• Aucun résultat trouvé

Étude bibliographique sur l’écoulement à bas Reynolds autour de profils d’aile NACA symétriques

I.4. L E CONTROLE D ’ ECOULEMENT AUTOUR D ’ UN PROFIL ACADEMIQUE EN INCIDENCE DANS UN FLUIDE :

I.4.3. Étude bibliographique sur l’écoulement à bas Reynolds autour de profils d’aile NACA symétriques

Les écoulements autour de profils NACA symétriques sont différents selon le régime d’écoulement. En effet, l’étude de la polaire de portance révèle des différences en fonction du Reynolds de l’écoulement. Par exemple, l’angle de décrochage peut varier avec le Reynolds comme l’illustre la Figure 32. D’autre part, la notion de décrochage dépend elle aussi du régime d’écoulement et elle perd sa pertinence pour un régime d’écoulement à ultra-bas Reynolds (cf. Figure 29).

L’une des 1res tentatives de classification des configurations d’écoulement autour d’un profil d’aile symétrique à bas Reynolds est réalisée par Kunz [52] en 2001. Il propose notamment que pour des Reynolds inférieurs à 104 soit considéré un régime d’écoulement dit de « Reynolds ultra-bas ». Les régimes ultra-bas Reynolds sont caractérisés par une couche limite laminaire sur toute la surface du profil d’aile. Ainsi lorsque l’incidence augmente, la couche limite laminaire est de moins en moins capable de résister au gradient de pression adverse associé à la génération d’une portance, et le point de décollement remonte progressivement vers le bord d’attaque. Quel que soit le profil d’aile, la valeur maximale de la portance diminue lorsque le Reynolds diminue, tandis que l’angle d’incidence où intervient la séparation de bord d’attaque apparaît à des angles d’incidence plus faibles. En effet, il n’est plus pertinent de parler d’angle de décrochage à ultra-bas Reynolds, puisque d’après Wang [50], le décrochage n’existe plus à ce régime. Huang [53] répertorie différents régimes d’écoulement de surface pour un NACA0012, pour des Reynolds compris entre 500 et 2500 et des angles d’attaque compris entre 0° et 90°. Ces régimes d’écoulement sont présentés Figure 30.

Figure 30. Régimes d’écoulement de surface créés par un profil NACA0012 en fonction du Reynolds et de l’angle d’incidence (Huang [53])

Le régime d’écoulement attaché (zone A) est observé pour de très faibles angles d’incidence (inférieurs à 3°). L’écoulement suit les parois du profil d’aile et il n’y a aucune émission tourbillonnaire.

47 Le régime de tourbillon de bord de fuite (zone B) est compris entre les angles d’incidence du régime d’écoulement attaché (entre 3° et 7°) et ceux du régime de séparation tourbillonnaire

à l’extrados (entre 7° et 10° pour des Reynolds inférieurs à 2500). Il se caractérise par

l’émission périodique de tourbillons massifs contrarotatifs émis alternativement au bord de fuite et depuis le point de séparation de l’écoulement. On observe une zone de recirculation de fluide comprise entre le bord de fuite et le point de séparation de la couche limite. Ce régime se caractérise par la formation d’un tourbillon au bord de fuite (sens antihoraire), puis par l’apparition d’un décollement de la couche limite sur l’extrados, donnant naissance à la formation d’un tourbillon de surface (sens horaire) au niveau du point de décollement. L’émission alternative de tourbillons de bord de fuite et depuis l’extrados s’observe dans ce régime et donne lieu au phénomène d’allée de Von Karman illustré Figure 31.

(a)

(b)

Figure 31. Schéma des allées de Von Karman sur un profil d’aile (a) Crédits Eloy [54]; photographie d’allées de Von Karman sur un profil NACA0012 à 10° d’incidence (b) Crédits Alam [55]

Le régime de séparation tourbillonnaire à l’extrados (zone C, separation vortex) ou régime d’écoulement décollé est observé pour des angles d’incidence où le décollement de la couche limite s’effectue au bord d’attaque et non à mi-corde comme dans le régime précédent (zone B). Des tourbillons contrarotatifs sont émis alternativement depuis le bord d’attaque et le bord de fuite. La zone de recirculation s’étend du bord de fuite au bord d’attaque.

Le régime de tourbillon de bord d’attaque (zone D) s’observe pour des angles supérieurs à 16° (Re = 2500). Ce régime est caractérisé par l’émission d’un tourbillon au bord d’attaque, qui grossit le long de l’extrados et contribue à la formation d’un tourbillon de bord de fuite au moment de son lâcher dans le sillage. Le tourbillon de bord de fuite nouvellement produit grossit et s’appareille avec un tourbillon prenant naissance dans une zone proche du bord d’attaque. Le nouveau tourbillon issu de cet appariement est ensuite lâché dans le sillage. On a donc comme dans les 2 régimes précédents des émissions tourbillonnaires contrarotatives périodiques mais le processus de formation de ces tourbillons est différent.

Le régime de corps immergé (bluff body effect) s’observe pour des angles supérieurs à 60°. Il se caractérise par le développement simultané de tourbillon au bord d’attaque et au bord de fuite. La dépression créée à l’extrados empêche le lâcher tourbillonnaire rapide de ces

48

structures et leur permet de grossir suffisamment jusqu’à atteindre une taille critique. L’émission alternative des tourbillons de bord de fuite et des tourbillons de bord d’attaque dans des sens opposés s’observe lorsque ces derniers atteignent leur taille critique.

La spécificité des Reynolds bas ou ultra-bas est que ces régimes d’écoulement apparaissent pour des angles d’incidence plus faibles que pour les Reynolds plus élevés (Re > 2.105). Par exemple l’angle de décrochage d’un profil NACA0015 est de l’ordre de 14° à Re = 4.105 , à

Re = 2,65.105 , l’angle de décrochage diminue et situe autour de 12° ; à Re = 1,3.105 , il n’est plus qu’à 11° (Benard [56]). Enfin à Re = 3.104, l’angle de séparation au bord d’attaque se situe à environ 10° (Tuck [17]). On observe une très légère inflexion de la courbe de portance. Cette dernière courbe, illustre le fait qu’il n’y a quasiment plus de perte de portance à bas Reynolds.

Figure 32. Polaires de portance d’un profil NACA0015 à différents Reynolds

La forme de ces polaires de portance révèle un comportement différent entre les régimes d’écoulement à bas Reynolds inférieurs à 105 et les régimes d’écoulement à Reynolds modéré à supérieurs 2.105 (Wang [50], cf. Figure 33). En effet pour les Reynolds modérés, le décrochage est brusque tandis que pour le régime de bas Reynolds (ex : Tuck 2008, Re = 3.104), le décrochage n’existe plus et l’on parle de séparation de bord d’attaque (cf. Figure 32 courbe rouge). Plus récemment Wang [50] (2014) propose une classification plus précise des régimes d’écoulement autour d’un profil NACA0012. Cette classification est basée sur l’amplitude maximale du décrochage (CL,max) qui augmentent à mesure que le Reynolds augmente, comme le représente la Figure 33.

0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 1.2 Incidence(°) Cy Re=3.104 (Tuck 2008) Re=1,3.105 (Benard 2010) Re=2,65.105 (Benard 2010) Re=4.105 (Benard 2010)

49

Figure 33. Classification des régimes d’écoulement basée sur l’amplitude du décrochage ; variations de l’amplitude du décrochage en fonction du Reynolds (Wang [50])

Selon cette classification, les hauts Reynolds sont supérieurs à 5.106, les Reynolds modérés sont compris entre 3.105 et 5.106, les bas Reynolds sont compris entre 104 et 2.105 et enfin les

ultra-bas Reynolds sont inférieurs à 104. La spécificité des ultra-bas Reynolds est que la couche cisaillée est laminaire et se détache du profil à faible incidence. À contrario, aux régimes bas Reynolds la couche de cisaillement laminaire se décroche puis se raccroche au profil à faible incidence formant un bulbe de séparation. La couche limite laminaire au début du profil transitionne en couche limite turbulente au niveau du point de recollement. La présence d’un bulbe de séparation sur l’extrados est responsable de lâchers tourbillonnaires à partir de l’angle de décrochage et à la perte brusque de portance. En revanche, au régime

ultra-bas Reynolds, l’absence de bulbe de séparation, implique qu’on n’observe pas de

décrochage brusque mais une séparation laminaire au bord d’attaque à des incidences supérieures à 10° (Wang [50], Alam [55], Sunada [57]) et pour des intensités de fluctuation inférieures à 1 %. Il semble que l’évolution croissante de la portance en fonction de l’incidence à ultra-bas Reynolds soit liée à la présence de tourbillons massifs qui modifient favorablement la distribution de pression sur la paroi du profil et créent une portance (Wang [50]).