• Aucun résultat trouvé

En 1984, la ville de La Chaux-de-Fonds est classée ville d’importance nationale par la Confédération, dans le cadre des inventaires des sites construits à protéger en Suisse (ISOS). Les ensembles formés par les nombreuses cages d’escalier peintes et les vitraux sont particulièrement remarqués. Corollaire de cette reconnaissance, la Confédération, le Canton et la Ville accordent des subventions aux propriétaires lors de restauration ou de réhabilitation de vitraux déposés1; il s’agit de maisons qui ne sont ni recensées, ni classées par le Service de la protection des monuments, situation exceptionnelle s’il en est. Pour s’assurer un instru-ment de travail adéquat à la surveillance de ce patrimoine et à la distribution des sub-ventions, le Service d’urba-nisme de la Ville a fait réa-liser un inventaire des vitraux des XIXeet XXesiècles, initiée officiellement au printemps 2000 par le Centre suisse de recherches et d’information sur le vitrail, sis à Romont (CSRIV)2. Nous avons réalisé cet inventaire sur la base d’une liste qui avait déjà été constituée par le Service d’urbanisme. Notre travail de

1 Sylvie MOSER, « Vitraux Art nouveau à La Chaux-de-Fonds (Neuchâtel) », ICOMOS 90 Conserver-restaurer, Editions du Grand-Pont, Lausanne, 1990.

2 Fabienne HOFFMANN, « Les inventaires de vitraux après 1900 en Suisse : l’exemple de La Chaux-de-Fonds », NIKE, Bulletin, no1, 2003.

Fig. 1. Porte palière d’appartement avec motifs gravés.

repérage sur le terrain, les discussions avec les maîtres verriers qui ont restauré ces dernières années les vitraux chaux-de-fonniers, les appels à la population par le biais des médias ont permis d’augmenter d’un bon tiers le nombre d’adresses de bâtiments ornés de vitraux. C’est sur la base de cet inventaire et de recherches en bibliothèque que nous écrivons cet article3.

Si l’apparition du verre coloré, puis du vitrail pour terminer avec la dalle de verre fait s’étendre le champ temporel du corpus verrier du troisième quart du XIXe siècle jusqu’à nos jours, la majeure partie des œuvres se concentrent sur la période d’apogée économique et commerciale de la cité horlogère, c’est-à-dire entre 1895 et 1920, époque qui voit se construire environ 1200 bâtiments en ville de La Chaux-de-Fonds. Dans une analyse plus fine, on peut même restreindre la période d’apparition du vitrail Art nouveau domestique entre 1895 et 1917, la guerre de 1914-1918 ayant considérablement freiné l’économie horlogère et, par conséquent, le marché de la construction. Les premières manifestations du travail sur le verre sont visibles dès le dernier quart du XIXe siècle ; des verres colorés décorent les entrées, les impostes, les portes de hall ou palières ou parfois même les pavillons de jardin ; ce type de décor n’est généralement pas appelé vitrail par l’absence de mise en plomb, les verres de couleur sont seulement fixés dans les menuiseries à l’aide de mastic.

On trouve également de nombreux verres gravés ou sablés qui ornent les portes palières ou de fermeture des couloirs, les restaurants et les fabriques ; ces verres, généralement fournis par les ateliers de verriers, sont très répandus en Suisse allemande et dans les pays germaniques (fig. 1).

3 L’étude du patrimoine domestique se révèle un exercice difficile ; les archives liées à la création de ces œuvres (atelier d’architecture, d’entrepreneurs ou d’artisans décorateurs) ou celles des propriétaires sont quasiment inexistantes. Les plans d’enquête, qui n’apparaissent de manière systématique qu’au tout début du XXesiècle à La Chaux-de-Fonds, ne donnent aucune indication sur les arts décoratifs qui vont enrichir la structure architecturale. Parmi les arts décoratifs liés au bâti, le vitrail est pourtant privilégié, puisque les baies sont parfois signées ; en l’état de la recherche, les ateliers de verriers sont donc relativement connus en comparaison des autres corps de métiers. Toutefois, on ne repère leur existence que grâce aux publicités qu’ils font paraître dans des ouvrages officiels tels les annuaires du téléphone, les Séries de prix de la construction, le Bulletin technique de la Suisse romande, les catalogues des expositions inter-nationales, nationales et cantonales, les dépliants publicitaires des ateliers et grâce à quelques rares fonds d’atelier conservés. Le travail essentiel consiste à se confronter aux œuvres, démarche consignée dans l’inventaire ; celui-ci permet une mise à plat et les comparaisons nécessaires à l’étude.

Plusieurs institutions et personnes ont facilité la réalisation de nos recherches ; nos plus vifs remer-ciements s’adressent au Service d’urbanisme qui a non seulement financé l’inventaire mais l’a soutenu avec bienveillance et efficacité, au Service des monuments et sites neuchâtelois qui a soutenu l’écriture de cet article, au Centre suisse de recherches et d’information sur le vitrail à Romont, au Musée d’histoire, à la Bibliothèque de l’Ecole d’art, à la Bibliothèque de la ville, au Musée international de l’horlogerie à La Chaux-de-Fonds, à la Bibliothèque publique et universitaire de Genève, à Frédérique Steiger, Eva Zangger, Nicole Quellet, Anouk Hellmann, Danielle Karrer, Armand Studer, Jean-Daniel Jeanneret et René Koelliker qui nous ont aimablement aidée dans nos recherches, enfin tout spécialement au Dr. Rudolf H. Röttinger de Zurich qui nous a permis de consulter le fonds de l’atelier de ces aïeux.

Le corpus

et son état de conservation

Si c’est avant tout dans les maisons d’habitation des ouvriers et les villas des patrons horlogers que se déploient les vitraux, les lieux publics ne sont pas en reste : bras-series, restaurants, hôtels, églises, crématoire, synagogue s’ornent également de verrières colorées.

Cet article traite du patrimoine domestique, public et privé, sans aborder les bâtiments religieux, même si certains sont parfois mentionnés pour éclairer le propos et étoffer le contexte. Le corpus étudié est composé des vitraux traités dans l’inventaire, augmenté

Fig. 2. Vestibule et galerie de la Tavannes Watch and Co avec un vitrail zénithal à motifs de châtaignier et des verres gravés sur les côtés. Revue internatio-nale de l’horlogerie, La Chaux-de-Fonds, 1905.

Fig. 3. Les baies du rez-de-chaussée de cet immeuble occupé par une imprimerie étaient munies de grands vitraux. Aujourd’hui, il ne reste que le vitrail d’imposte de la porte d’entrée. (Collection du Musée d’histoire de La Chaux-de-Fonds).

Fig. 4. L’ancien Hôtel de Paris : les fenêtres de l’oriel d’angle étaient ornées de vitraux. (Collection du Musée d’histoire de La Chaux-de-Fonds).

de quelques adresses repérées par des vues anciennes, sur-tout des cartes postales. Le patrimoine domestique vitrail de la période Art nouveau se monte aujourd’hui à 87 adresses qui se répartissent en 73 immeubles ou maisons d’habitation, 5 fabriques hor-logères ou petites industries4, 2 restaurants5, 4 salles de réunions6, 2 hôtels7, ce qui

dans le dépôt de la Ville8ou ailleurs ; il y a actuellement encore des vitraux non répertoriés, que les propriétaires ou locataires exhibent suite à la réalisation de l’inventaire, au gré des rencontres et des discussions.

Certaines baies attendent d’être exhumées des caisses déposées dans les caves ou les greniers9.

A cause des rigueurs du climat hivernal, les maisons d’habitation chaux-de-fonnières sont munies de doubles fenestrages ; dans la majorité des cas, le vitrail est posé en seconde position, ce qui lui permet de bénéficier d’une verrière de protection ; ce système constructif a largement contribué à la bonne conservation de ce patrimoine. Il est très difficile d’évaluer la part de vitraux détruits après 192010; il est certain que la crise économique horlogère des années 1970 a freiné quelque peu la destruction et les

4 Fabrique d’horlogerie Electa (Jakob-Brandt 61) ; Tavannes Watch & Cie (Numa-Droz 138) ; extension en 1912 de la fabrique Election (Numa-Droz 146) ; fabrique Election (Paix 152) ; imprimerie (Daniel-Jeanrichard 39).

5 Les Pervenches (Bulles 30 a) ; l’ancienne brasserie-restaurant de l’Astoria (Serre 14). D’autres établissements, comme la Brasserie du square ou le restaurant Ariste Robert étaient peut-être ornés de vitraux.

6 La Société nautique de La Libellule (Côtes-du-Doubs 14 a) ; la salle de Tempérance (Progrès 48) ; la salle du Cercle de l’Union (Serre 64) ; la salle du Cercle français (Daniel-Jeanrichard 17).

7 L’ancien Hôtel de la Poste (Musées 60) ; l’ancien Hôtel de Paris (Léopold-Robert 23).

8 Depuis plusieurs années, la Ville sauve de la destruction des vitraux dont les propriétaires veulent absolument se débarrasser ; ils sont rangés dans un dépôt et ont été également inventoriés.

9 Pour protéger la sphère privée, les adresses des bâtiments dévolus à l’habitation ne sont pas mentionnées.

10Nos discussions avec des personnes âgées rencontrées lors de l’inventaire ont confirmé qu’un certain nombre de vitraux 1900 ont disparu après la Seconde Guerre mondiale.

Fig. 5. Le restaurant des Pervenches aux Bulles possédait autrefois une véranda formée de vitraux devant le bâtiment dont on aperçoit l’angle derrière l’arbre. (Collection privée).

transformations d’immeuble11. Aujourd’hui, sous la pression de la pose de nouvelles fenêtres plus isolantes, et malgré l’inventaire réalisé et les efforts du Service d’urbanisme pour faire connaître l’importance de ce patrimoine, les vitraux sont encore très menacés de disparition.

La localisation des vitraux

Dans les fabriques, le vitrail est souvent utilisé pour faire impression sur le client, il est donc logiquement placé dans les lieux fréquentés par le public, halls d’entrée et de réception, souvent en éclairage zénithal, renforçant le caractère monumental du lieu (fig. 2-3). Dans les hôtels, il orne les cages d’escalier et les oriels, visibles en façade (fig. 4) ; dans les brasseries, les restaurants et les salles de réunion, on les trouve dans les fenêtres des salles où se tiennent les clients avec une particularité à la brasserie Astoria où le vitrail fait office de ciel, tamisant ainsi l’éclairage zénithal de la salle de restaurant (fig. 5-6).

Fig. 6. L’ancienne brasserie de l’Astoria avec son vitrail zénithal. (Collection du Musée d’histoire de La Chaux-de-Fonds).

11 Jean-Daniel JEANNERET, « Ville de La Chaux-de-Fonds ou l’invention d’un patrimoine », Revue historique neuchâteloise, 2004, pp. 79-93.

La localisation des vitraux dans l’habitat privé est très variée ; si de nombreuses cages d’escalier d’immeubles d’habitation sont enrichies de vitraux tant dans les fenêtres qui s’ouvrent vers la rue (fig. 7) que dans les impostes des portes palières (fig. 8) ou dans les halls d’entrées, la palme du nombre revient aux bow-windows (ou oriels) et vérandas dont généralement les trois faces sont ornées de vitraux. Dans certains cas même, une paroi de vitrail sépare la véranda de l’appartement lui-même (fig. 9). A l’intérieur de l’appartement, les portes de liaison entre les pièces ainsi que les fenêtres des fonds de couloir (typologie propre aux immeubles chaux-de-fonniers), qui apportent de la lumière mais qui doivent également protéger des regards indiscrets, sont pourvues de vitraux en verre cathédrale (fig. 10). Dans les appartements d’un certain standing, même les lieux de commodités et les cuisines sont fermées par des verrières colorées (fig. 11-12).

Les balcons d’une quinzaine d’immeuble sont fermés par des baies latérales où se déploient des vitraux ; cette typologie, rare en Suisse

Fig. 7. Un exemple de vitrail de cage d’escalier à motifs géométriques par-semés de cabochons.

Fig. 8. Imposte de porte palière.

romande, est probablement liée aux condi-tions climatiques (fig. 13) ; les parois latérales de très nombreux balcons sont aujourd’hui encore simplement fermées par des plaques de verre cathédrale12.

Les heureux bénéficiaires de la verrière colorée

Qui possède des vitraux à La Chaux-de-Fonds au début du XXe siècle ? Les vitraux aux dimensions les plus considérables et aux compositions les plus originales se trouvent dans les villas des patrons horlogers ; il y a donc une relation évidente entre le pouvoir d’achat et la présence des vitraux. Toutefois, l’inventaire a montré que des vitraux ornent

12 En parallèle à l’inventaire du vitrail, un inventaire rapide des verres colorés, en particulier des parois de balcon, a été mis sur pied : il est consultable au Service d’urbanisme de la ville.

Fig. 9. Véranda richement décorée de vitraux à motifs losangés et cives.

Fig. 10. Vitrail de fond de couloir avec nombreux verres structurés et cannelés.

Atelier Hubert-Stutz, Zurich.

aussi bien les appartements des ouvriers que ceux des patrons horlogers ; on pour-rait affiner ce constat par une étude socio-économique plus poussée. Une telle recherche se heurte à la difficulté de repérer quelles personnes habitaient dans les appartements ornés de vitraux et sur-tout de connaître leur profession et leur niveau de salaire13. Dans une logique constructive de rendement, il nous semble, en effet, pertinent d’émettre l’hypothèse que les loyers des immeubles ornés d’arts

13Une telle étude, qui n’était pas envisageable dans le cadre restreint de cette recherche, pourrait probablement être mise sur pied en collaboration avec un spécialiste des métiers de l’horlogerie.

Fig. 11. Une fenêtre de W.-C. à motifs géométriques.

Fig. 12. Une planche de modèle proposée par l’atelier H. Huber-Stutz de Zurich où on repère en bas à gauche le modèle de la figure 11 et en haut à droite celui de la figure 9 (collection Röttinger).

décoratifs devaient être plus élevés que la moyenne et, par conséquent, réservés à une élite à partir de modèles publiés.

Les bibliothèques des ateliers possédaient généralement les classiques de la composition et des décors, comme les livres d’Eugène Grasset sur l’art de la composition et sur les plantes, ceux de Maurice Pillard-Verneuil sur les animaux, mais également des ouvrages concernant l’art en général, l’héraldique, les allégo-ries et les emblèmes. Les verriers sont abonnés aux grandes revues internationales traitant de déco-ration ou de construction dont

les principaux sont : « Art et Décoration », « L'Art décoratif », « Deutsche Kunst und Dekoration », « The Studio », « La Patrie Suisse », « Das Werk », le « Bulletin technique de la Suisse romande » ou alors à des périodiques spécifiques à la profession comme le « Zeitschrift für alte und neue Glas-malerei ». Pour faciliter la production, des livres de modèles sont publiés pour les artisans des arts décoratifs ; certains sont plus particulièrement destinés aux verriers, qui ne peuvent s’accommoder de dessins trop fins et compliqués. Il s’agit des dessins de Karl Engelbrecht, Arnold Lyongrün, Louis Westphal, Adolf Eckardt, Joseph Lehner et Ed. Mader, Ludwig Preckel, Wilhelm Mewes, etc., publiés sous forme de recueils de planches en Allemagne, Autriche et aux Etats-Unis autour de 1900. Si, en général, ces livres restent des sources d’inspiration, parfois le verrier reproduit fidè-lement le modèle proposé – demande expresse du client ou gain de temps par économie du dessin ? –, il est impossible de répondre à cette question pour l’instant (fig. 14-15).

Fig. 13. Exemple de balcons avec parois latérales ornées de vitraux.

Les fleurs et les animaux

les populages des marais et les algues. Dans les vérandas en particulier, comme pour faire oublier le trop long hiver14, les vitraux évoquent des treilles fleuries ou des jardins d’hiver ; la palette s’étend alors à toutes les plantes grimpantes et tombantes – liserons, volubilis, glycines, clématites, fleurs de la passion, chèvrefeuilles, capucines, vignes vierges – ainsi qu’aux arbres et arbustes d’ornement – magnolias, marronniers, cytises, robiniers, pommiers du japon, arbustes fleurissants (fig. 16-19).

Quelques animaux ornent également les baies, en particulier celles des salles de bain qui font la part belle aux habitants des fonds marins, les poissons dont les formes multiples et les écailles colorées sont très appréciées par les artistes de l’Art nouveau, mais également de quelques animaux évoluant sur les eaux, comme les

14On n’a guère de printemps à 1000 mètres d’altitude !

Fig. 14-15. Baie de salle de bain et son modèle extrait du recueil de modèles de Jos. LEHNERet Ed. MADER, Neue Glas-malereien und Kunstverglasungen im Modernen Stil, Vienne-Leipzig, autour de 1900, planche 12 (collection Röttinger).

Fig. 16. Paroi latérale de balcon avec bordures ornées de fleurs stylisées. Atelier Eduard Diekmann, Lausanne, 1906.

cygnes et les canards (fig. 20). Les animaux sauvages ne sont pas oubliés : écureuils qui s’égayent joyeusement sur les branches d’un arbre, aigles en vol planant sur les montagnes, perroquet ou paon dont le plumage coloré offre de nombreuses possibilités décoratives et graphiques (fig. 21). Le paon, sym-bole d’immortalité, est justement l’image choisie par Maurice Pillard-Verneuil pour illustrer le frontispice de son livre L’Animal dans la décoration15! La série des vitraux peints à l’émail

Pour terminer avec les représentations issues de la nature, il faut parler d’une série de vitraux peints à l’émail de très bonne qualité qui ornent les nombreuses baies de sept immeubles (surtout dans les vérandas et les salles à manger). De style extrêmement réaliste, les dessins de ces verrières figent des moments de vie dans la nature. Les sujets (fleurs, arbres, oiseaux, papillons, insectes) ont bien souvent été réalisés à partir de planches de modèles. La composition de ces fenêtres doit beaucoup à la connaissance des estampes et dessins japonais, très prisés à la fin du XIXe siècle par les artistes des arts décoratifs16, qui révèlent des dessins asymétriques et d’une

15 Maurice PILLARD-VERNEUIL, L’Animal dans la décoration, E. Levy, Paris, 1897.

16 Dans son livre sur les vitraux Art nouveau en Suisse, Pierre-Frank Michel publie un vitrail chaux-de-fonnier avec un oiseau ainsi que son modèle tiré d’un recueil de planches japonaises. Pierre-Frank MICHEL, Jugenstilmalerei in der Schweiz, Paul Haupt Verlag, Bern, 1986.

Fig. 17. Fenêtre d’un oriel évoquant une treille fleurie. Fig. 18. Porte intérieure d’un appartement avec des cyclamens.

certaine sobriété. Pour la plupart de très bonne facture et bien conservés, ces vitraux révèlent un grand travail de peinture sur verre (émail, jaune d’argent et grisaille), occasion pour le peintre verrier d’exprimer sa virtuosité dans une représentation fidèle de la nature (fig. 22-26). Excepté pour une maison où les vitraux sont signés de la main d’Ernst Wehrli de Zurich, ces vitraux peints ne portent étrangement pas de signature.

Cette série de vitraux fait figure d’exception en Suisse romande où on préfère plutôt les verres colorés dans la masse ; en revanche, des vitraux peints de ce type ornent souvent des baies en Suisse alémanique, production des grands ateliers zurichois, et en Allemagne du Sud17 (fig. 27-28). En France, on en trouve quelques exemples antérieurs, dans les deux dernières décennies du XIXe siècle18. Il faut donc probablement attribuer tous ces vitraux aux ateliers zurichois qui ont travaillé à La Chaux-de-Fonds.

Les motifs géométriques

De nombreux vitraux présentent des dessins qualifiés de géométriques, pratique courante à cette époque. Le motif de la couronne, ronde ou ovale, à laquelle sont attachés des rubans, apparaît fréquemment. Celle-ci n’occupe pas toute la surface du vitrail, laissant pénétrer la lumière par les

17Ibidem ; Erhard REMMERT, Jugendstilfenster in Süddeutschland, Weingarten Verlag, Weingarten, 1992.

18Laurence de FINANCE, Un patrimoine de lumière 1830-2000, Verrières des Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne, Editions du patrimoine, Paris, 2003 ; Le vitrail en Lorraine du XIIIe au XXesiècle, Editions Serpenoises, Nancy, 1983.

Fig. 19. Baie de salle de bain avec paysage lacustre.

Fig. 20. Le verrier utilise des verres améri-cains pour rendre la robe colorée du poisson, l’œil est composé d’une cive.

Fig. 21. Détail d’un vitrail avec paon. Les marbrures des verres américains conviennent à merveille pour évoquer l’oiseau et son plumage.

Fig. 22. Véranda avec motifs peints à l’émail et à la grisaille : marronniers roses en fleurs, iris et coquelicots.

Fig. 23. Vol de canard peint à

l’émail et à la grisaille. Fig. 24. Des chrysanthèmes avec un papillon coloré peints à l’émail et à la grisaille.

Fig. 25. Une planche de modèles de papillons (collection Röttinger).

deux tiers inférieurs de la baie. Ce type de motif, qui offre de nombreuses possi-bilités décoratives, est relativement fré-quent dans les vitraux allemands ou autrichiens, pays où il est de tradition d’orner les portes de couronnes végétales (fig. 29).

Les lieux historiques et les contes Comme on peut le voir partout en Suisse romande sur des vitraux, mais également sur des peintures qui ornent les cages d’escalier, les artistes aiment

Les lieux historiques et les contes Comme on peut le voir partout en Suisse romande sur des vitraux, mais également sur des peintures qui ornent les cages d’escalier, les artistes aiment

Documents relatifs