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Évaluation de la reperfusion du foie après ischémie partielle

6.3 Évaluation de la reperfusion du foie après isché-

mie partielle

Nous venons de voir que les nanoparticules permettent de visualiser facilement la vascularisation d’une souris. Les expériences présentées ici ont eu pour but de visua- liser et d’analyser des différences de perfusion au niveau hépatique dans un modéle d’ischémie/reperfusion. Ce travail a débuté avec Charles-Henry Cottart, Isabelle Mar- gaill, Valérie Nivet-Antoine etMichel Vamy du Laboratoire de Physiologie Humaine et Expérimentale de la faculté de pharmacie (Université Paris Descartes).

Les dommages liés à une ischémie/reperfusion (I/R) du foie interviennent dans dans nombreux cas cliniques comme des chirurgies du foie, les transplantations ou des chocs hémorragiques. L’ischémie/reperfusion provoque des dommages importants au niveau de l’organe. Comme il est supposé que la reperfusion joue un rôle prépondérant dans les dommages lié à l’I/R, nous avons essayé de suivre cette reperfusion avec les nanoparticules à luminescence persistante.

En effet, comme nous l’avons vu lors des expériences réalisées sur la biodistribution des particules selon leur charges, les particules sont très rapidement éliminées de la circulation par capture hépatique. L’hypothèse de ce travail était que la distribution de particules in vivo refléterait le niveau de perfusion de l’organe.

L’ischémie hépatique partielle est réalisée en clampant (c’est à dire en bloquant physiquement) les vaisseaux sanguins (veine porte et de l’artère hépatique) irriguant les lobes caudal et latéral droit (environ 70 % du parenchyme hépatique). Les parties du foie ischémiés sont alors le lobe médian et le lobe latéral gauche. Après 45 min, La bride est alors enlevée en permettant la reperfusion des tissus. La reperfusion est relativement rapide puisque l’ensemble du foie est à nouveau perfusé environ 15 min après libération du clampe. Les dommages liés à l’ischémie/reperfusion sont toutefois plus durables et durent environ 2 jours.

Les animaux sont sacrifiés à la fin de la période de reperfusion. Le dommage au foie est évalué en mesurant l’activité des enzymes cytolytiques dans le plasma (trans- aminase d’aspartate – ASAT – et transaminase d’alanine –ALAT) par des techniques automatisées. Ces enzymes ont été dosées dans le cas d’injection de particules pour savoir si celles-ci n’engendraient pas de dommages supplémentaires.

6.3.1 Expériences de visualisation de la reperfusion avec les

nanoparticules

Afin de tester la faisabilité de cette étude, nous avons réalisé des expériences préli- minaires. L’analyse des résultats a été effectuée ex vivo, les résultats in vivo étant plus difficiles à exploiter.

Lors d’une injection de particules à luminescence persistante non fonctionnalisées sur un foie ischémié, il apparaît clairement une luminescence différentielle entre lobes ischémiés et non ischémiés (voir Figure 6.15). Comme attendu, la luminescence se situe en effet uniquement dans les lobes codal et lateral droit (marqués sur la figure 6.15 par NI). Lorsque l’injection se fait 5 min après la fin de l’ischémie, on note également une différence de luminescence entre lobes codaux et lobes médians, montrant ainsi

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que la reperfusion n’est pas encore totale. Si l’injection est faite sans qu’il y ait eu ischémie, la luminescence issue du foie est quasiment homogène avec toutefois une intensité surfacique légèrement supérieure pour les lobes médians.

0,04 0,58 1,31 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 1,2 1,4

Foie ischémié Foie ischémié 5 min après reperfusion Foie non ischémié NI I NI I (A) (B)

Fig. 6.15: Images de foie après dissection (A) rapport des intensités entre lobes codaux et lobes médians (B) images de foies (NI : lobes non ischémiés, I : lobes ischémiés Un des avantages de la technique de luminescence persistante est la possibilité de doser directement la quantité de nanoparticules sur organe entier (ou de façon plus précise sur un échantillon). Il n’est en effet pas nécessaire d’extraire le fluorophore pour faire la mesure comme il est classiquement fait en imagerie de fluorescence.

Nous avons donc effectué ces dosages sur une cohorte plus importante d’animaux. Ces résultats de dosages concordent avec les données macroscopiques. Toutefois, les rap- ports de luminescence entre lobes codaux et lobes médians sont nettement différents pour 3 souris du lot (marqué par un cercle rouge sur la figure 6.16. Les deux dernières souris correspondent à des souris dont l’injection ne s’est pas bien passée (l’injection est restée au niveau de la queue) tandis que les données issues de la troisième souris isché- miée correspondent à une absence totale de reperfusion après enlèvement du clampe. En connaissant le degré de reperfusion, cela nous a permis d’analyser plus facilement les données de toxicologie en enlevant les points aberrants (voir Figure 6.16).

6.3.2 Évaluation de la toxicité hépatique des nanoparticules

Le but final de ces expériences est de pouvoir visualiser et quantifier l’effet de molé- cules chimiques capables de modifier la reperfusion du foie après ischémie (vasodilata- teur, donneur de NO.). Cette étude est en cours. Avant d’étudier l’effet de ces molécules,

il fallait s’assurer que la présence de particules n’allait pas modifier le fonctionnement du foie dans l’intervalle des expériences (entre 6 h et 24h).

6.3 : Évaluation de la reperfusion du foie après ischémie partielle 143 0 5000 10000 15000 20000 25000 30000 35000 40000 45000 50000 Non ischémie Non ischémie Non ischémie Non ischémie

Ischémie Ischémie Ischémie Ischémie Ischémie Ischémie

In te n s it é ( u .a .) Lobes post- ischémiques Lobes non ischémiés 0 0,05 0,1 0,15 0,2 0,25 0,3 0,35 0,4 0,45 0,5

Souris ischémiées Souris non ischémiées

(A) (B)

Fig. 6.16: (A) Luminescence détectés dans les lobes post ischémiques et non ischémiés (B) rapport entre l’intensité des lobes post-ischémiques sur l’intensité totale du foie.

C’est pourquoi, nous avons dosé la libération des enzymes ALAT et ASAT après injection intraveineuse de particules. Ces enzymes sont en effet libérées lorsqu’un dom- mage tissulaire important intervient.

ASAT et ALAT

Les transaminases sont des enzymes qui interviennent dans la synthèse et la dé- gradation des acides aminés. Elles se trouvent soit au niveau du cytoplasme ou des mitochodries. Les deux transaminases les plus étudiées en biologie sont les suivantes :

– alanine aminotransférase (ALT ou ALAT), également appelée transaminase glutamique- pyruvique (TGP ou GPT, ou encore SGPT) ; cette enzyme se trouve en quantité plus importantes dans le foie. Elle catalyse le transfert du groupement NH2 de

l’alanine sur l’acide glutamique.Le sérum normal en contient peu.

– aspartate aminotransférase (AST ou ASAT), également appelée transaminase glu- tamique oxalo-acétique (TGO ou GOT ou encre SGOT). L’ASAT se trouve en quantité comparable dans différents tissus, comme le coeur, le foie et les muscles. Elle catalyse le transfert du groupement NH2 de l’acide aspartique sur l’acide a

-cétoglutarique.

Résultats des dosages dans les expériences de reperfusion

Nous n’avons pour l’instant que deux types de résultats concernant la reperfusion. Les premiers concernent l’effet des nanoparticules sans ischémie. Lors des expériences d’ischémie/reperfusion, le foie est déplacé manuellement afin de pouvoir positionner le clamp. Cette manipulation causant des dommages, le foie est soulevé de façon équiva- lente mais sans effectuer de clampage.

Les résultats de cette étude sont présentés à la figure 6.17. Les échantillons de sang servant au dosage des enzymes ont été prelevés 6 h après injection (temps auquel une hausse significative des ces enzymes est observée après une expérience d’ischémie/re-

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perfusion). Pour les souris non ischémiées, on note une légère augmentation du taux d’ASAT et taux équivalent d’ALAT. Même s’il n’y a pas assez de souris pour réaliser des tests statistiques et que l’acte chirurgical pratiqué engendre une très forte variabi- lité interindividuelle, les nanoparticules semblent avoir un léger effet délétère au niveau hépatique. Toutefois, l’effet est faible comme on peut le voir en comparant ces données avec celles obtenues lors d’une ischémie/reperfusion. L’expérience consistant à doser ces enzymes lors d’une simple injection de particules (c’est à dire sans acte chirur- gicale) permettrait de mieux appréhender la libération d’enzyme lié uniquement aux nanoparticules.

Les taux observés après l’expérience d’ischémie/reperfusion sont environ 50 fois su- périeures à ceux de l’expérience précédente. La variabilité étant encore plus élevée, il est difficile de conclure surtout avec le petit nombre de souris de l’expérience (seule- ment trois au final pour les souris ischémiées). Il est toutefois possible de supposer que l’injection de particules n’engendrera pas de forte augmentation du taux d’enzymes libérées. 0 50 100 150 200 250 300 350 400 450 Serum physiologique NPs Serum physiologique NPs ASAT ALAT 0 2000 4000 6000 8000 10000 12000 14000 16000 Serum physiologique NPs Serum physiologique NPs ASAT ALAT Intensité (u.a.) Intensité (u.a.) (A) (B)

Fig. 6.17: Résultats des dosages des enzymes ASAT et ALAT (A) sur des souris non ischémiés (B) 6h après ischémie/reperfusion.

En conclusion, les nanoparticules à luminescence persistante permettent d’avoir des informations de façon rapide et simple sur le degrée de reperfusion à un instant donné. Cette méthode bien qu’invasive (les souris sont sacrifiées) devrait permettre de mieux comprendre les mécanismes de reperfusion. Elle devra tout de même être comparé à des méthodes plus classiques comme l’échographie.

L’injection de nanoparticules ne semblent pas avoir un impact important sur les deux enzymes principalement dosées dans ces expériences d’ischémie/reperfusion. Il semble donc réaliste d’étudier l’effet de molécules modifiant la cinétique de reperfu- sion à l’aide des nanoparticules, et ce sans modifier de façon importante le suivi des