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5.3 Test du principe d’équivalence faible lors de vols paraboliques

5.3.2 Évaluation des effets systématiques et estimation de η en micropesanteur110

micrope-santeur

De même que nous l’avons fait pour le gravimètre double espèce au laboratoire, nous devons procéder à l’évaluation des effets systématiques afin de déterminer une valeur du paramètre d’Eötvös. Nous réalisons cette étude pour un temps d’interrogation T = 2.01 ms pour le rubidium et T = 2 ms pour le potassium. Nous nous concentrons sur l’étude des effets systé-matiques en microgravité.

Lors de la campagne de vol de 2015, ni la mélasse grise, ni la préparation d’état du potassium n’avaient été mises en place. De ce fait, à la fin de la mélasse, nous nous contentions d’appliquer un faisceau pousseur pour se débarrasser des atomes dans l’état |F = 2i. Dans ce cas, les atomes sont distribués dans l’ensemble des sous-niveaux mF. Par conséquent, comme nous travaillons dans l’état non magnétique mF = 0, nous sommes obligés d’appliquer un fort champ magnétique de 1.5 G. De plus, l’asservissement du champ magnétique n’était pas en place lors de cette campagne, donc, nous pouvons déjà en déduire que l’effet Zeeman quadratique sera un effet systématique important.

Nous représentons figure 5.13 l’évolution du champ magnétique vu par les atomes. Ce champ peut être décomposé par une variation temporelle (en rouge sur la figure) et une variation spatiale (gradient de champ magnétique). Nous utilisons la méthode décrite précé-demment pour estimer le déphasage induit par l’effet Zeeman quadratique. De plus, au premier ordre, en microgravité les atomes ne bougent pas, nous ne tenons compte que de l’évolution temporelle des atomes. La dépendance spatiale liée au signe du vecteur d’onde effectif est prise en compte dans l’évaluation de l’effet du gradient de champ. Nous obtenons alors un déphasage de 2.28 rad pour le rubidium et un déphasage de 32.61 rad pour le potassium.

En revanche, au second ordre, il faut tenir compte de la modification de la trajectoire des atomes induite par le transfert d’impulsion Raman. Nous devons également tenir compte de l’influence du gradient de champ magnétique sur ces données. Pour cela, nous ajustons le champ magnétique en utilisant le modèle (lissage noir sur la figure 5.13 :

B(z, t) = β0(t) + β1z (5.33)

où β0(t) correspond à l’évolution temporelle du champ magnétique et β1 correspond au gra-dient magnétique. Afin de déterminer le déphasage crée par ce gragra-dient, utilisons la différence entre les deux expressions trouvées pour le profil du champ (avec et sans dépendance spatiale) :

ΦB(z) = 2πK Z +∞

−∞

5.3. Test du principe d’équivalence faible lors de vols paraboliques

Nous devons tenir compte de l’impulsion transmise aux atomes en fonction du signe de ~keff. En effet, ceci change la position des atomes via la relation z±(t) = z0± (v0+ vR/2)t + δat2/2, où vR est la vitesse de recul de l’atome, z0 est la position initiale du nuage et v0sa vitesse initiale. Dans le cas de la microgravité, nous considérons comme accélération le niveau d’impesanteur donné par Novespace, δa = ±0.05 g. Dans le cas de ce calcul, nous considérons la borne positive de cette valeur, tout en sachant qu’elle fluctue au court du temps. Nous obtenons alors, pour le rubidium, un déphasage de 19.6 mrad pour +keffet un déphasage de - 18.55 mrad pour −keff. Pour le potassium, nous obtenons un déphasage de 814.5 mrad pour +keff et un déphasage de -796.6 mrad pour −keff.

0 5 10 15 1.0 1.1 1.2 1.3 1.4 1.5 Temps de vol (ms) Champ magnétique (G )

Figure 5.13 – Cartographie du champ magnétique vu par les atomes dans l’avion le long de l’axe de quantification en fonction du temps de vol dans les conditions de la campagne de vol du printemps 2015. Les repères gris représentent les impulsions de l’interféromètre pour un temps d’interrogation de 2 ms. L’ajustement rouge est réalisé sans prise en compte de la dépendance spatiale du champ. L’ajustement noir en tient compte. Ces données n’ont pas été prises dans l’avion mais au laboratoire.

Nous calculons ensuite le déphasage induit par les raies parasites en procédant avec la même méthode que celle décrite section 5.2.2. Pour un temps d’interrogation de 2 ms, nous obtenons un déphasage de 1.2 mrad pour +keff et un déphasage de -1.03 mrad pour −keff.

De même, nous calculons les déphasages induits par les déplacement lumineux à un et deux photons en utilisant le travail réalisé dans la section 5.2.2. Ces deux effets sont négligeables comparé à l’effet du champ magnétique. Les résultats obtenus sont résumés dans le tableau 5.6.

De plus, la rotation de l’avion lors des paraboles entraine un effet Coriolis beaucoup plus important qu’au laboratoire. Dans la suite du paragraphe, on note x l’axe de roulis de l’avion et y l’axe de tangage. Lors d’une parabole, les rotations subies par l’expérience ont une valeur moyenne de −0.19 /s selon l’axe x et de 4.1 /s selon l’axe y. De plus, ces valeurs ont une dynamique de ±0.45/s selon l’axe x et de ±0.5/s selon l’axe y. Il est également important de prendre en compte l’inclinaison de l’avion puisque cela se traduit par une projection de ~g sur les axes x et y de l’avion. Les inclinaisons moyennes sont de (θx= −1.9 ± 1.2)et (θy = −6 ± 25) (valeur moyenne ± dynamique). Nous tenons également compte des variations d’accélération de l’avion δa. Nous considérons que nous pouvons faire l’approximation des petits angles. Le déphasage induit par l’effet Coriolis devient :

Chapitre 5. Utilisation de l’interférométrie atomique pour tester le principe d’équivalence faible

Si l’on considère le vecteur d’onde effectif +keff, alors, le déphasage induit par l’effet Coriolis est de 10.7 mrad pour le rubidium et de 10.2 mrad pour le potassium.

Pour finir, nous pouvons mentionner l’influence du biais de l’accéléromètre mécanique. Les mesures réalisées ici n’ont pas étés prises sur une échelle de temps suffisamment grande pour observer une dérive de biais mais, nous voyons tout de même l’influence de l’offset. Nous estimons celui-ci de l’ordre de 10−2m.s−2 ce qui équivaut à un biais de 655 mrad sur la phase. Ce décalage étant commun aux deux interféromètres, il est très bien rejeté dans le calcul de η.

Φsys,Rb (mrad) Φsys,K (mrad)

Effets systématiques +keff −keff +keff −keff

Zeeman quadratique 2277 (50) 2277 (50) 32613 (730) 32613 (730) Gradient magnétique 19.6 (20) -18.55 (20) 814.5 (310) -796.6 (310) Lignes parasites 1.2 (0.07) -1.03 (0.07) - -DL (1 photon) 0.6 (0.1) 0.6 (0.1) -18 (3) -18 (3) DL (2 photons) -0.02 (2) -0.02 (2) 0.05 (5) -0.05 (5) Effet Coriolis 10.7 (5) -10.7 (5) 40.2 (10) -40.2 (10) Total Φsys 2308.88 (54) 2247.3 (54) 33449.75 (795) 31758.15 (795) 1 2(P i Φsys,i,+k−P i Φsys,i,−k) 31 (21) 845.8 (310)

Table 5.6 – Évaluation de la contribution des effets systématiques identifiés sur l’expérience sur le déphasage des franges en sortie de l’interféromètre du 87Rb et du 39K dans l’avion ZERO-G durant la dernière campagne de vol (mai 2015) pour un temps d’interrogation de 2 ms. DL : Déplacement Lumineux.

Les effets systématiques que nous venons d’évoquer sont résumés dans le tableau 5.6. Ils ont été évalués à partir de mesures réalisées en laboratoire, en changeant le signe du vecteur d’onde effectif. Comme nous l’avons expliqué au chapitre 1, en microgravité, l’interféromètre atomique fonctionne en régime DSD. Nous réalisons simultanément un interféromètre avec le vecteur d’onde +keff et un second avec −keff. Dans le chapitre 1, nous avions négligé l’impact des effets systématiques sur le déphasage de l’interféromètre. Nous repartons donc des équations 1.31 et 1.46 en tenant compte des effets systématiques. Ainsi, nous pouvons écrire les phases des deux interféromètres :

(

Φ+= keff(gj− gm)T2+ Φvib+ ϕlaser+ Φsys,+keff

Φ= −keff(gj− gm)T2− Φvib+ ϕlaser+ Φsys,−keff (5.36) Or, comme dans le cas du gravimètre, nous distinguons les effets systématiques qui dépendent du signe du vecteur d’onde effectif et ceux qui en sont indépendant. Ainsi, en réalisant la demie somme ou la demie différence des déphasages calculés pour ±keff, nous pouvons isoler le déphasage dépendant du signe de keffet le déphasage indépendant. Si l’on réécrit la probabilité de présence en sortie de l’interféromètre en microgravité, on obtient :

P = 2P0C

2(cos(Φ+) + cos(Φ))

= 2P0− C cos(ϕlaser+ Φsys, ind) cos(Φa+ Φvib+ Φsys, dép)

(5.37)

Ainsi, cette configuration particulière d’interféromètre présente l’avantage de rejeter les effets systématiques indépendant du signe de keffpuisque ce déphasage affecte seulement le contraste

5.4. Conclusion

de l’interféromètre.

Nous utilisons l’évaluation des effets systématiques que nous venons de réaliser pour corriger les mesures réalisées dans l’avion et obtenir une estimation du paramètre d’Eötvös. Pour un temps d’interrogation de 2 ms, l’ajustement par une sinusoïde des données présentées figure 5.12 nous permet d’évaluer un déphasage des franges tel que Φa,Rb = −625 mrad et tel que Φa,K = −265 mrad. Le déphasage différentiel entre les deux espèces atomiques (Φd= ΦK− κΦRb) est utilisé pour obtenir une estimation de η. Nous effectuons un bilan des déphasages obtenus, de leur correction des effets systématiques et de l’estimation du déphasage différentiel dans le tableau 5.7.

Nous calculons le paramètre d’Eötvös en utilisant l’expression η0g = Φd

keff, KaeffT2 K

. aeff, qui est de l’ordre de 8.56 m.s−2, correspond à la projection du vecteur de l’accélération gravi-tationnelle moyenne sur l’axe z. Pour conclure, nous obtenons une première estimation de η avec des atomes froids en micropesanteur, soit, η0g = (1.33 ± 7.1) × 10−4. Une étude plus détaillée peut être trouvée dans [129].

39K 87Rb Φa (mrad) 265 (180) -625 (180) Φsys,dep (mrad) 845.8 (310) 31 (21) Φcor= Φa− Φsys,dep -580.8 (358) -656 (181) Φd= ΦKcor− κΦRb cor 75.8 (401)

Table 5.7 – Bilan du déphasage différentiel en fonction des déphasages issus de la méthode FRAC et des déphasages résultant de l’analyse des effets systématiques. Le facteur d’échelle vaut κ = 1.0011.

5.4 Conclusion

Nous avons réalisé le premier interféromètre double espèce 87Rb/39K en micropesanteur à bord de l’airbus A300 ZERO-G de Novespace. A bord de l’avion, nous avons pu constater que le temps d’interrogation était limité puisque les vibrations et les rotations entrainent d’im-portantes chutes de contraste. Ainsi, lors de cette campagne de vol, le temps d’interrogation était limité à quelques ms. Ces données ont abouti au premier test du principe d’équivalence avec des atomes en micropesanteur [129]. Même si le résultat reste bien en dessous de l’état de l’art du test du WEP, cela reste encourageant pour des résultats futurs puisque cela nous a permis de mettre en avant les limites du système actuel qui pourra être amélioré par la suite. Nous avons également réalisé un test du principe d’équivalence faible au sol. Lorsque nous travaillons au laboratoire, le temps d’interrogation est limité à une vingtaine de millisecondes à cause de la configuration de l’expérience (voir chapitre 2). De plus, nous avons vu que l’accéléromètre mécanique utilisé pour reconstruire les franges en utilisant la méthode FRAC possédait un biais dépendant du temps. Nous déduisons l’évolution de ce biais à partir de la moyenne de l’accélération enregistrée par le senseur durant l’interféromètre. Nous utilisons un ajustement pour pouvoir l’estimer. Cette correction est imparfaite puisque nous ôtons la dérive du biais, mais pas le biais lui-même. Ceci a pour conséquence de générer des instabilités résiduelles qui entrainent une instabilité des deux gravimètres. En revanche, celle ci étant étant commune aux deux interféromètre, elle est rejeté lors du calcul de η. Ainsi, nous sommes en mesure d’intégrer la valeur de η jusqu’à τ = 11500 s ce qui nous permet d’obtenir une stabilité de 5.2×10−8.

Chapitre 5. Utilisation de l’interférométrie atomique pour tester le principe d’équivalence faible

Nous avons également réalisé une étude des effets systématiques de notre expérience. Nous sommes en présence de gros effets systématiques (raies parasites, effet Zeeman quadratique...). Cette étude doit donc être poursuivie, de plus, certains effets n’ont pas été étudiés (aberrations du faisceau Raman par exemple).

Il semble qu’une évolution du dispositif expérimental soit nécessaire pour améliorer les per-formances de l’expérience. Au laboratoire, nous sommes limités par le temps de chute des atomes alors que dans l’avion ZERO-G, nous sommes très vite limités par les rotations de l’appareil. L’arrivée du simulateur 0g au laboratoire devrait nous permettre d’augmenter le temps d’interrogation et donc la sensibilité de l’interféromètre. De plus, l’accès à la micrope-santeur de manière quotidienne au laboratoire sera également un bon outil à la préparation d’une campagne de vol. De plus, dans l’avion, la compensation des rotations en faisant tourner le miroir de référence devrait nous permettre d’augmenter le temps d’interrogation pendant les paraboles.

Nous prévoyons également de diminuer le déphasage induit par les effets systématiques. Il est prévu de modifier le système laser du rubidium en rajoutant une seconde diode esclave. Cette nouvelle diode sera asservie en phase avec la première diode esclave et servira à générer la seconde fréquence laser nécessaire à la manipulation des atomes. Ceci permettra de résoudre le problème des raies parasites puisqu’il n’y aura plus de modulateur de phase.Nous prévoyons également de remplacer la plaque en aluminium sur laquelle est fixée l’expérience (plaque à l’origine des courants de Foucault) par une plaque en acier inoxydable. Nous prévoyons également de filtrer le biais de l’accéléromètre mécanique.

Chapitre 6

Vers l’utilisation des atomes froids

dans les centrales inertielles

Nous nous sommes jusqu’à présent concentrés sur l’utilisation de l’interférométrie atomique appliquée au test d’un postulat fondamental de la Physique, le principe d’équivalence faible. Toutefois, l’expérience que nous avons décrite reste une expérience d’atomes froids qui sort de la norme. En effet, elle a été conçue pour un fonctionnement dans un environnement non contrôlé hors du laboratoire. De plus, il est important de souligner qu’elle fonctionne dans un véhicule en mouvement. A notre connaissance, il existe en France une autre expérience d’inter-férométrie atomique embarquable : le projet GIRAFE, réalisé à l’ONERA, est un gravimètre atomique gyrostabilisé utilsé lors de campagnes de mesure de gravité en mer [140].

Depuis le développement des premiers interféromètres à atomes froids dans les années 90 [14], le domaine des atomes froids a atteint une certaine maturité technologique et des performances intéressantes. Nous observons à l’heure actuelle de plus en plus d’entreprises s’intéressant à la technologie des atomes froids. Par exemple, Thalès [23], avec le projet CATS visant à réaliser un capteur atomique sur puce, l’entreprise Muquans [22], produisant des gravimètres ainsi que des horloges atomiques, ou encore AOSense ou l’entreprise Teledyne e2v qui s’intéresse également aux gravimètres.

C’est dans ce contexte que nous avons commencé à travailler avec l’entreprise iXBlue, spé-cialiste de la navigation inertielle. Le travail que nous souhaitons effectuer va au delà des expériences citées précédemment. En effet, d’importants efforts et de nombreux développe-ments technologiques restent à faire concernant l’application des atomes froids à la navigation inertielle, notament en terme de compacité de l’appareil. De plus, contrairement au gravimètre GIRAFE, les rotations font parties du signal mesuré par une centrale : elles ne sont pas com-pensées et elles vont donc influer sur les interféromètres atomiques (voir chapitre 4). Ensuite, contrairement aux centrales inertielles classique, les senseurs à atomes froids ne donnent pas de mesures continues, il faut alors mettre en place des protocoles complexes pour assurer la continuité de la mesure [141]. Il y a également la question de la dynamique de mesure qui rentre en jeu ainsi que la problématique concernant la réalisation d’une mesure sur plusieurs axes de façon simultanée.

Dans ce chapitre, nous présenterons brièvement le principe de la navigation inertielle, ainsi que les limites des technologies utilisées actuellement liées aux capteurs et à l’algorithme de navigation. Nous présenterons ensuite l’intérêt d’appliquer l’interférométrie atomique à la navigation inertielle. Pour finir, nous discuterons les premiers essais d’utilisation d’un accélé-romètre atomique pour faire de la navigation.

6.1. Introduction à la navigation intertielle

6.1 Introduction à la navigation intertielle