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Chapitre 3. Modélisation comportementale 85

3.4 Simulation Multi-Agents pour la validation de l’approche

3.4.3 Étude préliminaire

Dans un premier temps, en guise de preuve de concept, nous avons testé notre approche sur un modèle SMA de fourragement de fourmis [Wilensky 1997], qui est un grand classique dans la communauté multi-agents. La section suivante présente le modèle dans les grandes lignes. Puis, les deux sections qui suivent montrent les résultats de clustering à différents niveaux via la méthode MLC-HDP. Cette expérience a fait l’objet de la publication [Chiron 2014c].

3.4.3.1 Modèle de fourragement de fourmis

Les fourmis (ou agents) explorent leur environnement à la recherche de nourriture. Lors-qu’une fourmi trouve une source de nourriture, elle en rapporte un peu au nid. Le modèle prévoit que les fourmis savent retrouver leur nid. Sur le chemin du retour, la fourmi dépose des phéromones sur le sol qui vont se diffuser dans l’espace et s’évaporer avec le temps. De manière globale, les fourmis sentent les phéromones au sol et ont le réflexe de les suivre. Ceci entraine un phénomène de renforcement des pistes menant à la nourriture. De fait, le système multi-agents converge vers un comportement (dépendant des paramètres du modèle), ce qui représente l’intérêt de cette approche pour notre analyse comportementale. Au delà des pa-ramètres de population et d’environnement (e.g. sources de nourritures et nid), le modèle de fourragement de fourmis s’appuie principalement sur les deux paramètres suivant :

• TD : le taux (ou vitesse) de diffusion des phéromones • TE : le taux (ou vitesse) d’évaporation des phéromones

Les variations de ces deux paramètres, TD et TE, entrainent des changements de comporte-ment au sein de la colonie de fourmis, notamcomporte-ment au niveau de l’ordre, de la stabilité et de la vitesse des récoltes des sources de nourriture. La figure 3.16 illustre des simulations issues de 4 jeux de paramètres différents. L’effet des paramètres TD et TE sur le comportement de la colonie est clairement visible sur les graphiques d’évolution des réserves de nourriture. Les paramètres de simulation associées aux graphiques d’évolution de la nourriture constitueront ainsi notre vérité terrain comportementale.

Comme on peut le voir sur la figure, les configurations A (TD faible et TE moyen) et B (TD élevé et TE moyen) conduisent les fourmis à visiter les sources de nourriture une par une. À l’opposé, dans la configuration C (TD élevé, TE faible) et D (TD élevé, TE élevé) les sources sont récoltées simultanément, mais avec des degrés d’efficacité divers. En complément, la vue Netlogo apporte d’autres informations sur le comportement. Par exemple, on aperçoit, selon la configuration, un nombre plus ou moins important de fourmis qui explorent l’espace sans but précis.

On note que sur ce modèle de fourragement de fourmis, la zone d’observation s’étend sur tout l’espace de simulation, ce qui diffère quelques peu de l’application fil rouge de cette thèse où les trajectoires d’abeilles sont observées localement à l’entrée de la ruche.

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Figure 3.16 – Plusieurs simulations de l’algorithme des fourmis selon 4 configurations (A,B,C et D), chacune illustrée par une vue Netlogo (à la 150ème itération) dans la partie supérieure, et un graphique des réserves (ou sources) de nourriture dans la partie inférieure. Pour chaque vue, le cercle central représente le nid, les 2 cercles (à gauche et en haut) représentent les sources de nourriture, les points rouges symbolisent les fourmis et le gradient vert/blanc représente l’intensité des phéromones déposées au sol par les fourmis. Voici le détail des configurations : A (TD faible et TE moyen), B (TD élevé et TE moyen), C (TD élevé, TE faible) et D (TD élevé, TE élevé).

3.4. Simulation Multi-Agents pour la validation de l’approche 107 3.4.3.2 Exemples de signatures sur les trajectoires simulées

Cette section montre au travers de la figure 3.17 deux ensembles de signatures correspon-dant à des captures simulées selon des configurations différentes. On observe certains agrégats communs entre les deux ensembles, et d’autres complètement uniques. Cette situation se prête bien à une modélisation de type HDP, où les clusters sont partagés entre les groupes, mais représentés par des poids différents.

Figure 3.17 –Signatures (projetées dans un repère 3D via une ACP) pour deux capture simulées selon des configurations différentes. Le modèle multi-agents utilisé est celui des fourmis présenté dans la section précédente.

3.4.3.3 Résultats de clustering MLC-HDP - Niveau 2

Cette section illustre l’utilisation du MLC-HDP sur une seule capture, limitée donc au niveau 2 "activité". La capture est obtenue à partir du modèle multi-agents de fourmis défini précédemment. Les paramètres sont les suivants : TD=75, TE=10, trois sources de nourriture disposées à des distances croissantes de la ruche. La capture dure 1500 itérations (ou unités de temps), est segmentée en 31 sousclips, et comporte au total 1550 trajectoires. La figure 3.18 montre les données de simulation de la capture (i.e. graphique d’évolution des réserves de nourriture), et les résultats de modélisation MLC-HDP au niveau 2. L’interprétation visuelle des étapes de la chronologie démontre la pertinence des résultats de clustering. Chaque sousclip a été associé à une des 10 activités distinctes identifiées par le MLC-HDP. Ces 10 activités s’appuient sur 12 atomes d’activité auxquels sont associés différents poids en fonction de celles-ci. L’atome d’activité le moins, et le plus représenté, a été associé respectivement à 49, et 243 trajectoires. Comme le montre la figure 3.18, la plupart des transitions entre les activités sont en phase avec des événements notables s’étant produits lors de la simulation. Par exemple, sur la figure, la transition entre "Récolte source 3" et "Exploration libre" est nette, on voit bien une rupture des étiquettes (rouges et violettes) associées aux sousclips concernés.

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Figure 3.18 – En haut, les graphiques d’évolution des réserves de nourriture montrent que les sources de nourriture ont été récoltées une à une. En bas, les résultats de clustering MLC-HDP (niv. 2), où chaque sousclip est associé à une des 10 "activités" trouvées. Chaque carré symbolise, par sa couleur, l’activité correspondant au sousclip associé. Au centre, 7 interprétations visuelles à la série d’activités identifiées par le MLC-HDP.

Il est important de remarquer que la granularité du jeu de données (e.g. longueur des

sousclips) peut influencer la qualité des résultats. De fait, des événements notables peuvent se

mélanger au sein d’un même sousclip et donner naissance à des activités de nature différente. 3.4.3.4 Résultats du clustering MLC-HDP - Niveau 3

Cette section illustre l’application du MLC-HDP effectuée sur plusieurs captures permet-tant ainsi d’étendre l’étude jusqu’au niveau 3 "comportement". Le succès du clustering au plus haut niveau sémantique témoigne en partie du bon fonctionnement des couches inférieures. Dans cette expérience, les 4 comportements présentés précédemment (cf. Figure 3.16) sont mis en œuvre. De manière générale, le modèle des fourmis se comporte de façon identique (i.e. émergence de comportements similaires) lorsque que l’on réitère la simulation sur un même jeu de paramètres. Cependant, dans de rares occasions, il arrive que la simulation fasse émerger un comportement inattendu. Dans le cadre de cette première expérience, ces exceptions ont été manuellement retirées du jeu de données pour que la vérité terrain reste cohérente avec les

comportements observés (i.e. paramètres de simulation / graphique d’évolution des réserves de

nourriture). Finalement, 5 simulations sont retenues par jeu de paramètres, ce qui correspond à un jeu de données constitué de 4 ∗ 5 = 20 captures. L’environnement (2 sources de

nourri-3.4. Simulation Multi-Agents pour la validation de l’approche 109 tures situées à égale distance de la ruche) et la population (100 fourmis) est identique pour l’ensemble des captures simulées. Le jeu de données est alors composé de 49 882 trajectoires séparées en 20 captures, chacune segmentée en 16 sousclips.

La figure 3.19 montre les résultats du clustering pour les niveaux activité et comportement. La double force du MLC-HDP est clairement visible. Premièrement, 4 catégories principales ont été trouvées avec succès, le tout avec un minimum d’a priori sur les données, si ce n’est la structure en capture/sousclips. Deuxièmement, 18 sur les 20 captures ont été correctement classées en adéquation avec les paramètres de simulation. La couche activité montre la sé-quence d’activités correspondant à l’évolution temporelle de la colonie. Il est intéressant de noter que l’aspect temporel n’est pas pris en compte avec le MLC-HDP. Par exemple, le

com-portement "Récolte des sources une à une" est similaire, quelque soit l’ordre de récolte des

sources, à condition que la distance des sources par rapport au nid soit identique.

Figure 3.19 – Résultats sur 20 captures, chacune composée de plus de 1000 trajectoires. 4 configurations (ou jeux de paramètres) sont testées, avec 5 simulations pour chaque configuration afin d’assurer une certaine robustesse. La couleur des grands cercles au dessus de chaque capture représente le comportement associé à la capture (niv. 1). La couleur des petits rectangles au dessus de chaque capture représente l’activité associée à chaque sousclip (niv. 2). Les courbes colorées représentent pour chaque sousclips, les poids associés à tous les atomes d’activité existants (niv. 3).

110 Chapitre 3. Modélisation comportementale Dans la section suivante est menée une étude à plus grande échelle, sur un modèle multi-agents d’abeilles évoluant en 3D. Ce dernier se rapproche plus des contraintes de notre appli-cation fil rouge.