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État de l’art de l’assimilation des vitesses de surfaces issues des radars couranto-

4.4 État de l’art de l’assimilation des vitesses de surfaces issues

des radars courantométriques.

Dans cette thèse nous nous intéressons particulièrement à l’assimilation des données mesurées par radars HF présentées dans le chapitre 1. L’assimilation de ce type de données dans les modèles numériques est relativement récente (<20 ans) et bénéficie des différents développements de techniques d’assimilation nécessaires pour traiter le grand nombre d’observation disponibles. Une revue des différentes méthodes déjà employées s’est avérée nécessaire pour comprendre les limitations de l’assimilation de ce type de données.

Les grandes classes de méthodes décrites dans les sections4.2-4.3sont utilisées pour l’assimi-lation des données radar HF.

La première étude sur ce sujet (Lewis et al., 1998) prenait en compte les observations en utilisant une méthode de nudging des courants de surface vers les observations. Un pseudo-stress de cisaillement, représentant la différence entre le courant simulé par le modèle et les observations, est ajouté à la couche de surface du modèle. Dans la formulation du pseudo-stress, le coefficient de traînée joue le rôle de coefficient de nudging.Gopalakrishnan et al.(2007) utilisent également le nudging pour assimiler les vitesses de surface en ajoutant un terme de forçage au modèle dynamique. Dans ce cas, le coefficient de nudging est entièrement paramétré.

Une méthode de nudging a été comparée à une méthode utilisant un filtre de Kalman par

Wilkin et al.(2005). Le coefficient de nudging correspond à un temps de décorrélation pondéré par les covariances d’erreur de l’état du modèle et des observations. Ces covariances sont éga-lement utilisées dans le gain de Kalman avec des matrices de covariances d’erreur du modèle paramétrées. Pour éviter d’introduire des cisaillements verticaux dans les vitesses, celles-ci sont projetées sur la verticale en utilisant dans un premier temps une extrapolation basée sur une simple fonction exponentielle, puis dans un second temps en projetant ce résultat sur une base résultant de la décomposition en EOF des profils de vitesses mesurés par ADCP. Dans cette étude, il apparaît que le filtre de Kalman permet de mieux assimiler les vitesses radar que le nudging.

Les filtres de Kalman sont largement utilisés. Leur principal limitation est d’estimer correcte-ment les matrices de covariance d’erreur. Comme expliqué précédemcorrecte-ment, les statistiques d’erreur sont généralement mal (ou pas) connues et les matrices de covariance de rang plein ne sont pas manipulables avec les outils informatiques actuels. Pour l’assimilation des données radar HF, les matrices de covariances d’erreurs sont ainsi issues de paramétrisations ou estimées à partir d’un ensemble d’états de modèle.

Les approches choisies par Paduan and Shulman (2004) ou Shulman and Paduan (2009) sont basées sur la paramétrisation des matrices de covariance d’erreur modèle couplée à des considérations physiques pour projeter l’information de surface sur la verticale. La première approche consiste à corriger la tension du vent de façon à ce que le travail du vent soit conservé à la surface de l’océan (Paduan and Shulman, 2004). La deuxième approche consiste à utiliser la solution d’Ekman des courants de surface induits par le vent pour projeter la correction de la vitesse de surface vers le fond (Paduan and Shulman,2004;Shulman and Paduan,2009).

130 Chapitre 4. Généralités sur l’assimilation de données

Breivik and Sætra(2001) déterminent les covariances d’erreur modèle en utilisant un ensemble d’état du modèle issu d’une simulation de référence caractéristique de la période d’étude. Les covariances spatiales n’évoluent pas temporellement pendant la période d’assimilation et cette méthode peut donc être qualifiée d’interpolation optimale d’ensemble. Cette étude est conduite dans un cadre opérationnel et montre que l’assimilation des données radar HF a un impact positif sur les prévisions du modèle mais les bénéfices de l’assimilation s’atténuent avec une échelle de temps de 6 heures.

Oke et al.(2002b) utilisent un ensemble constitué d’états du modèle pris sur 18 étés différents pour estimer les covariances spatiales anisotropes entre les différentes variables d’état du modèle. Ces covariances restent ensuite fixes sur la période d’assimilation. Pour éviter les incompatibilités entre les données lors de l’initialisation, les observations et les sorties du modèle sont moyennées et l’incrément est distribué graduellement sur la période considérée en utilisant la méthode TDAP (time-distributed averaging procedure). Cette étude montre que les résultats sont meilleurs en tronquant les matrices de covariance et que l’assimilation des données radar HF permet de compenser les composantes mal représentées de la tension du vent et de son rotationnel.

Oke et al. (2009) considèrent également une interpolation optimale d’ensemble dans un sys-tème opérationnel d’assimilation de données (BODAS, Oke et al.,2008). L’ensemble stationnaire de 120 membres et construit à partir des anomalies intra-saisonnières du modèle. Cette étude montre que l’assimilation des données radar peut réduire les erreurs d’analyse des vitesses de surface jusqu’à 80%.

Dans ces différentes applications, les ensembles sont construits à partir d’états modèle pris à différents moments, faisant ainsi l’hypothèse que les erreurs du modèle sont du même ordre de grandeur que sa variabilité. Ainsi des facteurs d’échelle sont souvent nécessaires afin de dimen-sionner correctement les covariances d’erreur. Les méthodes d’ensemble permettent également de tenir compte de l’erreur du modèle due à des incertitudes sur des paramètres, de la condition initiale ou encore des forçages du modèle. C’est l’approche choisie par Barth et al. (2008a) qui construisent un ensemble de 100 membres d’état du modèle à partir de perturbations dans le champ de vent à la surface du domaine. Dans cette étude, l’ensemble est également stationnaire, les données sont moyennées temporellement, les ondes de gravités introduites lors de l’initialisa-tion sont filtrées et le vecteur d’état est augmenté pour inclure la tension du vent.

Barth et al.(2010) ont développé une méthode non séquentielle d’assimilation de données ba-sée sur un lisseur de Kalman (EnPS) permettant d’optimiser des paramètres du modèle à partir des observations. L’ensemble est créé en perturbant les paramètres à optimiser. Ces paramètres optimisés sont ensuite utiliser dans le modèle pour obtenir une meilleur description de l’état de l’océan. Cette méthode permet d’éviter d’introduire des ondes transitoires et irréalistes dans les sorties du modèles qui peuvent exister quand l’état du modèle est corrigé. Dans cette étude, les ondes de marées M2 sont optimisées aux frontières du domaine en utilisant les vitesses de surface issues de radar HF. Cette méthode permet également d’optimiser la trajectoire du vecteur d’état du modèle comme dans le cas des méthodes variationnelles. Cette approche est reprise parBarth et al. (2011) pour optimiser le vent en surface. L’assimilation des données radar effectuée dans la section4.2.3.4 s’inspire largement de cette méthode.

4.4 État de l’art de l’assimilation des vitesses de surfaces radar HF 131

L’optimisation de paramètres est souvent réalisée par des méthodes variationnelles basées sur la minimisation de l’écart quadratique entre les observations et l’état du modèle (e.g. section

4.3.1). C’est l’approche choisie par Kurapov et al. (2003) pour modéliser les marées internes de types M2. Ils utilisent une méthode variationnelle basée sur un problème inverse généralisé formulé avec les fonctions de représentation (e.g. Bennett,1992). Ils montrent que l’assimilation des données radar permet d’optimiser les valeurs des courants baroclines aux frontières ouvertes.

Yu et al. (2012) utilisent une méthode variationnelle de type 4DVAR également basée sur les fonctions de représentation pour optimiser la condition initiale du modèle. Les covariances utilisées dans la fonction de coût sont, soit dynamiquement équilibrées, soit non-équilibrées. L’étude montre que les propriétés du modèle adjoint permettent d’obtenir un champ corrigé en équilibre dynamique dans les deux cas. L’assimilation a un impact positif sur les courants de surface mais aussi sur la géométrie des fronts de SST.

Zhang et al. (2010) assimilent également les vitesses vectorielles de surface pour optimiser la condition initiale du vecteur d’état du modèle en utilisant une méthode de type 4DVAR incrémentale à contrainte forte.

Hoteit et al. (2009) optimisent la condition initiale, mais aussi les valeurs aux frontières océaniques et les forçages atmosphériques en utilisant une méthode variationnelle de type 4DVAR avec modèle adjoint. L’objet de l’étude est d’utiliser un modèle haute résolution et son adjoint afin de réaliser une cartographie vectorielle des vitesses de surface en utilisant une contrainte dynamique représentée par le modèle de circulation. Il est montré que la tension du vent subit l’ajustement le plus important lors de l’assimilation des données.

La liste des études précédentes et des méthodes d’assimilation utilisées est présentée dans le Tab.4.2.

Table4.2– Assimilation des vitesses radar HF : récapitulatif des études et des méthodes utilisées.

Nudging Kalman filter Kalman smoother Variationnal

Lewis et al.(1998) X

Breivik and Sætra(2001) EnOI

Oke et al.(2002a) EnOI

Kurapov et al. (2003) X

Paduan and Shulman(2004) X

Wilkin et al. (2005) X X

Gopalakrishnan et al. (2007) X

Barth et al.(2008a) EnOI

Oke et al.(2009) EnOI

Shulman and Paduan(2009) X

Hoteit et al. (2009) X

Zhang et al.(2010) X

Barth et al.(2010) EnPS

Barth et al.(2011) EnPS

Yu et al. (2012) X

132 Chapitre 4. Généralités sur l’assimilation de données

être assimilées dans des configurations opérationnelles (Breivik and Sætra, 2001; Oke et al.,

2009) et peuvent apporter des informations en bande côtière non disponibles avec l’altimétrie (Yu et al.,2012). L’assimilation des vitesses de surface a un impact à l’endroit des observations mais aussi horizontalement, hors de la zone observée (Breivik and Sætra,2001;Oke et al.,2009), et verticalement (Oke et al.,2002a;Paduan and Shulman,2004;Barth et al.,2008a;Shulman and Paduan, 2009). Elle permet de réduire les décalages spatiaux et temporels qui peuvent exister entre les structures de méso-échelle modélisées et observées (Paduan and Shulman, 2004). Le bénéfice de l’assimilation des vitesses de surface, en terme de transport barocline, par rapport à la seule assimilation des profils de température et de salinité, a également été montré par

Wilkin et al. (2005). Un impact positif sur la SLA14, la SSS15 et les températures et salinités de sub-surface proches des observations est également obtenu par Oke et al.(2009) et pour les températures proches de la surface parGopalakrishnan et al. (2007). L’assimilation des vitesses radar permet àBarth et al.(2011) d’observer une diminution du biais de SST dans les zones où la température est initialement trop chaude, et Yu et al.(2012) notent un impact positif sur la géométrie d’un front de surface.

Au contraire, aucune amélioration en terme de SST n’avait été obtenue par Oke et al.(2009) et Zhang et al. (2010). Ces derniers notent que l’assimilation des vitesses radar pourrait nuire aux prévisions de température en subsurface. Breivik and Sætra (2001) relèvent un problème d’inconsistance du champ de masse analysé dans les configurations imbriquées ("nested") qui crée une augmentation du gradient de densité le long des frontières ouvertes rendant le modèle instable. Ces auteurs proposent d’effectuer l’assimilation à la fois dans les modèles interne et externe. Également, Lewis et al. (1998) remarquent des courants de surface irréalistes dus à des erreurs importantes, qui se matérialisent par des divergences ou convergences de courant irréalistes, et qui forcent le modèle à répondre de manière irréaliste pour contrebalancer les effets des courants observés. Bien que l’assimilation des seules vitesses de surface permet de réduire les erreurs du modèle, il est nécessaire d’assimiler d’autres observations comme des données altimétriquesYu et al.(2012) ou des profils de température et salinité pour déterminer au mieux l’état complet du modèle et éviter des ambiguïtés entre la température et la salinité lors du calcul de la densité (Hoteit et al.,2009).

Par ailleurs les statistiques d’erreur d’observation des mesures par radar sont mal connues et les covariances d’erreur d’observation des vitesses radar sont souvent approchées par la valeur de la précision de mesure. Lors de l’utilisation des vitesses vectorielles issues de la combinaison des vitesses radiales et calculées aux endroits où au moins deux mesures sont disponibles, une erreur due à la géométrie des radiales est introduite (GDOP, section 1.2.3.2) et de plus toutes les données fournies par les vitesses radiales ne sont pas utilisées. Au contraire, l’utilisation des vitesses radiales permet de ne pas ajouter d’erreur et de considérer toutes les données disponibles (Barth et al.,2008a;Hoteit et al.,2009;Shulman and Paduan,2009).

Ainsi ces différents éléments permettent d’appréhender certaines particularités de l’assimi-lation des vitesses radar. En particulier, la méthode doit être choisie en fonction du problème à résoudre. En particulier, le chapitre 5 s’intéresse à l’optimisation des forçages d’une

configu-14. Sea Level Anomaly 15. Sea Surface Salinity