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L'étude de cas possède un statut particulier au sein de la recherche qualitative. En effet, certains auteurs comme Lessard-Hébert et al. (1995) associent l'étude de cas à des modes d'investigation servant à simplement encadrer des techniques de collecte des données (relève du pôle technique de leur modèle quadripolaire que nous verrons plus tard). Pour Collerette (2004), c'est une technique de cueillette, de mise en forme et de traitement des données dans le but de décrire et de comprendre des phénomènes complexes et évolutifs. Enfin, pour Anadon (2006), l'étude de cas est à la fois une approche et une technique de cueillette et de traitement de l'information dont le but est de décrire en profondeur un phénomène et d'analyser la relation entre l'individuel et le social.

Selon Savoie-Zajc (2004), les principaux travaux concernant l'étude de cas en tant que méthode de recherche sont associés à Merriam (1988), Stake (1995) et Yin (1994). Anadon (2006) reprend les travaux de Merriam (1988) dans lesquels nous nous reconnaissons et qui associent l'étude de cas à quatre traits: particulariste, descriptive, heuristique et inductive. En effet, le cas particulier est ce qui est au centre de l'étude de cas ce qui la rend particulariste. Ensuite, une description minutieuse du cas est indispensable dans ce type de recherche. De plus, l'étude de cas est heuristique, car elle permet une compréhension approfondie du cas étudié. Enfin, elle est inductive, car elle part de l'observation de terrain pour élaborer des liens entre les propriétés du cas, des catégories et des hypothèses interprétatives.

De son côté, Stake (2000) soutient que l'étude de cas est définie par l'intérêt qu'elle porte au cas et non par les méthodes de cueillette utilisées. Notre recherche va s'inscrire dans ce que Stake (2000) appelle « collective case study» (traduit par étude de cas multiples). C'est une étude qui porte sur plusieurs cas. En ce qui nous concerne, il s'agit d'un cas au Québec et d'un autre en France. Selon cet auteur, les

différents cas peuvent être similaires ou non, redondants ou pas, cela n'a pas d'importance. En effet, ces cas sont choisis, car ils vont permettre une meilleure compréhension de certaines particularités liées à l'accompagnement des stagiaires en formation des maîtres en EP. Par ailleurs, un des avantages de l'étude de cas multiples est qu'elle permet d'observer l'interaction d'un grand nombre de facteurs ce qui permet de saisir la complexité et la richesse des situations étudiées. D'autre part, l'étude de cas est une méthode de recherche plutôt flexible qui permet de s'adapter aux besoins de la problématique de recherche (Karsenti et Demers, 2004). Enfin, comme dans la majorité des recherches qualitatives, le chercheur est impliqué personnellement au niveau d'une étude en profondeur de cas particuliers (Lessard-Hébert et al., 1995).

Pour orienter notre démarche dans l'étude de cas multiples, nous nous sommes appuyés sur la modélisation proposée par Yin (1984) dont nous proposons une adaptation dans la figure ci-dessous.

Figure 4: Les étapes de l’étude de cas multiples (adapté de Yin, 1984) Planification de

la recherche

Problématique Objectifs de recherche

Choisir les sujets Préciser les protocoles de collecte des données

Effectuer la première étude de cas

Effectuer la seconde étude de cas

Rédiger le rapport sur le cas

Rédiger le rapport sur le cas

Analyse multi-cas

Dégager des résultats communs ou divergents

Répondre aux objectifs de recherche

Rédiger le rapport multi-cas Cueillette et analyse de

Nous avons fait le choix de réaliser une étude de cas multiples dans le cadre de notre recherche. Cependant, nous sommes conscients que cette méthode de recherche est remise en question par une partie de la communauté scientifique. Selon Roy (2006), on lui reproche de se pencher sur des cas qui ne sont pas « représentatifs » de l'ensemble. Autrement dit, les résultats des études de cas seraient déficients sur le plan de la validité externe. Campbell et Stanley (1966 dans Flyvbjerg 2006, p. 220) écrivaient même que de telles études ont tellement de liberté au plan du contrôle du processus de recherche qu'elles n'ont pratiquement aucune valeur scientifique. Flyvbjerg (2006) répond à ces critiques en soutenant que des théories prédictives et universelles ne peuvent pas être élaborées à partir de la recherche en sciences humaines. Selon lui, cela s'explique notamment parce qu'il n'existe que des connaissances contextualisées. De plus, à la suite de cet auteur (Flyvbjerg, 2006) nous pensons que le fait qu'une connaissance ne soit pas généralisable ne signifie pas qu'elle ne peut pas venir enrichir le champ des connaissances actuelles dans notre société.

Malgré certaines critiques, nous pensons que l'étude de cas multiples est la stratégie de recherche qui convient le mieux à notre projet. Nous nous inscrivons donc dans le champ des recherches qualitatives de type étude de cas multiples. Ces choix nous amènent maintenant à nous positionner au plan méthodologique. De Bruyne, Herman et de Schoutheete (1974) conçoivent la pratique méthodologique comme un espace quadripolaire construit dans un champ de connaissance donné. Ce modèle dépasse le cadre purement technique qui est parfois associé au terme de méthodologie et propose une articulation entre quatre pôles d'un processus de recherche: épistémologique, théorique, morphologique et technique. Ce modèle a été repris et complété par Lessard-Hébert et al. (1995) et est compatible avec les composantes que Van der Maren (1996) identifie pour qualifier une recherche comme étant qualitative. Nous allons redéfinir ce qui est contenu dans cet espace quadripolaire avant de montrer comment le projet d'étude de cas multiples que nous allons mener s'y inscrit. Nous avons choisi de regrouper les pôles théoriques et morphologiques pour cette présentation. Nous allons donc présenter les trois pôles de

notre méthodologie séparément, mais il est essentiel de comprendre qu'ils forment un tout cohérent et interrelié.

2 POLE ÉPISTÉMOLOGIQUE DE LA MÉTHODOLOGIE

Dans un premier temps, nous allons définir ce pôle en nous appuyant sur les travaux de Lessard-Hébert et al. (1995). Nous positionnerons ensuite les fondements qui sous-tendent notre recherche dans le pôle épistémologique.