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Étude des foldamères électroactifs en solution

CHAPITRE 3. FOLDAMÈRES -FONCTIONNELS ÉLECTROACTIFS

B. Étude des foldamères électroactifs en solution

B.1. Étude par spectroscopie RMN 1H dans différents solvants

Afin d’évaluer l’impact du solvant sur les structures obtenues, le spectre RMN 1H du composé J a été enregistré dans sept solvants différents, sélectionnés pour leurs caractères protiques ou aprotiques, plus ou moins polaires et éventuellement aromatiques (Figure 3-10). Ces expériences ont systématiquement été menées à une concentration totale de 3,4 mmol.L-1, à température ambiante et sur un spectromètre 300 MHz (Figure 3-10).

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Figure 3-10. Spectres RMN 1H du foldamère J enregistrés dans différents solvants (3,4 mmol.L-1, 298 K, 300 MHz).

Dans tous les cas, les signaux associés aux fonctions amide sont répartis sur une large gamme de déplacements chimiques. Cette observation renseigne sur le caractère très différent des environnements chimiques de ces protons. En outre, ces signaux sont fortement déblindés ( > 9 ppm) et un contact entre protons Hc et Hd a été mis en évidence par spectroscopie NOESY dans le DMSO-d6, solvant connu pour son caractère compétiteur de liaisons hydrogène (Figure 3-11). Ainsi, l’ensemble de ces données confirme l’adoption d’une conformation hélicoïdale par le foldamère J et ce, quel que soit le solvant d’étude.

Figure 3-11. Partie du spectre RMN NOESY du composé J (7,3 mmol.L-1, DMSO-d6, 298 K, 300 MHz).

Comme évoqué dans le premier chapitre de cette thèse, les foldamères type oligopyridinedicarboxamide sont connus pour leur capacité à s’auto-assembler en hélice double dans certains solvants.56 Ce comportement est généralement mis en évidence par spectroscopie RMN 1H, l’équilibre entre hélices simples et doubles étant le plus souvent lent. Le solvant d’étude s’avère déterminant car la constante de dimérisation peut varier d’un ordre de grandeur d’un solvant à l’autre pour un foldamère donné.54 Certains solvants empêchent même parfois la formation de l’hélice double, à l’image des compétiteurs de liaison hydrogène que représentent la pyridine et le diméthylsulfoxyde.48

L’analyse des spectres RMN 1H du composé J dans la pyridine-d5, le DMF-d7, le DMSO-d6 et le THF-d8 indique de fortes similitudes (Figure 3-10). Dans ces solvants polaires, la présence d’une seule série de signaux et la résolution des spectres indiquent la présence du foldamère sous sa forme non hybridée en solution. En présence de solvants chlorés, les spectres

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perdent clairement en résolution et deux situations émergent. Dans le cas de l’o -dichlorobenzène et du chloroforme, de nouveaux signaux apparaissent : les formes monomère et dimère57 sont en équilibre lent à l’échelle de temps de la RMN. La solution de foldamère J

dans le chloroforme présente quant à elle un spectre très peu résolu, qui pourrait résulter d’un équilibre ayant une cinétique d’échange voisine de 300 MHz à la température d’étude. Enfin, d’un point de vue qualitatif, on notera que les signaux présentant les plus fortes intégrales sont ceux de la forme monomère, ce qui suggère une faible propension à l’hybridation.

B.2. Effet de la température et constante de dimérisation du foldamère J dans le chloroforme deutéré

Les études précédentes ont été effectuées à l’aide d’un spectromètre Bruker 300 MHz. L’équilibre de dissociation étant très rapide à l’échelle de temps de la RMN, de nouvelles études ont été menées sur un spectromètre Bruker 500 MHz afin d’améliorer la résolution des spectres. Les spectres RMN 1H enregistrés dans le CDCl3 en fonction de la température (Figure 3-12) montrent clairement une amélioration de la résolution des spectres en refroidissant de 323 K à 273 K, température à laquelle les signaux apparaissent bien définis et les espèces distinguables.

Figure 3-12. Évolution des spectres RMN 1H du foldamère J en fonction de la température (9,4 mM, CDCl3, 500 MHz).

57 Des expériences de spectrométrie de masse menées sur un spectromètre FT-ICR ont permis la détection du dimère.

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124 Calcul de la constante de dimérisation

L’étude en fonction de la température présentée ci-dessus montre deux séries de signaux caractéristiques du monomère (simple hélice) et du dimère (double hélice) à 273 K. Afin d’attribuer ces signaux et de calculer la constante de dimérisation dans le chloroforme deutéré, une étude à concentrations variables a été menée dans ces mêmes conditions (CDCl3, 273 K, 500 MHz) (Figure 3-13).

Figure 3-13. Spectres RMN 1H du foldamère J en fonction de la concentration (CDCl3, 273 K, 500 MHz).

L’équation suivante, discutée dans le chapitre précédent, a été utilisée pour calculer la constante de dimérisation (Kdim) par régression non-linéaire ([M] désigne la concentration du monomère et Ct = la concentration totale en foldamère).

M + M ⇄ M2 (Kdim) [M] =−1 + √1 + 8KdimCt

4Kdim

La concentration du monomère est dans ce cas calculée en intégrant les signaux correspondants aux hélices simple et double dans la région des protons N-H. On remarque la présence de trois signaux correspondants au monomère et trois autres au dimère (voir Figure 3-14). Les signaux les plus aisément intégrés sont situés à 9,0 ppm (fonctions amides périphériques de l’hélice intégrant pour deux protons) et 10,3 ppm (quatre fonctions amide de chaque brin du dimère, intégrant pour 8 protons). Le suivi du ratio entre les deux intégrales a permis de calculer les

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concentrations relatives du monomère et du dimère et d’évaluer par régression non-linéaire, une constante de dimérisation d’environ 3 dans le chloroforme deutéré à 273 K.

Kdim = 3.3 ± 0.8

R2 = 0.99456

Figure 3-14. Zoom sur les signaux amide des spectres RMN 1H avec (*) pour le dimère et (X) pour le monomère de J (à gauche) (CDCl3, 273 K, 500 MHz) ; régression non linéaire (pour Ct (mM) = 0,05, 0,1, 0,2, 0,5, 1, 2, 4, 6, 8,

10, 12, 15).

Ainsi, la constante de dimérisation du foldamère J a pu être déterminée en diminuant la température. Cet oligomère présente une constante de dimérisation relativement faible (même à 0°C), ce qui est raisonnable compte tenu de sa structure comportant seulement cinq unités pyridine et de la présence des cycles triazole. Ces derniers jouent en effet le rôle d’espaceurs entre cavité et unités TTF terminales. Comme l’a montré la structure cristallographique du foldamère J (Figure 3-9), ces hétérocycles sont orientés perpendiculairement à la cavité ; un tel positionnement est de nature à rendre l’hélice plus accessible et plus flexible, et donc moins préorganisée.

On notera que des résultats similaires ont été obtenus avec le foldamère G, analogue pourvu de chaines dodécyloxy. En raison des comportements similaires des deux foldamères G

et J en solution, seul ce dernier, porteur de chaînes isobutoxy, sera considéré dans la suite de ces études.

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