde comprises

entre 10-10 et 10-14m. Ils sont de grande énergie et sont obtenus à partir d’éléments radioactifs

(les plus couramment utilisés sont le Cobalt 60 et le Césium 137). La désintégration de ces

noyaux atomiques libère des photons d’énergie de l’ordre du MeV. Les rayonnements gamma

ont un pouvoir de pénétration très important. Ils interagissent avec la matière via trois mécanismes principaux μ l’effet photoélectrique, la diffusion Өompton et la production de

paires électron-positron. En plus de ces trois mécanismes, un rayonnement dit de freinage (Bremsstrahlung) peut intervenir : il correspond à une émission de rayons X.

III.2.4.2 Les rayonnements corpusculaires – électrons accélérés

Ils correspondent à des faisceaux d’électrons générés par une cathode portée à une forte

intensité et accélérés par une tension électrique et des accélérateurs à ondes hyper fréquentielles. Ceux-ci permettent d’atteindre des énergies considérables mais limitées, dans

88 A chaque collision avec les électrons des atomes de la matière cible, les électrons incidents de grande énergie (électrons primaires) perdent une partie de leur énergie cinétique, entraînant la libération des électrons dits secondaires et par conséquent produisent une ionisation. Ces électrons secondaires peuvent avoir suffisamment d’énergie pour générer d’autres réactions d’ionisation en cédant à chaque collision une partie de leur énergie. Comme dans le cas des

rayonnements gamma, un second mécanisme se traduit par l’émission de rayonnement de

freinage lors du passage des électrons au voisinage des atomes.

Le pouvoir pénétrant des électrons accélérés est plus faible que celui des rayonnements gamma ν il dépend de l’énergie du flux des électrons et de la nature (densité) du produit traité.

En conclusion, les rayonnements gamma permettent la stérilisation de produits de densité élevée mais ils nécessitent des temps d’exposition relativement longs (faible débit dose :

quelques kGy/heure). En revanche, la stérilisation par électrons accélérés, du fait de son faible pouvoir pénétrant, ne permet de stériliser que des produits de faible densité mais son débit de dose élevée (de l’ordre de quelques kGy/s) permet de réaliser une stérilisation en des temps

plus courts [132].

Outre leur action stérilisante, les rayonnements ionisants peuvent conduire à des modifications physico-chimiques des matériaux constitutifs des dispositifs médicaux et du conditionnement. Ces modifications sont la conséquence de différentes réactions complexes qui dépendent de plusieurs paramètres que nous allons maintenant détailler.