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CHAPITRE I PROBLÉMATIQUE

1.5 État des lieux sur les recherches menées en orthopédagogie et en

En recensant la littérature en lien avec l’orthopédagogie et le domaine de la mathématique, l’équipe de recherche a noté qu’il y a quelques recherches au niveau primaire en mathématiques (Mary, 2003; Fontaine, 2008; Giroux, 2014; Giroux et Ste- Marie, 2015; Houle, 2016; Audet 2017), mais beaucoup moins que celles recensées en français. Ainsi, les recherches en français dominent largement celles faites en mathématiques. L’équipe de recherche fait ainsi le même constat que Houle (2016, p.54) : « peu de recherches ont été menées en mathématiques dans le contexte de l'orthopédagogie […] ». Parmi les recherches recensées, Mary (2003) montre, par le biais d’une étude de cas, comment le lien de dépendance s’établit entre une étudiante

universitaire (orthopédagogue) intervenant auprès d’un élève en difficultés d’apprentissage en mathématiques en contexte de résolution de problème. La chercheuse montre que les interventions menées par l’étudiante ne permettent pas à l’élève de développer une certaine autonomie lorsqu’il est en résolution de problème. D’ailleurs, Mary indique que certaines interventions émises par l’étudiante encouragent le développement du contrat didactique (Mary, 2003). À partir de cet article, il s’avère intéressant de se questionner sur les interventions pouvant être menées par l’orthopédagogue afin d’encourager un élève à développer son autonomie en mathématiques. Fontaine (2008) a plutôt étudié les représentations sociales des orthopédagogues du Québec en rapport avec l'intervention en mathématiques auprès des élèves à risque. Les orthopédagogues intervenant au primaire ou au secondaire qui ont été sondées semblent plus ou moins à l’aise avec l’interprétation du raisonnement mathématique. Selon ces participants, l’intervention mathématique est perçue comme « une rééducation des savoirs essentiels, de techniques de calcul et de stratégies de lecture pour faire des résolutions de problèmes » (Fontaine, 2008, p. 199) . Giroux (2014) précise que la manière de penser l’intervention dépend de la façon de conceptualiser les difficultés des élèves (p.ex. regard basé sur la neuropsychologie, la psychologie cognitive, l’éducation mathématique, la didactique des mathématiques, l’anthropodidactique, la sociologie de l’éducation). Afin de mieux comprendre l’essence de ce projet, l’équipe de recherche précise qu’elle s’intéresse uniquement à la pratique de l’orthopédagogue, et ce, sous un angle didactique. En 2015, Giroux et Ste- Marie ont bonifié des outils d’évaluation et d’intervention en mathématiques construits par les chercheurs, dans une démarche de partenariat avec six commissions scolaires. Ce projet se décline en deux phases, soit l’évaluation des connaissances mathématiques des élèves du primaire jugés à risque et l’intervention orthopédagogique auprès de ces élèves. Par le biais de ce projet, les orthopédagogues (et conseillers pédagogiques) participants ont été initiés à la posture didactique ce qui les a amenés à modifier leurs pratiques. Au lieu d’intervenir uniquement et directement sur l’élève pour modifier leurs connaissances, ceux-ci ont appris à modifier les conditions didactiques pour proposer des situations favorisant l’apprentissage (Giroux et Ste-Marie, 2015). En 2016, Houle a réalisé une étude qui aborde les fondements didactiques, plus spécifiquement sous l’angle de l’ingénierie didactique, pour une intervention orthopédagogique sur la notion de fraction auprès d’élèves en difficulté du 3e cycle du primaire. La séquence d’enseignement proposée par Houle permet d’éviter certaines

interventions telles que la centration sur les erreurs ou encore le morcellement du savoir. L’évitement de ces pratiques considérées comme néfastes en adaptation scolaire a contribué au développement des apprentissages d’élèves en difficultés (Houle, 2016). Audet (2017) a également travaillé auprès des élèves en difficulté du 3e cycle du primaire, mais le contenu à l’étude était plutôt la notion de problème dans l’intervention orthopédagogique en mathématiques. Audet énumère des balises permettant à l’orthopédagogue de maintenir la dévolution soit en étant sensible aux savoirs mobilisés par l’élève, en allégeant le milieu pour éviter la présence d’alourdissement dû à des rétractions verbales, en permettant à l’élève d’avoir des rétroactions rapides faites par le milieu.

Pour notre recherche, la vision du PRAO s’apparente à celle d’un modèle de résolution de problème pour identifier, entres autres, les besoins et capacités de l’élève à savoir s’il a besoin d’interventions supplémentaires ou intensives (Batsche et al., 2006; Audet, 2017). Par ailleurs, le modèle de résolution de problème sera basé sur l’idée de développer un contrôle mathématique chez l’élève en difficulté. Il est possible de remarquer que les recherches menées en mathématiques en lien avec l’orthopédagogie s’attardent essentiellement à l’analyse d’un dispositif d’interventions mis en place par les chercheurs ou à l’analyse de l’interaction entre l’élève et l’orthopédagogue, et ce, en mettant de l’élève en difficulté d’apprentissage.

Considérant cela, l’équipe de recherche a noté, comme Houle (2016, p.5), que « peu d'études portent sur les tâches effectuées par les orthopédagogues ». Par contre, comme le mentionne Fontaine (2008), l’intervention orthopédagogique occupe presque toute la tâche de ces professionnels. Il faut savoir aussi qu’ils « font peu d'interventions en mathématiques […], et ce, même si plusieurs élèves présentent des difficultés dans cette matière » (Fontaine, 2008, p. 4). Giroux et Ste-Marie (2015) affirment un constat similaire « […] au cours des 15 dernières années, peu d’interventions en mathématiques auprès des élèves en difficulté ont été réalisées » (Giroux et Ste-Marie, 2015, p.196). Fontaine affirme également qu’il n’y a « aucune recherche empirique sur l'importance relative des interventions en mathématiques dans le travail des orthopédagogues » (Fontaine, 2008, p.33). Depuis 2015, il est possible de recenser deux études qui s’attardent aux interventions des orthopédagogues et plus précisément au secondaire (Bélanger-Fortin, 2015; Croteau, en préparation). Croteau s’intéresse à la pratique

déclarée de ce corps de métier en lien avec les interventions en contexte algébrique. Bélanger-Fortin6 aborde plutôt la pratique de l'orthopédagogue en mathématiques au secondaire auprès d'une élève ayant un trouble d'apprentissage non verbal. Cette dernière s’intéresse plus spécifiquement aux interventions orthopédagogiques dans un contexte plus large. Ses observations ont permis à la chercheuse de repérer des interventions qui reviennent régulièrement dans la pratique de l’orthopédagogue. Plus spécifiquement, elle distingue différentes interventions que l’équipe de recherche a catégorisées de la façon suivante : verbales et non-verbales.

Interventions orthopédagogiques récurrentes dégagées de la pratique d’une orthopédagogue (Bélanger-Fortin, 2015, p.160-161)

Verbales Non-verbales

- Reformulation des propos de l’élève pour l’amener à les élaborer davantage ou à les préciser

- Questionnement visant à évaluer ce que l’élève comprend du problème à résoudre et ce qu’il identifie et voit comme données importantes

- Questionnement soutenu tant sur chaque tâche à réaliser dans la résolution d’un problème que sur les procédures à mobiliser pour réaliser chacune de ces tâches

- Accord d’un long temps de réflexion suite aux questions posées

- Utilisation du pointage pour mettre en évidence des éléments présents dans les problèmes sur lesquels l’élève doit porter une attention, car il est nécessaire de les considérer pour s’engager dans la résolution du problème

Tableau 1.4 Interventions orthopédagogiques récurrentes dégagées de la pratique d’une orthopédagogue (Bélanger-Fortin, 2015, p.160-161)

Pour ce projet, l’équipe de recherche souhaite aller plus loin concernant les interventions orthopédagogiques réalisées en mathématique, et ce, tout en s’appuyant sur le cadre théorique axé sur le contrôle en mathématique développé par Saboya (2010). En fait, la chercheuse désire regarder quelles sont les interventions qui ont du potentiel pour développer un contrôle chez les élèves et comment s’exprime chez l’orthopédagogue et chez les élèves ce contrôle? Autrement dit, en partant de ce que dit ou ne dit pas, fait ou ne fait pas l’élève, quelles sont les interventions qui visent le développement d’un contrôle chez les élèves et quels sont les indicateurs d’un contrôle chez les élèves?

Outre le travail qui a été fait en lien avec les interventions orthopédagogiques, Bélanger-Fortin aborde le concept de sensibilité chez l’orthopédagogue. Ce concept renvoie à l’ensemble des connaissances et à l’expérience professionnelle de l’orthopédagogue qui influencent ses interventions auprès des élèves.

« En effet, ses interventions seront teintées, entre autres, de ses connaissances sur les différents troubles d’apprentissage, de ses rencontres précédentes avec les élèves et de ses connaissances à propos des stratégies efficaces d’enseignement/apprentissage des mathématiques » (Bélanger-Fortin, 2015, p.41).

Cette idée de sensibilité est reprise, puisque l’équipe de recherche est d’avis que ce savoir permet à l’orthopédagogue de cheminer dans son processus de résolution de problème et lui permet d’alimenter le PRAO. D’ailleurs, Tremblay et al. (2013) soulignent que l’expérience du professionnel, cette sensibilité, permet la planification des interventions, et ce, en appréhendant les possibles difficultés qui sont associées à un trouble d’apprentissage (Tremblay et al., 2013; Bélanger-Fortin, 2015). En contexte de PRAO, il est fort possible que cette sensibilité ressorte spontanément.